Les activités économiques d’une entreprise peuvent avoir des impacts considérables sur l’environnement. C’est pourquoi leur évaluation ou étude d’impact est devenue obligatoire avant toute réalisation d’un projet. Cette étude d’impact permet d’examiner les conséquences tant bénéfiques que néfastes, qu’un projet aura sur l’environnement, et de s’assurer que ces conséquences sont dûment prises en compte dans la conception de ce projet ou programme. Et c’est ainsi que dans le cadre de la construction d’une usine de traitement d’eau potable à Keur Momar Sarr, parmi les mesures prises pour minimiser les impacts sur l’environnement ; notamment concernant l’occupation de l’espace, le bruit, les effets sur la santé et la sécurité, la commodité du voisinage ; celles traitant du rejet des boues nous a le plus intéressé. Car il a été retenu un système de lagunage pour la décantation des eaux de process contenant principalement des MES (matières en suspension) et de l’alumine, avec rejet du surnageant dans le lac, et évacuation des boues de fonds séchées pour retraitement ou stockage. Un constat a été fait que depuis le démarrage de l’usine, ces boues déshydratées et évacuées par pelle mécanique, sont stockées en tas. Ceci va poser dans l’avenir, vu les quantités énormes de boues produites, des problèmes environnementaux sérieux pour cette zone, que sont l’occupation de l’espace et la pollution des sols. Nous avons donc envisagé une étude pour la mise en place de filières pour ces boues déshydratées. Une approche pouvant offrir le maximum de sécurité ne peut se concevoir qu’après recueil et exploitation d’un faisceau d’arguments qui nécessitent l’intervention d’un certains nombres de laboratoires et de services spécialisés. D’où l’intérêt de ce travail dans lequel nous nous attacherons à atteindre l’objectif qui est de minimiser les impacts environnementaux liés au stockage des boues déshydratées, en envisageant des filières où elles peuvent être réutilisées du fait de leur degrés d’imperméabilité. Nous avons retenu leur utilisation dans les bassins de rétention, dans les centres d’enfouissement technique, dans les pistes de production, et pour la fabrication de briques étanches en zone rurale.
JUSTIFICATIFS DE L’ETUDE
Opportunités
Les effets de la pollution de l’environnement deviennent de plus en plus graves dans les pays en développement et entraînent des pertes énormes sur le plan économique. Les exemples ne manquent pas au Sénégal :
❖ Présence d’aluminium dans les fruits et légumes retirés de la bananeraie et du maraîchage à N’Gnith. Rappelons que l’arrosage est effectué à l’aide des eaux chargées de boues rejetées de l’usine de traitement d’eau potable.
❖ Dégradation catastrophique de la baie de Hann compromettant la pêche sur une grande zone ;
❖ Dégradation du lac de Guiers qui est la plus grande réserve d’eau douce du Sénégal
❖ Dégradation poussée des sols et risques élevés pour la santé humaine sur l’axe Rufisque Bargny du fait des rejets toxiques des industries de cette zone .
La gravité de ces problèmes environnementaux entraîne logiquement l’indispensabilité de la prise en compte du volet environnement. Donc conscient du danger, un système de lagunage a été conçu. Le lagunage en lui-même n’a pas permis de résoudre le problème des boues, car après décantation et reversement du surnageant dans le lac, le reste est soumis à la déshydratation solaire. Ce qui conduit à la production d’énormes quantités de boues déshydratées, qu’il fallait enlever et mettre en tas, pour pouvoir réutiliser les lagunes. Les boues même déshydratées, soulèvent une problématique particulière ; elles ne peuvent plus, comme par le passé, être considérées comme un déchet ultime destiné à une valorisation agricole ou à une mise immédiate en centre d’enfouissement. Le traitement de la boue est devenu un corollaire inévitable et indissociable du traitement de l’eau, il peut même parfois coûter plus cher (investissement et/ou coût de fonctionnement) que le traitement de l’eau. Ainsi si nous arrivons à trouver une solution pour ces boues desséchées, sans investissements énormes pour la SDE, et même régler des problèmes pour les paysans pasteurs des zones environnantes, nous aurons posé un acte concret dans la résolution d’éventuels conflits.
Conséquences de la situation actuelle sur l’environnement
❖ Occupation de l’espace
Avec l’implantation de l’usine, ce site qui faisait l’objet d’exploitation pour les cultures pluviales et irriguées a été abandonné. Et les anciens usagers ont été obligés de chercher d’autres secteurs propices à leurs activités. Les dépôts de boues desséchées, s’ils se poursuivent, prolongent et aggravent ces problèmes d’occupation de l’espace. Ils conduisent à une réduction progressive des secteurs d’activités productives des populations
❖ Pollution des sols
L’aluminium est présent dans les boues sous forme d’hydroxydes. Sa présence dans les sols entraîne des précipités qui bouchent les pores. En compactant ainsi tous les processus, ces précipités conduisent à une imperméabilisation des sols. Concernant les plantent et végétaux l’aluminium se dépose sur les racines et les radicelles, bouchant tout ce qui est pores, et étouffant les plantes.
❖ Effets néfastes sur le lac
De fortes concentrations d’aluminium entraînent des conséquences néfastes sur la faune aquatique. En effet l’aluminium précipite au niveau des bronchies, et étouffent les éléments de la faune aquatique, surtout les plus jeunes.
