Conduite physiologique du crabe pendant le jeun au cours du stockage et du transport 

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Cycle biologique

La ponte se produit cinq semaines après l’accouplement (LE RESTE et al., 1976). À Madagascar, la ponte s’étend sur deux périodes : mars à mai et septembre à octobre (RAMANANTONIAIANA, 2014). Le cycle biologique du Scylla serrata est décrit dans la Figure 1. Les femelles matures migrent vers la mer jusqu’à 50 km au large où les conditions sont stables (température, salinité) et favorables pour la survie des larves (NURDIANI et ZENG, 2007). Environ 12 jours après la ponte, les oeufs sont éclos donnant des larves Zoea de 1 mm (HAMASAKI, 2003). Ces larves Zoea passent à une série de cinq mues avant d’arriver au stade Mégalope. Cette étape dure environ deux à trois semaines. Le mégalope migre ensuite vers le fond des estuaires et il se métamorphose en juvénile de 10 à 20 mm après 7 à 9 jours (SHELLEY, 2008). La croissance des crabes se fait ensuite par des mues successives dont la fréquence diminue avec l’âge (MOKSNES et al., 2014).

Habitude alimentaire

Le crabe de boue est une espèce omnivore à tendance carnivore. Cette espèce est également qualifiée de cannibale qui est très fréquent chez les juvéniles. Toutefois, les habitudes alimentaires changent avec l’âge. Les juvéniles ayant une taille entre 2 et 7 cm se nourrissent essentiellement des crustacés alors que les subadultes (7-13 cm) se nourrissent des bivalves et des gastropodes. Les crabes adultes préfèrent les poissons mais ils mangent également des petits crabes (JAYAMMANA, 1991). Les activités alimentaires dépendent des facteurs environnementaux (température, salinité) et des facteurs physiologiques comme la mue et la ponte (MEYNECKE et RICHARDS, 2014).

Conduite physiologique du crabe pendant le jeun au cours du stockage et du transport

La pêche aux crabes se fait par des techniques traditionnelles. Chaque jour, les pêcheurs stockent leurs prises dans un endroit ombragé jusqu’à l’arrivée des collecteurs qui peut durer jusqu’à dix jours. Pour garder les crabes à l’état vivant, les pêcheurs leur enduisent des boues pour que les branchies restent humides (RANDRIAMIARISOA, Com Pers, 2015). Au cours de ce laps de temps et avec la durée de transport, les crabes sont obligés de mobiliser leurs réserves corporelles pour satisfaire aux besoins d’entretiens physiologiques. Ils pratiquent le phénomène d’autolyse de la chair pour survivre (CHIOU et HUANG, 2004). En effet, une diminution très remarquée du poids est constatée jusqu’à 30 % en 7 jours (NINLANON et TANGKROCK-OLAN, 2008).

Zone d’étude

Cette étude a été menée dans la Région de Boeny, auprès de la société PECHEXPORT sise à Mahajanga pendant cinq semaines à partir de la date d’ouverture de la campagne 2015/2016. Cette période coïncide à la saison pluvieuse dont la température moyenne varie de 25 à 33,1 °C avec une pluviométrie annuelle de 1338,6 mm (MTTM, 2016).
Plus de 98 % des 300 000 ha de mangrove à Madagascar (KIENER, 1972) constituant les zones de prédilection des crabes Scylla serrata sont concentrées dans la partie Nord-ouest. Ainsi, les activités de la pêche au crabe se trouvent groupées dans cette partie Nord-ouest, surtout dans la capitale de la Région de Boeny où se sont rassemblées les sociétés de pêche exportatrices de crabes de boue à Madagascar. La Société Anonyme PECHEXPORT, faisant partie des grandes sociétés de pêche du groupe GEXPROMER, opère dans la pêche aux crevettes, la collecte des crabes de boue et des poissons commerciaux destinés à la vente extérieure. Le crabe de boue forme l’une des principales espèces cibles auxquelles la société concentre ses activités. Les produits sont présentés sous forme de morceaux congelés après les différentes étapes de traitement (RANDRIAMIARISOA, 2009).
Les crabes collectés arrivant à la société ont été pêchés dans les différents foyers de mangrove des trois Régions : Melaky, Boeny et Sofia ; plus exactement entre Besalampy et Analalava où les superficies de mangrove sont étendues. Cependant, les origines des crabes enregistrées durant cette investigation ont été localisées, selon les points d’intervention des collecteurs, entre la baie de Mahajamba et la baie de Baly. Pour mieux affermir les analyses des données, les origines de ces produits ont été regroupées en quatre grandes zones de pêche formées par les baies et deltas de la côte Ouest de Madagascar. Ces zones sont la baie de Mahajamba, les baies entre Marosakoa et La Digue, la baie de Bombetoka et les baies entre Boeny et Baly notées respectivement zone 1, zone 2, zone 3 et zone 4 (Figure 2). Dans ces quatre zones, les principaux lieux de collecte des crabes de boue sont Mahajamba et Andranoboka pour la zone 1 ; Marosakoa, Betsako, Ampasimariny, Mariarano et La Digue pour la zone 2 ; Aranta, Boanamary, Marovoay et Sotema pour la zone 3 ; et Boeny, Namakia, Kompasy, Marambitsy et Baly pour la zone 4.

Distribution des fréquences de taille

La distribution de taille pour les mâles, les femelles et la population entière a été établie pour l’ensemble des zones de pêche avec un intervalle de classe de 1 cm à l’aide de l’outil Discrétisation du logiciel XLStat Pro version 7.5. La fréquence cumulée a été utilisée sur FISAT II (GAYANILO et al., 2005) pour la détermination de LC25, LC50 et LC75 qui correspond respectivement à la taille où 25 %, 50 % et 75 % des crabes sont représentés dans les prises. LC50 désigne la taille à la première capture.

Relation taille-poids

La relation taille poids a été calculée pour chaque sexe séparément ainsi que pour la population globale et pour chaque zone de pêche. L’équation de la régression utilisée est de la forme :
P = aLCb (1) (LE CREN, 1951 ; RICKER, 1975 ; PAULY, 1983).
avec : P = poids vif (g).
LC = largeur céphalothoracique (cm).
a = ordonnée à l’origine de la courbe de régression.
b = coefficient de régression ou pente.
La transformation logarithmique de cette équation a donné Ln P = Ln a + b Ln LC (2) (LAGLER, 1968). Ensuite, les paramètres a et b ont été calculés par régression linéaire avec l’ajustement direct sur le logiciel JMP 5.0.1 de SAS Institute (PROUST, 2002) sous Windows PC.
Selon BAGENAL et TESCH (1978), le coefficient de régression b dans cette relation a une valeur comprise entre 2 et 5. Il est estimé que si la valeur de b est égale à 3, l’espèce adopte une croissance isométrique ; en d’autres termes, il n’y a aucun changement de forme corporelle au cours de sa croissance. Par contre, une valeur de b significativement différente de 3 indique une croissance allométrique, ce qui dénote que la forme de l’individu change avec sa croissance. En d’autres termes, la taille et le poids s’accroissent non proportionnellement. Cette croissance allométrique est négative ou minorante si b est inférieure à 3 tandis qu’elle est positive ou majorante si b supérieure à 3.

Facteur de condition F de Fulton

Le facteur de condition F de FULTON (1911) donne une appréciation globale sur le bien-être de l’animal, l’intensité d’alimentation et l’indice de croissance d’une espèce dans un milieu naturel donné et pendant une période déterminée (NASH et al., 2006), et éventuellement sur la faculté d’adaptation de l’espèce aux conditions du milieu (JONES et al., 1999). Cette estimation est basée sur l’observation que les individus ayant des poids plus lourds pour une LC donnée s’exposent à des conditions environnementales plus favorables que ceux plus légers (BAGENAL et TESCH, 1978 ; NASH et al., 2006).

Distribution des fréquences de taille

L’analyse de variance à un facteur (ANOVA I) sur le logiciel JMP 5.0.1 a été utilisée pour la comparaison multiple des moyennes de tailles par sexe. Au seuil de signification 5 %, les différences significatives ont été obtenues par le test de Tukey HSD.

Relation taille-poids

Les coefficients de régression b pour chaque sexe et chaque zone ont été comparés avec la valeur constante 3 pour identifier l’allométrie. Le test « t » de Student au seuil =0,05 a été utilisé avec l’équation de SOKAL et ROHLF (1987) : | | où ESb désigne l’erreur standard de b. La différence est significative si la valeur calculée de « t » est supérieure à t0,05=1,96. L’analyse de la covariance (ANCOVA) sur XLStat Pro 7.5 a été adoptée pour la comparaison des courbes de régression taille-poids entre les sexes et entre les zones. Pour cela, les éventuelles différences significatives à un intervalle de confiance 95 % ont été identifiées avec le test de Tukey HSD.

