INTRODUCTION
L’infrastructure constitue un paramètre très déterminant pour accéder au processus de développement. Pour Madagascar, ce domaine est encore un fléau majeur car un nombre très important de localités restent handicapés sur ce point : les bases matérielles sont insuffisantes et la majorité des infrastructures déjà existantes sont médiocres et vétustes. Cependant, le pays connaît un rythme d’accroissement démographique très rapide, mais les infrastructures ne sont pas en harmonie avec le nombre de la population. C’est une île dotée de richesses naturelles et minières en abondance. Pourtant, il se trouve qu’on ne peut pas tirer profit de ces atouts considérables car les infrastructures demeurent faibles et ne sont pas performantes.C’est un pays potentiellement riche mais matériellement pauvre. Le manque actuel des infrastructures en qualité et en quantité à Madagascar est vraiment préoccupant car il porte atteinte à la reprise de la croissance économique et à la lutte contre la pauvreté pour accéder au développement. Pire encore,est qu’en milieu rural, la défaillance en infrastructure est beaucoup plus accentuée même si le pays est à vocation agricole et que le secteur de production primaire représente le premier secteur pourvoyeur d’emploi pour les 85%de la population dans cette zone.
En conséquence, cet obstacle infrastructurel contribue en grande partie à handicaper le développement de ce secteur vu que l’infrastructure stimule et demeure le socle de l’accélération de la croissance agricole. Il s’agit d’une réalité qui suscite des questions explicatives et des analyses approfondies car le décollage économique est profondément associé avec la prépondérance du monde rural.Afin de pouvoir apprécier explicitement les impacts négatifs de ce blocage infrastructurel dans ce domaine, une étude a été menée dans la commune rurale de Kianjavato. C’est une zone dotée d’atouts considérables du point de vue économique, écologique. Pourtant, il a été constaté que ces richesses sont sous-exploitées à cause du manque d’infrastructures communautaires..
Développement
« En tant qu’action le développement n’est autre chose que le faisceau dans une évolution coordonnée et harmonisée dans une phase de moins humaine à une phase plus humaine »,c’est donc une démarche de changement des différentes structures économiques, sociales, politiques et mentales qui ne peut être réalisée en une courte durée et qui implique la croissance ordonnée analogue à celle des vivants. Elle correspond à la transformation de ces structures qui permettent l’apparition et la prolongation de la croissance économique ainsi que l’élévation des niveaux de vie. « Le développement authentique est essentiellement la réponse aux besoins et le besoin apparaît comme une différence entre une situation et des normes, ces normes pouvant être un minimum absolu estimé par les spécialistes des sciences humaines ou le minimum fixé par les dirigeants politiques ou le minimum désiré par les sous-populations ou enfin le maximum possible en fonction des ressources ». Par rapport à cette affirmation on peut confirmer ainsi que le développement c’est l’atteinte des objectifs et des exigences fixés par chaque individu, par une communauté donnée, par la politique publique et par les références en terme de recherche étymologique des experts.
En d’autres termes, le développement est le stade ou les membres de la société auraient dépassé les problèmes de la satisfaction des besoins fondamentaux et auraient accédé à un certain confort matériel et intellectuel. « Selon le point de vue Marxisme le développement a des exigences :
– Economiques : mobilisation et centralisation des surplus économiques et leur utilisation planifiée pour le développement.
– Sociales : adaptation des rapports sociaux de production aux nécessités du développement ; promotion sociale générale.
– Psychologique : remplacement de la passivité, de la routine, de la superstition par la confiance, la volonté, l’engagement personnel dans le progrès, la stimulation de l’esprit d’initiative, l’innovation et la confiance en soi.
– Institutionnelle: gestion par le secteur public des ressources essentielles ; contrôle de la monnaie, du crédit et du commerce.
– Scientifique : refléter dans les plans les priorités, faire croitre l’accumulation plus vite que la consommation, consolider les bases agricoles, commencer l’édification du secteur industriel et respecter les proportionnalités entre secteur ».
