Conception et modélisation d’un bras d’inspection robotisé ultraléger

Robots à fort élancement rigides

Structures et performances

Afin de réaliser des missions d’inspection ou de manipulation dans des environnements encombrés et hostiles à l’homme, le CEA a proposé l’emploi de robots composés de segments et d’articulations en série portant à leurs extrémités une caméra ou un effecteur. Après avoir été introduits par l’orifice d’entrée, ils peuvent évoluer dans la zone à inspecter sans en toucher ni les parois ni les machines.
Afin d’explorer efficacement des volumes complexes et de grandes dimensions, ils sont divisés en segments articulés, et une mécanique très performante leur permet de supporter un porte-à-faux de plusieurs mètres et ce malgré leur faible diamètre. Ces robots sériels, dits à fort élancement, sont développés au CEA depuis près de vingt ans. La recherche dans ce domaine a abouti à deux robots : le PAC et L’AIA [Keller et al., 2008a; Keller et al., 2008b; Gargiuloa et al., 2009].
Le PAC (Porteur Articulé pour inspection en Cellule) est un manipulateur à 11 degrés de liberté, mesurant 6 m et pouvant supporter une charge de 1 kg à son extrémité. Ses actionneurs sont placés à l’intérieur des segments, il pèse 30 kg et peut être introduit par un orifice de 100 mm de diamètre seulement . Il a été réalisé en collaboration avec AREVA pour des missions variées d’inspection et d’intervention dans des environnements hostiles, radioactifs, ou simplement difficiles d’accès pour l’homme.
Le robot le plus récent, l’AIA [Keller et al., 2008a; Keller et al., 2008b; Gargiuloa et al., 2009] (pour Articulated Inspection Arm) a été développé exclusivement pour l’inspection du réacteur à fusion nucléaire, le tore supra, situé à Cadarache. Il pèse 130 kg, et peut embarquer une charge de 8 kg au bout de 8 m. Il est conçu pour fonctionner dans l’ultravide (10-5 Pa) et à une température de 200°C. Son introduction peut être effectuée par un orifice de 200 mm.
De part sa forme, le bras est soumis à des moments de flexion trop importants pour pouvoir être contrôlés par des actionneurs. Chaque articulation autorise donc, au plus, deux degrés de liberté en flexion mais aucun en torsion.
Bien que constitués de matériaux très performants en termes de raideur/masse (titane, fibre de carbone), le poids propre du bras et celui de la charge engendrent des flèches de l’ordre de 10 cm pour le PAC et de 40 cm pour l’AIA.

Actionnement

Les actionneurs présents sur les Snake-Arm Robots, l’AIA et le PAC sont des vérins électriques agissant sur les articulations par l’intermédiaire de câbles comme des muscles. Pour diminuer la masse des actionneurs présents sur un robot à fort élancement, deux stratégies sont possibles. La première consiste à doter le bras d’un système d’équilibrage statique développé au CEA [Guilbaud & Vertut, 1970]. Celui-ci permet de compenser les efforts dus à la gravité grâce à un mécanisme à ressort. La puissance et la masse des actionneurs embarqués peuvent donc être réduites. La deuxième consiste à déporter les actionneurs à la base du robot et à commander les articulations via des câbles. C’est aussi l’un des savoir-faire majeurs du Laboratoire de Robotique interactive du CEA-LIST avec notamment la conception et la commande du MA23 [Vertut & Coiffet, 1985; Garrec & Riwan, 2002; Garrec et al., 2002]. La transmission à câble permet de s’affranchir du poids des moteurs, c’est pourquoi elle est utilisée dans tous les Snake-Arms.
Mais elle pose le problème de l’indépendance des articulations. La rotation d’une articulation engendre donc une variation de la longueur du chemin pour tous les câbles qui la traversent, complexifiant ainsi la commande du bras. Il existe néanmoins des méthodes efficaces pour s’affranchir de ce couplage.
Le découplage mécanique le plus simple, consiste à faire passer les câbles par les axes de rotation des articulations qu’ils ne commandent pas [Chang et al., 2005]. Ainsi ils ne peuvent y exercer de couple fléchissant .
Le découplage peut aussi être effectué en compensant la variation de longueur du chemin par le déplacement d’une poulie mobile  [Lee et al., 2008].
Pour répondre aux problématiques d’inspection en environnement encombré, la recherche scientifique a aussi produit des systèmes robotiques aux conceptions moins classiques et notamment les manipulateurs à déformation continue.

