Politique de l’EMI : les élèves de cycle 1 confrontés à leurs usages
Statut et développement de l’enfant de cycle 1
Développement de l’enfant
L’article 1 de la Convention du comité des droits de l’enfant des Nations Unies dispose qu’«au sens de la présente convention, un enfant s’entend de tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt, en vertu de la législation qui lui est applicable » (Collectif AEDE, 2015).
Dans son rapport, Stratégie pour une politique de santé, en 1992, le Haut Comité de la Santé Publique définit l’enfance et l’adolescence comme “les périodes du développement physique et mental, de l’acquisition d’un capital culturel et scolaire plus ou moins important, de l’intégration de la vie sociale plus ou moins réussie un moment d’identification personnelle et sociale celui où achève de se constituer son capital de santé. Celui-ci peut et doit atteindre un niveau considérable, mais il risque d’être dilapidé par négligence, ignorance ou par des conduites à risques, dilapidation qui peut accumuler les facteurs de risques pour les stades ultérieurs de la vie” (Haut Comité de Santé Publique, 1992).
Selon Catherine Tourrette, “trois grandes étapes jalonnent le développement de l’enfant : la petite enfance qui couvre la période de la crèche et celle de l’école maternelle, la période de l’école primaire, puis celle du collège et du lycée. Chaque étape a des caractéristiques saillantes : le spectaculaire développement du tout-petit, les investissements sociaux et scolaires de l’écolier, les transformations adolescentes du collégien et du lycéen” (Tourette, 2010).
Elle nous apprend que ces trois grands moments de la vie s’enchaînent dans une continuité avec pour chacun d’eux, des transitions et des réorganisations. Cette continuité permet à l’adulte en devenir de rester lui-même et de se construire une identité personnelle en prenant conscience de ses différences avec l’autre.
La période de l’enfance est l’accès à l’autonomie à travers sa prise de conscience dans son individualité simultanément à travers les apprentissages moteurs, cognitifs et sociaux.
Catherine Tourrette affirme ainsi que “le développement de l’enfant se fait en interaction avec son environnement social et physique. C’est accompagné par l’adulte, que le jeune enfant apprend le monde, apprend à penser et à parler” (Tourette, 2010).
Le sujet de cette recherche s’attarde plus particulièrement sur le développement de l’enfant lors des premières phases de son développement. Plusieurs théories existent.
La plus commentée dans la documentation est celle de l’approche classique du développement cognitif et métacognitif de l’enfant selon Piaget.
Selon lui, l’action de l’enfant sur le monde et l’environnement contribue à sa construction, c’est la notion d’éducabilité́. Les acquisitions, organisées en stades, s’emboîtent. Ainsi jusqu’à̀ 2 ans : le stade sensori-moteur (construction du schème (structure, organisation), de l’objet permanent et de l’espace proche lié au corps). De 2 à 11 ans : le stade concret avec une période pré́-opératoire de 2 ans à 6-7 ans, (avènement des notions de quantité́, d’espace, de temps, de la fonction symbolique, du langage, etc.…). A ce dernier s’ajoute le stade des opérations concrètes de 6-7 ans à 11 ans où l’enfant devient capable de coordonner des opérations dans le sens de la réversibilité́ ainsi que d’une certaine logique mais toujours avec un support concret. Selon Piaget, le stade pré́-opératoire caractérise l’enfant scolarisé en maternelle. Ainsi, entre 2 et 4 ans, il parle d’émergence de la pensée symbolique.
Celle-ci se caractérise de différentes manières :
– Connaissance perceptivo-motrice de son milieu proche
– Capacité de symboliser ce qu’il connaît : le jeu symbolique (faire semblant de), le dessin (traces desquelles émergent progressivement le sens)
– Explosion du langage à cette période (de 200 à 2000 mots)
– Passage à l’imitation différée qui montre sa capacité d’assimilation du réel
– Absence de concept (de généralisation) : l’enfant ne peut conceptualiser que ce qu’il connaît, ce qu’il a touché́, ce qu’il a perçu.