Développement local
« Le développement local est plus qu’une alternative, c’est la seule issue pour contenir les conséquences de la destruction du tissu économique social et local et aux défaillances du système macro-économique ».Le développement local se substitue peu à peu au modèle centralisateur dans la mesure oùce dernier n’est plus en mesure de répondre aux exigences d’une société locale et de connaitre les réalités vécues à ce lieu pour entreprendre des programmes et des solutions appropriées à chaque contexte. Dans le même esprit, c’est vraiment primordial de mettre en place de nouvelles stratégies d’intervention car le modèle centralisateur entraine inévitablement des situations de déséquilibre entre le centre et la périphérie. « Le développement local s’agit principalement de créer un environnement favorable au développement des ressources humaines et à la promotion des initiatives de développement économique au niveau local. Les efforts sur le long terme doivent nécessairement s’appuyer sur un ensemble d’intervention à court terme qui vise à donner aux zones les plus pauvres le minimum des moyens nécessaires à leur participation effective au processus de développement » .
C’est donc le moyen le plus efficace visant à mobiliser les forces synergiques de développement économique présentes au niveau local qui sont notamment les potentialités et les atouts dont le rôle socio-économique n’est pas suffisamment pris en compte dans les politiques et programmes de développement des pays. Cette mobilisation consiste surtout à la mise en valeur des secteurs d’activité et des milieux sociaux locaux qui sont demeurés relativement à l’écart de la dynamique du processus du développement. « On stimulera l’initiative locale pour essayer de créer des entreprises, des nouveaux emplois, de maintenir les populations dans leur région d’origine atténuant ainsi la pression démographique sur les grands centres urbains et en même temps pour mettre en valeur les potentiels de compétitivité économique et les patrimoines multiples existant au niveau local ».
Définition et caractéristique du terme infrastructure
Selon la définition de la Toupie : « le terme infrastructure désigne l’ensemble des ouvrages et des équipements collectifs nécessitant des fondations et qui sont destinés à soutenir une activité économique. Dans la théorie Marxiste, l’infrastructure désigne l’ensemble des forces productives et les rapports de production qui forment la base matérielle de la société». Elle est l’ensemble des équipements collectifs à la base de l’activité productive c’est- à-dire l’ensemble des facteurs de production. « En dépit de leur diversité, les infrastructures partagent des caractéristiques communes ; elles sont très lourdement capitalistiques et nécessitent d’importants investissements. Elles reposent en général sur un réseau de distribution à plusieurs niveaux.Elles ont souvent un caractère de bien public lorsque le niveau d’équipement les place dans une zone de non rivalité ou plus rarement de non exclusion ». Un bien est qualifié de nonrival si son utilisation par un agent ne réduit pas les quantités disponibles pour les autres agents. La non-exclusion par les mécanismes de marché caractérise, de son côté, des biens dont aucun agent ne peut être exclu des bénéfices. Celle-ci découle également de l’impossibilité de fractionner le service entre divers utilisateurs c’est-à-dire de l’indivisibilité.Ces caractéristiques des infrastructures au-delà de leur aspect généralement très fortement capitalistique appellent une intervention publique adaptée en terme de gestion, de contrôle, de régulation, de financement, voire de subvention afin de produire et de distribuer de façon équitable les différents effets externes et assurer la pérennité des équipements.
Liaison entre infrastructure et le développement socio-économique local
Les actions de développement local nécessitent l’implantation complémentaire des réseaux d’infrastructures ; elle est un moyen pour la promotion du développement local.Un large consensus peut être avancé pour soutenir que les infrastructures favorisent la croissance et le développement :
• Sur le commerce : le développement des infrastructures joue un rôle incontournable en matière de facilitation des échanges.Il a la capacité de promouvoir les flux commerciaux créant ainsi des marchés régionaux. Diverses sortes d’infrastructures devraient être tenues compte pour assurer la dynamisation du secteur commerce à l’échelle locale,nationale et même internationale. Les infrastructures matérielles en relation avec le commerce sont entre autres les routes, les voies ferrées, les ports et les aéroports qui revêtent tous une valeur fondamentale pour relier le territoire au monde externe. Les infrastructures immatérielles telles que les transports maritimes, aériens, télécommunications, environnement des entreprises sont tous aussi primordiaux pour la maîtrise du commerce.
La création d’un environnement favorable aux échanges par le biais des infrastructures est déterminante si l’on veut soutenir le développement. «Les pays qui obtiennent les meilleurs résultats dans le domaine d’infrastructure affichent un accroissement plus rapide des échanges, une croissance économique accélérée et une plus grande diversification des exportations ». Une infrastructure de communication en état de vétusté ou bien de services de transporttrès inefficace se traduisent par des coûts directs de transport plus élevés et des délais de livraison plus longs. Ainsi, le développement de l’infrastructure d’un pays peut diminuer les coûts d’échange. « Les infrastructures entraînent d’importants effets externes sur l’ensemble de l’activité économique en facilitant la connexion entre les différents individus et les différents marchés et donc l’incitation aux investissements».
