Considérations générales sur la précipitation

La coprécipitation d’oxydes mixtes sous forme de solution solide est un domaine nettement moins exploré que la précipitation d’oxydes simples. Même la simple prédiction de la composition chimique du coprécipité à partir de la connaissance des espèces en solution ne fait guère l’objet d’attention dans la littérature. Cela peut s’expliquer par les stratégies de « contournement » habituellement employées pour produire des particules d’oxydes mixtes, en faisant en sorte que les deux précurseurs métalliques aient des réactivités proches, ce qui est rarement le cas à partir de sels dissous dans l’eau, les cations métalliques à coprécipiter ayant souvent des solubilités sensiblement différentes. Pour cette raison les solutions aqueuses sont délaissées au profit de systèmes non aqueux, ou alors en restant en système aqueux une forte sursaturation créée brutalement (sous forme d’ajout rapide de base dans une solution de sels dissous par exemple) génère un coprécipité amorphe ou nanocristallin qu’il s’agit alors de faire cristalliser ou mûrir dans une seconde étape. L’approche non aqueuse, très prisée dans le monde académique, rencontre un écho modéré chez les industriels tandis que la seconde demande de développer des procédés appropriés contrôlant parfaitement le mélange, comme l’a montré au laboratoire la thèse récente de Nicolas di Patrizio sur la coprécipitation d’oxydes de cérium et de zirconium [1].

Considérations générales sur la précipitation

Mécanismes moléculaires de la précipitation en milieu aqueux

L’eau et les cations en solution

L’eau est un solvant très utilisé aussi bien au laboratoire que dans l’industrie. Cette large utilisation s’explique non seulement par son abondance naturelle mais aussi par ses propriétés liées à sa structure. En effet, la présence de nombreuses liaisons hydrogènes entre les molécules induisent une température de fusion et d’ébullition élevées ainsi qu’une diffusion des espèces H+ et OH- plus rapide par rapport aux autres ions. En outre, la présence de doublets non liants sur l’atome d’oxygène lui donne des propriétés d’acide de Lewis et de base de Brönsted, et elle possède un moment dipolaire élevé (1,86 Debye). Ces particularités de la molécule d’eau lui confèrent ainsi un pouvoir ionisant et dissociant permettant l’équilibre d’autoprotolyse de l’eau :

2 H2O ↔ H3O⁺ + OH- Ke = [H3O⁺]*[OH-] = 10⁻¹⁴ à 25°C.

La possibilité de cet équilibre donne un caractère amphotère à l’eau et lui permet de jouer un rôle de solvant protique ayant un comportement acide ou basique selon que l’échange de proton se fasse avec un donneur ou un accepteur de protons.

Par ailleurs, la forte polarité de l’eau liquide permet la formation d’une paire d’ions lorsqu’une molécule polaire se trouve en milieu aqueux, et la forte constante diélectrique de l’eau va permettre la séparation de cette paire d’ions. La mise en solution d’un ion aboutit à sa solvatation qui est influencée par le pouvoir polarisant de cet ion à savoir son rapport z/r2 , z étant la charge de l’ion, et r son rayon. Plus ce rapport est élevé, plus il y aura de molécules d’eau impliquées dans sa sphère d’hydratation. Celle-ci se divise en plusieurs couches dont la première, dite première sphère d’hydratation, est constituée des molécules d’eau qui sont au contact du cation.

Lors de l’hydratation d’un cation métallique, il se crée une liaison M-O d’autant plus forte que le cation est polarisant. Un tel transfert conduit à l’affaiblissement de la liaison O-H ce qui entraîne un comportement acide des molécules d’eau coordonnées au cation métallique. Le cation peut être coordiné à trois types de ligands : aquo (H2O), hydroxo (OH-) et oxo (O2-).

Mécanisme moléculaire de la précipitation

La condensation de cations en solution se fait suivant un mécanisme en trois étapes principales :

• L’initiation :
Cette étape consiste à hydroxyler le cation métallique suivant la réaction suivante :

[M-OH2]+ + OH- ↔ M-OH + H2O

Le complexe hydroxylé constitue donc le précurseur des produits de condensation.

• La propagation :
Cette étape de la condensation consiste à former des ponts oxygénés entre les cations hydroxylés par des réactions dites d’olation et d’oxolation. Le cation étant sous forme [M(OH)n(H2O)6-n] (4-n)+, la formation de ces ponts oxygénés va s’effectuer par des réactions de substitution nucléophiles où les ligands OH- vont jouer un rôle de nucléophile du fait de leur charge partielle négative, et les ligands H2O celui de groupes partants. Cette réaction aboutit à la formation d’un pont « ol » et est appelé olation :

M-OH + M-OH2 ↔ M-OH-M + H2O

Lorsqu’il n’y a pas ou plus de ligand aquo dans la sphère de coordination du cation, la propagation se poursuit par élimination des ponts ol par la réaction d’oxolation suivante :

M-OH + M-OH ↔ M-O-M + H2O

• La terminaison :
Elle peut avoir lieu par la formation d’oligomères ou se produire à la précipitation d’une phase solide. En effet, dans le second cas, la condensation de complexes électriquement neutres peut se poursuivre jusqu’à précipitation de l’oxyde puisque la libération de molécules d’eau n’induit aucune modification de réactivité des groupes fonctionnels.

