Consultation ORL : audiométrie et inclusion

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Recrutement de la cohorte

La Guadeloupe est un département d’Outre-Mer français, comptant 390 253 habitants en 2017, selon l’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques (INSEE). Environ 1000 patients (dont 600 adultes) atteints de drépanocytose sont suivis au Centre Hospitalier Universitaire de la Guadeloupe, dans un centre de référence nommé Unité Transversale de la Drépanocytose (UTD). Le suivi médical de ces patients comporte notamment un bilan annuel en hôpital de jour, associant un examen clinique, un bilan biologique complet et des examens complémentaires selon les complications (ophtalmologie, ORL, fonction pulmonaire, imagerie). L’audiométrie annuelle fait habituellement partie de ce bilan, même si elle n’est pas toujours pratiquée tous les ans, notamment chez des patients jeunes sans doléance auditive.
Du 1er mars au 31 août 2020, tous les patients de 15 à 60 ans accueillis à l’UTD pour un bilan annuel se sont vus proposer une audiométrie, réalisée lors d’un créneau spécialement déidé dans le service ORL du CHU. Le recueil de données a été interrompu entre le 15 mars et le 15 juin, à cause de la pandémie Covid-19. Au total, l’inclusion a donc été réalisée sur 3 mois.
Ce protocole a été élaboré avec le soutien de la Délégation à la Recherche Clinique et à l’Innovation du CHU de la Guadeloupe, qui a l’approbation de la Commission Nationale Informatique et Libertés (CNIL) pour le traitement des données médicales (déclaration n° 2209186 v 0 pour les études de type MR-004), et en a reçu un avis favorable pour notre étude. Le protocole a été soumis au Comité d’Ethique Local, qui a lui aussi émis un avis favorable (numéro d’autorisation : A24_20_07_15_DREP_SURDITE).

Consultation ORL : audiométrie et inclusion

Le jour de la convocation en ORL, les patients étaient accueillis par l’investigateur principal (Alexandre LEBRET, interne ORL) qui réalisait lui-même l’audiométrie, après otoscopie. L’examen consistait systématiquement en une audiométrie tonale liminaire, en conduction aérienne puis en conduction osseuse. Un masquage était réalisé en conduction aérienne en cas de différence inter-aurale > 50 dB HL, et en conduction osseuse dès 10 dB HL de différence inter-aurale. 6 fréquences étaient testées : 250, 500, 1000, 2000, 4000 et 8000 Hz. Si nécessaire, l’examen était complété par une audiométrie vocale, notamment quand un appareillage était indiqué. Les explorations ont été réalisées avec un audiomètre GSI Pello® (Grason-Stadler, Eden Prairie, MN, USA).
A l’issue de cette audiométrie, l’anamnèse recherchait un antécédent de surdité brutale, qui le cas échéant était objectivée par les audiométries antérieures. Etait évaluée ensuite la présence ou non des critères d’inclusion ou de non-inclusion, mentionnés dans les tableaux 1 et 2. Nous avons décidé d’exclure les enfants de moins de 15 ans, l’audiométrie subjective nécessitant une bonne compréhension, difficile chez les enfants, et les atteintes auditives pédiatriques étant traitées dans de nombreuses études (perturbées par un taux important de surdités de transmission)16,23. De même, nous avons exclu les patients âgés de plus de 60 ans, âge à partir duquel la presbyacousie devient un facteur de confusion. Toujours afin de limiter les biais de confusion, nous avons écarté de l’étude tous les patients présentant un risque élevé de surdité sans lien avec la drépanocytose : exposition professionnelle au bruit, antécédent familial de surdité, traumatisme crânien avec fracture du rocher, antécédent de chirurgie otologique, antécédent de méningite, otoscopie anormale. Une surdité de transmission avec Rinne audiométrique supérieur ou égal à 20 dB était aussi un critère de non-inclusion, du fait de son influence sur l’évaluation de la courbe osseuse. Sur le plan de la drépanocytose, nous avons exclu les patients en cours de protocole d’échanges transfusionnels : en effet l’état biologique de base n’était pas évaluable chez ces patients, dont les paramètres étaient sans cesse modifiés par le traitement.