– Début des images mentales (évocation des images absentes)
– Approche chronologique mais non globale.
A partir de 4 ans, il parle d’émergence de la pensée intuitive. Selon sa théorie, c’est une pensée qui se complexifie mais qui reste intuitive (se passe de raisonnement), soumise au primat du figuratif sans distanciation du réel. Ensuite, vers 5 ans et demi, on identifie une évolution mais la pensée reste encore très perceptive, les opérations mentales de transformation apparaissent (Piaget, 1936). De ce fait, on retient que selon Piaget, l’enfant peut construire une représentation mais seulement à partir de son point de vue, qu’il est incapable de déconnecter sa pensée du réel (ce qu’il voit est réel). Il ajoute que l’enfant prête une intentionnalité́ aux choses (exemple : la télévision c’est pour « de vrai ») et qu’il cherche une finalité́ à toute chose (c’est la période du pourquoi).
Selon Serge Tisseron, “entre la naissance et 5 ans, ce sont tous les fondamentaux intellectuels et émotionnels de la personne en devenir qui se mettent en place. Le cerveau triple de taille et son réseautage est en expansion exponentielle. C’est aussi pendant cette période charnière que le futur adulte prend ses habitudes et fixe nombre de comportements et de préférences. C’est pourquoi plus l’enfant multiplie les expériences, et notamment les expériences de jeu, et plus il s’outille à la fois physiquement, intellectuellement et socialement” (Tisseron, 2011).
Recentrons-nous sur le sujet en faisant le lien avec les capacités du petit enfant en lien avec ses usages numériques.
Développement cognitif de l’enfant et usage numérique
Pour recentrer le sujet de la recherche, faisons désormais le lien entre le développement cognitif de l’enfant et leur usage numérique.
L’Académie des Sciences donne un avis éclairé dans un ouvrage L’enfant et les écrans, afin d’identifier les étapes clés du développement de l’enfant et les préconisations qui en découlent en matière de numérique. Les auteurs déconseillent l’exposition passive et prolongée devant les écrans, des enfants de 2 à 3 ans. Ils précisent qu’“ il est préférable que la publicité soit proscrite des programmes pour enfants (…) car à un âge où l’enfant ne peut pas clairement les distinguer et brouille ses repères (…)” (Bach, Houdé, Léna, Tisseron, 2013). Ensuite, “à partir de 3 ans, le développement des diverses formes de jeux symboliques invitant l’enfant à faire semblant, l’éduque à distinguer le réel du virtuel” (Bach, 2013). L’académie de sciences ajoute qu’il est important de faire verbaliser les enfants sur ce qu’ils voient sur les écrans afin de les sensibiliser à cette frontière entre le réel et le virtuel. Ils appuient également l’importance de prévenir des dérives de l’adolescence dès la maternelle. Enfin, “à partir de 4 ans, les ordinateurs et console de salon peuvent être un support occasionnel de jeu en famille, voire d’apprentissage accompagné” (Bach, 2013). Ils accentuent l’idée que cet usage doit être occasionnel et précisent que l’acquisition d’un outil numérique personnel pour l’enfant apporte plus d’inconvénients que d’avantage puisque le danger est que l’enfant se réfugie dans un monde virtuel à travers les écrans au détriment d’un monde réel. Enfin, ils rappellent que le temps passé sur les écrans doit être étudié au cas par cas, ne doit pas être excessif et ne doit pas remplacer les autres activités qui forgent l’enfant.
Cet âge charnière développé par les experts amène cette recherche vers une réflexion de l’enfant en tant qu’élève de cycle 1. En effet, l’école maternelle est un lieu où le jeune enfant va découvrir, acquérir et expérimenter différents savoirs à travers les apprentissages, le jeu et les activités.
