Quelques éléments d’épidémiologie
Salmonella est un germe ubiquiste largement distribué dans la nature (AFSSA, 2002). Labactérie peut résister plusieurs semaines dans le milieu extérieur sec et plusieurs mois dans l’eau et donc contaminer durablement l’environnement des élevages (INRS, 2005a; OMS, 2013). En effet, le tractus intestinal de l’homme et des animaux à sang chaud particulièrement les volailles, constitue l’habitat préférentiel des salmonelles (INRS, 2005a; Ravary et al., 1998). La mise en évidence de ce danger sur les carcasses signe un transfert de contamination direct (du tube digestif du réservoir animal vers sa carcasse) ou indirect (contaminations croisées des carcasses à partir des matériels souillés). Le stress du transport semble accentuer l’excrétion de Salmonella par les animaux (Fosse, 2008). L’homme se contamine principalement par voie orale, lors de l’ingestion d’aliments contaminés et rarement lors d’un contact direct avec un homme ou un animal infecté (EFSA et ECDC, 2014). La consommation d’un aliment dans lequel la population de Salmonella aurait atteint 106 germes entrainera une toxi-infection. Les aliments les plus souvent mis en cause dans les TIA à Salmonella sont les œufs et produits à base d’œufs comme la mayonnaise ; les préparations à base de viande de bœuf, les volailles et les fruits de mer ont été aussi incriminés (Aubry, 2011; INRS, 2005a; OMS, 2013; Tauxe, 2002). Le lait contaminé par les fèces suite aux mauvaises conditions hygiéniques au cours de la traite peut également jouer le rôle de vecteur des salmonelles (Silué, 2005). Indirectement, les manipulateurs d’aliments qui sont porteurs sains de salmonelles et l’environnement contaminés par les matières fécales peuvent contaminer toutes les autres catégories d’aliments au cours de leur préparation et pendant leur conservation. De même, les températures inadéquates de stockage, la cuisson inadéquate et la contamination croisée sont des facteurs déterminants dans la transmission des salmonelles (AFSSA, 2002; EFSA et ECDC, 2014). S’agissant de la fréquence de l’agent infectieux, plus de 60% des toxi-infections alimentaires dans le monde sont dues à Salmonella. Les salmonelles constituent la cause majeure de la mortalité infantile dans les pays en voie de développement et un risque permanent dans les pays industrialisés (INRS, 2005a; OMS, 2013). De ce fait, les salmonelloses sont devenues un problème de santé publique; ce qui a justifié l’implication de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) dans leur lutte à travers le programme « Global Salm-Surv » (OMS, 2005).
Symptomatologie des TIAC à Salmonella
En cas d’ingestion d’une denrée contaminée par les salmonelles, le temps d’incubation est fonction de la dose ingérée et peut varier de 6 et 18 heures. La symptomatologie est essentiellement gastro-intestinale : diarrhée, douleurs abdominales vomissements à laquelle peuvent s’ajouter des céphalées et de la fièvre (AFSSA, 2002; Larousse, 2014a). L’évolution est généralement favorable en 2 à 5 jours (InVS, 2012; Le Minor, 2014). Cependant, chez les sujets ayant un déficit immunitaire et les nourrissons, des complications peuvent survenir. Il peut s’agir de septicémies, d’atteintes vasculaires et articulaires (Tauxe, 2002).
Symptomatologie liee à Staphylococcus aureus
La symptomatologie lors des TIAC dues aux entérotoxines staphylococciques chez l’homme est souvent bénigne et la guérison spontanée. Après la période d’incubation courte ; d’une demi-heure à huit heures ; en moyenne 3h, les malades étant encore sur lieu de repas (Larousse, 2014a) ; apparaissent des sensations de nausée, de vertiges accompagnées de céphalées et éventuellement de sialorrhée. Ces prodromes sont rapidement suivis de vomissements incoercibles et violents. La température est généralement normale. Les vomissements disparaissent en 2 à 5 heures. La mortalité est exceptionnelle et le rétablissement intervient dans les 24 à 48 h et sans séquelle (AFSSA, 2002). Toutefois, chez les nourrissons et les personnes âgées, en raison de la déshydratation brutale que provoquent les vomissements et les diarrhées, on peut observer un état comateux et de la prostration.
