Confusion des modes de réalisation des actifs lors de la cession du fonds de commerce

Une bonne part de ce que le droit commercial a pu compter de grands esprits a, un jour, pris place au chevet de cette curieuse créature juridique qu’est le fonds de commerce pour en examiner les caractéristiques et en analyser les originalités. Reste-t-il seulement une pierre qui n’ait pas été tournée sur ce chemin déjà maintes fois arpenté ? L’homme de droit peut-il seulement trouver au sein d’un tel sujet un bel os sur lequel exercer sa sagacité ? En droit commun, on répondrait instinctivement par la négative. Les cessions de fonds de commerce obéissent à un régime dédié, dont les particularités, notamment en termes de publicité, sont depuis longtemps régulées par une législation dont la pratique a pu démontrer qu’elle était satisfaisante et à l’épreuve du temps.

L’objet même de la cession ne conserve plus guère de mystères, et ce malgré l’absence notable de définition légale . Depuis son introduction au sein de notre législation, par le truchement de la loi de 1909 organisant son nantissement, le fonds de commerce a été l’objet de toutes les attentions. Son anatomie a été disséquée avec soin, mettant à jour son organisation intime et révélant sa nature juridique profonde ; jusqu’à ses failles conceptuelles, qui commandent d’ailleurs pour certains, sinon un bannissement, tout du moins de lourds travaux de rénovation. Pourtant, en dépit des critiques qui lui sont adressées, à notre sens fondées pour une part d’entre elles, le fonds de commerce conserve à l’heure actuelle sa pertinence, et une place indiscutablement centrale au sein du droit commercial moderne, malgré l’émergence récurrente de notions concurrentes. Aussi ne pourrait-on nier le caractère superflu d’une nouvelle étude sur ce sujet peu enclin à l’évolution.

Confusion des modes de réalisation des actifs lors de la cession du fonds de commerce

Le droit des entreprises en difficulté constitue un terrain passionnel. Des enjeux patrimoniaux essentiels pour les parties en présence s’y opposent. D’autres préoccupations, reflets de la lourde somme d’attentes liées à l’issue de la procédure, se greffent également à ceux-ci. Ainsi, au chef d’entreprise qui voit le contrôle de cette dernière lui échapper progressivement, et dont la principale ambition est souvent la préservation de cette dernière, s’oppose la masse des créanciers, alors désireuse d’obtenir le remboursement des sommes qui ont été engagées pour permettre d’assurer l’exploitation. S’additionne ensuite notamment la nécessité de traiter le plus équitablement possible les salariés de l’entreprise concernée, qui peuvent être désorientés par un contexte anxiogène, ainsi que les cocontractants engagés dans une relation commerciale incertaine.

Ces intérêts souvent contradictoires, exacerbés encore par les difficultés économiques, sont également soumis à des principes économiques d’un rang supérieur  , que le droit des entreprises en difficulté vient nuancer. La mise en œuvre des modes de cession des actifs de l’entreprise, ou de l’entreprise elle-même, tout particulièrement dans le cadre de la liquidation judiciaire, dévolue aux situations irrémédiablement compromises, cristallise ces tensions économiques et humaines. De ceux-ci dépendent l’avenir de l’entreprise, ainsi que celui de ceux qui y sont liés. Afin que les droits des intervenants soient respectés, deux éléments sont indispensables : des régimes de cession efficacement organisés par la loi, ainsi qu’une distinction invariable, et théoriquement indiscutable, des concepts servant de base à l’application de ces régimes.

La transparence du déroulement de la procédure est la condition préalable à sa réussite, et le socle de sa crédibilité. Le doute et l’aléa doivent être exclus d’un environnement aussi tourmenté. Or, une confusion délétère, un « aspect pathologique » des régimes de cession se sont rapidement manifestés à l’usage, initialement du fait de la convergence conceptuelle des ensembles de biens déterminant leurs domaines d’application respectifs, péché originel auquel se sont greffées d’autres insuffisances d’origines législative et procédurale. Ces altérations des régimes de réalisation de l’actif en liquidation judiciaire doivent par conséquent être précisément identifiées afin de proposer des améliorations appropriées.

La confusion des régimes de réalisation des actifs en liquidation judiciaire se révèle lorsque le bien cédé est un fonds de commerce, mettant à jour les carences théoriques et procédurales des régimes légaux existants, et questionne en conséquence tant leur légitimité au sein du corps de règles applicable dans le cadre du droit des entreprises en difficulté, que leur efficacité réelle au moment de leur mise en œuvre dans ce cas particulier.

Causes théoriques de la confusion : carences conceptuelles des régimes de cession applicables au fonds de commerce 

L’entreprise et le fonds de commerce sont deux notions qui se distinguent par un stade de conceptualisation inégalement avancé. Or les régimes du plan de cession et de la cession de biens isolés exigent, comme critère d’application, la reconnaissance de concepts suffisamment définis pour diviser efficacement leurs domaines d’application respectifs. Il convient donc d’évaluer si les notions actuelles souscrivent à ces exigences. La principale interrogation concerne la notion d’entreprise lorsque celle-ci est cédée dans le cadre particulier du plan de cession. Il nous faudra déterminer si elle recouvre dans cette situation toutes les caractéristiques habituellement conférées à l’entreprise, qu’elle qu’en soit la perception retenue, et débrouiller l’intimité de ses rapports avec le fonds de commerce qu’elle héberge.

