Nous rapportons dans ce travail 10 cas d’état de mal épileptique observés dans le Service «Clinique Infantile» du Centre Hospitalier de Soavinandriana (CENHOSOA) du 1 mars 1998 au 28 février 2001.
L’OMS définit l’état de mal épileptique comme «un état caractérisé par une crise d’épilepsie qui persiste suffisamment longtemps ou qui se répète à des intervalles suffisamment brefs pour créer une condition fixe et durable». Ainsi, en pratique et chez l’enfant, on considère que l’état de mal épileptique est défini et nécessite une prise en charge spécifique dès que la durée de la condition épileptique est anormalement prolongée et expose à un risque vital ou fonctionnel (1), plus précisément lorsqu’une crise comitiale persiste pendant plus d’une demi-heure (2).
HISTORIQUE
L’EPILEPSIE
L’épilepsie ou comitialité est une maladie existant depuis des temps immémoriaux. Son historique est marqué par trois périodes successives :
– La période clinique,
– La période électroencéphalographique, et
– La période thérapeutique.
➤ La période clinique :
Dès l’antiquité, Hippocrate, Aretéé de Capadoce, Priscianus, Galien et plus tard Jean Fernel, médecin de Cathérine de Médicis, connaissent déjà les signes des accès. En 1850, Rolando décrit les crises adversives. Néanmoins, l’épilepsie reste encore considérée comme étant d’origine satanique, c’est à dire provoquée par des forces surnaturelles, les humeurs, les substances toxiques. Ainsi, pendant tout le Moyen Age, on recourt aux incantations, aux impositions des mains, aux pèlerinages en vue de prévenir les accès.
Il faut attendre la fin du XVIIIème siècle pour que l’épilepsie commence à être considérée comme une maladie au sens médical du terme.
➤ La période électroencéphalographique :
En 1929, Hans Berger enregistre les ondes électriques cérébrales (3). Ses travaux viennent transformer les conceptions jusque-là purement cliniques, en permettent :
● d’admettre la notion de décharge neuronale à l’origine des crises comitiales,
● de reconnaître comme non épileptiques des malaises jusque-là considérés comme des équivalents épileptiques (l’état nevropathique, la syncope, les parasomnies, la migraine, les tics, l’asthme, …) .
Actuellement, l’électroencéphalographie couplée aux enregistrements vidéographiques donnent des corrélations électrocliniques très fines. En outre, pratiquée sur de longues durées, elle renseigne de façon très précise sur la fréquence des crises .
➤ La période thérapeutique :
Dès la fin du XIXème siècle ont lieu les premiers essais de traitements médicaux par des bromures. Et en 1912 est découvert le phénobarbital.
D’autres anticomitiaux sont proposés par la suite. Aujourd’hui, la pharmacocinétique assure un traitement rationnel, non empirique, de l’épilepsie. Les premiers traitements chirurgicaux antiépileptiques sont l’œuvre de Penfield, Jaspers et l’école de Montréal. Ils sont bien codifiés depuis des travaux de Talairach, de Bancaud et du groupe de Sainte Anne .
L’ETAT DE MAL EPILEPTIQUE
Il a évidemment le même historique que l’épilepsie en général. Mais c’est vers le XVIIè siècle que des descriptions cliniques précises des convulsions prolongées évoquent des Etats de Mal Epileptiques .
ENFANT ET EPILEPSIE
Les grandes étapes du développement de l’enfant en pédiatrie générale
L’enfance est dominée physiologiquement par le fait de la croissance. On distingue quatre périodes de développements :
➤ la première enfance où appartiennent le nouveau-né et le nourrisson : de 0 à 2 ou 3 ans, elle a une physiologie et une pathologie propres. Le nourrisson est un être encore incomplet ; simultanément ses pouvoirs de multiplication cellulaire et de croissance sont considérables et donc ses besoins métaboliques très grands.
