Connaissances des médecins et des étudiants en médecine
Parodontite
La parodontite peut être définie comme étant une maladie inflammatoire chronique causée par la présence de microorganismes spécifiques et causant une destruction progressive du ligament parodontal et de l’os alvéolaire.(4) La caractéristique principale qui permet de distinguer la parodontite de la gingivite est la présence de perte d’attache clinique.(5) La parodontite peut éventuellement mener à la perte dentaire.(6) La Figure 1 montre l’apparence clinique d’une patiente ayant une parodontite chronique. Le saignement au sondage est une mesure clinique pouvant être associée à la progression de la parodontite.(8) Une étude longitudinale de 26 ans a révélé que les dents présentant un saignement au sondage à chaque examen annuel avaient 46 fois plus de risques d’être perdues comparativement aux dents ne montrant pas de signes d’inflammation gingivale.(9) La perte d’os alvéolaire est également une des caractéristiques de la parodontite. La résorption osseuse progresse généralement lentement et en direction horizontale. (10) De plus, la perte progressive des tissus de support des dents lors d’une parodontite peut souvent résulter en une mobilité dentaire augmentée.(7) L’halitose intra-orale est fréquemment retrouvée chez les patients présentant une gingivite ou une parodontite. Elle est le résultat de la dégradation de substrats organiques par les bactéries anaérobiques de la flore de la cavité buccale ce qui entraîne une émanation de mauvaises odeurs.(6)
Il est difficile d’obtenir des données précises sur la prévalence de la parodontite. En effet, la prévalence de la parodontite varie selon les critères cliniques utilisés pour définir la maladie dans les études épidémiologiques. De plus, elle varie selon le groupe d’âge ciblé. Selon la dernière mise à jour des données du National Health and Nutrition Examination Survey (NHANES) de 2009 à 2012, 46 % des adultes américains avaient une parodontite et 8,9 % d’entre eux avaient une parodontite sévère.(11) De façon générale, la parodontite est une maladie commune. Les parodontites légères à modérées touchent de 30 à 50 % des adultes américains alors que les parodontites sévères généralisées affectent de 5 à 15 % des américains âgés de plus de 30 ans.(11, 12) L’absence de consensus sur la façon de définir et de mesurer la parodontite rend difficile l’analyse des données de recherches cliniques sur la parodontite. Bien que la pathogénèse de la parodontite ait longtemps été expliquée par la présence d’une infection bactérienne causée par l’accumulation de plaque dentaire, il est maintenant admis que la maladie résulte d’une interaction complexe entre le biofilm bactérien sous-gingival et le système immunitaire de l’hôte. Cette interaction conduit au déclenchement et à la progression d’une réponse inflammatoire chez l’hôte susceptible, menant à l’apparition de signes cliniques de destruction tissulaire. Ce processus pathogénique est modulé par plusieurs facteurs de risque environnementaux ou génétiques.(13, 14) La Figure 2 montre un modèle illustrant la pathogénèse de la parodontite.
Diabète et parodontite
Le diabète est défini un groupe de maladies hétérogènes affectant le métabolisme des carbohydrates, des lipides et des protéines. La principale caractéristique du diabète est l’augmentation anormale des niveaux de glucose sanguin. Le diabète de type 1 résulte d’une destruction auto-immune des cellules pancréatiques ß et conduit souvent à un arrêt complet de la sécrétion de l’insuline alors que le diabète de type 2 résulte d’une résistance à l’insuline qui altère l’utilisation de l’insuline endogène par les cellules cibles. Pour les patients ayant reçu un diagnostic de diabète, l’hémoglobine glyquée (fraction HbA1c) est le meilleur indice utilisé pour surveiller le contrôle de la glycémie.(21) Une relation bidirectionnelle entre le diabète et les maladies parodontales a été suggérée dans la littérature.(22) Plus précisément, il a été trouvé que les individus diabétiques avaient un risque plus élevé d’être atteints de maladies parodontales. Dans une large étude épidémiologique américaine, les adultes ayant un diabète mal contrôlé avaient 2,9 fois plus de risque d’avoir une parodontite comparativement aux adultes non diabétiques. Au contraire, les adultes ayant un diabète bien contrôlé n’avaient pas de risque augmenté d’être atteints de parodontite.(23) À l’inverse, la présence d’une parodontite chronique sévère peut augmenter le risque d’un mauvais contrôle glycémique. Une étude longitudinale réalisée auprès d’une population d’indiens Pima ayant un diabète de type 2 a rapporté que les individus atteints d’une parodontite sévère au départ avaient 6 fois plus de risque d’avoir un mauvais contrôle glycémique au cours des deux années suivantes comparativement à ceux n’ayant pas de parodontite.
Une revue systématique traitant de la relation entre le diabète et la parodontite (25) a conclu que la présence de parodontite affecte négativement le contrôle de la glycémie et augmente le risque de développer le diabète. En résumé, la présence de parodontite chez un individu semble avoir un impact significatif sur le contrôle métabolique du diabète. Différents mécanismes ont été proposés pour expliquer la relation bidirectionnelle entre le diabète et les maladies parodontales.(22) Parmi ces derniers, les auteurs attribuent la réponse inflammatoire hyperactive chez les diabétiques à la présence de pathogènes parodontaux qui déclencheraient une inflammation exagérée menant à une destruction des tissus parodontaux (Figure 3). Deuxièmement, la présence de niveaux élevés de glucose peut activer la production de cytokines pro-inflammatoires. Troisièmement, les retards de guérison et les réponses immunitaires altérées telles qu’une phagocytose et une chimiotaxie des neutrophiles déficientes peuvent également prédisposer les patients diabétiques à développer des parodontites.
Maladies cardiovasculaires
Au cours des dernières décennies, plusieurs recherches ont été réalisées pour étudier l’association entre les maladies cardiovasculaires liées à l’athérosclérose et la parodontite. Les maladies cardiovasculaires associées à l’athérosclérose sont définies comme étant un groupe de maladies qui incluent les pathologies cardiaques suivantes : l’angine, l’infarctus du myocarde, les maladies cérébro-vasculaires ischémiques et les maladies artérielles périphériques.(30) Une revue de littérature récente sur l’évidence épidémiologique d’une association entre la parodontite et les incidents cardiovasculaires reliés à l’athérosclérose a permis de conclure qu’il y a un risque augmenté d’incidents cardiovasculaires chez les patients diagnostiqués avec une parodontite.(31) Aussi, une méta-analyse réalisée par Sfyroeras et Roussas a trouvé que le risque d’accident vasculaire cérébral chez les sujets atteints de parodontite était 1,47 fois plus élevé dans des études prospectives (95 % CI 1.13-1.92) et 2,63 fois plus élevé pour les études rétrospectives (95 % CI 1.59-4.33), comparativement aux sujets sans parodontite.(32) Une autre méta-analyse conclut que la parodontite est un facteur de risque indépendant des facteurs de risque traditionnels pour les maladies cardiovasculaires ; ce risque étant estimé à 1,24-1,35.(33) Un lien causal direct entre la parodontite et les maladies cardiovasculaires liées à l’athérosclérose n’est toutefois pas encore établi.(34) Plusieurs études supportent certains mécanismes biologiques plausibles pour expliquer le lien causal entre ces deux conditions.
Selon la revue de Schenkein et Loos publiée en 2013, le mécanisme biologique le plus plausible pouvant expliquer le lien entre la parodontite et un risque augmenté d’athérothrombogenèse serait que la parodontite chronique constitue une voie d’entrée bactérienne.(35) Par la suite, la réponse inflammatoire de l’hôte serait activée par de multiples mécanismes qui favoriseraient la formation et le développement de plaques athéromateuses.(36) Différents mécanismes inflammatoires impliqués dans la pathogenèse de parodontites modérées ou sévères pourraient augmenter le niveau d’inflammation systémique.(35) La parodontite a été associée à un niveau d’inflammation augmenté et mesuré par les biomarqueurs d’inflammation comme la C-Reactive Protein (CRP).(32, 37, 38) Selon certaines études, le traitement de la parodontite modérée à sévère réduirait le niveau des médiateurs de l’inflammation systémique et permettrait d’améliorer la fonction endothéliale.(36, 39, 40) Il y a toutefois pour l’instant peu d’évidences qui permettent de montrer que ces changements puissent contribuer à diminuer le risque d’incidents cardiovasculaires.
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Table des matières
1.Introduction
1.1. État des connaissances actuelles sur le sujet
1.1.1. Parodontite
1.1.2. Diabète et parodontite
1.1.3. Maladies cardiovasculaires
1.1.4. Complications de la grossesse
1.1.5. Autres maladies systémiques
1.2. Connaissances des médecins et des étudiants en médecine
1.2.1. Gastroentérologues, médecins internes et médecins
1.2.2. Gynécologues et obstétriciens
1.2.3. Cardiologues
1.2.4. Étudiants en médecine interne et médecins généralistes
1.2.5. Dentistes
1.2.6. Approche collaborative
1.3. Problématique
1.4. Objectifs du projet
1.5. Hypothèse de recherche
1.6. Pertinence
2.Matériel et méthodes
2.1. Design expérimental
2.2. Population cible
2.3. Population étudiée
2.4. Calcul de la taille de l’échantillon
2.5. Critères d’inclusion et d’exclusion
2.6. Stratégie de recrutement
2.7. Questionnaires d’enquête utilisés pour la cueillette des données
2.8. Méthodologie statistique
2.9. Démarches éthiques
2.10. Sources de financement
3.Résultats
3.1. Recrutement auprès des étudiants des programmes de médecine interne
3.2. Description de l’échantillon et données sociodémographiques
3.3. Résultats sur les connaissances de la parodontite et des liens avec les conditions systémiques
3.4. Résultats sur les pratiques cliniques
3.5. Résultats sur la formation reçue pendant le programme de médecine
3.6. Résultats sur l’opinion des répondants au sujet de leur rôle et de leur intérêt
3.7. Différences entre les universités, la langue et le nombre d’années d’étude en médecine interne
4.Discussion
4.1. Interprétation des résultats
4.1.1. Connaissances des maladies parodontales et des liens avec les conditions systémiques
4.1.2. Pratiques cliniques
4.1.3. Formation
4.1.4. Opinions des étudiants
4.1.5. Comparaison des connaissances entre les universités et le nombre d’années d’études
4.2. Taux de participation et recrutement des participants
4.3. Améliorations à la procédure expérimentale dans le cadre d’études futures
4.4. Validité externe
4.5. Limitations du projet de recherche et facteurs confusionnels
Conclusion
Bibliographie
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