• Sur la production :La présence des infrastructures contribue à favoriser le développement de micro-entreprise et PME locale ainsi que l’investissement direct étranger. « Selon la conception traditionnelle en science économique, l’entreprise recherche la localisation qui lui procure le bénéfice maximum compte tenu des prix auxquels elle se procure les différents facteurs de production, de la manière dont elle combine ces facteurs, du prix départ qu’elle pratique en fonction des coûts de transport et des prix régnant sur les divers marchés et enfin du niveau de production qui en résulte ». Les infrastructures ont une importance cruciale car elles peuvent avoir des influences sur un large éventail des activités économiques ayant des répercussions directes sur les capacités de production des entreprises ainsi que sur les possibilités des consommations offertes aux consommateurs. Elles peuvent favoriser et stimuler la diversification de la production dans son ensemble. Le rôle productif des infrastructures repose sur la fourniture de biens et de services intermédiaires qui participe au processus de production. Mais l’originalité des infrastructures relève aussi surtout de l’aptitude d’améliorer l’utilisation des autres facteurs de production qui concourent à la diminution des coûts de production et une augmentation de la rentabilité des activités.Il y a la convergence des infrastructures vers la formation de capital privé. Le processus par lequel les infrastructures publiques affectent la croissance de la productivité réside dans la formation du capital privé. A ce titre, l’accroissement de la productivité marginale des facteurs de production, en accroissant le capital public, entraine l’accroissement du taux du rendement du capital privé. « La corrélation entre la croissance économique et les investissements en infrastructure est très claire grâce aux résultats des recherches empiriques des auteurs : les calculs de A.MUNNELL(1990) confirme que quoi que la relation établie entre le capital public et la production du secteur privé est moins robuste ; une augmentation d’1% de stock de capital public provoque une augmentation de 0,34% de la production. En 1992, le même auteur met en évidence que la relation entre dépenses d’infrastructures est plus robuste lorsqu’on passe d’un espace régional localisé à une région plus vaste c’est-à-dire nation. Dans le cas des USA, l’élasticité de la production aux dépenses d’infrastructures passent de 0.34 – 0.39 à l’échelle nationaleà 0.15-0.20 au niveau des Etats et à 0.03-0.08 au niveau des métropoles. Pour Wang, une hausse de 1% des dépenses en capital public augmenterait la production privée de 0,2%11».Par ailleurs, les infrastructures de services offertes au ménage soutiennent en partie l’accroissement de la productivité du travail et à la réduction de la pauvreté. Sur le plan agricole, le système hydraulique performant permet aux agriculteurs de maîtriser l’eau et d’accroître le rendement de la production à l’hectare.
Dans le même secteur, l’approvisionnement et le coût des intrants nécessaires à la production dépendent du réseau routier ou du transport en place.L’infrastructure publique a une grande importance dans l’ouvrage de WW.ROSTOW « les étapes de la croissance économique, un manifeste anti-communiste »en1960. Cet auteur confirme que si un pays voulait connaître la croissance, il devrait franchir progressivement 5 étapes dont la société traditionnelle, les conditions préalables au démarrage, le démarrage, la maturité et la consommation de masse. Dans l’étape qu’on appelle « condition préalable au développement »,le secteur public tient un rôle stratégique dans la construction d’une économie moderne. En effet, pour lui, « il y a deux problèmes communs à toute société ayant appris l’art du développement : le problème de l’accroissement de la productivité dans l’agriculture et les industries extractives ensuite le problème de capital nécessaire à l’infrastructure sociale » mais pour résoudre ces contraintes, l’infrastructure publique doit être consolidée.
• Au niveau de la société :« Les réseaux d’infrastructures jouent un rôle vital dans le développement social. De plus en plus interdépendants, ils constituent un moyen d’assurer la fourniture et la prestation des biens et services qui concourent à la prospérité et à la croissance économique et contribuent à la qualité de vie ». Les infrastructures fournissent des services essentiels tels que l’eau, l’éducation, les télécommunications, la santé…« L’amélioration de la santé est consubstantielle au développement: le développement consiste avant tout à améliorer la vie que nous menons et à renforcer la liberté dont nous jouissons. Or, l’une des plus grandes libertés est celle de ne pas souffrir d’un mauvais état de santé que l’on peut prévenir et d’échapper à une mort évitable». La santé peut avoir des influences sur la performance économique étant donné que l’état de santé des individus est strictement lié à leurs capacités productives. Concernant l’éducation, elle a comme principale fonction d’ouvrir et de filtrer l’accès à l’emploi et à la promotion sociale dans tous les pays.