L’enfant, élève de cycle
Le projet de cette recherche s’appuie sur l’enfant en tant qu’élève de cycle 1.
Identifions maintenant le niveau de compréhension des enfants en maternelle.
C’est ce que présente Christine Brisset dans sa recherche sur le développement du jeune enfant. Elle mentionne notamment le site EDUSCOL, le site du ministère de l’éducation nationale qui propose aux enseignants des références traditionnelles.
On peut ainsi y lire dans les premières lignes consacrées à « quelques éléments de réflexion sur le développement de l’enfant et l’apprentissage », des références explicites à Henri Wallon, Jean Piaget, Lev Vygotski et Jérôme Bruner pour « tenter de décrire et d’expliquer le développement de l’enfant ». Ainsi leurs travaux sont cités pour, malgré leurs divergences, dégager des principes communs : « l’existence de repères dans le développement, l’apprentissage par l’action et le vécu et l’importance de l’utilisation du langage » (Brisset, 2010). Christine Brisset s’accorde donc à dire qu’il y a plusieurs niveaux de compréhension. Elle ajoute ainsi que “la maternelle est une période de transition pendant laquelle l’enfant construit sa personnalité. Il développe sa singularité dans une structure collective et c’est toute l’ambivalence et la difficulté de réussir son intégration et la progressivité des apprentissages. L’aider à développer du langage, des connaissances et compétences diverses et plus généralement l’aider à devenir citoyen est une tâche ardue, lourde de responsabilité” (Brisset, 2010).
L’école maternelle comporte plusieurs enjeux pour le petit enfant. Selon le site du ministère de l’éducation nationale EDUSCOL, “l’école maternelle accueille les enfants au début de l’instruction obligatoire qui débute à 3 ans. Elle est le plus souvent organisée en petite, moyenne et grande section, en fonction de l’âge des enfants. Les locaux des écoles appartiennent aux communes qui ont la charge de leur entretien”. (EDUSCOL, 2020). Depuis la rentrée 2019, l’instruction est obligatoire dès 3 ans. Les enfants de moins de 3 ans peuvent être scolarisés dans des modalités d’accueil différentes :
– Dans une classe de l’école maternelle, spécifique et adaptée aux besoins des jeunes enfants,
– Dans des classes de l’école maternelle comportant un ou plusieurs niveaux,
– Dans un milieu mixte, associant services de petite enfance et école, permettant d’offrir du temps scolaire dans des dispositifs conçus localement.
L’école maternelle constitue un cycle unique d’enseignement, fondamental pour la réussite de tous les élèves. Elle se caractérise selon trois grands axes :
– Une école qui s’adapte aux jeunes enfants, qui s’attache à garantir leur sécurité affective et à développer leur confiance en eux
– Une école qui organise des modalités spécifiques d’apprentissage, les prépare aux apprentissages fondamentaux, notamment en développant leur langage, élément essentiel d’accès et de structuration des apprentissages
– Une école où les enfants prennent plaisir à apprendre, à progresser et à vivre ensemble (EDUSCOL, 2020).
Organisée en un cycle unique, l’école maternelle est la première étape pour garantir la réussite de tous les élèves au sein d’une école juste pour tous et exigeante pour chacun. Elle s’adapte aux jeunes enfants en tenant compte de leur développement et construit des passerelles entre la famille et l’école. Elle organise des modalités spécifiques d’apprentissage en mettant en place des situations variées : résolution de problèmes, manipulation, entraînements, mémorisation. Le jeu y tient une place particulière : il favorise la richesse des expériences vécues et des échanges qui en découlent dans tous les domaines d’apprentissage. L’école maternelle permet aussi aux enfants d’apprendre ensemble et de vivre ensemble : elle assure une première acquisition des principes de la vie en société et du respect d’autrui, en permettant à l’enfant de se construire comme personne singulière au sein d’un groupe (EDUSCOL, 2020). Les enseignements sont organisés en cinq domaines d’apprentissage :
– Mobiliser le langage dans toutes ses dimensions
– Agir, s’exprimer, comprendre à travers l’activité physique
– Agir, s’exprimer, comprendre à travers les activités artistiques
– Construire les premiers outils pour structurer sa pensée
– Explorer le monde.
