Les piles à combustible
La pile à combustible est un convertisseur d’énergie. Elle représente à ce jour le moyen le plus efficace du point de vue du rendement pour convertir l’énergie chimique en énergie électrique. Elle se compose d’un électrolyte encadré par deux électrodes, l’anode et la cathode. Ces dernières contiennent un électrocatalyseur qui permet soit la réaction de réduction de l’oxygène (cathode) soit la réaction d’oxydation de l’hydrogène (anode).
C’est en 1839 que l’avocat britannique et chercheur amateur en électrochimie Sir William Grove démontre que la réaction entre l’hydrogène et l’oxygène peut produire de l’électricité, dans un système constitué de deux électrodes de platine poreux et d’un électrolyte à base d’acide sulfurique. En 1921, E. Baur met en évidence l’importance de la cinétique de la réaction et construit une cellule qui fonctionne à haute température (1000°C). Cependant, il faut attendre 1953 pour que le scientifique anglais F.T. Bacon réalise un prototype de 1kW. Ce dispositif servira à alimenter des navettes spatiales en eau et en électricité dans le cadre des programmes GEMINI (1965-66) et APOLLO (1968-72). Les travaux de Bacon suscitèrent un grand intérêt et des programmes de recherche publique et privée ont été démarrés. Parmi les industries très impliquées, nous pouvons citer Siemens, Westinghouse et Dupont. Depuis les années 2000, face à la demande croissante en énergie et à l’épuisement annoncé des ressources fossiles, la nécessité d’un développement durable et de nouveaux modes de production d’énergie, les piles à combustible connaissent un regain d’intérêt. De vastes programmes de recherche sont initiés à travers le monde (Europe, Japon, Etats-Unis, Chine, Corée du Sud…). Certains types de pile sont aujourd’hui commercialisés. Les différentes technologies sont différenciées selon la nature de l’électrolyte, la température de travail, la puissance générée. Les applications visées seront très différentes. Ces différents types de pile sont :
• les piles alcalines (AFC : Alkaline Fuel Cell)
• les piles à membrane polymère (PEMFC : Proton Exchange Membrane Fuel Cell)
• les piles à acide phosphorique (PAFC : Phosphoric Acid Fuel Cell)
• les piles à céramique conductrice protonique (PCFC : Proton CeramicFuel Cell)
• les piles à carbonate fondu (MCFC : Molten Carbonate Fuel Cell)
• les piles à oxyde solide (SOFC : Solid Oxide Fuel Cell
Parmi ces piles, les plus étudiées à ce jour sont les PEMFC et les SOFC, même si de nombreux prototypes de type MCFC ont démontré une durée de vie élevée aux quatre coins du monde et que les PCFC sont de plus en plus étudiées en laboratoire. La pile à oxyde solide apparait comme l’une des plus prometteuses en raison de son rendement élevé. C’est précisément dans ce cadre que se positionne ce travail.
Pour chaque technologie, le cœur de pile est constitué d’un électrolyte qui permet le passage des espèces ioniques entre les deux électrodes : la cathode (électrode à oxygène) et l‘anode (électrode à combustible). L’empilement anode-électrolyte-cathode constitue la cellule élémentaire. L’association de plusieurs cellules élémentaires constitue alors un « stack » (empilement) et nécessite l’utilisation de plaques d’interconnexion. Celles-ci assurent le contact électrique et la distribution des gaz au niveau des électrodes.
La pile SOFC
Au début des années 30 le scientifique suisse Emil Baur et son collègue H. Preis4 débutent leurs expériences sur les piles SOFC, en fabriquant des matériaux à base de zirconium, d’yttrium, de cérium, de lanthane et de tungstène. De leurs travaux découle l’exploitation des propriétés de conduction anionique de la zircone stabilisée qui fait l’objet d’études approfondies dans les années 60.
Ainsi le combustible, l’hydrogène pur ou issu du reformage interne d’un hydrocarbure naturel ou de synthèse, est oxydé à l’anode, tandis que le comburant, l’oxygène de l’air, est réduit à la cathode grâce aux électrons résultant de l’oxydation du combustible. Au cours des réactions électrochimiques, des électrons sont formés et sont acheminés de l’anode vers la cathode via un circuit extérieur. Un courant électrique est alors mesuré. L’utilisation de réactifs gazeux permet une production autonome et continue de l’énergie.
La transformation des hydrocarbures ou de l’hydrogène en énergie électrique par une pile à combustible n’est pas limitée par le cycle de Carnot. En effet, le rendement théorique de la réaction H2+½O2→H2O peut atteindre 78% à 700°C. Il n’est pas de 100% car une partie de l’enthalpie libre de la réaction est libérée sous forme de chaleur. Cet excédent de chaleur peut être récupéré pour la génération d’électricité par une turbine ou pour le chauffage. Ce procédé est appelé la cogénération. En pratique un rendement électrique de 40-50% est visé5. Avec la cogénération le rendement augmente et peut atteindre 85% .
Les performances de ce système électrochimique dépendent de la composition chimique des matériaux mis en jeux mais aussi de la microstructure des éléments constituant la cellule SOFC. Ce point particulier constitue, par la suite, une partie de notre travail.
Avantages et inconvénients
Avantages des SOFC
La technologie SOFC présente plusieurs avantages de par la température de fonctionnement élevée comme :
• Un fort rendement électrique avec une chaleur produite qui peut être valorisée via une turbine à gaz et/ou une turbine à vapeur qui permet ainsi d’augmenter le rendement global (de 40-50% en mode générateur électrique à 85% en cogénération).
• La possibilité d’utiliser, outre l’hydrogène, divers combustibles tels que les hydrocarbures, le gaz naturel ou encore le méthanol pour produire de l’hydrogène lors d’un reformage interne. Cette dernière approche permet de s’affranchir des problèmes liés au stockage de l’hydrogène.
• Des cinétiques de réaction élevées qui permettent de s’affranchir de l’utilisation de catalyseurs coûteux tels que les métaux précieux (Ag, Pt, Au…) tout en réduisant le coût de fabrication du système.
• Une plus grande résistance aux impuretés en tout genre, notamment celles résultant de la formation d’hydrogène par reformage interne à l’anode (principalement CO et CO2 ou encore des résidus soufrés).
• Une émission de gaz nocifs CO2, NOx, SOx, CO moindre comparée aux autres technologies de production d’énergie (moteur à explosion, centrale thermique…).
• Une étanchéité accrue et une corrosion moindre puisqu’il s’agit d’une pile « toutsolide» contrairement aux piles qui mettent en œuvre des électrolytes liquides.
• L’absence de parties mécaniques responsables de nuisances sonores.
Inconvénients des SOFC
Comme une grande partie des avantages des SOFC, leurs inconvénients proviennent de leur haute température de fonctionnement, entre 800 et 1000°C, tels que :
• La dégradation mécanique des matériaux liée à des différences de coefficients de dilatation thermique,
• La formation de phases isolantes aux interfaces électrode/électrolyte liée à leur affinité chimique,
• L’utilisation de matériaux onéreux pour les plaques d’interconnexion tels que les chromites de lanthane par exemple pour les températures de fonctionnement supérieures à 800°C notamment,
• La réduction de certains matériaux sous faible PO2 avec des gradients de température importants à haute température.
Ces inconvénients limitent le choix des matériaux utilisables. De plus, les conductivités et les propriétés mécaniques sont modifiées par la température.
Pour pallier ces inconvénients, les travaux de recherche s’orientent vers le développement de piles à oxyde solide fonctionnant à de plus basses températures. En réduisant la température de fonctionnement dans la gamme 400-600 °C, cela permet d’augmenter la durée de vie des matériaux en réduisant leur réactivité aux interfaces et leur dégradation mécanique. Des matériaux d’interconnexion moins chers tels que des aciers inoxydables pourront être utilisés. De plus, les avantages d’un rendement élevé et d’un reformage interne en absence de catalyseurs coûteux seront conservés .
