L’automédication semble particulièrement se développer dans les pays en développement. Les raisons sont multiples : l’ignorance et l’insuffisance d’informations de la population ne protègent pas cette dernière contre l’utilisation « intempestive » des produits pharmaceutiques disponibles. Les médecins et le personnel de la santé ne sont pas présents dans toutes les localités. Et comme certains médicaments sont vendus un peu partout (sur le marché du village, dans les épiceries, au mieux au niveau des dépôts de médicaments) sans qu’il soit nécessaire de présenter une ordonnance, la tendance à s’automédiquer gagne progressivement les communautés. Dans les pays développés, c’est la médecine scientifique qui est considérée comme traditionnelle, les autres voies thérapeutiques proposées correspondant à une médecine parallèle, empirique. On parle aussi de «médecines douces », concept regroupant des thérapeutiques anodines et des démarches grossières ou mystificatrices. La médecine traditionnelle telle qu’on la comprend actuellement regroupe des actions aux objectifs, aux moyens et à l’efficacité variés. Pourtant, la médecine traditionnelle ne doit être ni méprisée ni magnifiée ; son rejet équivaudrait à nier les valeurs hier démontrées ou demain à déceler ; sa valorisation excessive apparaît souvent être la conséquence des carences de la médecine scientifique, parfois un maladroit transfert de préoccupations politiques ou la tentative opportuniste d’un retour à une «authenticité» mal intégrée. Sa place doit être définie sans à priori ni passion, en analysant tout autant ses vertus et ses inconvénients que ne peut manquer d’engendrer l’empirisme des choix de la pharmacopée et des méthodes de leurs prescriptions.
LES MEDICAMENTS ESSENTIELS
Définition
Les médicaments essentiels sont ceux qui satisfont aux besoins de la majorité de la population en matière de soins de santé ; ils doivent donc être disponibles à tout moment en quantité suffisante et sous la forme pharmaceutique appropriée. Le choix de tels médicaments dépend de nombreux facteurs, tels que la prévalence locale des maladies, les installations de traitement, la formation et l’expérience du personnel disponible, les ressources financières et les facteurs génétiques, démographiques et environnementaux.
Sélection des médicaments
Pour les formations sanitaires et donc pour les communautés, seuls seront sélectionnés les médicaments pour lesquels il existe des données sûres et suffisantes sur l’efficacité et l’innocuité, qualités obtenues à partir d’études cliniques, et pour lesquels la preuve a été faite de leur utilité pour l’usage général dans divers types d’établissements médicaux.
Chaque médicament choisi doit être disponible sous une forme pour laquelle il est possible d’assurer une qualité suffisante, y compris en ce qui concerne la biodisponibilité ; sa stabilité dans les conditions prévues de stockage et d’utilisation doit être démontrée. Lorsque deux ou plusieurs médicaments restent à peu près équivalents en ce qui concerne les critères ci-dessus, le choix sera déterminé par une évaluation soigneuse de leur efficacité, de leur innocuité, de leur qualité, de leur prix et de leur disponibilité respective. Lors de la comparaison du coût des différents médicaments, on devra prendre en considération, non seulement le coût unitaire, mais aussi le coût total du traitement.
Médicaments essentiels et soins de santé primaires
On ne saurait trop insister sur le fait qu’en pratique, la sélection des médicaments pour les soins de santé primaires doit être opérée à l’échelon national, la formation et les responsabilités du personnel chargé d’administrer ces soins variant considérablement d’un contexte à l’autre. Les agents hautement qualifiés sont capables d’utiliser avec une sécurité acceptable un large éventail de médicaments correspondant à des compétences diagnostiques différentes, et les décisions concernant la mise à disposition de médicaments spécifiques aux agents de santé communautaires ne peuvent être prises que compte tenu de tous les facteurs inhérents à la situation locale. Les facteurs suivants influant sur les médicaments.
Systèmes médicaux existants
L’établissement de services de soins de santé primaires dans les pays en développement ne doit pas entraîner le rejet brutal des pratiques culturelles en usage dans les collectivités rurales. Par exemple, le travail des guérisseurs traditionnels devra être adapté et complété de façon à assurer que les nouvelles pratiques seront convenablement intégrées aux systèmes de soins existants.
Infrastructure sanitaire nationale
Le type de services de soins de santé primaires qu’exige un pays donné dépend de la proximité et de la nature des installations de premier secours. Dans certains pays, il n’est pas rare que le poste sanitaire permanent le plus proche soit à un ou plusieurs jours de voyage des villages isolés qui relèvent de son secteur d’activité.
Formation et approvisionnement
Les effectifs en personnel dûment formé, les installations dont ce personnel dispose, et le système d’approvisionnement déterminent la portée et les limites du système de soins de santé primaires. Il est évident que des travailleurs ayant suivi une formation d’une ou plusieurs années peuvent connaître davantage que le personnel n’ayant suivi qu’un cours intensif de formation pratique de quelques semaines. Mais, quelles que soient les circonstances, ces agents ne pourront effectuer un travail valable que si la continuité de l’approvisionnement et de l’information est assurée.
