Confluence d’alignement des planètes

L’intime et le social 

L’habitat et l’acte d’habiter font partie intégrante de la vie de l’homme dans notre société : la demeure est l’enveloppe qui permet de se protéger, de vivre son intimité, de montrer une image relativement maîtrisée de soi ; et enfin, elle permet l’obtention d’un statut social et aide à se situer dans la communauté. L’habitat permet de prendre possession des lieux, construire une domesticité en son intérieur, créer des liens avec son environnement. La boîte aux lettres est directement rattachée à l’habitation : elle est le premier signe de propriété et d’appartenance, elle représente un premier lien entre l’intime et le social, entre soi et le monde actif (le flux, les échanges).Il y a la maison (« ma maison), la rue (« ma » rue), « mon » immeuble.Marqueur d’identité, l’habitat est le témoin du réseau social d’appartenance, il dévoile le niveau de vie de ses occupants, il permet de montrer à l’autre sa capacité à habiter (donc à exister) et à être intégré dans la société.

L’habitant peut être locataire ou propriétaire, ou sans domicile fixe (est-il alors toujours l’habitant ?). Le locataire (majoritaire en ville et minoritaire en campagne) s’approprie les lieux, son logement est son « chez soi » dans ses parties privatives. Il partage les parties communes et l’on bascule ici de l’intime au social, restreint aux voisins, mais qui nécessite des règles implicites ou explicites (règlements d’immeubles, de copropriétés..).Le locataire habite principalement en appartement dont le propriétaire est bailleur privé (70% des cas) ou un bailleur social (30 % des cas) avec qui il est « en contrat » : le bail, précisant les engagements de part et d’autre. Habiter ne va pas sans cohabiter, d’abord avec ses voisins. La cohabitation peut être une source d’obligations, mais aussi de solidarités : elle s’organise autour des défenses collectives, de l’aide et du soutien, des services rendus. La cohabitation implique le partage des espaces de vie, des espaces d’articulation et des espaces publics : elle confronte les différentes cultures de l’habiter entre des personnes ou des familles de provenances sociales et culturelles diverses, qui n’ont pas choisi d’être ensemble ni de se fréquenter, tout en trouvant une proximité physique et il faut pour cela des régulations, faire respecter les rapports sociaux par un règlement, un code de civilité.

Habiter c’est être et avoir : le propriétaire occupant, le propriétaire bailleur et le copropriétaire 

Le propriétaire occupant a réussi à accéder à la propriété et à « monter » dans l’échelle sociale. De nombreuses injonctions politiques ont régulièrement appelé à une « France de propriétaires » en mettant en œuvre des politiques d’aides financières et fiscales favorables à l’accession. Ce propriétaire est souvent considéré par la classe politique et administrative, comme « bon père de famille » qui prend soin de son bien, en jouit dans toute la liberté que lui confère le code civil art 544, et la constitution « droit sacré et inaliénable » et prenant soin de vivre en bonne entente avec ses voisins.

Enfin le propriétaire bailleur a acquis un ou plusieurs logements et a constitué un «patrimoine bâti» qui, dans le modèle économique urbain actuel constitue une rente foncière. On se déplace ici de l’habiter pour envisager un bien et un service sur le marché de l’immobilier. On se déplace même pour considérer que, s’il en a les titres de propriété, le propriétaire possède en partie le « bien commun », élément de la cité, patrimoine collectif, géré par l’Etat et les collectivités. Nous défendrons ici l’idée que si le bâtiment constitue un « produit » positionné sur un marché, le logement, en tant que résidence principale constitue un « bien de première nécessité » compris dans une relation entre le bâti et son occupant, lui octroyant des droits et des devoirs. C’est ce qui justifie l’intervention publique, dans la régulation des excès du marché (rejetant les plus pauvres), pour l’inclusion de tous les ménages dans un logement décent. Le logement et l’habitat : On relève ici une première difficulté du fait que l’organisation de l’intervention publique s’est scindée en deux champs : L’aide à la personne et l’aide à la pierre. Ainsi l’analyse de l’habitat réclame la prise en compte en dynamique :

– Des logements : types, état, modes de gestion
– Des ménages : taille, ressources
– Du marché immobilier – dynamiques des marchés locaux (selon les types de biens)
– De la qualité de l’habitat, des dynamiques des marchés de la rénovation
– De l’accès à la ville et à ses aménités (déplacements, emplois, consommation, activités)
– Du cadre de vie.

Enfin, l’habitat constitue le patrimoine commun dans un système économique ouvert
L’habitation façonne le paysage urbain ou périurbain, elle donne des repères du lieu, du quartier, du secteur et à ce titre fait partie du « bien commun ». L’analyse des parcours résidentiels montre que l’habitat est constitué d’étapes de parcours et à ce titre, on peut affecter des fonctionnalités à des quartiers ou des secteurs :
– Quartier de grands logements accueillant des familles, proche des écoles,
– Quartiers de petits logements locatifs pour étudiants ou jeunes adultes,
– Quartiers d’accession à la propriété avec des petits logements pour jeunes couples,
– Logements collectifs pour travailleurs,
– Maisons en campagne ou en ville pour retraités,
– Quartier d’accueil des nouveaux arrivants…

Pourquoi le parc privé ancien ? 

Dans un territoire comme celui de la Métropole Aix Marseille Provence, le parc de logements est composé par trois entités : le parc social (17% des résidences principales), le parc privé (82%) et la construction neuve (1% chaque année). La construction neuve a fait l’objet d’un « coup de booster » dans le cadre du premier PLH de la Communauté urbaine Marseille Provence Métropole (MPM), elle répond a des besoins pour un type de ménages, mais ne répond pas à la demande des plus modestes. Elle dope l’économie locale mais consomme du foncier, parfois et contribue au mitage des territoires péri urbains. Enfin, si elle répond aux normes actuelles, en termes de conforts, son empreint carbone reste très élevèe et les pionniers, en matière écologiques sont le fait d’une élite.