Recueil des données

Forts du consentement oral du patient, nous avons consigné les résultats de son audiométrie, à savoir le seuil en conduction osseuse pour chacune des 12 fréquences étudiées (6 par oreille). Puis nous avons recherché dans le dossier médical informatisé les critères génétiques, biologiques et cliniques que nous voulions étudier. Les données recueillies sont citées dans le tableau 3. Le choix de ces critères a été établi après concertation des deux équipes médicales concernées par le sujet (ORL et UTD), et répondait aux différentes hypothèses pouvant expliquer la disparité de l’atteinte auditive chez les sujets drépanocytaires :
– l’hétérogénéité génotypique et les comorbidités génétiques fréquentes (déficit en G6PD),
– l’hétérogénéité biologique, portant sur l’hémoconcentration, le niveau d’hémolyse, l’inflammation, le niveau d’anémie
– l’hétérogénéité clinique, incluant les diverses complications comme la vasculopathie cérébrale (évaluée sur l’IRM cérébrale), le nombre de crises vaso-occlusives sévères, etc. On ajoute à ces critères le traitement par hydroxycarbamide (potentiellement bénéfique par réduction des crises), chez les patients S/S et S/β0-thalassémiques, et le taux d’hémoglobine foetale reflétant l’efficacité du traitement chez ces patients.
Toutes les données recueillies ont été saisies sur un tableur anonymisé, protégé par un mot de passe.

Analyse des données

Nous avons dans un premier temps calculé la prévalence de la surdité neurosensorielle dans notre population et son intervalle de confiance à 95% (IC 95%), objectif principal de notre étude.
Deux groupes ont été formés : un groupe « audition normale » nommé groupe N, et un groupe « surdité » nommé groupe S. Compte tenu des observations faites dans l’étude de Stuart et Smith16, pointant du doigt les grandes différences de résultats en fonction des critères définissant la surdité, nous avons mesuré la perte auditive de 2 manières :
– D’une part en considérant la perte auditive moyenne en conduction osseuse sur chaque oreille (définie classiquement comme la moyenne des seuils en dB HL sur 500, 1000, 2000 et 4000 Hz),
– D’autre part en considérant la présence de seuils en conduction osseuse supérieurs ou égaux à 25 dB sur au moins 2 fréquences, et sur au moins une oreille.
Dans la littérature, les études utilisent l’une ou l’autre méthode. Nous avons décidé de retenir la première (basée sur la perte auditive moyenne en CO supérieure ou égale à 21 dB HL) pour constituer nos deux groupes N et S, ce pour différentes raisons :
– Le but de l’audiométrie dans la pratique est de mesurer l’impact social sur la compréhension et de proposer in fine un appareillage audioprothétique. Or l’impact social et l’indication d’appareillage sont plus corrélés à une perte moyenne qu’à un déficit sur deux fréquences, qui peut être focal et ne pas avoir de retentissement majeur.
– La perte auditive moyenne est le critère reconnu par le Bureau International d’Audiophonologie (BIAP) dans sa recommandation 02/1 bis pour la classification audiométrique des déficiences auditives. Cette classification est utilisée notamment par les Maisons Départementales pour les Personnes Handicapées (MDPH), afin d’établir la sévérité du handicap auditif (cf. Cerfa 15695 01 Volet 1).
La prévalence a été mesurée sur la globalité de l’échantillon, puis par sexe et en sous-groupes liés à l’âge.
Pour répondre à notre objectif secondaire, nous avons ensuite analysé l’influence des différents facteurs mentionnés précédemment dans le tableau 3. La significativité des différences observées a été statistiquement établie ou infirmée à l’aide du logiciel SPSS V21 (IBM SPSS Statistics, Chicago, IL.) par :
– un test du Khi-2 ou un test exact de Fisher pour les variables qualitatives,
– et par un test non paramétrique de Mann-Whitney pour les variables quantitatives (notamment les résultats biologiques).