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1- DE LA PILE À COMBUSTIBLE À LA MICRO-SOFC
1.1 Introduction
1.2 Les piles à combustible
1.2.1 La pile SOFC
1.2.2 Avantages et inconvénients
1.2.2.1 Avantages des SOFC
1.2.2.2 Inconvénients des SOFC
1.2.3 Nouvelles architectures d’électrodes SOFC
1.2.4 Miniaturisation de la SOFC
1.3 Etat de l’art des micro-SOFC
1.3.1 Les matériaux utilisés
1.3.1.1 L’électrolyte
1.3.1.1 L’anode
1.3.1.2 La cathode
1.3.1.3 Conclusion
1.3.2 Les performances actuelles des micro-SOFC
1.3.3 Les contraintes thermiques
1.4 Les méthodes de synthèse
1.4.1 Méthode de dépôt sous vide
1.4.1.1 Méthode de dépôt par vaporisation physique
1.4.1.2 Méthode de dépôt chimique en phase vapeur
1.4.1.3 Conclusion
1.4.2 Méthodes de dépôt sous forme d’aérosol
1.4.2.1 Spray sous pression
1.4.2.2 Spray électrostatique
1.4.2.3 Pulvérisation de flamme
1.4.2.4 Conclusion
1.4.3 Dépôt en phase liquide
1.4.3.1 Dip/Spin-Coating
1.4.3.2 Dépot par voie électrochimique
1.4.3.3 Conclusion
1.5 Conclusion du chapitre
Références
CHAPITRE 2- CONCEPTION, SYNTHÈSE ET CARACTÉRISATION DE LA CATHODE
2.1 Introduction
2.2 Synthèse des films minces poreux de LSCF-CGO par le procédé sol-gel
2.3 Caractérisations structurale et microstructurale de films de LSCF-CGO
2.3.1 Caractérisation de la microstructure par microscopie électronique à balayage
2.3.1.1 Influence de la température
2.3.1.2 Influence de la composition en LSCF
2.3.2 Caractérisation de la porosité par porosimétrie-ellipsométrie
2.3.3 Caractérisation du réseau inorganique des films minces de LSCF-CGO
2.3.3.1 Etude du réseau inorganique par microscopie électronique en transmission
2.3.3.2 Composition chimique de la cathode
2.3.3.3 Structure cristallographique et évolution de la croissance cristalline
2.3.3.3.1 Influence de la température
2.3.3.3.2 Influence de la composition en LSCF
2.3.4 Conclusions
2.4 Suivi in situ des propriétés électriques par spectroscopie d’impédance
2.4.1.1 Influence du pourcentage de LSCF
2.4.1.2 Influence de l’épaisseur du film mince poreux de LSCF pur
2.5 Caractérisation ex situ des propriétés électriques des films de LSCF-CGO
2.6 Conclusion du chapitre
Références
CHAPITRE 3- CONCEPTION, SYNTHÈSE ET CARACTÉRISATION DE L’ANODE
3.1 Introduction
3.2 Synthèse des films minces poreux de NiO-CGO par le procédé sol-gel
3.2.1 Synthèse des films
3.2.2 Etude du traitement thermique
3.2.2.1 Profil du traitement thermique obtenu par ellipsométrie-thermique
3.2.2.2 Effet du pourcentage de Nickel
3.2.2.3 Conclusion
3.3 Caractérisations structurale et microstructurale de films de NiO-CGO
3.3.1 Etude du réseau poreux des films minces de NiO-CGO
3.3.1.1 Etude du réseau poreux par microscopie électronique à balayage
3.3.1.2 Caractérisation de la porosité par porosimétrie-ellipsométrie
3.3.1.3 Organisation de la mésoporosité
3.3.2 Caractérisation du réseau inorganique des films minces de NiO-CGO
3.3.2.1 Structure cristallographique du réseau inorganique
3.3.2.2 Composition chimique de l’anode
3.3.2.3 Evolution de la croissance cristalline
3.3.2.4 Mécanisme de croissance cristallin et tension de surface
3.3.2.4.1 Le mécanisme de croissance
3.3.2.4.2 La tension de surface
3.3.2.5 Etude de la stabilité de la microstructure
3.3.2.6 Conclusion
3.4 Caractérisation électrochimique des films minces de Ni(O)-CGO
3.4.1 Films minces d’anode étudiés et conditions expérimentales
3.4.2 Caractérisation ex situ de films minces poreux de Ni(O)-CGO après réduction
3.4.3 Suivi dynamique in situ des propriétés électriques et microstructurales lors de la réduction des films minces poreux de NiO-CGO
3.4.3.1 Suivi in situ de la réduction de NiO par diffraction des rayons X
3.4.3.2 Suivi in situ de la réduction de NiO par spectroscopie d’impédance
3.4.3.2.1 Influence du pourcentage de nickel
3.4.3.2.2 Influence de la microstructure
3.4.3.3 Conclusion
3.4.4 Suivi cinétique in situ des propriétés électriques et microstructurales lors de la réduction des couches mésoporeuses de NiO-CGO
3.4.4.1 Suivi in situ de la réduction de NiO par spectroscopie d’impédance
3.4.4.1.1 Conductivité totale sous azote avant réduction
3.4.4.1.2 Percolation du nickel
3.4.4.1.3 Etude cinétique de la réduction
3.4.4.1.4 Etude cinétique de la coalescence
3.4.4.2 Conclusion
3.4.4.3 Suivi in situ de la réduction de NiO par diffraction des rayons X
3.4.4.3.1 Etude cinétique de la réduction
3.4.4.3.2 Etude cinétique de la coalescence
3.4.5 Conclusion
3.5 Conclusion du chapitre
Références
CONCLUSION
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