Le parc social est intimement lié au parc privé, au regard des besoins des ménages modestes. En effet, si 17% des ménages aux ressources modestes l’occupent, plus du double des ménages les plus pauvres réside dans le parc privé. Son modèle économique, même s’il est recomposé très régulièrement, est basé sur les prêts de la Caisse des dépôts et consignations, ce qui en fait une base solide. L’accompagnement social et les aides à la personne (APL) contribuent à sécuriser son exploitation. Il reste néanmoins fragile et nécessite des travaux réguliers comme le parc ancien. Le parc privé ancien, soumis aux aléas de l’offre et de la demande, ne bénéficie pas d’un modèle économique solide : Dans un contexte de ménages modestes voire pauvres, il ne peut supporter les investissements nécessaires pour le maintenir en état de décence sans aides publiques. Particulièrement dans le collectif (nous le verrons en particulier sur les copropriétés fragiles ou dégradées), il réclame de la part des propriétaires, la gestion d’un plan de patrimoine, d’un carnet d’entretien, de fonds importants pour le maintien, la valorisation de son état. Le nombre de logements dépourvus duconfort sanitaire de base (eau chaude, WC, cuisine…) ne cesse de reculer en France depuis des décennies. Mais bien d’autres critères comme l’humidité, des problèmes d’isolation, des infiltrations d’eau ou une installation électrique dégradée peuvent se cumuler et avoir des conséquences dommageables pour la santé ou la sécurité des habitants, En 2013, 10 % des logements, soit près de 3 millions, cumulaient trois ou plus de ces défauts. Et la réhabilitation du parc privé ancien réclame des moyens importants du fait des contraintes d’accès, techniques, architecturales, en milieu occupé, .. et bien sûr des conséquences de la propriété privée. Le parc privé ancien joue un rôle social du fait qu’il loge deux fois plus de ménages modestes que le parc social. Ce rôle peut être reconnu et aidé, en particulier par le conventionnement Anah qui permet l’accessibilité financière du logement des personnes aux ressources modestes. Grace à cette reconversion d’un parc privé en parc social, de façon temporaire, en diffus, les aides sociales, fiscales et les aides aux travaux favorisent notamment le recyclage de logement vacants ou très dégradés. La constitution progressive d’un parc privé à vocation sociale, complémentaire au parc social public pérenne, notamment sur un territoire ne disposant pas suffisamment de logements locatifs sociaux, permet d’augmenter le taux de logements sociaux SRU, sans augmenter la base comme avec une nouvelle construction. Témoin de l’histoire, son empreinte patrimoniale, en quartiers ancien modèle le cadre de vie. Aussi il peut être obsolète du fait des nouveaux modes de vie , et dans ce cas peut entrer en concurrence avec la construction neuve du parc locatif intermédiaire aidé fiscalement.L’analyse des réhabilitations du parc privé ancien intègre les questions sociales de peuplement (mixité sociale et fonctionnelle, de parcours résidentiels), techniques, urbaines, et va chercher à redonner à l’objet « habitat » une nouvelle vie dans un contexte renouvelé.

Confluence d’alignement des planètes 

Cette période, de transitions voire de bouleversements, peut, si l’on s’y intéresse, constituer une opportunité de mise en œuvre de nouveaux modèles prenant en compte les transitions économiques, environnementales, sociales et démocratiques, politiques et institutionnelles. Cette opportunité reste à saisir dans l’élaboration du SRADDET (2017-2019), du Scot Métropolitain (2017-2022), Plan Climat métropolitain (2017-2020), des PLUi (2016-2018), du PLH (2017-2018), Agenda du développement économique, Agenda de la mobilité … tous en chantier. Sur fond de fortes tensions financières (les collectivités sont invitées à participer à la réduction du déficit public : 12 milliards entre 2014 – 2017), nous essayerons de préciser les réformes institutionnelles et leurs effets : une nouvelle organisation des pouvoirs locaux offrant des compétences renforcées pour la métropole et ses impacts sur la politique de l’habitat.

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Table des matières

Introduction
Confluence d’alignement des planètes
Présentation du Plan du mémoire
1- Des outils méthodologiques pour approcher l’habitat
1.1 Comprendre les besoins en logement
1.2 Des besoins qui s’expriment sur des territoires
1.3 Typologie des communes de la métropole AMP
1.4 Territorialiser les besoins
1.5 Diagnostiquer un territoire au regard des besoins en habitat.
2- L’exercice de la compétence habitat sur le territoire de MPM
2.1 Le contexte habitat de Marseille Provence Métropole
2.2 L’exercice de la compétence habitat 2006
Le premier PLH 2006
Le deuxième PLH 2012
Les Etats Généraux du Logement
2.3 L’arrivée de la metropole
3- La Métropole Aix Marseille Provence
3.1 Pourquoi la métropole
3.2 Contexte territorial d’Aix Marseille Provence
3.3 Appropriation de la compétence habitat
3.4 Penser la réhabilitation de l’habitat existant
3.5 Les segments de l’amélioration du parc privé ancien
Récapitulatif Acteurs
4- Pistes d’organisation collective de la compétence habitat
4.1 Chef de filat
4.2 Pour une métropole résiliente et agile
4.3 Pistes et initiatives emergeantes
Conclusion
Bibliographie
Table des illustrations
Annexes

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