Symptomatologie de la listériose humaine
Les infections par Listeria monocytogenes chez des personnes en bonne état physiologique se traduisent par de la fièvre, des douleurs musculaires, des maux de tête, des frissons et une coloration des urines. Plus rarement, on observe une pharyngite et des diarrhées (Dalton et al., 1997; INRS, 2008a; Riedo et al., 1994). On parle alors de syndrome pseudo-grippal (Janakiraman, 2008). Par contre, chez des individus immunodéprimés tels que les femmes enceintes, les personnes âgées et les porteurs d’une affection intercurrente sont particulièrement sensibles à la listériose (Slutsker et Schuchat, 1999). Ces dernières peuvent développer des symptômes plus sévères tel que la septicémie avec une atteinte souvent mortelle (Fleming et al., 1985; Linnan et al., 1988; Riedo et al., 1994). Lorsque la bactérie atteint le système nerveux central, on peut observer des convulsions, des déficits des nerfs crâniens et des tremblements, l’endocardite ou abcès du cerveau. Dans cette forme disséminée, la listériose a un taux de létalité de 20% à 50%. Chez la femme enceinte, cette bactérie emprunte la voie trans-placentaire et provoque la contamination du fœtus. Cela conduit soit à un avortement avec mort du fœtus in utero soit à un accouchement prématuré. Dans d’autres cas, la grossesse se poursuit normalement avec un nouveau-né atteint de méningite pouvant avoir des séquelles neurologiques. Cette forme est qualifiée de listériose maternelle et néonatale (Janakiraman, 2008).
Virus de l’hépatite E
Le virus de l’Hépatite E (VHE) ou « Human hepatitis virus E (HEV) » est un virus nu à ARN appartenant à la famille des Hepeviridae, genre Hepevirus (Smith et al., 2014). Le VHE a été détecté chez les humains, le porc, le sanglier et dans les coquillages (AFSSA, 2006c; Namsai et al., 2011). Des cas de contamination humaine ont été signalés suite à la consommation de viande de porc (Colson et al., 2010; Feagins et al., 2007; Mishiro, 2004; Ponterio et al., 2014), des coquillages bivalves et autres fruits de mer (Jiang et al., 2010; Namsai et al., 2011). Le HEV se transmet également au travers de l’eau de boisson contaminé (Wedemeyer et al., 2012) et les produits sanguins infectés (Hewitt et al., 204AD). La maladie est responsable de nombreuses éclosions d’hépatite en particulier après les grandes inondations ou dans les camps de réfugiés (CDC, 2013; Wedemeyer et al., 2012). Chez l’homme, dans plus de 99% des cas, l’infection à VHE est asymptomatique et la guérison est spontanée (Pischke et al., 2014). Chez les personnes immunodéprimées notamment les femmes enceintes, les patients atteints d’une maladie chronique du foie, les porteurs du VIH/SIDA et les transplantés, on peut observer une insuffisance hépatique chronique (Kamar et al., 2008; Wedemeyer et al., 2012), l’arthralgie (Al Shukri et al., 2013) et le syndrome de Guillain-Barré (Van Den Berg et al., 2014) qui est une forme de paralysie ressemblant à la poliomyélite et pouvant entraîner des dysfonctionnements respiratoires et neurologiques sévères, voire la mort.
Epidémiologie et cycle évolutif des Tænia
Tænia saginata a besoin de deux hôtes pour se développer. L’hôte intermédiaire est le bœuf même si d’autres animaux domestiques comme le chameau et le mouton y sont sensibles, alors que l’hôte définitif est l’homme (Pawlowski et Schultz, 1972). Ce dernier rejette les œufs de Tænia saginata dans l’environnement et le bovin se contamine en broutant l’herbe contaminée par les œufs de Tænia saginata. Les œufs éclosent dans le tube digestif du bœuf pour donner des larves lesquelles seront entrainées par le sang dans tout l’organisme pour se fixer enfin dans les muscles de prédilection tels que les muscles masséters, les muscle de la langue, le myocarde et le diaphragme (Michelet, 2010). L’homme contracte le téniasis en ingérant les cysticerques contenus dans la viande de bœuf insuffisamment cuite. Une fois dans le corps humain, les cysticerques se développent et, au stade adulte, s’installent au niveau de l’intestin où ils libèrent des proglottis gravides. Les œufs sont expulsés lors de la défécation et le cycle recommence (OMS, 2013b). Quant aux Tænia solium, le porc qui est l’hôte intermédiaire (Anofel, 2014) se contamine en ingérant les œufs au cours de son alimentation. L’homme s’infeste en ingérant cette viande insuffisamment cuite (CDC, 2014; Michelet, 2010; Youn, 2009) ou à la suite d’une autoinfestation par voie féco-orale. Dans ce cas, les œufs ou proglottis gravides regagnent le corps par la bouche et se rendent souvent dans les muscles, les yeux ou le système nerveux central, où ils évoluent en cysticerques. Dans ces emplacements, les cysticerques causent respectivement la cysticercose musculaire, la cysticercose oculaire (OMS, 2013b) ou la cysticercose cérébrale appelée neurocysticercose (Anonyme, 2014a; Aubry et al., 1995; Ndimubanzi et al., 2010). L’homme devient alors un cul-de-sac épidémiologique pour Tænia solium.
