Constitution chimique des macromolécules du caoutchouc naturel

Constitution chimique des macromolécules du caoutchouc naturel

Synthèse bibliographique

Ce chapitre consiste en une synthèse bibliographique pour cerner notre problématique et pour définir une méthodologie pour notre étude. Il est axé sur la complexité et la variabilité de la mésostructure (la structure macromoléculaire et les agrégats ou gel) du caoutchouc naturel (NR), sa viscosité Mooney et les relations entre la mésostructure et la viscosité Mooney. Tout d’abord, nous allons aborder la constitution chimique des macromolécules du NR, ainsi que les irrégularités de la structure chimique. Nous ferons ensuite un état concernant la structure macromoléculaire (la distribution des masses molaires et les ramifications des chaînes) et le gel du NR. Nous présenterons également la viscosité Mooney du NR et sa relation avec les paramètres de la mésostructure. Pour finir, les objectifs de la thèse et les méthodologies à retenir seront débattus.

Constitution chimique des macromolécules du caoutchouc naturel Il y a bien souvent des confusions entre le NR et le latex. En effet, ils désignent deux produits différents, l’un étant issu de l’autre. Le latex est : « une dispersion colloïdale stable d’une substance polymère dans un milieu aqueux » (Blackley et al., 1979). Ainsi, le latex produit par l’hévéa (Hevea brasiliensis), et d’autres plantes, est une dispersion colloïdale stable de poly(cis-1,4-isoprène) dans un milieu aqueux contenant aussi d’autres particules diverses telles que les lutoïdes et les particules de Frey-Wyssling (Moir, 1959). Les macromolécules de poly(cis-1,4-isoprène) du NR sont obtenus par une réaction de biosynthèse in-vivo dans le cytosol de la cellule des plantes. Les monomères sont des isopentényl pyrophosphate (IPP) issus des acétyles CoA sous l’action de diverses enzymes en plusieurs étapes (Lynen, 1963). Puskas et al. (2006b) ont suggéré que cette réaction de biosynthèse est une polymérisation carbocationique vivante.

Les analyses par la spectroscopie de résonance magnétique nucléaire (RMN) du 1H et 13C ont révélé que la macromolécule du NR est constituée de près de 100% d’unités cis- 1,4-isoprène, de deux ou trois motifs trans-1,4-isoprène et de deux groupements fonctionnels ω et α aux extrémités de chaque chaîne. Le groupement ω serait une protéine liée à la chaîne de façon covalente, tandis que le groupement α serait un lipide voire un phospholipide (Figure 1) (Tanaka, 1991 ; Eng et al., 1993). A ce jour, la structure exacte du groupement ω n’est pas encore bien élucidée (Sakdapipanich, 2007). Il y a un certain nombre d’irrégularités de la structure chimique due à la présence de groupements fonctionnels dits « anormaux » sur les chaînes de poly(cis-1,4-isoprènes) tels que des aldéhydes (Sekhar, 1960 ; Gregory et Tan, 1975), des époxydes (Burfield, 1974 ; Burfield et Law, 1979), des lactones (Gregg et Macey, 1972) et des esters (Shiibashi et al., 1989 ; Eng et al., 1993). Avec des structures chimiques quasi-identiques, les propriétés physiques et mécaniques du NR sont meilleures que celles du guayule (GR) et du poly(cis-1,4-isoprène) de synthèse (SR) (Ramos de Valle et Montelongo, 1978 ; Montès et White, 1982). Cette supériorité en termes de propriété est en partie grâce à la présence de quelques pourcents de certains composés non isoprène (Gregg et Macey, 1972), tels que des protéines, des lipides (Liengprayoon, 2008), des glucides et des minéraux.