Chacun de ces cinq domaines est essentiel au développement de l’enfant et doit trouver sa place dans l’organisation du temps quotidien. La place primordiale du langage est réaffirmée comme condition essentielle de la réussite de toutes et de tous.
La pratique d’activités physiques et artistiques permet de développer les interactions entre l’action, les sensations, l’imaginaire, la sensibilité, la pensée et le langage. Les domaines « Construire les premiers outils pour structurer sa pensée » et « Explorer le monde » s’attachent à développer une première compréhension des nombres et des premiers outils mathématiques, de l’environnement des enfants et à susciter leur questionnement. Le besoin d’exploration, de découverte, de manipulation, d’expérimentation, de jeu et d’échanges des jeunes élèves est stimulé pour les conduire vers la maîtrise progressive de compétences et de connaissances nouvelles.
En s’appuyant sur des connaissances initiales liées à leur vécu, l’école maternelle met en place un parcours qui leur permet d’ordonner le monde qui les entoure, d’accéder à des représentations usuelles et à des savoirs que l’école élémentaire enrichira (EDUSCOL, 2020).
Au regard des programmes de cycle 1, où se place l’éducation aux médias et à l’information dans ces derniers ?
Le numérique : nouveau média complexifiant l’EMI
Depuis plusieurs années, l’EMI fait face à de nouveaux médias, notamment avec le développement constant du numérique. Avec ce dernier, on fait passer le récepteur de l’information en un producteur et un diffuseur. Ce nouvel aspect de l’information vient complexifier l’éducation aux médias car les sources sont multipliées. A cela, s’ajoute la rapidité du partage des données, on fait donc face à toujours plus d’informations en un temps restreint et à temps réel. La circulation de ces informations est facilitée mais la multiplicité des sources appropriées et transformées par les utilisateurs de ces nouveaux médias alimente la désinformation et l’apparition de contenus erronés. De ce fait, l’éducation aux médias et à l’information se voit attribuer de nouvelles missions et prend davantage tout son sens pour former les élèves, futurs citoyens, à aiguiser leur sens critique et apprendre à traiter l’information de différentes façons. Comme l’explique Marlène Loicq, docteure en sciences de l’information, “le numérique ne vient pas modifier l’ordre de composition des actions de l’éducation aux médias, mais complexifier chacun d’eux en leur assignant de nouvelles propriétés et fonctions(…). L’enjeu est de taille puisqu’il s’agit en fait de simplifier la compréhension des médias à mesure que leurs fonctionnements se complexifient” (Loicq, 2017). Le numérique est donc un changement de format de l’information, qui voit apparaître, avec lui, différents outils pour la créer et la gérer. Ces outils appelés technologies de l’information et de la communication (TIC) demandent de redéfinir la place des usagers et leurs rôles en matière de médias et d’informations. Comme l’explique Marlène Loicq, “le numérique renforce la nécessité de clarifier la démarche critique en éducation aux médias en renforçant les éléments systémiques auxquels elle s’adosse” (Loicq, 2017). Cette notion de nouveaux rôles des usagers dans le monde médiatique est également relatée par Louis Porcher, il y a quelques années déjà, à l’aube des nouvelles pratiques numériques. Il évoque les individus comme “responsables des idéologies en circulation”. Il ajoute que “c’est sur cet aspect que l’éducation aux médias encourage un usage raisonné et le développement d’une éthique dans les pratiques médiatiques. Cette responsabilisation doit se faire en amont d’un usage autonome et s’appuyer sur une compréhension des mécanismes de communication qui fondent les médias” (Porcher, 2006). Ainsi, l’éducation aux médias et à l’information prend un nouveau tournant avec l’accroissement du numérique. Cette notion complexe et dont la réflexion est en perpétuel mouvement est clairement résumée par Marlène Loicq. En effet, elle aborde l’EMI à l’ère du numérique comme “un accompagnement vers la compréhension critique des logiques communicationnelles et des enjeux d’ordres économiques, politiques, culturels, sociaux et techniques des usages des médias, ceux-ci étant à prendre en compte dans l’environnement spécifique dans lequel ils prennent place. Celui-ci concernant donc tout à la fois le système médiatique et la singularité des usagers” (Loicq, 2017).
