Consommation d’antibiotiques dans le secteur de ville : la situation en France et en Europe

Le premier antibiotique, la pénicilline, a été découvert en 1928 par Alexander Fleming. L’activité antimicrobienne des antibiotiques a permis de lutter contre de nombreuses maladies considérées jusque-là comme incurables. Première cause de mortalité en 1940, les maladies infectieuses sont aujourd’hui responsables de seulement 2% des causes de décès en France. Cependant, cinquante ans environ après cette révolution médicale, l’émergence de bactéries résistantes conduit à des impasses thérapeutiques de plus en plus fréquentes .

L’antibiorésistance est aujourd’hui un problème de santé publique mondial. L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) déclare que nous entrerons bientôt dans une ère post-antibiotique dans laquelle des infections courantes et de petites blessures infectées seront à nouveau mortelles .

Dans ce contexte, la France a engagé depuis la fin des années 1990 trois plans nationaux d’action sur les antibiotiques. La consommation a ainsi baissé de 11,4% entre 2000 et 2010 (3) mais a de nouveau progressé par la suite. Cette hausse de consommation provient très majoritairement de la médecine de ville avec une augmentation de 5,6% entre 2011 et 2016, alors que dans les établissements de santé la consommation sur cette période est restée stable (4). En 2018, la France était au 3e rang des pays européens les plus consommateurs d’antibiotiques (5). Quatre-vingt-treize pourcents étaient dispensés dans le secteur de ville, dont 71% prescrits par des médecins généralistes (3). Parmi ces prescriptions, 69,5% concernaient des affections des voies respiratoires dont 43,8% d’affections ORL (4). Ces infections sont pourtant le plus souvent d’origine virale et donc traitées à tort par antibiotiques .

La surconsommation et le mauvais usage des antibiotiques contribuent à l’augmentation préoccupante des résistances bactériennes. Le non recours aux antibiotiques pour les infections virales est un enjeu majeur des politiques de santé publique.

Une des stratégies mises en place est l’utilisation d’une « Ordonnance de Non Prescription » (ONP) . Il s’agit d’une fiche d’information présentée sous la forme d’une ordonnance, sur laquelle sont exposées les raisons pour lesquelles le médecin ne prescrit pas d’antibiotique. Ainsi, en cas d’infection virale, le médecin pourra la remettre à son patient. Cet outil pédagogique possède une double action: réduire la pression exercée par le patient sur le médecin qui remet bien une « ordonnance » et responsabiliser le patient .

Consommation d’antibiotiques dans le secteur de ville : la situation en France et en Europe

En France, dans le secteur de ville, la consommation d’antibiotiques a évolué en 3 phases depuis 2000 : d’abord une baisse jusqu’en 2005, puis une stabilité entre 2005 et 2010, et enfin une tendance à la hausse que les résultats de 2016 confirment (4). En 2019, deux indicateurs ont été calculés par Santé Publique France (11) : d’une part le nombre de Dose Définie Journalière (DDJ), avec la nouvelle base de l’OMS en vigueur au 1er janvier 2019, et d’autre part le nombre de prescriptions, tous deux exprimés pour 1 000 habitants et par jour. La mise à disposition de ces données par régions et départements permet d’adapter les actions nationales localement.

En termes de tendances, la consommation globale d’antibiotiques en secteur de ville exprimée en DDJ est restée stable dans les dix dernières années (22,7 en 2009 contre 22,5 en 2018) (11). L’actualisation des doses journalières en 2019, du fait de leur augmentation, explique la différence de tendance avec les résultats antérieurs s’inscrivant plutôt à la hausse (4). En effet, la DDJ constitue une posologie de référence pour un adulte de 70 kilos dans l’indication principale de chaque antibiotique, l’augmentation de la DDJ de certains antibiotiques très consommés (comme l’amoxicilline) peut faire diminuer significativement la consommation globale des antibiotiques.

Exprimée en nombre de prescriptions, la consommation globale d’antibiotiques en ville est passée de 2,81 à 2,38 prescriptions pour 1 000 habitants et par jour, soit une diminution de plus de 15% .

Sur 10 ans, la consommation a diminué pour presque toutes les classes d’antibiotiques, dont les fluoroquinolones, générateurs d’antibiorésistance. Les seules exceptions notables concernent les antibiotiques suivants : l’amoxicilline + 55% (conformément aux recommandations) et l’association amoxicilline-acide clavulanique + 12%, également pourvoyeur d’antibiorésistance .

Malgré ces évolutions, la consommation d’antibiotiques en France en 2018 demeurait supérieure d’environ 30 % à la moyenne européenne, plaçant le pays au 3e rang des plus gros consommateurs en Europe (5). En 2018, la consommation moyenne d’antibactériens en Europe était de 18,4 DDJ pour 1000 habitants et par jour en soins primaires, allant de 8,9 aux Pays-Bas à 32,4 en Grèce. Entre 2009 et 2018, elle est restée stable (18,6 DDJ en 2009) mais des tendances à la baisse ont été observées pour neuf pays (Autriche, Belgique, Danemark, Finlande, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal et Suède) et des tendances à la hausse pour quatre pays (Bulgarie, Irlande, Lettonie et Pologne) .