Les différents types de distribution des masses molaires du caoutchouc naturel La distribution des masses molaires (DMM) et les masses molaires moyennes ont une influence sur les propriétés physiques et rhéologiques des polymères. En générale, les DMM des polymères synthétiques sont gaussiennes et leurs largeurs sont définies par un indice de polymolécularité (Ip) qui est le rapport entre la masse molaire moyenne en poids (Mw) et la masse molaire moyenne en nombre (Mn). Pour le NR, la DMM native (DMM0) est bimodale (deux pics) (Bristow et Westall, 1967). Westall (1968) a montré que la DMM0 du NR issu de latex frais est bimodale. La technique utilisée a été de fractionner le NR en différentes fractions monodisperses, puis les Mn de ces fractions ont été déterminées par osmométrie. Subramaniam (1972) a utilisé la chromatographie d’exclusion stérique (SEC) pour étudier le NR. Il a distingué trois différents types de DMM0 pour le NR (Figure 2). Les types 1 et 3 sont les distributions bimodale et quasi-unimodale, alors que le type 2 est l’intermédiaire entre les types 1 et 3. Les différents types de distributions des masses molaires vont donner différents comportements rhéologiques du NR (Subramaniam, 1975 ; Fuller et Fulton, 1990). Un échantillon de NR du grade TSR5CV2 ayant une DMM bimodale a une viscosité Mooney plus faible que celle d’un autre échantillon du même grade ayant une DMM quasi-unimodal (Subramaniam, 1993 ; Bonfils et al., 2000).

Généralité sur la ramification des polymères

L’étude sur la ramification des polymères présente un grand intérêt car il y a une différence considérable de comportement rhéologique entre un polymère ramifié et un polymère linéaire (Munstedt et Auhl, 2005). Il existe plusieurs types de polymères ramifiés : polymère en étoile, polymère en peigne, dendrimère et polymère ramifié statistique (Figure 4) (Burchard, 1999). Le polymère en étoile possède un seul noeud de ramification qui relie plusieurs branches, alors que pour le polymère en peigne plusieurs branches sont liées à une seule chaîne principale. La fonctionnalité de la ramification (f) est égale au nombre de branches attachés au noeud de ramification. Dans le cas d’un dendrimère, les noeuds de ramification se trouvent aux extrémités de chaque chaîne. On distingue également entre les chaînes ramifiées courtes et les chaînes ramifiées longues. Si la masse molaire de la ramification attachée à la chaîne principale est inférieure à la masse molaire d’enchevêtrements, la ramification est définie comme « courte », et dans le cas contraire elle est définie comme « longue ». La relation entre le rayon de giration et la masse molaire moyenne en poids est décrite selon l’Eq. (1) (Laguna et al., 2001 ; Teraoka, 2002). L’exposant de Flory (ν) renseigne sur l’interaction polymère-solvant et la conformation de la chaîne. Il varie de 0,33 pour une sphère compacte à 1 pour un bâtonnet rigide. Pour un pelote statistique, ν varie de 0,5 (solvant Θ) à 0,59 (bon solvant) (Burchard, 1999). Pour le même type de polymère, les macromolécules ramifiées ont une valeur de ν plus petite que celle des macromolécules linéaires.

Une macromolécule ramifiée en solution a un rayon de giration (Rg) plus petit que celui de son homologue linéaire, de même masse molaire, en raison des ramifications. Pour évaluer le degré de compacité, ou indice de ramification (g), des polymères ramifiés, on peut recourir à la comparaison de leur rayon à celui de l’équivalent linéaire de même masse molaire. Par définition, g est égal au rapport au carré entre les rayons de giration de la chaîne ramifiée et de la chaîne linéaire ayant la même masse molaire (Eq. (2)). Le degré de compacité viscosimétrique (g’) est aussi utilisé, il est calculé comme le rapport des viscosités intrinsèques du polymère ramifié et du polymère linéaire ayant la même masse molaire (Eq. (3)). Les degrés de compacité g et g’ sont reliés par l’Eq. (4) (Yu et al., 2005). Le nombre de noeuds de ramifications par chaîne, m3 (trifonctionnel) et m4 (tétrafonctionnel), est déterminé par la relation de Zimm et Stockmayer (1949) (Eq. (5) et (6)).