L’éducation aux médias et à l’information est un domaine complexe, elle appréhende le cercle médiatique afin d’aiguiser la pensée critique des individus. Mais avec la création du numérique et l’émergence de nouvelles pratiques, où les utilisateurs sont devenus des producteurs et des diffuseurs de l’information, il a été nécessaire de repenser les enjeux qu’impliquent l’EMI de façon générale et également au sein de l’école.
On remarque donc que même si les programmes de cycle 1 abordent brièvement les contours de l’éducation aux médias et à l’information de façon transversale au sein des différents domaines, elle débute réellement à partir du cycle 2. Ce positionnement tient compte des représentations de la société concernant les usages des enfants.
Selon les experts sur lesquels le ministère de l’éducation nationale s’appuie, il est essentiel d’éduquer les jeunes avant qu’ils aient des usages. Dans la littérature actuelle, ces usages sont répertoriés plus particulièrement chez les adolescents mais l’on voit apparaître depuis environ 5 ans, des chiffres qui s’intéressent aux enfants à partir de 9 ans, c’est ainsi qu’il a été décidé dans les nouveaux programmes de débuter l’EMI à partir du CP. Regardons de plus près l’état de la recherche concernant ces usages.
Utilisation massive des réseaux sociaux numériques centrés sur l’image
Selon une étude réalisée par l’agence Heaven et l’association Génération Numérique, bien que légalement interdits aux moins de 13 ans, les réseaux sociaux sont aujourd’hui le terrain de jeu de cette jeune génération, souvent équipée d’outils numériques dès le plus jeune âge. Ainsi, l’étude Born Social, a observé les comportements numériques des 11-12 ans.
Cette étude de 2017 nous apprend que les jeunes de cette tranche d’âge sont davantage friands, via leurs smartphones, des SMS, des applications de messagerie tels que Messenger ou Whatsapp ainsi que des jeux en ligne comme Fornite (CNIL, 2017). Cependant, selon l’étude on apprend que concernant les réseaux sociaux, “YouTube est l’application la plus utilisée par le jeune public avec quasiment 60 % d’utilisation, loin devant Snapchat (42,3 %), WhatsApp (39,8 %) et TikTok (39,2 %). Instagram se retrouve étonnement loin derrière avec seulement 22,7 %”. Cette étude récente permet également de connaître l’avis des jeunes utilisateurs concernant les applications ciblées. Par exemple, on apprend que “Facebook est très peu populaire auprès de la jeune génération. Il est vu par les 11-12 ans comme “un truc pas très fun”, principalement à cause de la présence des parents, des risques de mauvaises rencontres mais aussi à cause du contenu peu divertissant”. De plus, on y retrouve TikTok qui bénéficie d’une popularité inédite auprès des enfants. Leurs nouvelles idoles y sont nées à l’instar de Charli d’Amelio, 16 ans, qui totalise bientôt 90 millions d’abonnés. Les réseaux comme Snapchat sont les plus populaires pour “communiquer vite fait”. D’ailleurs, autre usage intéressant : 41 % des enfants indiquent envoyer des messages vocaux via ces applications de messagerie. Enfin, le réseau social Instagram, déjà plus populaire que Facebook, est un réseau, qui selon l’étude, intrigue. Tous les enfants n’y sont pas présents mais ils aimeraient bien car les plus grands l’utilisent. C’est une plateforme qui suscite de la désirabilité (CNIL, 2017).