➤ la petite enfance ou deuxième enfance va de 2 ou 3 ans à 6 ans (apparition de la première molaire ou dent de 6 ans),
➤ la grande enfance ou troisième enfance allant de 6 ans à la puberté,
➤ l’adolescence : de la fin de la puberté à l’âge adulte (7).
les épilepsies selon les étapes du développement
Tout enfant est susceptible de présenter des crises comitiales, mais spécialement le nouveau-né du fait de son immaturité cérébrale, de la fréquence de la déshydratation, de l’hypoglycémie et de l’hypocalcémie. Il peut exister une fragilité familiale. L’âge est un des facteurs déterminants dans la survenue, dans l’expression clinique, électrique et dans le pronostic de la maladie épileptique de l’enfant. Aicardi propose ainsi de séparer 4 périodes :
❖ De la naissance à 3 mois : la maladie épileptique, souvent secondaire à une pathologie neurologique, est de pronostic sévère. Néanmoins, chez le nouveau-né, le cerveau immature est moins sensible aux conséquences de l’état de mal épileptique.
❖ De 3 mois à 3- 4 ans, les crises convulsives occasionnelles (convulsions fébriles, …) sont fréquentes. Les crises d’épilepsies répétées sont souvent dues à une pathologie neurologique organique sous-jacente. Certaines épilepsies sont particulières à cette tranche d’âge : syndrome de West, épilepsies myocloniques, syndrome de Lennox-Gastaud.
❖ De 3-4 ans à 9-10 ans, cette période est dominée par les épilepsies cryptogéniques. Des facteurs génétiques sont souvent retrouvés. Par contre, les malformations cérébrales et les maladies neurologiques évolutives sont rares. C’est à cette période que l’on rencontre des syndromes épileptiques bien définis comme l’épilepsie-absence, l’épilepsie rolandique bénigne….
❖ De 9-10 ans jusqu’à 19-20 ans, cette période est marquée par la fréquence des épilepsies généralisées primaires. Les épilepsies partielles témoignent fréquemment d’une lésion cérébrale. C’est aussi pendant cette période que disparaissent les épilepsies transitoires de l’enfance comme l’épilepsieabsence, certaines épilepsies partielles bénignes .
Sur le plan diagnostique, l’état de mal épileptique pose souvent un problème en pédiatrie car :
➡︎ chez l’enfant, le niveau de conscience est d’autant plus difficile à apprécier qu’il est plus jeune ;
➡︎ chez le nouveau-né et le nourrisson, les crises sont pauci-symptomatiques et difficiles à reconnaître .
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES SUR L’ÉPILEPSIE ET L’ÉTAT DE MAL ÉPILEPTIQUE
1.1 Historique
1.1.1. L’épilepsie
1.1.2. L’état de mal épileptique
1.2.Enfant et épilepsie
1.2.1. Les grandes étapes du développement de l’enfant en pédiatrie générale
1.2.2. Les épilepsies selon les étapes du développement
1.3.Classifications
1.3.1. des épilepsies
1.3.2. des états de mal épileptiques
1.4. Conduite à tenir et traitement
1.4.1. Objectifs de la prise en charge
1.4.2. Les moyens thérapeutiques (en urgence)
1.4.3. Quelques indications thérapeutiques selon les variétés d’état de mal épileptique
1.4.4. Protocole d’utilisation des principaux anticonvulsivants d’urgence dans l’état de mal épileptique
DEUXIÈME PARTIE : NOTRE ÉTUDE PROPREMENT DITE
2.1.Méthodologie
2.1.1. Population source
2.1.2. Mode de recrutement et critères d’inclusion
2.1.3. Critères d’exclusion
2.1.4. Résultats
2.2.Nos Observations
2.3. Discussion
2.3.1. Sur le plan séméiologique
2.3.2. Du point de vue thérapeutique
TROISIEME PARTIE : PROPOSITIONS ET SUGGESTIONS
3.1. La définition de l’état de mal épileptique chez l’enfant
3.2. La symptomatologie de l’état de mal épileptique
3.2.1. Etats de mal épileptiques GENERALISES
3.2.2. Etats de mal épileptiques PARTIELS
3.2.3. Les Etats de mal épileptiques UNILATÉRAUX
3.2.4. Etats de mal épileptiques ERRATIQUES
3.3. Le traitement de l’état de mal épileptique chez l’enfant
3.3.1. Une règle d’or
3.3.2. Objectifs de la prise en charge
3.3.3. Conduite de la prise en charge
3.3.4. Les moyens thérapeutiques (en urgence)
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE