Concilier le développement urbain et agricole avec la conservation de la biodiversité

HUMANITE, CHANGEMENTS GLOBAUX ET DECLIN DE BIODIVERSITE

La Terre est exceptionnelle par bien des aspects, elle regorge d’une multitude de formes de vie, estimée à plus de 11 millions d’espèces (Bar-On et al., 2018). Parmi cette diversité, vivent aujourd’hui 7.6 milliards d’humains (www.worldometers.info),
représentant seulement 0.01% de la biomasse terrestre globale (Bar-On et al., 2018). Et pourtant, malgré la jeunesse de l’espèce humaine à l’échelle des temps géologiques (- 120 000 ans), son impact à l’échelle globale est considérable. A l’ère de l’Anthropocène, l’augmentation croissante de la population engendre des besoins croissants en ressources, énergies et technologies, modifiant la biosphère à travers les changements climatiques et l’augmentation des émissions de CO2 (Solomon et al., 2009), l’acidification des océans (Orr et al., 2005), ou encore les changements d’utilisation des sols, que ce soit à des fins d’urbanisation, industrielles ou agricoles (Foley et al., 2005; Meyer and Turner, 1992; Newbold et al., 2015). Ces changements rapides, et bien d’autres (Figure I-1), agissent en synergie et causent ce que l’on appelle maintenant la 6ème grande extinction de masse (Barnosky et al., 2011; Ceballos et al., 2015), avec des taux d’extinctions 100 à 1000 fois plus importants que la normale (Ceballos et al., 2015; Pimm et al., 2014). Ainsi, cette érosion sans précédent de la biodiversité affecte en retour les écosystèmes avec des conséquences sur le bien-être humain à travers la fourniture de fonctions et services écosystémiques (Cardinale et al., 2012; MEA, 2005; Pereira et al., 2012; Régnier et al., 2015). Toute la difficulté consiste donc à trouver un équilibre entre des besoins humains croissants et le maintien de la biodiversité (Foley, 2011; Newbold et al., 2016).

LES ACTIVITES AGRICOLES, UN ENJEU MAJEUR

Parmi ces changements, figure en premier lieu par son ancienneté et la superficie occupée, le développement de l’agriculture. L’agriculture est apparue en -8000, lors de la révolution néolithique, et depuis cette période, elle a façonné le paysage et joué un rôle crucial dans le développement et le progrès des sociétés humaines (Mazoyer and Roudart, 2007). La plupart des régions d’Europe et d’Asie étaient déjà couvertes par des surfaces agricoles entre -3000 et +1500 ans (Ellis et al., 2013). Historiquement, les moyens d’augmenter la production agricole dans le but de satisfaire aux demandes passaient par l’expansion, la transformation de milieux naturels (forêts, prairies, marais, etc.) en surfaces cultivables et productives (Ramankutty and Foley, 1999). Ces trois derniers siècles (de 1700 à 1980) ont vu une augmentation de 466% des surfaces agricoles à travers le monde (Meyer and Turner, 1992). De nos jours, plus de 38% de la surface terrestre est occupée par des cultures et prairies (Ramankutty et al., 2008). En Europe, près de la moitié de la surface est allouée aux cultures et à l’élevage, faisant ainsi des milieux agricoles l’écosystème majoritaire (Stoate et al., 2009, 2001). Chaplin-Kramer et al. (2015) estiment même que dans les 40 prochaines années, entre 200 et 300 millions d’hectares de « nature » seront convertis par l’expansion agricole, principalement sous les tropiques et dans les savanes, des régions biologiquement riches.

Actuellement, les activités agricoles figurent parmi les plus grandes menaces sur la biodiversité (et pas seulement les espèces déjà menacées) (Figure I-1). Elles englobent à la fois la perte et la modification d’habitats, les émissions de gaz à effet de serre, les pollutions chimiques, les ressources disponibles.

