Falciformation
La polymérisation de la désoxy-HbS induit une déformation des érythrocytes et des lésions pathologiques qui caractérisent la drépanocytose. Cette falciformation résulte également des interactions entre les globules rouges déshydratés et les cellules endothéliales.
Plusieurs facteurs influencent cette falciformation comme :
● La baisse de la tension en oxygène qui favorise la désoxygénation de l’HbS.
● L’acidose ou une baisse du pH.
● La déshydratation cellulaire.
● L’augmentation du taux de 2,3DPG.
● L’association avec d’autres hémoglobines anormales peut faciliter le processus de polymérisation : il s’agit de l’Hb korle Bu, O Arab, D Punjab.
D’autres facteurs inhibent la falciformation :
● L’hémoglobine F exerce un effet inhibiteur, et ceci dès le stade de la nucléation d’où l’absence de trouble chez les nouveau-nés drépanocytaires. Il en est de même chez les individus qui présentent une prédisposition génétique à une persistance héréditaire de l’HbF. Cet effet inhibiteur est du au fait que l’HbF agit comme un diluant inerte car ne copolymérise pas avec l’HbS [42].
● La CCMH car tout facteur qui abaisse ce paramètre diminue les risques de falciformation d’où l’intérêt paradoxal de certaines anémies ferriprives, et les anémies hypochromes dues aux thalassémies .
Conséquence de la falciformation
La falciformation entraine un blocage des vaisseaux sanguins par des microthrombi. Ceci est à l’origine d’une ischémie qui se traduit par des crises vaso-occlusives responsables de douleurs intenses ostéo-articulaires. Cette ischémie peut évoluer vers la nécrose qui peut intéresser plusieurs organes entrainant des infarctus au niveau des os, du poumon [55], du rein, etc. Les globules rouges falciformés de façon irréversibles sont piégés par la rate d’où une hyperhémolyse responsable de l’anémie.
Diagnostic
Signes cliniques
Le trait drépanocytaire est un état bénin sans symptomatologie clinique dans les conditions normales et habituelles d’oxygénation [13]. Signes cliniques de la forme homozygote : ils apparaissent dans la première année de vie et très rarement avant trois mois du fait de l’effet protecteur de l’HbF sur la falciformation. Nous avons :
● Une phase constante marquée par des signes d’anémie hémolytique chronique (pâleur, subictère et splénomégalie).
● Sur cette phase constante se greffe des périodes de crises vaso-occlusives marquées par des douleurs intenses ostéo-articulaires
● Des complications de plusieurs ordres peuvent ensuite émailler l’évolution de la maladie, il s’agit de :
‒ Complications anémiques liées soit à une anémie aigue, soit à l’hémolyse chronique
‒ Complications ischémiques : en particulier des nécroses osseuses, les accidents vasculaires cérébraux, lithiase biliaire [118] etc.
‒ Complications infectieuses .
Hémogramme
L’hémogramme se présente sous forme d’une anémie constante souvent sévère (6 à 7g/dl en période de stabilité) et qui s’illustre sous plusieurs formes :
● Une anémie hémolytique chronique normochrome, normocytaire et régénérative avec une anisopoikylocytose franche, une polychromatophilie et une érythroblastose variable.
● Des crises aplasiques par érythroblastopénie avec exacerbation de l’anémie qui devient aregénérative .
L’hémogramme montre également une hyper leucocytose (polynucléose neutrophilie) fréquente et modérée : 20 à 40 Giga/l en l’absence de contexte infectieux, avec une myélimie modérée (Méta et myélocytes neutrophiles : 2 à 5% en moyenne) .
Bilan d’hémolyse
L’hémolyse se traduit par :
➨ Une hyperbilirubinémie indirecte évocatrice d’un ictère à caractère hémolytique,
➨ Une élévation des LDH en dehors de contexte de cytolyse hépatique,
➨ Une diminution de l’haptoglobine inférieur à 0,5g/l, parfois même indosable,
➨ Une hypersidérémie avec augmentation du coefficient de saturation.
Test d’Emmel
C’est un test de falciformation provoqué qui est basé sur l’incubation d’une goutte de sang entre lame et lamelle en condition d’hypoxie en présence d’un réducteur d’oxygène (Méta bisulfite de Na à 2%). Ce qui reproduit ainsi les conditions favorables à la formation de drépanocytes.
➤ Il permet le dépistage rapide du trait drépanocytaire en l’absence de drépanocytes spontanés visibles sur les frottis.
➤ Il n’est pas indispensable dans le bilan de diagnostic des formes homozygotes car on note la présence de drépanocytes spontanés.
Electrophorèse de l’hémoglobine
L’hémoglobine est une molécule complexe composée de 4 chaines polypeptidiques, identiques deux à deux, chaque chaine étant liée à l’hème, noyau tétra pyrrolique (porphyrine) lié à un atome de fer. L’hème est commun à toutes les hémoglobines. La partie protéique responsable du type d’hémoglobine est appelée globine. On connait principalement les chaines polypeptidiques α, β, δ et γ. Chez l’homme, on peut trouver les hémoglobines normales suivantes :
➤ Hémoglobine A = α2 β2
➤ Hémoglobine A2= α2 δ2
➤ Hémoglobine fœtal = α2 γ2 .
La chaine α est commune à ces trois hémoglobines. La structure spatiale de l’hémoglobine (comme celle de toutes les protéines) dépend de la nature et de la séquence des acides aminés constituant les chaines. Les liaisons qui se forment entre les différents acides aminés sont responsables de la forme de la molécule, de sa stabilité et de ses propriétés.