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Table des matières
INTRODUCTION
MATÉRIEL ET MÉTHODES
PARTIE I: PRINCIPAUX DANGERS BIOLOGIQUES TRANSMIS PAR LES ALIMENTS
1.1. Dangers zoonotiques responsables d’intoxination ou toxi-infections alimentaires
1.1.1. Salmonella spp
1.1.2. Escherichia coli producteur de shigatoxines
1.1.3. Yersinia enterocolitica
1.1.4. Clostridium spp
1.1.5. Staphylococcus aureus
1.1.6. Bacillus cereus
1.1.7. Vibrio spp
1.2. Dangers zoonotiques responsables d’infections alimentaires
1.2.1. Brucella spp. et la fièvre de Malte
1.2.2. Campylobacter spp
1.2.3. Listeria monocytogenes
1.2.4. Mycobacterium bovis et la tuberculose d’origine animale
1.2.5. Virus de l’hépatite A
1.2.6. Virus de l’hépatite E
1.2.7. Norovirus
1.2.8. Rotavirus
1.2.9. Prions
1.3. Dangers zoonotiques responsables d’infestations alimentaires
1.3.1. Kystes de Toxoplasma gondii et la toxoplasmose
1.3.2. Kystes à Cysticercus spp. et les Tæniasis
1.3.3. Trichines
1.3.4. Kystes de Sarcocystis spp. et la sarcosporidiose
1.4. Quelques dangers non zoonotiques à impact alimentaire
1.4.1. Amines biogènes
1.4.2. Virus influenza de type A: sous-types H5N1 et H1N1
1.4.3. Virus Ebola
PARTIE II : DROIT ALIMENTAIRE EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS
2.1. Droit alimentaire applicable à l’échelle internationale
2.1.1. Accord sanitaire et phytosanitaire (SPS)
2.1.2. Normes, codes et lignes directrices du Codex Alimentarius
2.1.3. Code sanitaire pour les animaux terrestres de l’Organisation mondiale de la santé animale
2.2. Législation alimentaire applicable à l’échelle communautaire
2.2.1. Réglementation en vigueur dans l’Union Européenne
2.2.2. Réglementation en vigueur au sein de l’UEMOA
2.3. Législation nationale en matière de sécurité sanitaire des aliments : cas du Sénégal
2.3.1. Les lois sénégalaises relatives à la sécurité sanitaire des aliments
2.3.2. Les décrets sénégalais relatifs à la sécurité sanitaire des aliments
2.3.3. Les arrêtés sénégalais relatifs à la sécurité sanitaire des aliments
2.4. Moyens de vérification de l’application du droit alimentaire en matière de sécurité sanitaire des aliments
2.4.1. Organismes nationaux de sécurité sanitaire des aliments
2.4.2. Contrôles officiels des denrées alimentaires
2.4.3. Critères microbiologiques et critères chimiques de sécurité
2.4.4. Réseaux d’alerte et de surveillance des maladies alimentaires
2.4.5. Analyse de risques
PARTIE III : OUTILS DE MAITRISE DE LA SÉCURITÉ SANITAIRE DES ALIMENTS A L’USAGE DES PROFESSIONNELS DE L’AGROALIMENTAIRE
3.1. Méthodes préventives des dangers biologiques dans la chaîne alimentaire
3.1.1. Bonnes pratiques d’hygiène et de fabrication
3.1.2. Analyse des dangers par la Méthode HACCP
3.1.3. Plan de nettoyage et de désinfection
3.1.4. Traçabilité des lots et traitement des non-conformités
3.2. Méthodes physiques de traitement d’assainissement des aliments
3.2.1. Traitement des aliments par la réduction de l’activité de l’eau
3.2.2. Traitement d’assainissement des aliments par la chaleur
3.2.3. Traitement des aliments par les rayonnements ionisants
3.2.4. Traitement des aliments par le froid
3.3. Méthodes chimiques de traitement des aliments
ANALYSE & DIGNOSTIC, CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES ET RECOMMANDATIONS
CONCLUSION
LISTE DES RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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