REVUE DE LA LITTERATURE
Les éléments polluants et/ou leurs produits de transformation séparés de la phase liquide par décantation ou floculation au cours de tout traitement d’eau, quelle qu’en soit la nature, se trouvent finalement rassemblés dans des suspensions plus ou moins concentrées dénommées boues. Toutes les boues nécessitent un traitement spécifique qu’elles soient recyclées, réutilisées ou remises dans le milieu naturel. Ces traitements sont généralement des concentrations/élimination de l’eau (épaississement puis déshydratation ), et des stabilisations. On aboutit après à des boues déshydratées, qui nécessitent des traitements permettant de les conduire à leur destination finale ( agricole, revégétalisation, valorisation énergétique, décharge de déchets ultimes etc) . Ces traitements sont maintenant fortement encadrés par une réglementation que nous verrons plus loin.
TRAITEMENTS DES BOUES DESHYDRATEES
LE COMPOSTAGE
Le compostage est une fermentation contrôlée consistant à transformer les matières organiques par voie aérobie et à former des composés humides et préhumides stables. L’aération ne peut être efficace que si le milieu est perméable à l’air. Les boues déshydratées ayant souvent une très faible porosité, il est indispensable de leur apporter un agent de foisonnement , généralement représenté par le support carboné ( minimum 20% de vide à atteindre dans le mélange ). Cette dégradation par des micro-organismes divers , s’accompagne d’une élévation de température pouvant dépasser 70° : il y a alors destruction des germes pathogènes et diminution de l’humidité du produit ( évaporation ). Le compostage s’applique de préférence à des boues fraîches ( riches en MO et en azote ) ; mais peut également être utilisé sur des boues digérées ou stabilisées aérobies. Le retournement des tas de compost se fait avec des machines appropriées ; cette opération permet d’aérer le tas et de le décompacter pour assurer une redistribution des espaces.
LE TRAITEMENT THERMIQUE DES BOUES DESHYDRATEES
Les boues déshydratées mécaniquement sont concentrées en matières sèches ( 16-35%). Les procédés thermiques appliqués à ces boues ont trois finalités différentes : soit un rôle strict de déshydratation thermique ( séchage partiel ou poussé ), soit un rôle d’oxydation totale ou partielle de la matière organique sans interférence avec la matière minérale ( incinération, gazéification, thermolyse, pyrolyse ), soit le rôle d’un traitement thermique poussé de la fraction minérale des boues avec une modification minéralogique ( vitrification ).
LE SECHAGE
Le séchage thermique est rendu nécessaire vu les limitations rencontrées par la déshydratation mécanique. De manière générale les sécheurs utilisés dérivent de ceux des industries chimiques, pharmaceutiques et agro-alimentaires. Trois grands types de sécheurs existent :
– sécheur indirect : transfert de chaleur au travers d’une surface d’échange métallique (conduction, convection) ;
– sécheur direct : transfert de chaleur par contact direct du fluide caloporteur et de la boue (conduction) ;
– sécheur mixte : mélange des deux systèmes, la première partie du séchage se fait dans une zone de séchage indirect, la seconde dans une zone de séchage direct.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
A) JUSTIFICATIFS DE L’ETUDE
A-1 Opportunités
A-2 Conséquences de la situation actuelle en matière de protection de l’environnement
B) REVUE DE LA LITTERATURE
1. TRAITEMENT DES BOUES DESHYDRATEES
1-1 Le compostage
1-2 Traitements thermiques des boues déshydratées
1-3 Le séchage
1-4 Les procèdes thermiques de destruction de la matière organique des boues
2. CONCLUSIONS
C) LA REGLEME NTATION
D) CADRE DE L’ETUDE
D-1 PRESENTATION DE L’USINE DE KEUR MOMAR SARR ( KMS )
D-1-1 Description des ouvrages
la prise d’eau et la station exhaure d’eau brute
la chaîne de traitement et le recyclage des eaux de lavage et le traitement des boues
la station de pompage d’eau traitée
D-1-2 L’environnement du site
contexte environnemental
impact de l’usine sur l’environnement
D-2- TRAITEMENT DES BOUES ET DES EAUX DE LAVAGE
D-2-1-Dimensionnement
D-2-2-Eau de lavage des filtres
D-2-3- Traitement des boues
D-2-4- Estimation des quantités de boues à traiter
DEUXIEME PARTIE
A) LES FILIERES
A-1 Description
A-1-1 L’utilisation dans les bassins de rétention
A- 1-2 L’utilisation dans les centres d’enfouissement techniques
A-1-3 L’utilisation dans les pistes de production
A-1-4 L’utilisation pour la fabrication de briques étanches
A-2 Enjeux et avantages des filières
A-3 Pérennité des filières
B) TRAITEMENT DES BOUES DESSECHEES
C) METHODOLOGIE
C-1 Prélèvement des boues
C-2 Etude des échantillons
D) RESULTATS
D-1 Qualité des boues
D-2 La quantification des boues
D-3 Les tests de perméabilité
D-4 Recherche d’aluminium dans aliments
D-5 Evaluation de quelques paramètres de suivi du trop plein des lagunes
E) COMMENTAIRES
CONCLUSIONS