RESULTATS

Entre le 1er mars et le 31 août 2020, 111 audiométries ont été réalisées. 86 patients ont été inclus dans l’étude, après exclusion de 25 patients. Les motifs d’exclusion sont recensés dans le flowchart ci-après.
La pandémie de Covid-19 ayant perturbé les bilans annuels des patients, certains ont été vus en consultation à l’UTD sans être admis en hôpital de jour pendant la période d’inclusion. Quand le bilan annuel a été reporté après le 1er septembre, nous avons recueilli les résultats du bilan annuel précédent, en 2019, sauf événement intercurrent majeur susceptible d’affecter l’état biologique de base.

Prévalence de la surdité neurosensorielle

Le groupe S comptait 25 patients, présentant une perte auditive moyenne en conduction osseuse (PAM) supérieure ou égale à 21 dB sur au moins une oreille. Le groupe N en comptait 61. La prévalence de la surdité dans notre échantillon était donc de 29,1% (IC 95% : 19.8 – 39.9).
Il est à noter que si l’on avait utilisé l’autre classification employée par certains auteurs (classer en surdité la présence de seuils > 20 dB sur au moins 2 fréquences), la prévalence aurait été évaluée à 38,4% (IC 95% : 28.1 – 49.5) dans notre cohorte (contre 45,6% dans la première étude publiée en Guadeloupe en 200611).
On observait une différence significative de l’âge moyen entre les deux groupes. Plus précisément, le graphique 1 montre une nette augmentation du taux de surdité en fonction de l’âge.
L’atteinte était similaire chez les homozygotes S/S (27,9%, IC95% 14,5-41,3), et chez les hétérozygotes S/C (29,4%, IC95% 141-44,7) : cf. tableau 6.

Analyse des facteurs de risque potentiels

Sur le plan des facteurs génétiques, nous avons vu que la prévalence de la surdité neurosensorielle était sensiblement identique chez les homozygotes S/S et chez les hétérozygotes composites, notamment S/C. Le déficit en G6PD, ne concernant que 5 patients (dont 3 dans le groupe S), n’était pas concluant sur un plan statistique.
Parmi les facteurs biologiques étudiés, aucun ne semblait statistiquement lié à une augmentation du taux de surdité, tous génotypes confondus Plusieurs d’entre eux avaient une variabilité faible, notamment les marqueurs inflammatoires (leucocytes, PNN, plaquettes, CRP) : l’inflammation sur les bilans de base était quasi nulle. Il en était de même pour l’hématocrite : un taux élevé est souvent symptomatique (syndrome d’hyperviscosité), or le bilan de base est fait en dehors de toute complication aiguë. Les marqueurs de l’hémolyse pourtant plus variables, ne semblaient pas liés à un sur-risque.
Les comorbidités étaient peu représentées (12 patients hypertendus et 3 diabétiques), et n’étaient pas non plus liées à une différence statistiquement significative, tout comme la présence d’une vasculopathie cérébrale.
La présence d’un antécédent de surdité brutale lors d’une crise vaso-occlusive était relevée chez 32% des patients du groupe S. Dans notre étude, 10 patients avaient eu au moins 1 épisode de surdité brutale unilatérale, soit 11,6% de l’effectif, ce qui est bien supérieur au taux de surdités brusques observé en population générale. Huit patients en gardaient des séquelles sur au moins une oreille : 4 avaient une surdité bilatérale (3 asymétriques et 1 symétrique) et 4 une surdité unilatérale droite. 2 patients présentaient une subcophose unilatérale séquellaire. 2 patients avaient totalement récupéré. Parmi les patients du groupe S âgés de moins 40 ans, 6 sur 9 (soit 2/3 des patients) rapportaient un antécédent de surdité brutale.
Il n’existait pas de différence significative liée aux autres éléments cliniques analysés, à savoir l’antécédent d’échanges transfusionnels, l’antécédent de protocole de saignées, ou l’hospitalisation pour crise vaso-occlusive dans les 2 années précédentes.

