Consommation de compléments alimentaires par les sportifs en Martinique

Les compléments alimentaire (CA) sont, selon l’ANSES et maintenant l’EFSA, des « denrées alimentaires dont le but est de compléter le régime alimentaire normal et qui constituent une source concentrée de nutriments ou d’autres substances ayant un effet nutritionnel ou physiologique seuls ou combinés, commercialisés sous forme de doses destinées à être prise en petite quantités ».[1] Conceptuellement, son rôle premier est de traiter ou prévenir une carence alimentaire. L’EFSA leur attribue des effets par le biais d’allégation nutritionnelle et/ou santé. Bien qu’ils ressemblent à des médicaments, ils n’en sont pas. Leur statut se situe entre un aliment et un médicament, (annexe n°2) sachant toutefois que les seuls aliments qui sont des médicaments sont les « aliments diététiques destinés à des fin médicales », qui vont traiter ou prévenir un état de dénutrition. En Europe, il n’y a plus de statut légal spécifique de CA ou d’aliment « pour le sport » (anciennement produit de l’effort). Cependant, des CA ont une allégation, voire simplement un étiquetage orienté vers le sport (exemple : « les solutions à base de glucose contribuent à l’amélioration des performances physiques pendant des exercices intenses »).

Les CA sont un business très lucratif (1.8 milliard d’euros en 2017 en France pour les CA tout confondus avec une croissance de 5.7% en 1 an) [2]. On remarque un détournement de la définition de complément alimentaire qui est normalement de pallier une carence. Des effets bénéfiques sur les performances physiques et la santé sont promis alors qu’ils n’ont pas été démontrés, contrairement à leurs risques qui eux, sont réels. D’après l’ANSES, les CA ont un risque d’interaction avec les traitements médicamenteux et des risques sur la santé à court terme. Ces risques ont été relevés par le dispositif national de nutrivigilance[3] : effets potentiellement graves pour certains, majoritairement d’ordre cardiovasculaires (tachycardie, arythmie et accident vasculaire cérébral) et psychiques (troubles anxieux et troubles de l’humeur). Une étude évalue à 23 005 le nombre de visites aux urgences par an dues aux CA aux EU [4] et 20% des atteintes hépatiques reportées sur « l’ U.S. DrugInduced Liver Injury Network » sont liés à la consommation de CA [5]. De plus, il existe un risque de contamination de certains compléments alimentaires par des produits dopants et interdits (stéroïdes anabolisants ou leurs précurseurs, ou des stimulants comme l’éphédrine). Les CA achetés sur internet sont plus à risque de contenir des substances interdites [6]. En parallèle, dans n’importe quel commerce ou pharmacie on trouve des CA d’origine naturelle qui contiennent des stimulants comme le citrus aurantium (extrais d’orange amère) : il contient de la synéphrine qui présente des risques cardiaques et peux rendre un test de contrôle antidopage positif [7]. Une étude en attente de publication [8] confirme que cela est toujours le cas : 203 CA consommés aux EU par les bodybuilders ont été analysé et seulement 44% avaient un étiquetage conforme à la composition du produit. 80% des produits qui visent à augmenter la masse ou les performances étaient contaminés notamment pour 50% parstéroïdes anabolisants. 72% des produits utilisés dans un but de perte de poids n’étaient pas conformes [9](Observations non publiés). Le consensus est que la consommation de CA pour le sport n’est jamais nécessaire lorsqu’une nutrition équilibrée et adaptée est suffisante, pour éviter toute carence chez le sportif [10,3]. Certaines situations de carence avérée peuvent nécessiter une prescription de complément alimentaire si une modification du régime alimentaire n’est pas possible.

A ce jour, aucune étude n’a été faite aux Antilles Françaises à propos de la consommation de CA pour le sport. Une évaluation de sa prévalence et de ses caractéristiques est nécessaire pour mettre en place les bonnes mesures d’information et de prévention autour de cette pratique. De plus, la plupart des études ont été réalisées sur des sportifs de haut niveau et très peu l’évaluent dans le milieu sportif amateur. Cela nécessite d’étudier la population consommatrice, ses motivations, ses sources et potentielles carences d’information sur les CA. Cette étude réalisée en Martinique a pour but d’attirer l’attention sur cette problématique et éventuellement débuter une campagne d’information des sportifs, mais surtout des professionnels du sport et de la santé, ce qui est impossible sans chiffres à l’appui. Elle est aussi le point de départ d’une étude de plus grande envergure sur la prévalence de consommation de CA aux Antilles et en métropole.

DISCUSSION

Résultats clés

Un mésusage des CA pour le sport

Cette étude montre l’existence d’une population à risque de mésusage. Parmi les consommateurs de CA, 7 sportifs avaient au moins un antécédent de la liste de l’ANSES pour lesquels elle déconseille la prise de CA [3]. De même, 11 sportifs consommaient des CA alors qu’ils avaient un traitement régulier malgré un risque d’interaction.
– Pas de différence significative pour la présence d’un antécédent entre les sportifs CA+ et CA-. On aurait attendu une différence si les sportifs suivaient les recommandations de l’ANSES.
– Les moyens de se prémunir du dopage sont nettement méconnus des sportifs avec seulement 2 % des sportifs qui connaissent la norme AFNOR NF V 94-001 qui est la référence (logo en annexe n°9) et préfèrent s’appuyer sur les garanties du fabricant (27%). La majorité des sportifs déclarent qu’ils ne vérifient pas (51%) ou qu’ils ne savent pas (25%).