Manipulateurs à déformation continue

Contrairement aux structures robotiques précédemment présentés, les manipulateurs à déformation continue ne sont pas munis d’articulations localisées. Ils sont constitués d’une «colonne vertébrale» fléchie continument par un système d’actionnement.

Propriétés de la colonne vertébrale

Comme pour les autres robots sériels, la colonne vertébrale doit autoriser les rotations mais pas la torsion. Elle peut donc être constituée tiges flexibles délimités munies sections droites ; leurs déformations élastiques autorisant deux degrés de liberté en flexion [Robinson & Davies, 1999; Gravagne & Walker, 2000a; Blessing & Walker, 2004]. D’autre auteurs [Jones et al., 2004; MacMahan et al., 2005] proposent de remplacer cette tige flexible par une structure gonflable composée de plusieurs chambres contrôlées en pression . Il est ainsi possible de faire varier la longueur et la raideur du bras en fonction de la pression [Walker et al., 2006].
La colonne vertébrale offre ainsi de 2 à 3 degrés de liberté par segment. Cependant leur cinématique est différente de celle des robots classiques et nécessite des modélisations particulières.

Modélisation

Les méthodes classiques de modélisation de robot [Khalil & Dombre, 1999] doivent être adaptées pour s’appliquer aux manipulateurs à déformation continue à cause du nombre infini de centres de rotation. Dans la plus part des modélisations il est fait l’hypothèse que les segments ont une courbure constante [Hannan & Walker, 2002; Jones & Walker, 2006], ils sont donc modélisés par un assemblage de liaisons pivot et de segments à longueur variable dont les paramètres dépendent de la courbure et d’équations de couplages. D’autres considérations géométriques permettent de réaliser le modèle inverse et de calculer la longueur des actionneurs (câbles ou muscles pneumatiques) en fonction des courbures [Hannan & Walker, 2001].
Une modélisation dynamique prenant en compte les effets de la gravité et des déformations élastiques a aussi été réalisé grâce à une approche Lagrangienne [Gravagne et al., 2003; Tatlicioglu et al., 2007].

Structures robotiques gonflables

Le meilleur moyen de rendre un robot intrinsèquement sûr, d’un point de vue mécanique est de réduire drastiquement sa masse et sa dureté: les risques liés aux contacts sont ainsi évités. Sanan et al. (2009) ont proposé l’emploi de segments gonflables dans la conception de bras robotisé en interaction avec l’homme. Il a montré par plusieurs prototypes que les chocs potentiels avec ce type de structures étaient sans danger pour la personne assistée [Sanan, 2010a].
Ses robots se basent sur deux types de structures : l’Inflatable Arm composé de segments et d’articulations gonflables et le Tubot : un cylindre gonflé, très souple, qui se déforme élastiquement sous l’action de câbles actionneurs .
L’Inflatable Arm est articulé grâce à une section centrale, de diamètre inférieur et sous gonflée par rapport aux deux autres segments. Elle est donc beaucoup moins raide que les segments et peut être fléchie par des câbles d’actionnement. Comme pour l’Air-OCTOR, utiliser ce genre de structure pour un robot à fort élancement impliquerait de gonfler la chambre à haute pression et donc de surdimensionné les actionneurs.
Otherlab présente une autre solution ou le bras n’est plus commandé par des câbles, mais par des actionneurs pneumatiques. Chaque articulation est en fait composée de deux actionneurs pneumatiques qui « poussent » l’articulation dans un sens ou dans l’autre suivant leur différentiel de pression.
Otherlab annonce des capacités de charge importante pour une faible masse mais ne donne pas de valeurs. En revanche, dans le cadre d’une application à fort élancement, la masse des nombreuses gaines pressurisées risquerait d’alourdir le bras. Or il n’est pas possible d’utiliser un système d’actionnement plus léger comme des câbles ; en effet, les articulations n’ont pas de comportement passif, elles fléchissent seulement si leurs actionneurs sont gonflés à des pressions différentes. Par ailleurs, le concept d’un bras comportant des segments gonflés et des articulations passives actionnées par des câbles a déjà été breveté dans le cadre d’une application spatiale [Koren & Weinstein, 1991]. Les segments gonflés présentent ici de forts avantages en termes de masse et d’encombrement mais les articulations proposées dans le brevet sont des liaisons pivot classiques.
En microgravité leur masse est sans importance, mais elle limiterait la longueur d’un tel bras pour une application terrestre.
L’étude de l’état de l’art montre que dans le cadre de l’inspection en environnement encombré et fragile, des robots aux technologies très diverses ont vu le jour . Cependant leur poids propre limite leur porté et aucun ne permet d’envisager une augmentation radicale des performances des robots à fort élancement.