DISCUSSION

Notre étude estime la prévalence de la surdité neurosensorielle à 29,1% (IC 95% : 19.8 – 39.9) dans la population drépanocytaire suivie au CHU de la Guadeloupe. Ce taux est cohérent avec les études publiées dans la littérature, dont les résultats oscillent entre 22,5 et 45% 12–15,17. Comme le remarquent Stuart et Smith16, les critères définissant la surdité influent très largement sur le résultat final ; si nous classons en surdité la présence de 2 seuils strictement supérieurs à 20 dB sur au moins 2 fréquences et sur au moins une oreille, nous mesurons la prévalence de la surdité à 38,4% (IC 95% : 28.1 – 49.5). Cette valeur se rapproche des observations formulées par Jovanovic-Bateman dans son étude publiée en Guadeloupe en 200611, où la prévalence était de 45% avec ce même critère.
La surdité neurosensorielle est clairement corrélée à l’âge : elle ne concerne aucun des 11 patients de 20 ans ou moins, tandis qu’elle concerne 8 (72,7%) des 11 patients âgés de 51 ans ou plus. Nous avons écarté les patients de plus de 60 ans pour limiter le biais de confusion avec la presbyacousie ; cette limite d’âge pourrait être discutée, dans le contexte d’une maladie grave qui induit un vieillissement physiologique prématuré. Toutefois, sur les patients de plus de 55 ans inclus dans l’étude, 4 seulement présentent une atteinte prédominante sur les hautes fréquences (courbe en pente de ski), avec peu d’influence sur la perte auditive moyenne. Nous estimons donc que la surdité dans l’ensemble de notre échantillon, y compris entre 50 et 60 ans, reflète l’atteinte liée à la drépanocytose, tous les facteurs de confusion ayant été scrupuleusement exclus.
La profondeur de la surdité est très variable. On note chez un jeune homme de 31 ans, une subcophose droite après surdité brutale dans un contexte de crise vaso-occlusive sévère. La question de l’implantation précoce des patients cophotiques doit être posée, même en cas d’atteinte unilatérale au vu du risque de bilatéralisation de la surdité. Ces bilatéralisations peuvent survenir à tout âge, comme en témoigne l’implantation d’une jeune Saoudienne de 15 ans après une surdité d’installation rapidement progressive (en 18 mois) sur l’oreille gauche puis sur la droite26. En outre, un case-report de 2018 rapporte une sclérose cochléaire sans ossification, quelques mois après une surdité brutale en contexte de CVO, qui a nécessité des dilatations lors de la pose des électrodes27. Une étude dédiée au sujet serait nécessaire, afin d’évaluer le risque de sclérose ou d’ossification cochléaire qui compromettrait une implantation plus tardive. Notons que 2 audiométries réalisées sur les patients exclus (âgés de plus de 60 ans) avaient montré une cophose bilatérale, qui pourrait nécessiter une implantation cochléaire selon les résultats du bilan complet. Le cas n’est donc pas isolé.
L’objectif secondaire de notre étude était de mettre en lumière d’éventuels facteurs de risque, qui expliqueraient l’hétérogénéité de l’atteinte auditive. La littérature nous apprenait déjà que l’atteinte n’était pas liée au sexe et que la prévalence était équivalente entre les S/S et S/C11, bien que beaucoup d’études se concentrent sur les patients homozygotes. Nos conclusions confirment que le risque auditif est équivalent dans les 2 génotypes.