Identification de la population consommatrice en Martinique

Certaines caractéristiques des consommateurs de CA ont pu être identifiées et pourraient servir aux professionnels de santé et du sport à mieux les identifier pour mieux les informer. Les hommes consomment largement plus que les femmes. Le fait que les consommateurssont statistiquement plus grands que les CA- est certainement lié à cette différence en fonction du sexe. Les sportifs pratiquant les sports d’endurance sont proportionnellement plus consommateurs que ceux qui n’en pratiquent pas. Ceci est retrouvé dans de nombreuses autres études[12,13]. Or il parait inédit que les pratiquants de sports collectifs sont moins consommateurs que ceux qui n’en pratiquaient pas. Les sportifs ayant une pratique intensive (pratiquant de nombreuses heures d’entrainement) ou pratiquant le sport en compétition seraient volontiers plus consommateurs. Les motivations de la prise de CA sont le plus souvent la récupération, l’endurance, l’augmentation de la force et de la puissance. La consommation de CA pour le sport est aussi comparable dans ses objectifs à celle des CA de manière générale car 40% des consommateurs les utilisent pour rester en bonne santé. La prise de CA fait intervenir des facteurs psychosociaux. Les résultats de l’étude mettent en avant un profil de sportifs se déclarant plus souvent comme agressif, satisfait de leur apparence et à la recherche de sensations fortes. Les consommateurs décrivent aussi plus souvent le sport comme « le dépassement de soi, la performance », et « la prise de risque ». En résumant, il semble que les pratiquant de sports individuels, ayant un profil psychosocial plutôt autocentré, narcissique et en recherche de performance, de sensation forte seraient proportionnellement plus consommateurs de CA.

Source d’information des sportifs sur les CA 

– Les sportifs s’étaient informés par eux même pour la moitié des cas : « recherche personnelle/internet ».
– Très peu déclaraient avoir reçu de conseils par les professionnels de santé : « nutritionniste/diététicien » 16% ; « pharmacien » 14% ; « médecin traitant » 11% et « autre médecin » 10%.
– Ils reçoivent plus d’information des « autres sportifs » 28% ; de leurs « entraineur/coach » 19%. Les sportifs ont donc reçu la majorité des informations sur les CA sur internet avec très peu d’informations de la part des professionnels du sport et de santé. Les sportifs vont d’ailleurs acheter ces compléments sur internet pour 20% ce qui majore le risque de prendre un CA contaminé par des dopants ou de composition incertaine.

En revanche, selon les sportifs, le « nutritionniste/diététicien » (n=0.70) suivi du « médecin traitant » (n=0.49) puis des « médecins autres » (n=0.45) et du pharmacien (n=0.21) » étaient les plus à même pour les informer sur les CA pour le sport, ce qui est rassurant. Les sportifs ne reçoivent pas assez d’informations de la part des professionnels de la santé mais leur font largement confiance pour leur donner des informations sur les CA.

La présence de certaines sources de conseil augmentait significativement avec la proportion de consommateur. Autrement dit, les sportifs ayant reçu des conseils de certains sources étaient proportionnellement plus consommateurs. Ces sources d’informations étaient le médecin autre que traitant, le pharmacien, le diététicien, internet/recherche personnelle, magazine et coach. Pas de différence significative pour ceux qui avaient reçu un conseil du médecin traitant et de la famille. Aucune source de conseil n’avait été associée avec une diminution de la proportion de consommateurs.

Pour les sources préférées, les consommateurs donnent significativement de meilleures notes que les non-consommateurs aux « diététiciens », « recherche personnelle/internet », « magazine », « autre sportif », « coach ». Pas de différence pour les autres (médecin traitant, famille, médecin non traitant et pharmacien).

Les consommateurs donnent donc plus de crédit aux sources d’information dont le contenu n’est pas le plus scientifique ou dénué de conflit d’intérêt que les non consommateurs. Fait notable, 100 % des sportifs ayant reçu un conseil du diététicien consomment des CA. Fait aussi retrouvé dans l’étude (Wardenaar, 2017) [14]. Les consommateurs accordent tout de même hiérarchiquement du crédit aux mêmes sources que les non-consommateurs si on compare les moyennes des notes.

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Table des matières

I. INTRODUCTION
II. MATERIEL ET METHODE
A. Type d’étude
B. Population étudiée
C. Recueil des données
D. Le questionnaire
E. Outils statistiques
III. RESULTATS
IV. DISCUSSION
A – Résultats clés
1. Un mésusage des CA pour le sport
2. Identification de la population consommatrice en Martinique
3. Source d’information des sportifs sur les CA
B- Limites
C- Interprétation
D- Généralisation des résultats
Conclusions / perspectives de travail
V. ANNEXES

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