Ce premier titre a donc pour ambition de soumettre au lecteur une analyse théorique parallèle des notions d’entreprise et de fonds de commerce, en abordant consécutivement selon une approche globale, leur nature juridique (Chapitre I), puis, selon une approche plus détaillée, l’organisation intime des éléments constitutifs de celles-ci (Chapitre II). Ces deux notions seront confrontées à chaque étape de notre raisonnement, en analysant dans un premier temps l’approche prônée par le droit commun, puis en observant ensuite l’action des mécanismes propres aux procédures collectives sur ceux-ci.

Convergence progressive des natures juridiques du fonds de commerce et de l’entreprise

La nature, les éléments constitutifs et la structuration du fonds de commerce ont déjà fait l’objet d’un nombre significatif d’études et d’articles, ainsi que d’un effort décisif de définition de la part du droit prétorien. Ces derniers trouvent leur raison d’être dans le manque de précision entretenu par le législateur depuis l’apparition de la notion. Néanmoins, il reste nécessaire d’entreprendre une étude théorique et technique de ce dernier. La spécificité de notre approche vient de ce qu’elle place celui-ci dans une perspective évolutive. A l’origine élément principal d’un ensemble sain, nous l’observerons plus spécialement lors de son appréhension par le droit des entreprises en difficulté, pour en poursuivre l’étude dans le cadre particulier des cessions opérées dans le cadre de la réalisation des actifs en liquidation judiciaire, qui relèvent du chapitre II du Titre IV du Livre VI du Code de Commerce.

L’enjeu de cette étude est, sur ce point, double. La délimitation des limites juridiques de cette notion est indispensable pour établir si ce dernier est invariable. Il nous faudra donc déterminer si ces dernières peuvent être qualifiées de mouvantes, ou bien si celles-ci sont au contraire aujourd’hui fermement balisées, et insusceptibles d’être influencées par les situations économiques rencontrées. La même analyse sera ensuite appliquée à l’entreprise, principale notion concurrente du fonds de commerce lors des cessions d’actifs, plus évanescente que la première car teintée de droit social, là où la première est essentiellement une construction ayant ses origines dans le droit des biens. (Section I).

Une fois les natures juridiques du fonds de commerce et de l’entreprise arrêtées, une analyse comparative des particularités apparaissant au sein de ces deux notions au moment de leur cession en liquidation judiciaire, et des conséquences de ces mutations sur la nature des notions étudiées, pourra être réalisée. Ces notions gardent-t-elles toujours la même nature juridique, ainsi que la même composition, lorsqu’elles sont soumises à des frictions économiques grandissantes, ainsi que peuvent l’être des éléments chimiques soumis à des conditions de pression et de température variables ? (Section II)

Nature juridique du fonds de commerce et de l’entreprise en droit commun 

La première des caractéristiques devant être examinée afin d’établir un comparatif pertinent entre les notions de fonds de commerce et d’entreprise, doit être leur nature juridique. L’établissement de cette dernière permet de déterminer les contours généraux de chacune d’elles, et de procéder à un rapprochement des silhouettes ébauchées. Nous appréhenderons tout d’abord la nature juridique du fonds de commerce (I), et évoquerons ensuite celle de l’entreprise (II).

Nature juridique du fonds de commerce 

La nature juridique du fonds de commerce ne peut être abordée de manière unidimensionnelle. Elle ne peut être exhaustivement traitée qu’au moyen d’une approche décomposant son étude en plusieurs étapes. En premier lieu, il sera judicieux de rappeler le rôle patrimonial central qui reste attaché au fonds de commerce dans la majorité des cas rencontrés (A). Ensuite, constituant, tout comme l’entreprise, un ensemble complexe de biens, la qualification de l’universalité qu’ils constituent doit impérativement être précisée (B). Nous pourrons, enfin, déduire des constatations établies la nature juridique profonde du fonds de commerce (C).

Approche économique du fonds de commerce
En préliminaire, il convient de rappeler le caractère exceptionnel de ce bien particulier qu’est le fonds de commerce, et son importance patrimoniale déterminante tant en droit commun (1), que dans le cadre spécifique du droit des procédures en difficulté (2).

Valeur patrimoniale du fonds de commerce en droit commun
Le fonds de commerce est depuis sa création une notion centrale de la vie des affaires, dont la perception, contrairement à l’entreprise, est univoque. Malgré son âge vénérable, le débat récurrent autour de sa supposée obsolescence n’a pas encore pu, à l’heure à actuelle, parvenir à l’évincer, notamment du fait de certaines de ses caractéristiques intimes (a), mais également du fait des conséquences juridiques que sa reconnaissance engendre (b).

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Table des matières

Introduction
Partie I) Confusion des modes de réalisation des actifs lors de la cession du fonds de commerce
Titre I) Causes théoriques de la confusion : carences conceptuelles des régimes de cession applicables au fonds de commerce
Chapitre I) Convergence progressive des natures juridiques du fonds de commerce et de l’entreprise
Chapitre II) Convergence progressive de la structuration de l’entreprise et du fonds de commerce
Titre II) Causes techniques de la confusion : insuffisances procédurales des régimes de cession applicables au fonds de commerce
Chapitre I) Carences du contrôle du périmètre des biens cédés par les organes de la procédure
Chapitre II) Carences du contrôle judiciaire du périmètre des biens cédés
Partie II) Propositions de réforme des régimes de cession applicables au fonds de commerce lors de la réalisation des actifs
Titre I) Identification des axes de réforme
Chapitre I) Maintien d’un régime dualiste
Chapitre II) Adoption d’un régime unifié
Titre II) Apports de l’unification des régimes de cession applicables au fonds de commerce lors de la réalisation des actifs en liquidation judiciaire
Chapitre I) Préparation et mise en œuvre des cessions
Chapitre II) Régime des contrats cédés
Conclusion Générale

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