Chaque année en France, 1100 femmes décèdent suite à un cancer du col de l’utérus. Dans plus de 90% des cas, ce cancer est lié à une infection à un papillomavirus humain (HPV) contractée plusieurs dizaines d’années auparavant. La réalisation d’un frottis cervico-utérin (FCU) chez les femmes est actuellement le moyen utilisé dans le dépistage de lésions pré-cancéreuses et cancéreuses. De plus, un moyen de prévention est mis à disposition depuis 13 ans : la vaccination des jeunes filles. Toutefois, le taux de couverture vaccinale en France est l’un des plus faibles d’Europe et ne dépasse pas les 25%, alors que l’efficacité et la sécurité de ces vaccins sont établies.
Les Papillomavirus
Transmission
Les infections aux HPV font partie des Infections Sexuellement Transmissibles (IST) les plus fréquentes. Ces virus se transmettent donc lors des contacts cutanéomuqueux, le plus souvent lors des rapports sexuels, qu’il y ait pénétration ou non. Ainsi un simple contact intime au niveau des zones génitales suffit à transmettre le virus. Comme ils sont présents dans toute la sphère ano-génitale, l’utilisation de préservatifs ne protège qu’imparfaitement de la contamination par les HPV, bien qu’elle contribue tout de même à en réduire le risque.
Prévalence
On considère que plus de 75% des hommes et des femmes sexuellement actifs seront exposés aux HPV au cours de leur vie. La forte contagiosité et la transmission par contact direct aussi bien cutané que muqueux expliquent la fréquence élevée de cette exposition. (3) La primo-infection a lieu généralement au début de la vie sexuelle : c’est pourquoi on estime qu’une femme sur quatre de moins de 25 ans ayant des rapports sexuels est porteuse d’un HPV. Certains facteurs de risque vont favoriser l’infection : l’âge précoce au moment des premiers rapports sexuels et le fait d’avoir des partenaires sexuels multiples sans protection.
Conséquences
Il existe plus de 120 génotypes différents (on les différencie par un numéro) : 75% d’entre eux sont inoffensifs, d’autres (comme les HPV 6 et 11) peuvent être responsables de condylomes. Ceux-ci correspondent à des verrues sur les parties génitales sans potentiel d’évolution vers des lésions de haut grade, ni vers le cancer invasif. Ainsi elles ne sont pas cancéreuses mais sont gênantes, très contagieuses et peuvent nécessiter un traitement (par exemple : laser). D’autres HPV sont susceptibles d’entraîner un cancer du col de l’utérus, mais aussi de la vulve, du vagin, de l’anus et de la sphère oro-pharyngée (notamment les HPV 16 et 18 qui sont retrouvés dans 70% des cancers du col de l’utérus : ils ont un pouvoir oncogène). (3) (5) Dans 90% des cas, avec un système immunitaire compétent, une infection à un HPV est asymptomatique et transitoire : son élimination est spontanée et a lieu dans l’année. Le portage évolue ainsi dans la majorité des cas vers la clairance virale. (4) Toutefois dans 10% des cas, l’infection persiste, initialement sans lésion cytologique ou histologique, puis évolue vers des lésions précancéreuses (appelées lésions intraépithéliales, dysplasies cervicales ou CIN). Celles-ci ont une probabilité non négligeable de régresser spontanément vers un épithélium normal. Les facteurs favorisant la persistance de l’infection sont l’immunodépression, le tabagisme, la multiparité, la présence d’autres infections (Chlamydia Trachomatis ou virus de l’herpès simplex de type 2), et de façon moins certaine l’utilisation prolongée de contraceptifs hormonaux oestro-progestatifs. (5) Lorsque ces lésions persistent au niveau de la muqueuse cervicale, elles peuvent évoluer vers un cancer du col de l’utérus. La survenue de ce cancer est ainsi la conséquence d’une infection à un HPV oncogène survenue plusieurs années auparavant. Une infection persistante à un HPV à haut risque est donc nécessaire mais non suffisante pour aboutir à un cancer du col de l’utérus.
Épidémiologie
Le cancer du col de l’utérus est actuellement le onzième cancer chez la femme en France par sa fréquence. Le pic d’incidence se situe vers 40 ans et l’âge médian au diagnostic est de 51 ans. Il est rare chez les femmes âgées de moins de 30 ans et celles âgées de plus de 65 ans.