Facteurs de condition

Les valeurs moyennes de F et Kn par classe de taille, par zone et par sexe ont été analysées à l’aide de l’analyse de variance à deux facteurs (ANOVA II) en utilisant la méthode des moindres carrés sur le logiciel JMP 5.0.1. Les moyennes ont été comparées deux à deux pour déceler les différences possibles avec le test « t » de Student au seuil de signification 5 %.

Maturité sexuelle

Les tests de corrélation entre la taille et l’IMF puis entre l’IMF et le stade de maturation ont été effectués sur le logiciel JMP 5.0.1. Enfin, une analyse de variance à un facteur (ANOVA I) des moyennes de tailles et de poids de chaque stade en fonction du groupe d’IMF a été réalisée sur le même logiciel. Les moyennes ont été comparées deux à deux à l’aide du test « t » de Student pour avoir les différences significatives possibles au seuil α=0,05.
Les figures ont été obtenues sur Microsoft Office Excel 2013.

Structure en taille

Les tailles des crabes collectés au sein de la société PECHEXPORT varient suivant le sexe, de 9,9 à 15,6 cm LC pour les femelles et de 9,7 à 16,9 cm LC pour les mâles. Les tailles moyennes pour les mâles, les femelles et la population entière ont été de 12,12 ± 0,03 cm, 12,27 ± 0,03 cm et 12,17 ± 0,02 cm LC dont les classes modales se sont situées respectivement entre 11 et 12 cm, 12 et 13 cm, et 11 et 12 cm LC (Figures 3 et 4). La comparaison de ces moyennes a révélé une grandeur significative chez les femelles par rapport aux individus mâles (p0,05).
Les tailles respectives à 25 %, 50 % et 75 % des captures débarquées ont été enregistrées à 11,15 cm, 11,89 cm et 12,88 cm LC pour les mâles, 11,37 cm, 12,18 cm et 12,99 cm LC pour les femelles et 11,19 cm, 11,99 cm et 12,92 cm LC pour les deux sexes. Dans ces résultats, la LC50=11,99 cm LC (Figure 4) désigne la taille à la première capture chez le Scylla serrata.

Relation d’allométrie par zone de pêche

Le Tableau 6 résume les caractéristiques des paramètres de la relation taille-poids classés par zone. Les coefficients de régression b ont fluctué entre 2,533 ± 0,055 (zone 2) et 2,632 ± 0,066 (zone 3) chez les femelles et 3,401 ± 0,036 (zone 1) et 3,592 ± 0,042 (zone 4) chez les mâles. Les valeurs de la pente b chez les femelles sont significativement inférieures à 3 (p0,05) pour toutes les zones (p0,05). Par contre, les mâles ont présenté des valeurs de b supérieures à 3 (p0,05). Les relations établies pour les femelles sont donc des relations allométriques négatives tandis que chez les mâles, elles sont des relations allométriques positives. Pour le sexe combiné dans toutes les zones, les zones 1 et 4 ont présenté des relations allométriques positives. Cependant, aucune différence significative par rapport à 3 des valeurs de b n’a été trouvée dans les zones 2 et 3 (p0,05). Les crabes dans ces zones ont donc des croissances proches de l’isométrie.

Facteur de condition relative Kn

Pour les facteurs de condition relative Kn, les observations obtenues ont été respectivement de 1,003 ± 0,003 et 1,005 ± 0,002 pour les femelles et les mâles. Le facteur de condition relative pour toute la population de Scylla serrata a été de 1,004 ± 0,002 (Tableau 9). En somme, ni le sexe ni les zones n’ont aucun effet sur la variation de la valeur de Kn (p0,05). De l’autre côté, le facteur de condition relative Kn a été faible (p0,05) chez les crabes de 11 à 13 cm LC par rapport aux autres classes de taille dont les plus petits (09-10 cm) en ont la valeur la plus élevée (1,177 ± 0,052) (Tableau 9).