Les moyens d’actions mis en place

Trois plans d’actions se sont succédés en France depuis les années 2000 : deux plans nationaux pour préserver l’efficacité des antibiotiques entre 2001-2005 puis 2007-2010 puis le plan national 2011-2016 d’alerte sur les antibiotiques. Une étude récente a fait l’inventaire des programmes de bon usage des antibiotiques en médecine générale en France et à l’étranger entre 2000 et 2015 (13). En France, les principales actions menées étaient la formation des professionnels de la santé, la diffusion des recommandations, une rétro-information aux généralistes concernant leurs prescriptions, la mise à disposition des tests diagnostiques. Des lignes de conseils téléphoniques ont été mises en place dans certaines régions. À l’étranger, beaucoup de pays ont mis à disposition des médecins du matériel pédagogique expliquant aux patients la conduite à tenir en cas d’infections virales ou de prescription retardée. Certaines actions se démarquent, comme des autorisations spéciales pour les fluoroquinolones dans une province canadienne, l’arrêt temporaire du remboursement de certains antibiotiques selon l’écologie bactérienne au Danemark et les antibiogrammes comprenant moins de cinq molécules au Royaume-Uni .

L’OMS a publié en mai 2015 un plan d’action global contre l’antibiorésistance avec une approche « One Health » (« Une seule santé »). L’OMS invite chaque pays à se doter d’un plan d’action national intégrant les secteurs de la santé humaine, animale et environnementale (14). Il existe depuis 2016 en France une feuille de route interministérielle pour la maîtrise de l’antibiorésistance (15). Ce programme est construit autour de 5 axes : mieux sensibiliser le public, mieux utiliser les antibiotiques, mieux soutenir la recherche et l’innovation, renforcer la surveillance et l’engagement de la France dans la lutte internationale contre l’antibiorésistance.

L’ordonnance de non-prescription d’antibiotique 

La difficulté de la non-prescription

La France est le premier consommateur de médicaments en Europe. Pour un nombre de consultations par an similaire à ses voisins, c’est dans le nombre de médicaments prescrits à chaque consultation que se fait la différence : en moyenne 1,6 en France contre 1,2 en Allemagne et en Espagne (16). En effet, les français ont un rapport à l’ordonnance très fort, 90% des consultations se concluent par une ordonnance de médicaments (contre 43,2% aux Pays-Bas). L’ordonnance est quasi systématique, une forme de réflexe se traduisant par une équation simple : consultation = ordonnance = médicaments (16). Cette habitude ancrée dans la culture médicale rend difficile d’envisager l’idée de la non-prescription.

Les antibiotiques sont les médicaments les plus réclamés par les patients, loin devant les antalgiques ou encore les somnifères et les psychotropes (17). La pression exercée par les patients sur les médecins est l’un des principaux déterminants de la prescription d’antibiotique en médecine générale (18,19). Lorsque la demande du patient est explicite, elle rend la situation plus à risque d’une prescription inappropriée .

Si 33 % des médecins généralistes estiment que leur patient leur suggère implicitement une prescription d’antibiotiques, seuls 14 % des patients pensent en avoir demandés. Si 24% des médecins généralistes déclarent vivre des demandes explicites, 8 % des patients avouent avoir insisté pour obtenir des antibiotiques (17). Les attentes des patients ont une influence significative sur la délivrance d’antibiotiques, cependant les médecins surestiment ces attentes (21). Il existe un décalage important entre les attentes réelles du patient et les attentes ressenties par le médecin. La communication médecinpatient est donc essentielle pour améliorer les comportements de prescription.

La non-prescription est rarement un motif de mécontentement, dès lors qu’elle est expliquée. Si aucun antibiotique n’était prescrit aux patients qui les estimaient utiles, la majorité d’entre eux (62%) attendaient avant tout de leur médecin des explications (17). La délivrance d’informations et la réassurance sont plus fortement associées à la satisfaction des patients que la réception d’une prescription d’antibiotique .

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Table des matières

INTRODUCTION LONGUE
Introduction
Contexte
I. Consommation d’antibiotiques dans le secteur de ville : la situation en France et en Europe
II. Moyens d’actions mis en place
III. L’ordonnance de non-prescription d’antibiotique
A. Difficulté de la non prescription
B. Information du patient : intérêt d’un support écrit
C. Améliorer les connaissances des patients
D. L’ONP en France et à l’étranger
E. Actions régionales autour de l’ONP
ARTICLE
Introduction
Matériels et méthodes
I. Type d’étude et objectifs
II. Population étudiée
III. Déroulement de l’étude
IV. Données recueillies
V. Analyse statistique
Résultats
I. Caractéristiques de la population
II. Motifs de consultation et besoin d’antibiothérapie
III. Remise de l’ONP
IV. Connaissances initiales des patients
V. Impact de l’ONP sur les connaissances
VI. Acceptabilité et satisfaction des patients
VII. Retour d’expérience des médecins
Discussion
Conclusion
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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