Réseaux sociaux numériques : de la communication à la diffusion d’images
Selon Vincent Lemieux, un réseau social est un “ensemble de relations entre un ensemble d’acteurs. Cet ensemble peut être organisé (une entreprise, par exemple) ou non (comme un réseau d’amis) et ces relations peuvent être de natures fort diverses (relations de pouvoir, affectives, de conseil, etc.), spécialisées ou non, symétriques ou non. On distingue par exemple les réseaux de parenté, d’affinité, de soutien, marchands, de mobilisation, d’entreprises, concernant les politiques publiques et de clientélisme” (Lemieux, 1999).
Dans un article commun, Camille Capelle et Soufiane Rouissi abordent la notion de réseaux sociaux numériques (RSN) comme “des espaces d’information et de communication du quotidien. Considérés comme des espaces publics, ils recouvrent de nouveaux enjeux d’éducation” (Capelle, Rouissi, 2018). Ils ajoutent que “les RSN comportent trois dimensions : une dimension technologique (services et technologies web, base de données, intelligence artificielle) ; une dimension documentaire (informations personnelles et nominatives, documents, pages, contenus textuels, photos, vidéos) ; une dimension sociale (traces numériques, liens et relations entre les personnes, discussions synchrones ou asynchrones, réactions, partages)” (Capelle, Rouissi, 2018).
Selon le site Futura Tech, “YouTube est un service en ligne d’hébergement et de diffusion de vidéos en streaming qui intègre des fonctionnalités sociales de partage et de commentaires des contenus. Il s’agit de l’un des sites Web les plus visités au monde”. Selon cette même source, “il a été créé en 2005 par trois salariés de PayPal : Chad Hurley, Steve Chen et Jawed Karim. L’année suivante, en octobre, Google fait l’acquisition de YouTube pour 1,65 milliard de dollars. Le service est financé par l’affichage publicitaire inséré dans les vidéos”. De plus, on y apprend que le réseau social compte plus d’un milliard d’utilisateurs. Le service est disponible dans 88 pays et 76 langues. Plus de la moitié du milliard d’heures de vidéos visionnées quotidiennement sont consultées sur des smartphones. La version française de YouTube a été lancée en juin 2007.
Concernant le réseau social Snapchat, Guillaume Belfiore, journaliste high-tech pour le site FuturaTech, nous en donne une définition: “Snapchat est une application de photographie pour smartphones disponible sur iOS et Android. Elle présente la particularité de permettre la publication des clichés éphémères.
Créée par trois étudiants américains en 2011, l’application Snapchat cible principalement les adolescents et a connu plusieurs changements au fil des années.
Aujourd’hui la société Snap présente d’elle-même son application comme un service de messagerie basé sur la photo et au sein duquel les utilisateurs se définissent à un instant T”. Le journaliste nous explique que “l’idée première de Snapchat est de permettre la capture d’une photo ou d’une vidéo “un snap” puis de transformer ce média en message”. De ce fait, contrairement à Facebook, où les réactions à un média peuvent survenir plusieurs jours après la publication, Snapchat n’est pas défini par l’idée d’accumuler des publications mais de déclencher des réactions immédiates via une photographie prise au moment présent.