L’augmentation de la population se traduit par une augmentation des changements d’usages des sols. Cela se traduit par une transformation en surfaces agricoles pour subvenir à une demande sociétale alimentaire toujours plus forte. Mais également par une nécessité de logements, d’infrastructures à travers l’urbanisation et l’imperméabilisation des sols. Cependant, la population a le besoin et l’envie de milieux récréatifs et présente une volonté citoyenne de préserver la biodiversité pour les bienfaits qu’elle lui apporte, sur le plan culturel, affectif, et de la santé (Watson et al., 2005). Tout l’enjeu est donc de trouver des solutions qui concilient au mieux ces objectifs. Tous ces différents usages entrent en conflit pour un même milieu (Haberl, 2015). La principale solution mise en place pour réduire cette compétition pour l’espace a été d’intensifier l’usage des sols en agriculture et foresterie (Tilman et al., 2011), mais également pour répondre à la compétitivité nationale et internationale au sortir de seconde guerre mondiale. Face à l’accroissement de la population et des besoins, augmenter les ressources agricoles est une solution. Cette assertion est tout de même à contrebalancer avec les possibilités offertes par une meilleure rationalisation des productions et de leur commercialisation pour éviter le gaspillage alimentaire (Parfitt et al., 2010).

L’intensification se décrit comme étant l’augmentation des récoltes par unité de surface en améliorant, via les innovations technologiques, le labour, ou en augmentant l’utilisation d’intrants additionnels tels l’énergie, l’eau, les fertilisants et les pesticides (Kuemmerle et al., 2013). Au cours du siècle dernier, l’agronomie, la chimie et l’écophysiologie ont permis des avancées technologiques comme la sélection et le développement de variétés plus résistantes d’espèces de plantes et d’animaux, d’engrais, de produits phyto- et zoo-sanitaires, et la mécanisation (Mazoyer and Roudart, 2007). Depuis le milieu du XXème siècle et la révolution verte, la production agricole par unité de surface a plus que doublé (Borlaug, 2007; Green et al., 2005; van Zanden, 1991). La mise en place d’une Politique Agricole Commune (PAC) de l’Union Européenne dès 1962 a favorisé cette intensification, grâce à de nombreuses subventions pour permettre l’autonomie et la sécurité alimentaire (Stoate et al., 2009). La France a ainsi vu son rendement en blé par unité de surface augmenter de 88% entre 1970 et 2010, tandis que le rendement céréalier total a augmenté de 99% (FAOSTAT, 2014). L’agriculture est ainsi devenue industrielle, associée à de profonds changements des paysages et pratiques culturales (Robinson and Sutherland, 2002; Stoate et al., 2001) : fragmentation, simplification du paysage, homogénéisation des cultures, rotations culturales simples, perte d’habitats naturels semi-permanents (bois, mares, haies, etc.). Ces processus ont conduit à l’intensification des terres, mais également à une déprise agricole et au reboisement, du fait du niveau de vie agricole difficile et de l’appel du travail en ville (Henle et al., 2008; MacDonald et al., 2000), intensifiant également le tissu urbain. Il passe ainsi d’un tissu diffus, avec de faibles densités de population à une expansion massive des villes par artificialisation des sols, à très forte densité humaine, suivie d’une intensification urbaine en métropoles, pour renouveler et densifier l’existant (bâtiment en hauteur), et maitriser l’étalement péri-urbain permettant l’accueil d’une population toujours plus dense. Des chercheurs ont estimé qu’en 2030, l’espace urbain mondial devrait avoir triplé de surface et gagné 1,2 millions de kilomètres carrés (Seto et al., 2012). La déprise agricole concerne un nombre important de territoires : des zones où l’agriculture n’était plus rentable (zones peu productives de montagnes et basses montagnes, territoires péri-urbain enclavés, territoires pollués) (Cavailhes and Normandin, 1993). Ces milieux, laissés un temps en friche, ont fait place à des boisements, qui par la suite pourront être exploités et intensifiés pour permettre une fourniture en bois de construction, de chauffage ou en papier.