Articulations gonflables

Plusieurs types d’articulations peuvent être adaptés à une structure gonflable, l’état de l’art montre que les robots gonflés ont été jusqu’à présent élaborés avec des articulations : classiques (robot à segments gonflables pour le spatial [Koren & Weinstein, 1991]). à restrictions de section (Inflatable Arm [Sanan et al., 2009; Sanan, 2010b]). constituées de matériaux suffisamment élastiques pour être fléchis sans trop d’efforts (Air-OCTOR [MacMahan et al., 2005], Tubot [Sanan, 2010a]). actives constituées d’actionneurs pneumatiques (Robotic Arm [Otherlab]).
L’utilisation d’articulations classiques (pivot, cardan) n’est pas étudiée ici, car la masse des articulations ferait aussi fléchir la structure.
Les articulations basées sur une structure souple ou sur une restriction de section sont aussi éliminées d’office puisque, dans le cas d’un fort élancement elles doivent être suffisamment raides pour supporter le poids propre du bras mais aussi suffisamment souples pour être fléchies par les actionneurs. Leur emploie nécessiterait donc un compromis incompatible avec l’idée de rupture technologique tel que l’entend la TRIZ.
Comme énoncé plus haut, les articulations actives supposent d’amener de l’air sous pression à chaque articulation ce qui risque d’alourdir le bras d’autant plus que celui-ci est long.
Une autre version de la restriction de section consiste à créer un axe de rotation en fermant totalement le tube suivant une ligne perpendiculaire à l’axe du cylindre. Celle ci existait sur une version antérieure de l’Inflatable Arm. Ce principe est envisageable si les propriétés mécaniques restent bonnes dans les directions perpendiculaires à l’axe de rotation.
Il existe encore un autre type d’articulations gonflables qui n’a encore jamais été utilisé pour réaliser un bras robotisé. Il s’agit des articulations de combinaisons spatiales. Elles ont été inventées pour faciliter les mouvements des spationautes à l’intérieur de leurs combinaisons pressurisées.
Sans ces articulations, la combinaison se rigidifie sous l’effet de la pression de l’air. Leur principe de fonctionnement est simple : il consiste à créer une zone qui se déforme à volume constant. Ce phénomène peut être obtenu en réalisant des plis, ou soufflets, le long d’un cylindre .

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre I Principes fondamentaux et problématique 
I.1 Introduction 
I.2 Etat de l’art 
I.2.1 Robots à fort élancement rigides
I.2.2 Manipulateurs à déformation continue
I.2.3 Structures robotiques gonflables
I.3 Principes fondamentaux
I.3.1 Raisonnement TRIZ
I.3.2 Mécanique des structures gonflables
I.3.3 Robot à fort élancement : gonflable vs. classique
I.3.4 Articulations gonflables
I.4 Problématique et hypothèses
I.5 Conclusion 
Chapitre II Conception mécanique des articulations 
II.1 Introduction 
II.2 Propriétés des articulations a volume constant
II.2.1 Efforts d’actionnement
II.2.2 Géométrie des soufflets
II.2.3 Modélisation analytique
II.3 Choix du type d’enveloppe 
II.3.1 Présentation des textiles
II.3.2 Présentation des prototypes
II.4 Modes de réalisation 
II.4.1 Solution avec goupilles
II.4.2 Solution à câbles
II.5 Conclusion 
Chapitre III Conception de l’Actionnement 
III.1 Introduction 
III.2 Etat de l’art 
III.2.1Actionneurs pneumatiques de traction
III.2.2Actionneurs pneumatiques extenseurs
III.2.3Actionneurs à câbles
III.3 Structure globale de l’actionnement
III.3.1Pré-dimensionnement des actionneurs
III.3.2Câbles actionneurs
III.3.3Découplage
III.3.4Capteurs articulaires
III.4 Conception de la transmission à moufle 
III.4.1Contraintes
III.4.2Effecteur multi-moufle
III.4.3Validation numérique
III.4.4Réalisation pratique
III.5 Conclusion
Chapitre IV Modélisation en vue de la commande
IV.1 Introduction 
IV.2Modélisation du bras
IV.2.1Modèle géométrique
IV.2.2Modèle cinématique
IV.2.3Modèle de simulation pour la commande
IV.3Analyse et perspectives 
IV.3.1Inversion des modèles
IV.3.2Modèle de transmission
IV.3.3Traitement des flexibilités
IV.4Conclusion 
Conclusion générale
Annexe 1 
Annexe 2
Références bibliographiques

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