conservation de l’aigle pecheur de madagascar haliaeetus vociferoides desmurs, 1845

Madagascar est réputée au monde comme une des zones rouges ou «Hotspots» de la conservation. C’est l’un des pays de «mégadiversité» grâce au grand nombre de familles et genres endémiques et à cause de la rapidité de la destruction des habitats naturels (Mittermeier et al., 2004 ; Primack et Ratsirarson, 2005). La grande île compte 1 845 422 ha d’Aires Protégées (ANGAP, 2001) et dispose d’une superficie estimative de 500 000 ha de zones humides (Davies & Burgis, 1987). Ces dernières ont subi une menace très poussée due aux pressions anthropiques : transformation en riziculture et surpêche. Pour palier cette destruction, le Gouvernement malgache a ratifié des conventions internationales visant à préserver et protéger l’environnement naturel et à fournir un moyen d’utilisation durable des ressources. L’implication des populations humaines vivant aux dépens de ces aires protégées devient incontournable et préoccupe même le pouvoir étatique autant que l’adhésion à diverses conventions internationales (Andrianarimisa, 1998).

La convention de «Ramsar» a été élaborée en 1971 pour arrêter la dégradation continue des écosystèmes aquatiques, particulièrement ceux qui abritent les oiseaux d’eau et pour reconnaître leurs valeurs écologiques, scientifiques, économiques, culturelles et récréatives (Hails, 1996). Cette convention a été mise en vigueur à Madagascar depuis le 25 Janvier 1999. Elle a aidé le Gouvernement malgache dans la gestion de zones humides et au développement durable de la nation. Madagascar dispose de sept sites Ramsar à l’heure actuelle. Il s’agit du lac Tsimanampetsotsa, au sud, le complexe Manambolomaty et le lac Bedo, à l’ouest, le lac Alaotra, le marais de Torotorofotsy, la rivière Nosivolo à Marolambo, à l’est, et le lac privé de Tsarasaotra à Antananarivo. L’acceptation du complexe lacustre de Manambolomaty d’être parmi les «Site Ramsar» a lieu le 25 septembre 1998 (Peck, 1998).

DESCRIPTION DES SITES D’ETUDES ET DE L’ESPECE ETUDIEE 

Le complexe des trois lacs : Ankerika, Soamalipo et Befotaka du district d’Antsalova, région Melaky et l’aigle pêcheur de Madagascar font l’objet de la présente étude. Le projet The Peregrine Fund a choisi ce site comme centre d’expérimentation pour initier un projet de conservation des zones humides et de l’espèce en question depuis 1992.

Choix des sites d’études

Le choix des sites repose sur deux critères fondamentaux : la forte concentration de la population d’aigle pêcheur de Madagascar et le type d’habitat qui reste toujours à l’état naturel. Les habitats potentiels au sein du district d’Antsalova ont été suivis annuellement. Par contre, les sites éparpillés de la façade ouest de la grande île allant du district de Manja jusqu’à Nosy Hara d’Antsiranana, délimités au centre par les districts de Miandrivazo et Marovoay, ont fait l’objet d’un projet de recensement tous les cinq ans. Les habitats cibles sont constitués principalement par des lacs, des mangroves, des embouchures, des estuaires et des fleuves. A signaler que, Madagascar dispose plus de 3 000 km de fleuves et rivières. Le réseau hydrographique est naturellement divisé en cinq ensembles d’importance très inégale (ORSTOM, DMH et CNRE, 1993). La circonscription d’Antsalova possède une richesse importante du point de vue biodiversité, particulièrement en avifaune aquatique. Six espèces sont potentiellement menacées dans cette zone, à savoir : l’aigle pêcheur de Madagascar, le héron de Madagascar Ardea humbloti (Birdlife International, 2010), la sarcelle de Bernier Anas bernieri (Young, 1995), l’ibis sacré Threskiornis bernieri, le gravelot de Madagascar Charadrius thoracicus et le héron à crabier blanc Ardeola idae. La menace pourrait être due à la modification, voire même, la destruction de l’habitat naturel, causée par la pression anthropique excessive telle que la pêche, la chasse (Watson & Lewis, 1994).