Placées dans un champ électrique, les hémoglobines se déplacent en fonction de leur charge, de la taille de la molécule, de la force ionique, du pH tampon et de la nature du support. Les variant de l’hémoglobine sont dus à des mutations de certains acides aminés entrainant des charges de surfaces différentes et donc des mobilités différentes en électrophorèse.
Traitement
But du traitement
Ce traitement doit permettre de :
● Prévenir les différentes complications de la maladie.
● Obtenir une sédation rapide de la douleur lors des épisodes de crises.
Il s’agit d’un traitement symptomatique.
Moyens du traitement
Les moyens utilisés dans le traitement de la drépanocytose sont :
● La réhydratation par voie orale ou veineuse qui est indispensable dans le maintien de l’équilibre hydrominéral.
● L’utilisation d’antalgiques et d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) lors des crises douloureuses [95].
● L’utilisation d’antifalcémiants qui sont des médicaments qui améliorent les propriétés rhéologiques des globules rouges.
● L’utilisation de vasodilatateurs pour faciliter la circulation sanguine et prévenir les ischémies
● L’utilisation d’antiagrégants plaquettaires pour éviter la formation de microthrombi.
Les syndromes drépanocytaires majeurs sont associés à trois grandes catégories de manifestations cliniques que sont l’anémie hémolytique chronique, les crises vaso occlusives douloureuses et les infections, avec une grande variabilité d’expression selon les individus. La prise en charge de la drépanocytose nécessite souvent le recours à la transfusion sanguine pour corriger une anémie ou prévenir certaines complications .
Transfusion sanguine dans les formes sévères de la drépanocytose
Produits transfusionnels
L’utilisation de sang total est devenue rare. Le produit de base est le concentré de globule rouge déleucocyté, préparé à partir d’une unité de sang total prélevé sur un anticoagulant après soustraction du plasma et l’addition d’une solution de conservation [64]. Il existe des unités pour adultes et enfants de volume variable. Le contenu minimal en hémoglobine d’une unité adulte déleucocyté doit être supérieur ou égal à 40g.
Indications de la transfusion
La transfusion associe deux objectifs complémentaires. D’une part, la correction de l’anémie par une hémoglobine fonctionnelle va permettre l’oxygénation des tissus et la régression de l’asthénie, d’autre part, la diminution du pourcentage de l’hémoglobine anormale diminue le risque de crises vasoocclusives et de l’hyper adhésivité. La symptomatologie clinique est extrêmement variable d’un individu à l’autre et si pour certains, la transfusion reste ponctuelle pour d’autres elle s’inscrit dans un programme thérapeutique au long cours. Les transfusions vont se réaliser dans un contexte aigu (crises douloureuses, accidents vasculaires, séquestration splénique. . .) ou chronique (ulcères de jambes) mais surtout dans un contexte de prévention : dépistage du risque d’accident vasculaire cérébral (AVC) chez l’enfant par la mesure des vitesses circulatoires cérébrales, prévention des récidives d’AVC chez l’adulte, suivi d’une grossesse, préparation à une intervention chirurgicale, à un examen, à un voyage .
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Table des matières
Introduction
PREMIERE PARTIE
I. Drépanocytose
I.1. Définition
I.2. Physiopathologie
I.2.1. Gélification
I.2.2. Falciformation
I.2.3. Conséquence de la falciformation
I.3. Diagnostic
I.3.1. Signes cliniques
I.3.2. Hémogramme
I.3.3. Bilan d’hémolyse
I.3.4. Test d’Emmel
I.3.5. Electrophorèse de l’hémoglobine
I.4. Traitement
I.4.1. But du traitement
I.4.2. Moyens du traitement
II. Transfusion sanguine dans les formes sévères de la drépanocytose
II.1. Produits transfusionnels
II.2. Indications de la transfusion
II.2.1. Traitement de l’anémie aigue
II.2.2. Traitement des accidents vaso-occlusifs graves
II.3. Modalités de la transfusion
III. Sécurité transfusionnelle infectieuse
IV. Risque résiduel
V. Virus majeurs en transfusion sanguine
V.1. VIH
V.2. Virus de l’hépatite B
V.3. Virus de l’hépatite C
VI. Techniques de dépistage des infections virales de la transfusion sanguine
VI.1. Dépistage de l’infection par le VIH
VI.2. Dépistage du VHB
VI.2.1. Recherche de l’Ag HBs
VI.2.2. Recherche de l’Ac HBc
VI.2.3. Recherche des autres marqueurs viraux
VI.2.3.1. Marqueur HBe
VI.2.3.2. ADN du VHB
VI.3. Dépistage de l’infection par le VHC
DEUXIEME PARTIE
I. OBJECTIFS
I.1. Objectif général
I.2. Objectifs spécifiques
II. PATIENTS ET METHODES
II.1.Cadre d’étude
II.2. Type d’étude
II.3. Patients
II.4. Variables étudiées
II.5.Techniques
II.5.1. Prélèvement
II.5.2. Tests de laboratoire
II.6. Analyse statistique
RESULTATS
III. Résultats
III.1. caractéristiques de la population étudiée
III.1.1. Aspects socio-démographiques
III.1.2. Morbidité
III.2. Données transfusionnelles
III.2.1. Indications de la transfusion
III.2.2. Répartition des sujets en fonction du nombre d’unités de sang transfusés
III.2.3. Type de produits sanguins
III.3.Séroprévalence des marqueurs infectieux
III.3.1.Comparaison des marqueurs du VIH, du VHC et du VHB
III.3.2. Séroprévalence (VIH, VHB et VHC) selon les caractéristiques sociodémographiques et cliniques
III.3.3. Séroprévalence des sujets transfusés selon le sexe
III.4. Facteurs de risque infectieux
DISCUSSION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE