Connaissances de la loi Claeys-Léonetti et pratique des médecins généralistes

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Etat des lieux

Une population vieillissante

Les personnes en fin de vie vont être plus nombreuses dans les prochaines années en raison de l’évolution démographique qui tend à un vieillissement de la population française.
Cette accentuation du vieillissement est due à trois causes (1):
Premièrement : Le nombre de personnes âgées dépend de la taille des générations à la naissance. Le déficit des naissances lié à la première guerre mondiale ne se fait plus sentir car la plupart des individus de cette génération sont maintenant décédés. En revanche, cette dernière décennie a vu arriver à l’âge de 65 ans la génération de l’après seconde guerre mondiale, issue du baby-boom. Deuxièmement : L’augmentation de l’espérance de vie liée à l’amélioration de la qualité de vie ainsi qu’aux progrès médicaux et pharmacologiques, passe pour les personnes de 65 ans de 16,8 ans pour les femmes et 13 ans pour les hommes en 1971 à respectivement 23,3 ans et 19,4 ans en 2016.
Troisièmement : La catégorie des personnes de plus de 65 ans devient de plus en plus importante en raison de la baisse de la fécondité depuis la fin du siècle dernier, passant de 12,6% en 1986 à 19,4% en 2017.
Selon l’INSEE (2), si les tendances démographiques actuelles se poursuivent la France compterait en 2070 76,5 millions d’habitants, soit 10,7 millions de plus qu’en 2013. Cette augmentation toucherait essentiellement les personnes de plus de 65 ans (+10,4 millions), et plus particulièrement les personnes de plus de 75 ans dont la population aura doublé entre 2013 et 2070.
Cette augmentation de la population âgée aura comme répercussion une augmentation des maladies chroniques et des cancers, qui sont les principales causes de décès. Une étude parue dans Population et société(3) prévoit 770 000 décès en 2070 contre 547 000 en 2014.
L’évolution de la prise en charge de la fin de vie sera nécessaire pour permettre à la population française d’accéder à la fin de vie qu’elle désire.
Une commission de réflexion sur la fin de vie en France, répondant à la demande du président Hollande en vue de l’élaboration de la loi du 2 février 2016 (4), a émis des points incontournables et fondamentaux concernant la fin de vie : toutes les personnes en fin de vie doivent être égales en terme d’accès aux soins palliatifs. La volonté de tout patient doit être écoutée et respectée dans le processus décisionnel. Le traitement de la douleur est un droit pour tous et un devoir du corps médical.
Ce jury conseille également une sensibilisation de la population générale sur la fin de vie, afin que chaque citoyen puisse réfléchir à l’idée de sa propre mort pour pouvoir la préparer. Ce qui rejoint le conseil d’intégrer la formation en soins palliatifs dans toutes les spécialités médicales afin de réduire le clivage soins palliatifs/soins curatifs. Les médecins seront ainsi amenés à introduire auprès de leurs patients l’idée d’une prise en charge palliative avant que ceux-ci ne soient en phase terminale de leur maladie.

Les Français veulent mourir à domicile

Dans un sondage IFOP réalisé pour la fondation Adrea en 2016(5), 85% des personnes interrogées voulaient mourir à leur domicile, contre 6% à l’hôpital et 9% en maison de retraite. Cela nous prouve que malgré une société à la pointe de la technologie avec des traitements médicaux toujours plus efficaces, les Français ne souhaitent pas médicaliser la mort. Ils préfèrent mourir à leur domicile.
En revanche, si l’on étudie le rapport de l’INSEE de 2017 (6), on s’aperçoit qu’en 1972 la majorité des gens mouraient à leur domicile contre un peu moins de 40% en établissement de santé. Cette proportion s’est inversée dans les années 1980 pour arriver en 2016 à 26% de décès à domicile et 13,5% en maison de retraite contre 59,2% en établissement de santé.
Plusieurs conditions sont nécessaires pour pouvoir répondre au souhait d’un patient de décéder à son domicile (7) :
– Le désir du patient et de ses proches : cela passe par une information claire et honnête sur la situation du malade, une écoute des souhaits et attentes de chacun. Il faut
également évaluer la possibilité d’aménagement du domicile aux nécessités de la prise en charge de fin de vie (matériel médical, plain-pied ou non, etc…), ainsi que la possibilité financière.
– La présence indispensable des proches : présents au domicile, ceux-ci seront parfois amenés à être des partenaires de soins et, à minima, devront être en mesure de faire appel aux professionnels de santé si la situation le nécessite.
– Une équipe soignante motivée et disponible : une présence infirmière quotidienne est indispensable, avec une possibilité d’être jointe au téléphone en cas de problème.
– Une évaluation régulière et systématique des symptômes et de la situation globale. Tous les acteurs (médicaux, paramédicaux, sociaux) doivent procéder à cette évaluation pour adapter la prise en charge.
– Une démarche d’anticipation des complications prévisibles : les prescriptions anticipées doivent être mises en place et réévaluées régulièrement selon l’évolution de l’état physique et psychologique du patient. Dans le cadre de l’urgence une fiche d’urgence palliative a été créé par la SFAP (8). Elle regroupe les informations essentielles à la prise en charge d’un patient en soins palliatifs par un médecin intervenant en situation d’urgence.
– La possibilité d’hospitaliser le patient. Cela doit être anticipé si on se trouve dans une situation d’urgence. Il faut prévoir la possibilité d’un lit de répit sans passer par un service d’urgence.
– La coordination et la continuité de soins entre le milieu hospitalier et le domicile. Cela implique la préparation du retour à domicile des patients hospitalisés avec communication entre l’hôpital et le médecin traitant.
Ce contraste entre le souhait des Français et la réalité des lieux de décès doit nous faire changer nos pratiques afin de privilégier le décès à domicile quand cela est possible, en particulier avec le vieillissement de la population et la baisse du nombre de lits à l’hôpital lors des dernières années.

Les médecins généralistes, premiers acteurs pour répondre à cette demande

Bien que le pourcentage des visites parmi les médecins généralistes soit en baisse (9), ils restent les seuls à les effectuer, ce qui est essentiel dans les situations de fin de vie où un passage régulier à domicile est nécessaire.
Les médecins généralistes, étant des médecins de premier recours, ont également le rôle d’organiser le système de soins s’articulant autour du patient. Ils sont le point central de cette organisation, ils doivent coordonner les passages infirmiers et/ou des aides à domicile si nécessaire.
Ils sont prescripteurs et doivent surveiller les traitements, avec si besoin la mise en place des prescriptions anticipées pour pallier la douleur et autres symptômes difficiles.
Ce sont les premiers interlocuteurs des familles et des patients.
Ils doivent faire le lien avec les médecins spécialistes pour permettre aux patients d’avoir la meilleure prise en charge.
Lors de précédentes thèses de médecine générale (10)(11)(12), les médecins interrogés mettent en avant leur rôle de pivot, de premier interlocuteur du patient et de sa famille, et d’accompagnateur dans les situations de fin de vie. En effet, leur implication auprès du patient (qui choisit son médecin généraliste contrairement aux médecins hospitaliers) depuis souvent plusieurs années, leur donnent un rôle « d’expert » incontournable dans les situations de fin de vie.
De plus les patients et leurs proches seront plus enclins à discuter de ces situations difficiles avec un médecin qui les suit depuis plusieurs années.
Les médecins interrogés font part d’une obligation morale envers les patients dans ces situations. En effet après un suivi d’une longue durée ils se sentent un devoir d’accompagnement : cela fait partie de leur mission d’être présents jusqu’à la fin pour ces personnes avec lesquelles ils ont signé une sorte de « contrat » moral. (13) Ils sont également conscients que leur proximité géographique avec le domicile des patients leur permet un suivi plus régulier et plus précis, qui font d’eux de vrais acteurs de premier recours.
Les médecins généralistes ont donc un rôle indispensable à jouer dans les situations de fin de vie à domicile. Ils sont ceux sur qui repose l’organisation des soins afin que le maintien à domicile soit optimal, afin d’éviter entre autres des hospitalisations non souhaitées.

La fin de vie, une situation qui engendre des décisions compliquées

La prise en charge d’un patient en fin de vie demande un effort psychologique important de la part des médecins. Ils doivent être en mesure de répondre aux demandes des patients, d’utiliser tout ce qui est en leur pouvoir afin de leur apporter le soulagement indispensable. Ils doivent également être disponibles à tout moment pour éviter les hospitalisations d’urgence ou, en tout cas, prévoir une marche à suivre en cas de situation de détresse avec l’aide de l’équipe paramédicale. Ce qui rend ces situations également chronophages.
Accompagner la fin de vie amène forcément les médecins à confronter ces situations à leurs propres ressentis face à la mort, à leurs peurs éventuelles. Ils doivent éviter tout phénomène de projection afin de s’investir pleinement dans la situation présente et se concentrer uniquement sur le patient.
Cela est notifié dans différentes thèses (10)(12)(11)(14) : Sont nécessaires des efforts physique et psychologique que les médecins doivent être prêts à effectuer. Ils devront faire face à une charge morale non négligeable quand ils prendront leur décision. Ils devront faire face également à la peur de la mort et de leur propre finitude.
Les médecins interrogés pointent également un sentiment d’isolement face à certaines situations qui peut encore majorer la difficulté et la lourdeur de celles-ci. Ils pointent également la difficulté de communiquer sur ces sujets avec certains patients, pour qui la mort est une sorte de tabou, et/ou avec leurs familles qui peuvent être insistantes pour trouver encore une solution curative pour leur proche, même quand tout ce qui peut être essayé l’a été. L’anticipation d’une discussion sur les soins palliatifs semble être une bonne idée pour ces situations, encore faut-il pouvoir aborder le sujet.
Cela est encore exacerbé dans les demandes de LATA (Limitation ou arrêt des thérapeutiques actives) ou de SPCMD (Sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès), car la décision peut impacter directement la temporalité du décès.
Une décision de cet ordre va forcément créer un doute chez le médecin : toutes les possibilités ont-elles été évaluées auparavant ? Un choix pourrait lui paraître évident, mais la responsabilité d’une telle décision est extrêmement importante sur le point de vue moral et éthique, sans parler de la charge mentale qu’elle implique. Pour éviter un choix pris de façon unilatérale, le médecin peut faire appel à d’autres médecins et à l’équipe paramédicale pour l’aider à la réflexion. C’est la notion de collégialité apparaissant dans les derniers textes de loi concernant la fin de vie.
On pourrait penser qu’un avis unanime des proches et de la famille du patient pourrait suffire à rassurer le médecin sur le plan moral de sa décision, mais dans la notion de collégialité cité précédemment la famille et les proches n’ont qu’un avis consultatif, et ne peuvent faire partie intégrante du processus décisionnel.

La procédure collégiale, une aide à la décision

La collégialité est selon la définition du Larousse une forme d’organisation du pouvoir confiant la fonction exécutive à plusieurs personnes. C’est un principe qui encourage la délibération avant la prise de décision, après avoir pris en considération les avis des différents partis.
Selon la HAS (15) la procédure collégiale implique l’ensemble des professionnels de santé intervenant dans la prise en charge du patient (médecins et équipe paramédicale) ainsi qu’un médecin extérieur, idéalement un spécialiste en soins palliatifs, intervenant en tant que consultant et sans lien hiérarchique avec le médecin prenant en charge le patient. Les participants se réunissent pour évaluer si la situation remplit bien les critères définis par loi Claeys-Léonetti puis discutent pour parvenir à une décision commune. Le médecin en charge du patient reste le décisionnaire final.
On voit que, bien que le médecin reste le décisionnaire final, la réunion collégiale permet de recueillir les avis des personnes directement impliquées dans la prise en charge des patients, en particulier l’équipe paramédicale (infirmières et aides-soignantes). Ce sont elles qui sont souvent plus à même de recueillir les inquiétudes, ressentis, peurs et volonté des patients et de leurs familles, du fait de leur proximité avec eux.
Le médecin tiers permet d’avoir un regard objectif sur la situation médicale du patient. Il est une aide à la décision.
Si le patient n’est pas en mesure d’exprimer sa volonté, on doit rechercher s’il a écrit des directives anticipées. Si ce n’est pas le cas, il est nécessaire de recueillir la parole de la personne de confiance et à défaut, des proches.
Ces points sont recueillis dans les précédentes thèses (10)(12)(11), mais ce qui est particulièrement mis en avant c’est la sécurité qu’une réunion collégiale apporte au médecin qui prend la décision. En effet, ne pas se sentir isolé et discuter de cas difficiles avec des collègues permet aux médecins interrogés de premièrement respecter la loi et l’aspect éthique des situations de fin de vie, deuxièmement d’éviter les dérives et de prendre la meilleure décision en s’ouvrant à d’autres points de vue, et troisièmement d’éviter la charge mentale d’avoir à prendre une décision seul. La plupart des médecins ressent donc la nécessité d’un échange avec un médecin tiers.

Des freins identifiés

La procédure collégiale est malheureusement difficile à mettre en place en médecine générale. Les précédentes thèses en médecine générale (10)(12)(11)(16) mettent en évidence différents points expliquant ce phénomène :
– Le manque de temps : l’emploi du temps souvent chargé des médecins généralistes est un obstacle à l’organisation d’une réunion collégiale.
– La difficulté à réunir tous les participants : les médecins difficilement joignables, les emplois du temps des différents acteurs, permettent difficilement d’organiser une réunion regroupant tous les participants au même moment.
– Le manque de rémunération : pour tous les acteurs il n’y a aucune valorisation financière à organiser ou à participer à une réunion collégiale.
– L’absence de cadre : en effet, aucun créneau horaire n’est présent dans l’organisation des différents participants afin de réaliser des actions pluridisciplinaires dans les situations le nécessitant.
– L’absence d’un lieu commun : le manque d’un espace pour faciliter la coordination entre les professionnels de santé.
– La difficulté à contacter les participants nécessaires : les médecins généralistes se retrouvent souvent isolés et ont du mal à savoir qui contacter pour réaliser les procédures collégiales.
– La difficulté de communication entre la ville et l’hôpital : le fait que les comptes rendus ne suivent pas le retour d’hospitalisation et que les médecins généralistes soient trop peu souvent appelés pour être tenus informés de l’évolution de l’état de santé de leurs patients pose un problème pour pouvoir prendre en charge le patient correctement. Des médecins décrivent même un délaissement des patients vers la médecine hospitalière lorsque la situation n’est plus maitrisée.
– Enfin le manque de formation revient souvent comme un frein à la procédure collégiale. En effet si les médecins récemment diplômés ont été formés en formation initiale sur la pluridisciplinarité ce n’est pas le cas des médecins plus âgés.

Le cadre législatif

La loi Léonetti du 22 avril 2005

La loi Léonetti (17) met en place plusieurs grand changements concernant le droit des personnes malades et en fin de vie.
Elle interdit l’obstination déraisonnable, c’est-à-dire que lorsque les traitements apparaissent inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus ou ne pas être entrepris.
Elle met en place la notion de double effet, c’est-à-dire que si un patient en phase avancée ou terminale d’une affection grave ou incurable, a besoin d’un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger sa vie, il doit en être informé ou à défaut sa personne de confiance, une personne de sa famille ou un de ses proches. La procédure suivie doit être notée dans le dossier médical.
Elle indique la nécessité d’une procédure collégiale comme précisé auparavant dans les situations de limitation ou d’arrêt d’une thérapeutique active, à condition que la personne de confiance ou à défaut un membre de la famille ou un proche ainsi que les directives anticipées aient été consultés. La décision doit être notée dans le dossier médical.
Elle précise que lorsqu’une personne en phase avancée ou terminale d’une maladie grave et incurable, décide de refuser, d’arrêter ou de limiter un traitement, le médecin doit accepter sa décision après l’avoir informé des conséquences de ce choix. Le médecin doit assurer la qualité de sa fin de vie et respecter sa dignité. Sa décision doit être notée dans le dossier médical.
Elle donne le droit à toute personne majeure d’écrire ses directives anticipées précisant ses souhaits au cas où elle ne serait pas capable d’exprimer ses volontés. Elles sont révocables à tout moment et ont une durée de validité de 3 ans.
Elle précise le rôle des personnes de confiance, qui une fois désignées, donneront dans la situation où le patient n’est plus capable d’exprimer ses volontés, un avis supérieur à tout autre avis (famille, proches) en dehors des directives anticipées.

Modification par la loi Claeys Léonetti du 2 février 2016

Elle (18) précise la nutrition et l’hydratation comme des traitements pouvant être arrêtés dans le  refus d’une obstination déraisonnable.
A la demande du patient d’éviter toute souffrance et d’éviter une obstination déraisonnable, cette loi offre la possibilité d’une sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès, associée à une analgésie et à l’arrêt de tous les traitements de maintien en vie. Elle est autorisée dans les situations suivantes :
– Lorsque le patient, atteint d’une affection grave et incurable et dont le pronostic vital est engagé à court terme, présente une souffrance réfractaire aux traitements.
– Lorsque la décision du patient, atteint d’une affection grave et incurable, d’arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable.
– Lorsque le patient est inconscient et que le médecin décide d’arrêter un traitement de maintien en vie.
Cette décision est soumise à une réunion collégiale et doit être notée dans le dossier médical du patient.
Elle enlève la durée de validité des directives anticipées qui deviennent sans durée de validité. Elle précise qu’elles s’imposent à tout médecin le temps d’avoir une évaluation complète de la situation médicale si le patient est inconscient, sauf en cas d’urgence.
En cas de directives anticipées jugées inappropriées ou non conformes à la situation médicale le médecin peut décider de les refuser à condition de procéder à une procédure collégiale.
Elle insiste sur le fait qu’un médecin devant une personne en phase avancée ou terminale d’une affection grave ou incurable hors d’état d’exprimer sa volonté, doit s’enquérir de la volonté du patient soit par les directives anticipées, soit par le biais de la personne de confiance, ou à défaut par le biais d’un membre de sa famille ou d’une proche.
Elle précise la possibilité pour le patient d’être traité à domicile s’il en exprime le souhait.
L’article L1110-10 du code de la santé publique modifié par la loi Claeys-Léonetti redonne une définition des soins palliatifs : « Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage. »
Des définitions sur les soins palliatifs et le domicile, ainsi que sur les structures de soins en soins palliatifs et à domicile seront trouvables en annexe.

Un sujet d’actualité

Les enseignements apportés par le plan national développement des soins palliatifs et accompagnement de la fin de vie 2015-2018

Le rapport de 2018 de l’IGAS (19)(Inspection Générale des Affaires Sociales) a montré une mise en œuvre très partielle et un impact très limité de l’axe 3 du plan national 2015-2018, « Développer les prises en charge de proximité : favoriser les soins palliatifs à domicile y compris pour les résidents en établissements sociaux et médicosociaux ».
L’action 8-2, « faciliter la mise en œuvre des soins palliatifs à domicile par les personnels de santé de ville », a été mise en place de façon très inégalitaire selon les territoires et difficile à évaluer. La coordination des différents dispositifs d’aide a pour but d’aider à la prise en charge en ville mais le manque d’information et la disparité de ces dispositifs font qu’ils sont rarement cités par les professionnels comme leviers.
La facilitation de la formation des personnels salariés des établissements médicosociaux au contact de personnes en fin de vie en soutenant le financement « retour et maintien à domicile » a eu un impact très modeste avec un soutien financier en baisse.
Une action prévoyait de favoriser une présence infirmière la nuit en EHPAD afin d’éviter les hospitalisations. C’est une mesure qui a bien été conduite et qui reste à évaluer sur les prochaines années. Une autre mesure prévoyait un élargissement des horaires en particulier la nuit et les week-ends des SPASAD et SSIAD, ce qui n’a pas été fait.
Une autre mesure visait à améliorer le partenariat de l’EMSP et des réseaux avec les établissements et services sociaux et médicosociaux. Si on voit une avancée bien que limitée au niveau des EHPAD (85% des établissements ont une convention avec un EMSP), le reste des réseaux ou établissements (SSIAD par exemple) n’ont pas ou peu eu d’amélioration de ce partenariat.
Pendant un temps le partenariat entre HAD et SPASAD/SSIAD posait un problème car l’un n’était pas compatible avec l’autre. Un décret a établi la durée minimale de prise en charge par le SSIAD d’un patient pour permettre une intervention conjointe avec l’HAD et une instruction a apporté les outils et les précisions techniques permettant une articulation de la prise en charge entre HAD et SSIAD. Il y a donc une avancée non évaluable pour le moment devant la récence de ce décret. Une action visait à organiser partout une réponse aux situations d’urgence en fin de vie à domicile avec définition d’un protocole d’anticipation pour chaque établissement disposant d’un protocole d’urgence. Un fiche « urgence pallia » a été créée avec la SFAP afin d’informer au centre 15 l’état de santé, le traitement et tous les éléments utiles pour la régulation. Cette mise en place est progressive, dépendant de la formation des médecins et de l’utilisation des différents centre 15.
Au total différentes mesures ont été proposées afin d’améliorer la prise en charge en ville mais qui diffèrent selon les établissements. On note une avancée au niveau des EHPAD mais moins au niveau du domicile avec le manque de formation du corps médical de ville et des SPASAD/SSIAD, ce qui permet difficilement une fin de vie apaisée au domicile des patients.

Les objectifs du nouveau plan national développement des soins palliatifs et accompagnement de la fin de vie 2021-2024

Le Dr Olivier Mermet, médecin généraliste dans l’Allier et le Dr Bruno Richard, responsable du service de soins palliatifs du CHU de Montpellier, membres du comité de pilotage de ce nouveau plan national ont présenté ses différents points lors du 27e congrès annuel de la SFAP du 22 au 24 septembre 2021.(20)
Il est basé sur 2 grands objectifs : l’égalité d’accès aux soins palliatifs et l’anticipation, ainsi que sur 3 axes : la communication, la recherche et la formation ainsi que l’offre de soins palliatifs.
L’axe de communication porte sur l’encouragement à réaliser des planifications de soins anticipées avec consultations dédiées, l’encouragement à réaliser des directives anticipées et à l’optimisation de son mode de conservation (ainsi que pour la désignation de personnes de confiance), la promotion de l’accompagnement des aidants, ainsi que la reconnaissance du rôle des bénévoles et la communication sur leurs rôles.
L’axe de recherche/formation se porte sur le développement d’une filière universitaire avec formations de professeurs, de la formation initiale en 1er, 2e et 3e cycle (DES, FST) ainsi que de la formation continue de tous les professionnels de santé, dans les établissements médicosociaux et hospitaliers mais aussi chez les libéraux, ce qui n’était pas précisé dans le dernier plan national. Des formations et outils en vue de la mise à disposition du Midazolam en officine de ville seront mises en place.
L’axe d’offre de soins palliatifs, qui nous intéresse particulièrement dans notre sujet de thèse, porte sur l’égalité de l’offre selon les territoires. Elle prévoit une unité de soins palliatifs par département, une offre plus importante de lits identifiés en SSR et dans les établissements de proximité. Elle prévoit également une consolidation des EMSP, pour en faire des équipes expertes de soins palliatifs à vocation territoriale, articulées et conventionnées avec les dispositifs d’aide à la coordination, les établissements médicosociaux et les maisons de santé pluriprofessionnelles. Une mise en place d’astreintes de soins palliatifs est également prévue. Un référent de soin palliatif sera mis en place dans chaque établissement avec mise en place des soins palliatifs dans les projets de soin.
Cet axe donne de nouvelles marges de manœuvre aux acteurs du domicile et de l’EHPAD : continuer de développer les infirmiers de nuit en EHPAD, développer les compétences palliatives des HAD et leur coopération avec les autres intervenants, faciliter l’implication des SSIAD et SPASAD, reconnaitre l’action des professionnels libéraux et renforcer leur capacité d’appui et de formation en soins palliatifs. Il inclue ces acteurs dans les réunions collégiales pluridisciplinaires avec les équipes de soins palliatifs.
Il donne également une valorisation des actes d’anticipation et de concertation pluriprofessionnelle, un accès et un accompagnement aux pratiques sédatives quels que soit le lieu de soins (domicile compris).
Cette présentation a par la suite été suivie par la publication du plan détaillé (21) sur lequel nous auront l’occasion de revenir dans la partie discussion.
On voit donc que les soins palliatifs ont une place importante dans la société actuelle et que le domicile prend une place importante dans ce nouveau plan. Cela qui indique qu’une demande est présente et qu’en tant que médecins généralistes nous devons y répondre.

Matériel et méthodes

Choix d’une méthode quantitative

Les précédentes thèses de médecine générale traitant du sujet de la procédure collégiale en médecine générale ont été en majorité des thèses qualitatives par le biais d’entretiens semi-dirigés avec des médecins généralistes. Elles ont permis d’avoir des résultats tangibles sur le ressenti des médecins généralistes sur les lois Léonetti du 22 avril 2005 et Claeys Léonetti du 2 février 2016 ainsi que sur la pratique de la procédure collégiale en médecine de ville.
En revanche aucune thèse n’a été réalisée afin d’évaluer le nombre de situations de fin de vie auxquelles les médecins généralistes sont confrontés ainsi que sur la pratique de la procédure collégiale dans les différentes situations dans laquelle elle est indiquée (Limitation ou Arrêt des Thérapeutiques Actives, Sédation Profonde et Continue Maintenue jusqu’au Décès). Le but de notre travail de thèse est d’évaluer ces différents points et d’essayer de trouver des moyens facilitateurs à la mise en place de réunions collégiales en pratique de ville.
Nous avons fait le choix d’une étude observationnelle, descriptive et quantitative par le biais d’un questionnaire envoyé par mail aux médecins généralistes de l’ancienne région Basse Normandie (départements de l’Orne, de la Manche et du Calvados). Il a pour but de recenser les connaissances et pratiques des médecins généralistes sur la fin de vie et particulièrement sur la procédure collégiale.
Le fait d’avoir choisi une méthode quantitative va permettre un nombre de participants plus important afin d’avoir une vision plus globale de la pratique des médecins généralistes.
La dernière question du questionnaire permet une approche plus qualitative en demandant aux médecins les leviers pouvant être mis en place pour la facilitation de la procédure collégiale en médecine de ville.

Présentation du questionnaire

Après la lecture bibliographique préalable nous avons décidé de diviser notre questionnaire en 3 parties.
La première partie du questionnaire recueille les caractéristiques civiles, universitaires et professionnelles du répondant : cela nous permet de mieux connaître la population interrogée. Elle recueille également le nombre de patients en fin de vie par an et leur lieu de vie, et la connaissance de la loi Claeys-Léonetti pour chaque répondant.
Vous êtes :
– Un homme
– Une femme
Quel est votre âge ?
En quelle année vous êtes-vous installé ?
Etes-vous en milieu :
– Rural
– Semi rural
– Urbain
Avez-vous eu une formation en soins palliatifs :
– Non
– Oui en formation initiale
– Oui, par un DIU
– Oui, par le biais d’un séminaire
– Oui, par le biais d’une soirée de formation
Combien de personnes en fin de vie avez-vous dans votre patientèle par an, en moyenne ?
Sur ces situations de fin de vie, les patients sont-ils plutôt :
– A domicile (Pourcentage)
– En EHPAD (Pourcentage)
– Hospitalisés (Pourcentage)
Comment pensez-vous connaître la loi sur la fin de vie du 2 février 2016 (dit Loi Claeys-Léonetti) ?
– Parfaitement
– Plutôt bien
– Plutôt mal
– Pas du tout
La deuxième partie du questionnaire, après une explication sur la loi Claeys-Léonetti, est orientée sur la réalisation de LATA ou de SPCMD chez les médecins répondants, en précisant dans chaque cas si une procédure collégiale était réalisée au préalable.
La loi Léonetti du 22 avril 2005 instaure la nécessité d’une procédure collégiale dans le cas où la question se pose d’une limitation ou d’un arrêt des thérapeutiques actives (LATA) pour un patient inconscient, afin d’éviter l’obstination déraisonnable.
La loi Claeys Léonetti du 2 février 2016, oblige cette procédure dans le cas de refus de directives anticipées si les médecins les jugent déraisonnables. La procédure collégiale est également nécessaire si une sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès (SPCMD) est envisagée. Elle peut être demandée dans 3 situations : dans le cas de la demande d’un patient conscient, atteint d’une affection grave et incurable, et dont le pronostic vital est engagé à court terme présente une souffrance réfractaire aux traitements ou lorsque la décision du patient atteint d’une affection grave et incurable d’arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d’entraîner une souffrance insupportable. Elle est également possible lorsque le patient est inconscient et que le médecin décide d’arrêter un traitement de maintien en vie.
Selon la HAS la procédure collégiale implique l’ensemble des professionnels de santé intervenant dans la prise en charge du patient (médecins et équipe paramédicale) ainsi qu’un médecin extérieur sans lien hiérarchique avec le médecin prenant en charge le patient. Les participants se réunissent pour évaluer si la situation remplit bien les critères définis par loi, consultent les directives anticipées ou à défaut la personne de confiance ou les proches, puis discutent pour parvenir à une décision commune. Le médecin en charge reste le décisionnaire final.
La loi n’oblige pas à une réunion collégiale dans les cas de détresse terminale (hémorragies cataclysmiques, détresse respiratoire asphyxique, etc…).
Pour vous, les LATA ou la SPCDM sont-elles une forme d’euthanasie déguisée ?
– Oui
– Non
Avez-vous déjà prescrit une limitation ou un arrêt des thérapeutiques actives comme précisé dans la loi ?
– Non
– Oui
Si non, pourquoi ?
– Je n’en ai jamais eu besoin
– C’est contraire à mes valeurs
– Je trouve que la responsabilité est trop grande
– Je crains de provoquer la mort
– Je manque de formation/technique
– J’ai préféré hospitaliser mon patient
Si oui, avez-vous d’abord procédé à une procédure collégiale ?
– Systématiquement
– La plupart du temps
– Rarement
– Jamais
Avez-vous déjà prescrit une sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès ?
– Non
– Oui
Si non, pourquoi ?
– Je n’en ai jamais eu besoin
– C’est contraire à mes valeurs
– Je trouve que la responsabilité est trop grande
– Je crains de provoquer la mort
– Je manque de formation/technique
– J’ai préféré hospitaliser mon patient
Si oui, avez-vous d’abord procédé à une procédure collégiale ?
– Systématiquement
– La plupart du temps
– Rarement
– Jamais
Dans le cadre où la réunion collégiale n’a pas été réalisée, quelle en était la raison ? (Plusieurs réponses possibles)
– Je pense pouvoir prendre la décision seul
– Je n’en demande que quand je ne suis pas sûr de pouvoir la mettre en œuvre
– L’urgence ne répondait pas aux modalités de la loi
– Difficulté à mettre en place ce genre de réunion en pratique de ville
– Manque de temps
– Manque de rémunération
– Je ne savais pas qu’elle était nécessaire
– Autre : Réponse libre
La troisième partie du questionnaire a pour but de savoir si les médecins connaissent les aides à la réalisation d’une procédure collégiale et la dernière question, plus qualitative, leur demande les politiques à mettre en œuvre afin de faciliter la réunion collégiale en pratique de ville.
Pensez-vous que la récente possibilité d’utiliser le midazolam en ville va changer votre pratique ?
– Oui
– Non

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Table des matières

1 Introduction :
2 Contexte de l’étude
2.1 Etat des lieux
2.1.1 Une population vieillissante
2.1.2 Les Français veulent mourir à domicile
2.1.3 Les médecins généralistes, premiers acteurs pour répondre à cette demande
2.1.4 La fin de vie, une situation qui engendre des décisions compliquées
2.1.5 La procédure collégiale, une aide à la décision
2.1.6 Des freins identifiés
2.2 Le cadre législatif
2.2.1 La loi Léonetti du 22 avril 2005
2.2.2 Modification par la loi Claeys Léonetti du 2 février 2016
2.3 Un sujet d’actualité
2.3.1 Les enseignement apportés par le plan national développement des soins palliatifs et accompagnement de la fin de vie 2015-2018
2.3.2 Les objectifs du nouveau plan national développement des soins palliatifs et accompagnement de la fin de vie 2021 2024
3 Matériel et méthodes
3.1 Choix d’une méthode quantitative
3.2 Présentation du questionnaire
3.3 Validation éthique et règlementaire du questionnaire
3.4 Population ciblée
3.5 Analyse méthodologique
4 Résultats
4.1 Caractéristiques des répondants
4.2 Connaissances de la loi Claeys-Léonetti et pratique des médecins généralistes
4.3 Quels pourraient être les leviers pour faciliter les réunions collégiales en ville ?
5 Discussion
5.1 Conception de l’étude
5.1.1 Des biais dans la constitution de l’échantillon
5.1.2 Des biais dans le déroulement de l’étude
5.2 Interprétation et commentaire des résultats de l’étude avec comparaison avec la bibliographie
5.2.1 Une formation en soins palliatifs et une connaissance de la loi partielles
5.2.2 Pourtant, des pratiques qui s’y référent
5.2.3 Le recours aux réunions collégiales est différent selon les situations
5.2.4 Des freins identifiés
5.2.5 Des aides plus ou moins sollicitées
5.2.6 Des leviers pour faciliter la réalisation d’une réunion collégiale en médecine de ville
5.3 Comparaison avec les objectifs des plans nationaux de développement des soins palliatifs et accompagnement de la fin de vie
5.3.1 Objectifs déjà réalisés par le plan 2015-2018
5.3.2 Objectifs prévus par le plan 2021-2024
5.3.3 Objectifs à prévoir dans le futur
6 Conclusion :
Bibliographie

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