Tableau d’endémicité
La prévalence des principales infections endémiques et maladies parasitaires peut varier d’une région à l’autre d’un même pays en fonction de facteurs climatiques, géographiques, topographiques, sociaux, économiques et professionnels. Une planification soigneuse et, dans certains cas, des enquêtes épidémiologiques, sont nécessaires pour assurer que les médicaments les plus efficaces seront fournis et pour tirer le maximum de bénéfices de ressources limitées.
Consommation pharmaceutique
Il est manifeste que souvent les médicaments ne sont pas utilisés au maximum de leurs possibilités ni conformément aux critères généralement admis. On sait peu de choses des conséquences cliniques que peuvent avoir les différences importantes qui existent dans les modalités de prescription d’un pays à l’autre et d’une région à l’autre d’un même pays. Les ventes de médicaments sans Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) et les consommations sans prescription font qu’on obtient rarement d’une manière systématique et exhaustive des données de consommation complètes.
Les enquêtes de consommation pharmaceutique
On peut mener des études de consommation pharmaceutique à différents niveaux, selon les buts visés et les moyens disponibles. L’intérêt de ces études sera renforcé par l’usage de procédures normalisées dans les différents pays ou régions (systèmes communs de classification des médicaments et d’unités de mesure). Il faut utiliser ces procédures pour fournir des données sur tous les médicaments importants d’une catégorie thérapeutique particulière, en tenant compte à la fois du coût et des quantités prescrites, ainsi que des différences au niveau des modalités thérapeutiques. Les enquêtes de consommation pharmaceutique ont pour objet essentiel de quantifier l’usage actuel des médicaments et les exigences futures. Ces données peuvent être aussi utilisées
• pour apprécier les effets des mesures prises dans le domaine de l’information et de la réglementation, de la politique des prix…etc ;
• pour définir des domaines de recherche ultérieure sur l’efficacité et la sécurité absolues ou relatives de la chimiothérapie ;
• pour faciliter la détermination des rapports avantages/risques et coût/efficacité ;
• enfin, moyennant une interprétation correcte, pour signaler toute consommation excessive, insuffisante ou abusive de certains médicaments ou catégories de médicaments.
Accessibilité aux médicaments et aux services de santé
L’accessibilité des services de santé
L’accessibilité des services de santé, et la question qui en résulte de l’accès aux soins de santé par les différents groupes de population, ont plusieurs dimensions.
• En premier lieu, il existe de grandes divergences dans la couverture sanitaire dans un même pays et dans un pays à l’autre. Le problème d’accessibilité géographique oblige plus ou moins les communautés à faire appel à d’autres types de prestataires de soins : médecine traditionnelle et guérisseurs.
• En deuxième lieu, l’insuffisance des moyens financiers, autrement dit le problème d’accessibilité financière, favorise l’appel aux prestataires les moins chers.
L’accessibilité aux médicaments
• L’insuffisance de couverture sanitaire peut favoriser l’existence de filières non autorisées et non contrôlées de distribution de médicaments. Ces points de vente illicites de produits pharmaceutiques permet en particulier le développement de l’automédication.
• Les différences de prix des médicaments entrent aussi en jeu. Les figures n° 1 et n° 2 présentent une comparaison des prix médians des médicaments provenant de 4 sources différentes en Sierra Leone et pour le traitement antipaludique : pour les médicaments vendus par les colporteurs, la moyenne était d’environ 30 léones ( le cours du dollar EU étant de 60 léones au moment de l’étude) alors que les dispensaires publics faisaient payer un prix moyen de 70 léones.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : CONSIDERATIONS GENERALES SUR LES MEDICAMENTS ET LEUR CONSOMMATION
1. LES MEDICAMENTS ESSENTIELS
1.1. Définition
1.2. Sélection des médicaments
1.3. Médicaments essentiels et soins de santé primaires
1.4. Consommation pharmaceutique
1.4.1. Les enquêtes de consommation pharmaceutique
1.4.2. Accessibilité aux médicaments et aux services de santé
2. LA CONSOMMATION PHARMACEUTIQUE
2.1. Les différences sociales dans la consommation de médicaments
2.2. Le compte de consommation
DEUXIEME PARTIE : ETUDE DE LA CONSOMMATION DES MEDICAMENTS SANS PRESCRIPTION A ANJOZOROBE
1. CADRE D’ETUDE
1.1. Limites et organisation du Fivondronam-pokontany
1.2. Démographie
2. METHODOLOGIE
2.1. Méthode d’étude
2.2. Paramètres d’étude
3. RESULTATS
3.1. Répartition des personnes enquêtées
3.2. Les formations sanitaires
3.3. Connaissance des médicaments
3.4. Attitude
3.5. Pratique
CONCLUSION