Plusieurs auteurs ont formulé des hypothèses physiopathologiques. L’ischémie de la strie vasculaire, vascularisation terminale, conduirait à l’hypoxie de l’organe de Corti, particulièrement sensible, avec un risque significatif sur la fonction auditive par dégradation des cellules ciliées externes24. Pour Burch-Sims G et al.25, l’ischémie serait due à la déformation des hématies, ne permettant pas d’apporter l’oxygène nécessaire à l’importante activité métabolique que requiert l’équilibre ionique dans l’endolymphe. Pour da Silva et al.28, la cochlée est particulièrement sensible à l’hypoxie en raison de sa vascularisation unique terminale, et l’atteinte chez les patients drépanocytaires serait liée à des phénomènes de micro-ischémie sur vaso-occlusions répétées. Toutes ces pistes laissent penser que l’atteinte auditive pourrait être liée soit à une hyperviscosité responsable d’hypoxie chronique, soit à des micro-infarctus répétés, qui pourraient donner une perte auditive brutale, ou bien une atteinte cumulative par paliers infra-cliniques. D’autres paramètres pourraient être impliqués : l’inflammation chronique avec des phénomènes auto-immuns, la sévérité de la maladie, le génotype, les traitements ototoxiques (chélateurs du fer, antibiotiques lors des séjours en réanimation…), etc.
Peu d’études s’intéressent aux causes de cette surdité ; il faut pourtant mentionner le travail de Lago et al.22. Sur une population de 52 enfants de 6 à 18 ans, drépanocytaires S/S, ils mesurent la prévalence de la surdité neurosensorielle à 28,8%. Chez les enfants atteints de déficience auditive, ils observent une association statistiquement significative avec l’absence de vasodilatation induite par le flux au niveau de l’artère radiale (flow-mediated dilation), classiquement reconnue comme un marqueur de la fonction endothéliale. La dysfonction endothéliale pourrait donc être liée à la déficience auditive, alors que les autres marqueurs étudiés – bilan lipidique, CRP et traitement par hydroxycarbamide – ne montraient aucune différence significative dans cette publication.
En Guadeloupe, Lemonne et al. en 2014 ont remarqué une prévalence supérieure des atteintes otologiques chez les patients S/C présentant une tension artérielle supérieure à 120/70 mmHg29. Pourtant dans notre étude, l’hypertension artérielle n’est pas associée à un sur-risque auditif. Les facteurs génétiques et biologiques que nous avons étudiés ne montrent aucun lien statistique avec la surdité, si l’on considère indistinctement tous les génotypes. Les marqueurs d’hémolyse, d’inflammation et d’hémoconcentration sont sensiblement identiques entre les deux groupes. Il faut mentionner toutefois que les paramètres biologiques ont été recueillis sur des bilans annuels à l’état de base. Par exemple, l’hématocrite sur un bilan de base reflète mal la tendance à l’hémoconcentration, qui serait traitée si l’hématocrite était anormalement élevé. Ceci constitue une limite de notre étude, qui par son schéma transversal ne peut analyser les variations passées de l’hémorrhéologie par exemple.
En revanche, l’analyse en sous-groupes par génotype montre une prédominance de l’atteinte auditive chez les sujets homozygotes S/S ayant un faible niveau d’hémolyse : la LDH est significativement plus faible dans le groupe S. Nous expliquons cette différence par le fait qu’une hémolyse moins marquée s’accompagne d’une hémoconcentration plus importante. Effectivement, dans le groupe S, les taux d’hémoglobine et d’hématocrite sont plus élevés, et les réticulocytes sont plus bas, même si le faible effectif ne permet pas de dégager une différence statistiquement significative. Tous ces éléments sont cohérents : les sujets moins hémolyseurs et plus hémoconcentrés semblent plus à risque de développer une surdité neurosensorielle.
Chez les hétérozygotes S/C, le taux d’hématocrite est significativement plus faible dans le groupe S (29,2% contre 31,5% dans le groupe N, p = 0,017), ce qui pourrait sembler paradoxal puisque notre hypothèse physiopathologique principale repose sur l’hémoconcentration et l’hyperviscosité. Toutefois, le biais lié aux saignées est capital chez les S/C : 60% des patients S/C du groupe S ont un antécédent de saignées. Comme les sujets touchés par la surdité semblent plus symptomatiques, nous supposons qu’ils sont plus exposés aux saignées fréquentes, ce qui expliquerait que leur hématocrite de base soit plus bas.