L’INTENSITE D’USAGE DES SOLS

L’intensité d’usage des sols est liée au processus d’industrialisation agricole, qui par effet domino a conduit à l’intensification urbaine et forestière. L’intensification est également souvent employée mais ce terme implique une temporalité, une action durable, une intensité d’usage des sols sur le long terme. En effet, l’intensification indique un processus temporel tandis que l’intensité désigne l’état à un temps donné. Puisque je n’utilise pas de séries temporelles, j’utiliserai le terme « intensité » plutôt que « intensification » dans le reste du manuscrit. Cependant, la définition et la manière d’aborder l’intensité d’usage des sols varie selon l’expérience ou le champ disciplinaire (géographie, anthropologie, politique, écologie) de chacun (Encadré 1), ce qui entrave la conceptualisation et la normalisation de l’intensité d’usage des sols. De plus, les approches traditionnelles n’examinent qu’une fraction simplifiée des différents aspects de cette intensité au lieu de regarder la multi-dimensionalité du processus dans un système complexe. Elles se concentrent sur le milieu agricole à défaut des autres milieux (urbains, forestiers) qui sont souvent ignorés, de même que des pratiques managériales non-conventionnelles (comme la fertilisation des forêts) par exemple (Erb et al., 2013). Ces raisons, en partie, expliquent le manque de données globales liées à l’intensité d’usage des sols.

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Table des matières

I. INTRODUCTION GENERALE
A. CONTEXTE GENERAL
A.1. HUMANITE, CHANGEMENTS GLOBAUX ET DECLIN DE BIODIVERSITE
A.2. LES ACTIVITES AGRICOLES, UN ENJEU MAJEUR
A.3. L’INTENSITE D’USAGE DES SOLS
B. PRODUCTION ET ENERGIE
B.1. LA PRODUCTIVITE : DEUX VOIES D’ENERGIE POSSIBLES
B.2. LA PRODUCTIVITE PRIMAIRE NETTE
B.3. LE CADRE CONCEPTUEL ET METHODOLOGIQUE D’HANPP : LIEN ENTRE ENERGIE PRODUCTIVE ET INTENSITE D’USAGE DES SOLS
C. UNE BIODIVERSITE EN ETROITE RELATION AVEC L’ENERGIE
C.1. LA BIODIVERSITE DANS LE CONTEXTE DE LA RELATION ESPECE-ENERGIE
C.2. UNE APPROCHE MULTI-DIMENSIONNELLE DE LA BIODIVERSITE
C.3. QUATRE MESURES DE LA DIVERSITE FONCTIONNELLE
D. SOUTENIR LA BIODIVERSITE MALGRE L’INTENSITE D’USAGE DES SOLS : L’EXEMPLE DE L’AGRICULTURE ?
D.1. IMPACT DE L’INTENSIFICATION AGRICOLE SUR LA BIODIVERSITE
D.2. L’UTILISATION DE GROUPES TAXONOMIQUES INDICATEURS DE BIODIVERSITE ISSUS DES SCIENCES PARTICIPATIVES
D.3. ENJEUX DE CONSERVATION DE LA BIODIVERSITE
E. STRUCTURE ET OBJECTIFS DE LA THESE
II. PRESENTATION DES JEUX DE DONNEES ET DES INDICATEURS SOLLICITES
A. ZONE D’ETUDE
B. INDICATEURS D’INTENSITE D’USAGE DES SOLS
B.1. LE CADRE CONCEPTUEL ET METHODOLOGIQUE DE HANPP
B.2. L’INDICE DU COUT D’INTRANTS PAR HECTARE
B.3. L’INDICE DE HAUTE VALEUR NATURELLE AGRICOLE
C. MODELES BIOLOGIQUES
C.1. LES SCIENCES PARTICIPATIVES ET VIGIE-NATURE
C.2. LE PROGRAMME VIGIE-CHIRO
C.3. LE PROGRAMME VIGIE-PLUME
D. APPROCHES TAXONOMIQUE ET FONCTIONNELLE DE LA BIODIVERSITE
D.1. INDICE AU NIVEAU DES ESPECES
D.2. INDICES AU NIVEAU DE LA COMMUNAUTE
III. VERS UNE MEILLEURE APPREHENSION DU CADRE CONCEPTUEL D’HANPP ET DES DIMENSIONS DE L’INTENSITE
A. CONTEXTE
B. OBJECTIFS
B.1. DONNEES
B.2. METHODES D’ANALYSE
C. PRINCIPAUX RESULTATS
D. PERSPECTIVES
E. ARTICLE: « DISENTANGLING THE DEPENDENCY OF HUMAN APPROPRIATION OF NET PRIMARY PRODUCTIVITY TO LANDSCAPE COMPOSITION, AGRICULTURAL INPUTS AND CLIMATE ACROSS FRENCH AGRICULTURAL LANDSCAPES »
IV. CONCLUSION GENERALE

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