Elle contribue énormément à assurer une meilleure condition de vie des individus au niveau de la communauté en leur permettant d’exercer des emplois décents.« Les différentiels de salaires entre les individus ne sont dus qu’à des différences entre eux de niveau d’éducation, puisque le marché égalise le revenu d’individus à niveau de formation égal. Une implication forte en termes de politique économique est que, sous cette hypothèse, pour réduire les inégalités dans la réparation des revenus d’un pays, il faudrait commencer par réduire celles dans l’accès à l’éducation, étant donné que l’inégalité des revenus paraît d’autant plus importante que l’éducation est plus inégalement distribuée ». Par ailleurs, le niveau d’éducation élevé est une grande opportunité pour un pays puisqu’il influe sur la productivité, ayant ainsi des impacts sur l’augmentation de revenu.Il permet à un pays d’être plus compétitif en matière de main d’œuvre ou en matière de qualité de produits à l’échelle mondiale grâce aux compétences et aux qualifications professionnelles requises à travers l’éducation. L’accès à l’éducation par la présence des infrastructures permet donc le développement individuel, familial, et même de la nation toute entière.« L’enseignement est un investissement intergénérationnel qui développe les facultés des enfants, exerce des effets sur la fécondité des femmes, valorise le patrimoine culturel et construit l’identité nationale».
Création d’un centre de formation des personnels publics décentralisés
Afin de renforcer les compétences des autorités locales, il est nécessaire de créer un centre de formation. L’attribution d’une formation en gouvernance locale est la réponse adéquate pour affronter les contraintes inhérentes à la capacité restrictive des dirigeants au niveau de la commune et fokontany dans la mise en œuvre des programmes de développement infrastructurel. Il a été soulevé que la réalisation des projets infrastructurels requiert des analyses approfondies des contextes socio-économiques, politiques, environnementales, financières, juridiques afin d’assurer les impacts positifs et efficaces en terme de développement.
De ce fait ces personnalités publiques doivent disposer des bagages techniques de base à travers des formations à multiples dimensions pour accomplir ces missions d’ordre infrastructurel portant sur :
– Les méthodes de l’identification des besoins de la population, la formulation, le montage, l’exécution, le suivi et l’évaluation des projets en matière d’infrastructure
– Les stratégies et les moyens possibles pour financer les projets infrastructurels
– Les dispositifs sur le système de passation de marché public, car la réalisation des grands travaux d’infrastructure nécessite parfois des appels d’offres dans la sélection des prestataires, suivi et contrôle des chantiers, gestion de contrat, gestion post investissement
– La maîtrise de la fiscalité locale ou fiscalité de proximité en vue du financement des travaux d’investissement afin que les maires et les responsables financiers de la commune connaissent les grandes lignes sur les recettes fiscale et parafiscale.
– Les moyens sur l’application des procédures, des règles et de la gestion budgétaires Bref ces formations sont nécessaires mais ils sont justes des appuis mais la solution à long terme repose sur la réglementation de la candidature pour les postes administratifs locaux. La gestion des affaires administratives communales doit être fondée par les principes de productivité et d’efficacité. De ce fait, la candidature aux élections doit être strictement soumise autant que possible à des critères de niveau d’étude.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I : CONCEPT DE BASE ET THEORIE SUR LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE LOCAL ET L’INFRASTRUCURE
CHAPITRE I : Interrelation entre développement économique local et infrastructure
CHAPITRE II : Etat et condition des infrastructures à Madagascar
CHAPITRE III :Paramètres conditionnant la qualité des projets infrastructurels
PARTIE II : RESULTATS ET DISCUSSIONS
CHAPITRE I: Présentation de la zone d’étude
CHAPITRE II: Analyse des facteurs de blocage de la réalisation des infrastructures dans la commune rurale de Kianjavato
CHAPITRE III : Analyse des impacts des contraintes infrastructurelles dans la commune rurale de Kianjavato
PARTIE III: RECOMMANDATIONS ET ACTIONS POSSIBLES
CHAPITRE I : Recommandations
CHAPITRE II : Perspectives sur les paquets d’actions complémentaires aux infrastructures économiques
CONCLUSION
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