Pour finir, TikTok, une des dernières applications en vogue chez les jeunes, est expliquée par Pauline Croquet dans un article du journal Le Monde paru en octobre 2018. Dans cet article, la journaliste y explique que TikTok, dont le nom est Douyin en Chine, son pays d’origine, est une application pour smartphones, née en septembre 2016, et éditée par le géant chinois Byte Dance qui s’est fait connaître avec la très populaire plate-forme de contenus d’actualité personnalisés Toutiao. TikTok, elle, est dédiée à la création et au partage de courtes vidéos musicales. Les utilisateurs se filment face caméra faisant du playback ou des chorégraphies. De nombreuses applications concurrentes existent dans les domaines du karaoké, du « lip sync » ou « play-back » comme Triller, Dubsmash, Funimate. Selon Pauline Croquet, “une fois son compte créé, l’utilisateur peut choisir une chanson dans un vaste catalogue. Il peut ensuite se filmer par-dessus face caméra, en faisant semblant de chanter, ou en mimant les paroles. Les vidéos qui durent quinze secondes peuvent ensuite se voir appliquer une vitesse particulière pour ralentir ou accélérer le mouvement, mais aussi des filtres et effets visuels. Une fois partagés, les clips défilent sur la page d’accueil de l’appli et sont répertoriés dans le profil du créateur à l’image d’un compte Instagram.
Les utilisateurs recueillent ainsi des « likes » et des abonnés” (Croquet, 2020).
Avec la loi de refondation de l’école de 2013 et les nouveaux programmes qu’elle a amenée, nous pensions que les usages du numérique chez les enfants commençaient à l’âge de neuf ans et de ce fait, il était primordial de les éduquer aux médias et à l’information avant cet âge. Ainsi, les programmes valorisent l’EMI à partir du cycle 2 mais cette dernière est absente de ceux de la maternelle. Cependant, les usages et les pratiques évoluent rapidement et l’on observe, au fil des lectures, une précocité fulgurante en une dizaine d’années des usages des jeunes vis à vis du numérique.
Avant 2013, nous pensions que les enfants, avant neuf ans, n’étaient pas des usagers des réseaux sociaux numériques et le constat est le même avec la nouvelle loi de l’école de la confiance de 2019 et ses mesures apportées aux programmes : l’éducation aux médias et à l’information reste en vigueur dans les programmes de l’éducation nationale à partir du cycle 2. La réalité concernant les usages des jeunes enfants sur le terrain est – elle la même en 2021 ?
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Table des matières
Remerciements
Sigles et Abréviations
INTRODUCTION
1. Politique de l’EMI: les élèves de cycle 1 confrontés à leurs usages
1.1 Statut et développement de l’enfant de cycle 1
1.1.1 Développement de l’enfant
1.1.2 Développement cognitif de l’enfant et usage numérique
1.1.3 L’enfant, élève de cycle
1.2 L’EMI en cycle 1, grande absente des programmes
1.2.1 L’EMI, pilier majeur des pratiques éducatives actuelles
1.2.2 L’EMI, support incontournable de la loi de refondation de l’école pour les cycles 2 et 3
1.2.3 Le numérique : nouveau média complexifiant l’EMI
1.3 Évolution rapide de l’usage des réseaux sociaux numériques chez les jeunes
1.3.1 Usages de plus en plus jeune des réseaux sociaux numériques en Europe
1.3.2 Utilisation massive des réseaux sociaux numériques centrés sur l’image
1.3.3 Réseaux sociaux numériques : de la communication à la diffusion d’images
2. Cadre méthodologique
2.1 Formulation des hypothèses de recherche
2.2 Ébauche du recueil de données
2.3 Description du contexte, de l’échantillon et de son influence sur le choix méthodologique
2.4 Points de vigilance et prise en compte de la spécificité de la fiabilité de la parole de l’enfant
2.5 Conception finale de l’enquête sur le terrain et élaboration définitive du recueil de données
2.6 Mise en œuvre et déroulement de la recherche sur le terrain
3. Confrontation des usages du numérique des enfants avec l’absence d’EMI en cycle
3.1 Les élèves de cycle 1 confrontés à leurs usages
3.2 Des résultats qui révèlent une utilisation massive et précoce des réseaux sociaux chez les élèves de cycle 1
3.3 Utilisation prépondérante des réseaux sociaux numériques qui diffusent de l’image chez les
élèves de cycle 1
CONCLUSION
Bibliographie
ANNEXES
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