Croissance

Les paramètres de la croissance de Scylla serrata selon le modèle de Von Bertalanffy sont présentés dans le Tableau 11. Les largeurs asymptotiques sont respectivement 21,95 cm, 22,85 cm et 22,10 cm LC pour les femelles, les mâles et l’ensemble de sexes. Les taux de croissance instantanés respectifs ont été 0,31, 0,41 et 0,31 an-1 pour les femelles, les mâles et la population. Ces coefficients de croissance ont révélé que les mâles croissent plus vite que les femelles dans l’atteinte de la largeur asymptotique (Figure 10). Ainsi, les largeurs relatives à 1 an, 1,5 an et 2 ans ont été respectivement 8,52 cm, 10,45 cm et 12,10 cm LC pour les femelles et 10,15 cm, 12,50 cm et 14,42 cm LC pour les mâles.
Les équations de Von Bertalanffy pour tous les sexes sont :
 Femelle : LC=21,95 (1-e-0,31 (t+0,58)).
 Mâle : LC=22,85 (1-e-0,41 (t+0,43)).
 Ensemble : LC=22,10 (1-e-0,31 (t+0,58)).
L’indice de performance de la croissance phi-prime (Ø’) a été similaire pour les femelles (2,17) et pour les mâles (2,33). La valeur commune de Ø’ est égale à 2,18. En outre, la valeur de tmax a montré une longévité plus élargie chez les femelles (9,68 ans) par rapport à celle des mâles (7,32 ans). L’équation et la courbe de croissance du Scylla serrata selon le modèle de Von Bertalanffy sont présentées dans la Figure 9 pour l’ensemble de l’échantillon et elles sont combinées dans la Figure 10 pour les mâles et femelles.

Stade de maturité sexuelle

Les valeurs des IMF observés ont été de l’ordre de 0,618 à 1,078. Le Tableau 12 et la Figure 12 montrent que les femelles ayant des abdomens de forme triangulaire (IMF ≤ 0,768) ont été 100 % immatures (Stade 0 et I). Les femelles à abdomen de forme intermédiaire (0,769 ≤ IMF ≤ 0,904) ont été composées respectivement de 78,16 ± 4,43 % et 21,84 ± 4,43 % immatures et matures tandis que les femelles à abdomen globulaire (IMF ≥ 0,905) ont été constituées de 30,00 ± 1,99 % immatures et 70,00 ± 1,99 % matures.
Le taux de développement de chaque stade ovarien par groupe d’IMF et les tailles-poids correspondants sont respectivement présentés dans les Tableaux 13 et 14. Les femelles à IMF inférieur ou égal à 0,775 ont été 100 % immatures constituant 15,87 % des femelles. Bien que le stade de maturité ait été faiblement dépendant de la taille (p  0,0001), les femelles au stade 0 ont eu des tailles moyennes inférieures ou égales à 11,91 cm LC. Les crabes à IMF de 0,776 – 0,875 et 0,876 – 0,955 ont été respectivement composés de 74,04 % et 37,04 % des femelles immatures. Ainsi, la maturation sexuelle a commencé à une taille de 11,18 ± 0,03 cm LC qui a été la taille moyenne des femelles matures au stade II dans l’intervalle d’IMF 0,776 – 0,875.

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Table des matières

INTRODUCTION
CONNAISSANCES SUR LA BIOLOGIE DU CRABE DE BOUE Scylla serrata 
1. Habitat
2. Cycle biologique
3. Habitude alimentaire
4. Conduite physiologique du crabe pendant le jeun au cours du stockage et du transport
MATÉRIELS ET MÉTHODES
1. Zone d’étude
2. Matériel biologique
3. Méthode d’échantillonnage
4. Opérations
5. Détermination des paramètres étudiés
5.1. Sex-ratio
5.2. Distribution des fréquences de taille
5.3. Relation taille-poids
5.4. Facteurs de condition
5.4.1. Facteur de condition F de Fulton
5.4.2. Facteur de condition relative
5.5. Paramètres de croissance
5.6. Taille à la première maturité
5.7. Stades de maturité sexuelle
6. Analyses statistiques
6.1. Sex-ratio
6.2. Distribution des fréquences de taille
6.3. Relation taille-poids
6.4. Facteurs de condition
6.5. Maturité sexuelle
RÉSULTATS
1. Sex-ratio et taux de capture par zone
1.1. Sex-ratio par zone
1.2. Sex-ratio par groupe de tailles
1.3. Capture par zone
2. Structure en taille
3. Relations taille-poids
3.1. Relation d’allométrie par sexe
3.2. Relation d’allométrie par zone de pêche
3.3. Variation des poids selon la zone de pêche et la taille
4. Facteurs de condition
4.1. Facteur de condition F de Fulton
4.2. Facteur de condition relative Kn
5. Croissance
6. Taille à la maturité
7. Stade de maturité sexuelle
DISCUSSIONS
1. Sex-ratio
2. Structure en taille
3. Relation taille-poids
4. Facteurs de condition
5. Croissance
6. Taille à la maturité
7. Stade de maturité sexuelle
CONCLUSION
RÉFÉRENCES

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