La survie des femmes ayant un cancer du col utérin dépend de différents facteurs pronostiques : la survie à cinq ans est comprise entre 84 et 93% pour les cancers de stade I (limité au col), et 35% pour les cancers de stade IV (envahissant les organes de voisinage). (7) L’infection aux HPV est étiologiquement associée à plus de 90% des cancers du col de l’utérus (3000 nouveaux cas par an en France), 90% des cancers de l’anus (1100 nouveaux cas par an), 70% des cancers du vagin (300 nouveaux cas par an), 50% des cancers du pénis, 40% des cancers de la vulve (500 nouveaux cas par an) et 20 à 60% des cancers de l’oropharynx.
Les hommes peuvent être porteurs asymptomatiques de l’infection, la transmettre à leur(s) partenaire(s) mais aussi souffrir de complications d’une infection à un HPV sous la forme de condylomes, de lésions précancéreuses ou cancéreuses de la région anogénitale et oropharyngée.
Dépistage
Le dépistage du cancer du col utérin repose sur un test cytologique : le frottis cervico-utérin (FCU). Celui-ci a été inventé par le Docteur Papanicolaou en 1928, et est édité selon la classification Bethesda. (9) La Haute Autorité de Santé (HAS) recommande depuis 2010 de réaliser un FCU tous les trois ans chez les femmes, vaccinées ou non contre les HPV, de 25 à 65 ans, après deux FCU successifs normaux effectués à un an d’intervalle. Il peut être réalisé par une sage-femme (SF), un médecin généraliste, ou un gynécologue. Tout frottis anormal doit être suivi d’investigations diagnostiques en fonction du résultat de la cytologie (FCU de contrôle, recherche de l’ADN viral des HPV oncogènes encore appelé test HPV, colposcopie-biopsie, curetage de l’endocol, conisation diagnostique). (9) (10) Malgré une sensibilité imparfaite (70%), le dépistage par FCU permettrait de diminuer de 80% le nombre de cancer du col chez la femme. Il permet un dépistage plus précoce des lésions et ainsi une prise en charge à un stade moins avancé. Dans le cadre du plan cancer, l’institut national du cancer (INCa) a édité en 2017 15 arbres décisionnels concernant la prise en charge des frottis anormaux.
Le frottis de dépistage est remboursé à 65%. Un programme national de dépistage organisé du cancer du col en France est prévu durant l’année 2019, bien que des expérimentations locales soient déjà faites. Par exemple, depuis 1991 en Isère, l’Office de Lutte contre le Cancer (ODLC) invite toutes les femmes, par courrier postal, n’ayant pas de suivi gynécologique ou un suivi supérieur à trois ans à effectuer un FCU. (6) (8) Sur les 17,5 millions de femmes françaises concernées, seulement 10% bénéficieraient d’un dépistage dans l’intervalle recommandé, 50% des femmes seraient trop peu ou pas dépistées et 40% seraient dépistées trop fréquemment.
|
Table des matières
1. Introduction
1.1. Les papillomavirus
1.1.1. Transmission
1.1.2. Prévalence
1.1.3. Conséquences
1.1.4. Épidémiologie
1.1.5. Dépistage
1.2. La vaccination
1.2.1. Historique
1.2.2. Schéma vaccinal
1.2.3. Couverture vaccinale
1.2.4. Efficacité
1.2.5. Sécurité
1.3. Représentations sociales et professionnelles
1.3.1. Enquête auprès de parents de jeunes filles
1.3.2. Enquête auprès de lycéens masculins
1.3.3. Enquête auprès de femmes
1.3.4. Enquête auprès de sages-femmes
1.3.5. Enquête auprès d’internes en médecine générale
2. Matériels et Méthodes
2.1. Objectifs
2.2. Méthode
2.3. Accords préalables
2.4. Matériel
2.5. Outils statistiques
2.6. Hypothèses
3. Résultats
3.1. Description de la population
3.2. Existence d’une vaccination anti-HPV
3.3. Couverture vaccinale
3.4. Connaissances concernant les Papillomavirus et la vaccination anti-HPV
4. Analyse et Discussion
4.1. Limites et biais de l’étude
4.2. Forces de l’étude
4.3. Statut des connaissances
4.3.1. HPV et vaccination
4.3.2. Suivi gynécologique
4.4. Prévention primaire
4.5. Vecteurs d’informations et facteurs favorisant la vaccination
4.5.1. Les parents
4.5.2. Médecin traitant
4.6. Freins à la vaccination
4.7. Rôle de l’institution scolaire
4.7.1. Une vaccination en milieu scolaire
4.7.2. Rôle des infirmiers scolaires
4.8. Implication des familles
4.9. Place et impact des médias
4.10. Et les garçons ?
4.11. Une vaccination dès 9 ans
4.12. Une consultation dédiée aux adolescents
5. Conclusion
Bibliographie
Annexes