La limite principale de cette étude est le nombre restreint de patients inclus, qui ne nous permet pas de conclure sur certaines tendances de l’analyse en sous-groupes. Pourtant, les 111 audiométries réalisées représentent plus d’1/6ème de la population adulte suivie à l’UTD. Une poursuite de l’étude à l’UTD voire une étude multicentrique incluant les patients suivis au Centre Hospitalier de Basse-Terre ou au CHU de la Martinique, permettrait d’augmenter la puissance statistique et de conclure plus formellement.
Parmi les critères cliniques, l’antécédent de surdité brutale a retenu toute notre attention. En effet 10 patients (11,6% de l’effectif total) dans notre étude ont eu un antécédent de surdité brutale. Deux tiers des patients jeunes (âgés de 40 ans ou moins) souffrant d’un déficit auditif ont eu une surdité brutale. Autrement dit, un événement aigu de surdité brutale explique la majeure partie des déficiences auditives chez les patients les plus jeunes : seuls 3 patients sur les 50 sujets âgés de 15 à 40 ans avaient une perte auditive sans antécédent de surdité brutale, et cette perte était légère dans les 3 cas. Il nous semble donc que la surveillance de l’audition avant 40 ans devrait se concentrer sur ces patients qui ont présenté des surdités brutales, et qu’une surveillance étroite des autres patients n’est pas justifiée, sauf doléance clinique.
Nous nous sommes demandé quelles étaient les caractéristiques de ce groupe « antécédent de surdité brutale ». Il en ressort que 9 patients sur 10 (90%) avaient un antécédent de protocole de saignées, ce qui constituait une différence statistiquement significative avec les patients sans antécédent de surdité brutale (p = 0,001). 8 étaient encore sous protocole de saignées moins de 2 ans avant l’inclusion. Les saignées sont réalisées le plus souvent chez les patients ayant une tendance à l’hyperviscosité sanguine : après vérification des dossiers, 8 patients (80%) avaient effectivement une tendance à l’hyperviscosité, telle qu’elle est définie plus haut. Elément supplémentaire, l’hémoglobine était significativement plus élevée chez les patients S/S par rapport aux sujets sans surdité brutale.
Tous ces éléments laissent penser que l’hémoconcentration pourrait être un facteur favorisant de surdité brusque, et donc un facteur majeur de surdité neurosensorielle chez les plus jeunes. A ce stade, notre étude ne permet pas de conclure à la causalité de ces événements aigus, puisque son caractère transversal exclut toute temporalité. Afin de déterminer plus précisément le rôle de l’hyperviscosité sur la survenue des surdités brutales, il conviendrait de mettre en place une étude prospective, incluant tous les patients au moment de leur surdité brutale, et analysant le bilan biologique du moment. Un tel schéma est toutefois difficile à appliquer, étant donné la relative rareté de ces événements.
Il paraîtrait plus réalisable d’étudier le lien entre l’atteinte auditive et les autres complications connues de l’hémoconcentration : l’ostéonécrose aseptique de la tête fémorale et de la tête humérale, et la rétinopathie proliférative.

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Table des matières

INTRODUCTION
MATERIEL ET METHODES
1. Recrutement de la cohorte
2. Consultation ORL : audiométrie et inclusion
3. Recueil des données
4. Analyse des données
RESULTATS
1. Prévalence de la surdité neurosensorielle
2. Analyse des facteurs de risque potentiels
DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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