District d’Antsalova

Situation géographique

Le district d’Antsalova se localise dans la région Melaky et se trouve entre les coordonnées géographiques 18°40’S et 44°37’E. Le pl ateau de Bemaraha, le canal de Mozambique, la rivière Manambolo et la commune de Soahany constituent respectivement les limites est, ouest, sud et nord. Sa superficie totale est administrativement de 697 119,01 ha. Cette zone est l’un des endroits de Madagascar ayant obtenu différentes qualifications aussi bien nationales qu’internationales. Le Site d’Intérêt Biologique et Ecologique (SIBE) national pour le complexe lacustre/forêt de Manambolomaty en 1988, le patrimoine mondial pour le Tsingy en 1990, le statut Ramsar pour le complexe Manambolomaty en 1999, en sont des exemples concrets (Andrianarimisa, 1998). Le district possède aussi un Parc National (PN), une Réserve de chasse (lacs Bemamba et Masama) dont on ignore le statut de protection et la Forêt classée de Tsimembo (Programme Bemaraha, 1997). La présence des mangroves et des espaces savanicoles lui sert aussi d’atouts majeurs. La diversité floristique et faunistique qu’on y découvre, constitue un patrimoine biologique et écologique exceptionnel au monde. Nicoll et Langrand (1989) ont classé les écosystèmes lacustres et forestiers, par leurs importances en biodiversité, d’être parmi les sites nécessitant une protection et un aménagement immédiats.

Le complexe des trois lacs (Ankerika, Befotaka et Soamalipo) avec le lac Antsamaka et une bande de forêt adjacente constituent le site Ramsar Manambolomaty dont l’altitude varie de 7 à 280 m. Les lacs Ankerika, Befotaka et Soamalipo se situent dans les Communes Rurales de Masoarivo et de Trangahy, district d’Antsalova (figure 1). Ils s’étendent sur une superficie avoisinante de 1 181 ha. De toute évidence, les lacs Befotaka et Soamalipo sont liés par un chenal d’une vingtaine de mètres et l’ensemble forme un grand lac dénommé «Andranobe» tandis qu’Ankerika est un lac indépendant. Ce complexe avec quelques lacs satellites et une partie de la forêt de Tsimembo, est actuellement sous le contrôle de deux associations locales (FIZAMI et FIFAMA).

Caractères physico-chimiques des lacs 

Le site Ramsar Manambolomaty se trouve sur la partie sud du lambeau forestier de Tsimembo et a comme position géographique 18°59’ – 19°03’ Sud et 44°24’ – 44°29’ Est. La superficie totale du site (forêt et lacs) est de 9 471 ha.

Profondeur
Les lacs Ankerika, Befotaka et Soamalipo sont constitués par d’eau douce permanente de profondeur variable suivant les saisons : sèche et pluvieuse (Rasamoelina, 2000).
– Soamalipo : son étendue reste autour de 486 ha avec une profondeur variant de 0,80 à 3,60 m. Ce lac culmine sur une altitude de 7 m ;
– Befotaka : s’étale sur une superficie de 386 ha et se trouve sur une altitude de 7 m aussi. Sa profondeur varie entre 0,70 et 3,30 m ou même davantage ;
– Ankerika : ce lac est plus petit par rapport aux deux autres. Il n’a que 309 ha seulement. En revanche, il présente un léger avantage en termes de profondeur et d’altitude. Sa profondeur va jusqu’à 4,40 m pendant la saison pluvieuse et son élévation reste autour de 8 m. Le fond des lacs est constitué par des vases comme type de substrat. Au début de la saison de pluie, ces lacs sont alimentés par la rivière Manambolo.

Température de l’eau
En moyenne, la température de l’eau des trois lacs reste suffisamment stable au cours de l’année, autour de 26°C mais remonte jusqu’à 34° C entre les mois de novembre et décembre. L’écart thermique entre la surface et le fond de l’eau varie de 0,5 à 1°C et on ne constate pas une variation significative entre les trois lacs (Rasamoelina, 2000).

Turbidité, pH, composition chimique 

Pour le cas d’Andranobe, la turbidité varie de 0,50 à 1 m, respectivement en saison pluvieuse et sèche. L’eau y paraît légèrement limpide que celle d’Ankerika dont la valeur de la turbidité varie de 0,45 à 0,90 m. En général, l’eau s’avère plus trouble durant la saison sèche qu’en saison de pluie. Le lac Befotaka présente une couleur plus sombre que celle de Soamalipo et d’Ankerika.