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1 : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
1.1 Introduction
1.2 Constitution chimique des macromolécules du caoutchouc naturel
1.3 Distribution des masses molaires du caoutchouc naturel
1.3.1 Les différents types de distribution des masses molaires du caoutchouc naturel
1.3.2 Effets des paramètres agronomiques, de l’usinage et de la transformation sur la distribution des masses molaires du caoutchouc naturel
1.4 Ramification des chaînes du caoutchouc naturel
1.4.1 Généralité sur la ramification des polymères
1.4.2 Ramification des macromolécules du caoutchouc naturel
1.4.3 Principe et théorie de la SEC-MALS
1.5 Gel du caoutchouc naturel
1.5.1 Définitions
1.5.2 Formation du gel dans le caoutchouc naturel
1.5.3 Effet de l’usinage et de la transformation du caoutchouc naturel sur le taux de gel
1.6 Viscosité Mooney du caoutchouc naturel
1.6.1 Introduction
1.6.2 Principe du viscosimètre Mooney
1.6.3 Viscosité Mooney : un test normalisé mais un critère insuffisant
1.6.4 Viscosité Mooney à vitesse variable
1.6.5 Transformation de la viscosité Mooney en viscosité de cisaillement
1.6.6 Relaxation Mooney du caoutchouc naturel
1.7 Relation entre la viscosité Mooney du caoutchouc naturel et sa mésostructure
1.8 Méthodologie de la recherche
CHAPITRE 2 : MATERIELS ET METHODES
2.1 Echantillons
2.1.1 Caoutchouc naturel
2.1.2 Polymères synthétiques
2.2 Homogénéisation des échantillons de caoutchouc naturel
2.2.1 Principe
2.2.2 Procédure
2.3 Réduction du taux de gel dans des solutions de caoutchouc naturel
2.3.1 Traitement au bromure de tétrabutylammonium
2.3.2 Trifluoroacétate de 1,1,3,3-tétraméthylguanidinium
2.4 Détermination de l’incrément d’indice de réfraction
2.4.1 Principe
2.4.2 Procédure
2.5 Chromatographie d’exclusion stérique couplée avec un détecteur à diffusion de la lumière multi-angulaire (SEC-MALS)
2.5.1 Matériels
2.5.2 Procédure
2.6 Viscosité Mooney à vitesse variable
2.6.1 Principe
2.6.2 Matériels
2.6.3 Procédure
2.7 Mesure du module complexe
2.7.1 Théorie
2.7.2 Matériels
2.7.3 Procédure
CHAPITRE 3 : CARACTERISATION DE LA MESOSTRUCTURE DU CAOUTCHOUC NATUREL PAR SEC-MALS
3.1 Introduction
3.2 Détermination de l’incrément d’indice de réfraction de solutions de caoutchouc naturel et de poly(cis-1,4-isoprène) de synthèse
3.2.1 Introduction
3.2.2 Résultats obtenus
3.2.3 Conclusion
3.3 Characterization of natural rubber using size-exclusion chromatography with online multi-angle light scattering: Study of the phenomenon behind the abnormal elution profile*
3.3.1 Introduction
3.3.2 Experimental
3.3.3 Results and discussion
3.3.4 Conclusion
3.4 La quantité variable de gel dans le caoutchouc naturel a-t-il un impact sur les paramètres de la structure macromoléculaire obtenus par SEC-MALS ?
3.4.1 Introduction
3.4.2 Résultats obtenus
3.4.3 Conclusion
3.5 Influence de l’élution anormale sur les paramètres de structure macromoléculaire obtenus par SEC-MALS
3.5.1 Introduction
3.5.2 Résultats obtenus
3.5.3 Conclusion
3.6 Study of chain branching in natural rubber using size-exclusion chromatography coupled with a multi-angle light scattering detector (SECMALS)*
3.6.1 Introduction
3.6.2 Experimental
3.6.3 Results and discussion
3.6.4 Conclusion
3.7 Discussion
CHAPITRE 4 : CARACTERISATION RHEOLOGIQUE DU CAOUTCHOUC NATUREL PAR VISCOSIMETRE MOONEY A VITESSE VARIABLE, ETUDE DES RELATIONS AVEC LA MESOSTRUCTURE
4.1 Introduction
4.2 Influence de la méthode d’homogénéisation sur la caractérisation du caoutchouc naturel par viscosimètre Mooney à vitesse variable
4.2.1 Introduction
4.2.2 Résultats obtenus
4.2.3 Conclusion
4.3 Better characterization of raw natural rubber by decreasing the rotor speed of Mooney viscometer
4.3.1 Introduction
4.3.2 Experimental
4.3.3 Results and discussion
4.3.4 Conclusion
4.4 Universalité de la relation entre la viscosité Mooney obtenue à 0,05 tr/min et la Mw : influence du taux de gel
4.4.1 Introduction
4.4.2 Résultats obtenus
4.4.3 Conclusion
4.5 Discussion
CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE

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