Les étapes de formation d’un solide

La première étape de la formation d’un solide est la génération du précurseur de charge nulle . Celle-ci s’effectue par réaction d’hydroxylation rapide, tandis que la vitesse de formation du précurseur est variable. La deuxième étape est l’étape de nucléation : pendant cette étape, la formation des nuclei s’effectue par condensation des précurseurs de charge nulle. La vitesse de cette étape dépend de la concentration en précurseur : à partir d’une concentration Cmin, la vitesse de nucléation augmente brutalement tant qu’une concentration maximale en précurseur n’est pas atteinte. Comme cette étape consomme des précurseurs, leur concentration chute jusqu’à atteindre de nouveau Cmin, c’est à ce moment que l’étape de nucléation prend fin.

Plusieurs types de nucléations sont distingués :
• La nucléation primaire : elle se produit quand la solution ne contient pas de solide de même nature. Celle-ci peut être homogène si elle s’effectue spontanément au sein de la solution, ou hétérogène si elle est catalysée par la paroi ou un corps étranger.
• La nucléation secondaire : elle se produit lorsque la solution contient déjà des cristaux de la phase solide qui doit précipiter. Elle est dite « vraie » si elle se produit à la surface des particules, et dite « apparente » si elle se produit par cassure et détachement de fractions du solide.

La troisième étape est celle de croissance des germes (zone III), elle se fait par un apport de matière jusqu’à l’obtention de particules primaires suivant un processus analogue à la condensation, à savoir par réaction d’olation/oxolation. Au voisinage de Cmin, la vitesse de nucléation devient très faible voire nulle et les précurseurs vont alors se condenser sur les germes existants. Cette croissance a lieu jusqu’à ce que la concentration en précurseur atteigne la saturation de la solution, c’est-à dire la solubilité du solide. L’étape de nucléation et celle de croissance peuvent être concomitantes ou bien se chevaucher, ce qui a des conséquences sur le nombre et la taille des particules primaires puisque ceux-ci sont liés aux vitesses relatives de ces deux étapes. Lorsque la nucléation et la croissance sont bien séparées, il n’y a ainsi qu’une seule étape de formation des germes et leur croissance est régulière. Il n’y a donc qu’une population de particules de taille homogène qui est obtenue. Pour avoir une telle séparation de ces deux étapes, l’étape de nucléation doit être très brève et sa vitesse très supérieure à celle de la génération du précurseur de charge nulle.

En revanche, si la concentration en précurseurs reste supérieure à la concentration critique Cmin d’apparition des nuclei, alors les étapes de nucléation et de croissance se chevauchent et une large distribution en taille de particules est obtenue.

Enfin, la dernière étape est celle du mûrissement d’Ostwald qui induit une augmentation de la taille moyenne des particules par dissolution des plus petites qui nourrit la croissance des plus grosses particules, particules qui peuvent ensuite s’agréger. Durant le vieillissement, il peut y avoir un changement de morphologie et de structure cristalline des particules, ou encore une cristallisation de particules amorphes. C’est cette étape qui va finalement déterminer les caractéristiques des particules obtenues au terme de la précipitation.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 Introduction bibliographique
1.1 Considérations générales sur la précipitation
1.1.1 Mécanismes moléculaires de la précipitation en milieu aqueux
1.1.2 Force motrice de la précipitation
1.1.3 Cas de la coprécipitation
1.2 La (co)précipitation par thermohydrolyse
1.3 Synthèses des oxydes de titane et d’étain
1.3.1 Propriétés structurales des oxydes TiO2 et SnO2
1.3.2 Etat de l’art sur la synthèse de particules de TiO2 par thermohydrolyse acide
1.3.3 Etat de l’art sur la synthèse des particules de SnO2 par thermohydrolyse
1.3.4 Cas des particules mixtes SnxTi1-xO2
1.4 Conclusion
Chapitre 2 Etude de la spéciation des ions Ti(IV) et Sn(IV) en milieu aqueux
2.1 Données concernant la spéciation du titane
2.1.1 Solubilité de TiO2 et étude du système Ti(IV)-H2O
2.1.2 Complexation du titane
2.2 Données concernant la spéciation de l’étain
2.2.1 Solubilité de SnO2 et étude du système Sn(IV)-H2O
2.2.2 Complexation de l’étain
2.3 Conclusion
Chapitre 3 Etude thermodynamique de la précipitation des oxydes purs TiO2, SnO2 et mixtes SnxTi1-xO2
3.1 Précipitation de particules de TiO2
3.1.1 Etude expérimentale
3.1.2 Modélisation de la précipitation du TiO2
3.2 Précipitation de particules de SnO2
3.2.1 Etude expérimentale
3.2.2 Modélisation de la précipitation de SnO2
3.3 Précipitation de particules d’oxydes mixtes SnxTi1-xO2
3.3.1 Etude expérimentale
3.3.2 Modélisation thermodynamique de la coprécipitation
3.4 Conclusion et perspectives
Chapitre 4 Synthèse d’oxydes mixtes à faibles teneurs en étain : application à la photocatalyse
4.1 Synthèse et caractérisation des particules
4.1.1 Mode opératoire
4.1.2 Résultats des synthèses
4.2 Introduction bibliographique à la photocatalyse
4.2.1 Principe de la photocatalyse
4.2.2 Optimisation de l’activité photocatalytique d’un matériau
4.2.3 Méthodes de synthèses existantes des interfaces anatase/rutile
4.3 Activité photocatalytique des composites
4.3.1 Tests en phase liquide
4.3.2 Tests en phase gazeuse
4.4 Conclusions et perspectives
Conclusion générale
Annexe A. Dosage du titane par spectroscopie UV-Visible
Principe
Préparation des solutions
Caractérisation du précurseur commercial TiOSO4•yH2O
Annexe B. Dosage de l’étain par spectroscopie d’absorption atomique
Principe
Fonctionnement de l’appareil
Protocole de mesure
Bibliographie

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