Quant au pH, la valeur se trouve plus élevée en saison sèche, autour de 8 et plus acide en temps pluvieux : 6,8. Ces valeurs plus basiques demeurent conformes aux eaux douces de l’Ouest malgache où se localisent les trois lacs, qui ne descendent pas la valeur 7 (Keiner, 1963). Les nitrites et ammoniums, pouvant indiquer le niveau de pollution, restent encore très faibles, largement au-dessous des taux alarmants. Les eaux des trois lacs ne sont pas encore polluées. A part ces éléments, le taux d’oxygène dissous se trouve non moins de 5 mg/l (Rasamoelina, 2000). Tous ces caractères physico-chimiques et le pH exigé par la vie piscicole, entre 5 et 9, font que les trois lacs abritent une faune ichtyologique abondante.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
I- DESCRIPTION DES SITES D’ETUDES ET DE L’ESPECE ETUDIEE
1- Choix des sites d’études
1-1- District d’Antsalova
1-1-1- Situation géographique
1-1-2- Caractères physico-chimiques des lacs
a- Profondeur
b- Température de l’eau
c- Turbidité, pH, composition chimique
1-1-3- Climat
1-1-4- Hydrologie
1-1-5- Caractéristiques du sol
1-1-6- Diversité biologique du site
a- Végétation
b- Faune
1-2- Zones hors du district d’Antsalova
1-2-1- Zones humides continentales
a- District de Maintirano
b- District de Besalampy
c- District de Marovoay
d- District de Belo-sur-Tsiribihina
e- District de Miandrivazo
1-2-2- Zones littorales
a- Zone humide de la baie de Sahamalaza
b- Zone humide de la baie de Loza
c- Zone humide de la baie de Mahajamba
d- Zone humide du delta de Mahavavy
e- Zone humide de la baie de Baly
1-2-3- Iles et îlots
Conservation de l’aigle pêcheur de Madagascar : étude bio-écologique et impacts de l’application de la GELOSE
a- Nosy-be et îles satellites
b- Archipel de Mitsio
2- Espèce étudiée
2-1- Position systématique
2-2- Description morphologique
II- MATERIELS ET METHODES
1- Technique de recensement
1-1- Observation directe
1-2- Méthode de perturbation
1-3- Enquête
2- Estimation de la densité
3- Modes de capture et de marquage
3-1- Capture
3-2- Marquage
4- Etude biologique de l’espèce
4-1- Suivi systématique des nids existants
4-2- Suivi du changement de place de nids
4-3- Succès de la reproduction
4-4- Mortalité des juvéniles
5- Estimation de la longévité
6- Etude écologique
6-1- Caractéristiques de l’arbre de nidification
6-2- Caractères physico-chimiques des lacs
6-3- Evaluation des menaces
6-4- Observation du régime alimentaire
7- Analyses statistiques
7-1- Test de Mann-Whitney
7-2- Test de Chi-deux (χ2)
7-3- Modèle de simulation de la tendance de la population
7-4- Modèle de niche écologique à l’aide de MaxEnt
7-5- Analyse en Composantes Principales (ACP) sous SPSS 17
III- RESULTATS ET INTERPRETATIONS
1- Effectif de la population
1-1- Zones littorales
1-2- Ecosystème lacustre
1-3- Ecosystème fluvial
2- Densité
Conservation de l’aigle pêcheur de Madagascar : étude bio-écologique et impacts de l’application de la GELOSE
3- Efficacité des techniques de capture
3-1- Capture
3-2- Marquage
3-3- Taille et poids des individus
4- Biologie de la reproduction et de développement
4-1- Paramètres concernant les nids
4-1-1- Zones littorales
4-1-2- Complexe des trois lacs (Ankerika, Soamalipo et Befotaka)
4-1-3- Lacs satellites environnants
4-2- Ponte
4-3- Incubation
4-4- Eclosion
4-5- Envol des poussins
4-6- Changement de place de nids
4-7- Succès de la reproduction
4-7-1- Complexe des trois lacs (Ankerika, Soamalipo et Befotaka)
4-7-2- Lacs satellites environnants
4-8- Mortalité des juvéniles
5- Longévité
6- Ecologie
6-1- Paramètres de l’arbre de nidification
6-2- Paramètres physico-chimiques des lacs
6-2-1- Profondeur
6-2-2- Température de l’eau
6-2-3- Turbidité et pH
6-3- Menaces et pressions
6-4- Régime alimentaire
7- Analyses statistiques
7-1- Modèle de simulation de la tendance de la population
7-2- Modélisation de niche écologique
7-3- Analyse en Composantes Principales
VI- DISCUSSIONS
1- Taille de la population
2- Identification des individus
3- Mensuration et pesage des individus
4-Biologie de la reproduction et de développement
4-1- Localisation des nids
4-2- Succès de la reproduction
Conservation de l’aigle pêcheur de Madagascar : étude bio-écologique et impacts de l’application de la GELOSE
4-3- Echec des juvéniles
5- Durée de vie de l’espèce
6- Habitat
7- Base du régime alimentaire
V- CONCLUSION

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