Définition d’un sédiment
Le sédiment est un matériau issu de l’érosion, transporté et déposé par les cours d’eau, et n’ayant pas encore subi de transformation diagénétique (passage à une roche sédimentaire par compression des sédiments, accompagnée d’une évacuation de l’eau et de la pression) et a deux principales origines (Schneider 2001) :
● l’origine endogène de la sédimentation provient de la production autochtone du milieu. Cette production primaire engendre des débris de macrophytes (plantes aquatiques, cadavres de microphytes et d’animaux).
● l’origine exogène vient d’un apport de matières allochtones. Celles-ci sont issues du ruissellement des fleuves, des effluents ou de l’atmosphère. Cet apport peut être d’origine naturelle (érosion des sols, décomposition de la matière végétale), ou anthropique (apports de matière en suspension, de matières organiques, de nutriments ou de micropolluants en raison des rejets agricoles, industriels et domestiques).
Granulométrie
La distribution granulométrique présente la répartition de la taille des particules constituant la phase solide des sols ou des sédiments.En général, les sols peuvent être classés selon la taille de leurs grains et leurs dénominations .
Pour les sédiments de dragage, la taille maximale des grains est inférieure à 2 mm. Pour une grande part (environ 70%), les sédiments de dragage sont constitués de limon dont la taille des particules est inférieure à 63 µm. Ainsi, les composants sont alors des argiles, des limons et quelquefois des sables fins. Cette fraction fine est responsable du comportement complexe des sédiments, provoqué par les interactions de surface entre les particules solides (plasticité, perméabilité du matériau…) ainsi que par les interactions entre les ions présents dans la matrice aqueuse interstitielle (capacité d’échange de cations), (Ammami 2013).
Composition minéralogique des sédiments
Le sédiment naturel est une matrice hétérogène constitué en général : d’une fraction minérale, d’une fraction organique et d’une quantité d’eau.
Fraction minérale
Des silicates et des carbonates sont les deux composants principaux dans la fraction minérale d’un sédiment. Les silicates sont des groupements chimiques anioniques très stables dont la structure est basée sur des tétraèdres de [SiO4]⁴⁻ (Ammami 2013). Les argiles sont des silicates d’aluminium hydratés (SAH) d’une structure cristalline en feuillet, avec parfois un phénomène de gonflement très important (Grosdemange 2005; Cazalet 2012).
Les minéraux carbonatés présents dans les sédiments sont pour la plupart des calcites (CaCO3), mais éventuellement de la magnésite (MgCO3), de la dolomite (CaCO3.MgCO3), du carbonate de sodium (Na2CO3.10H2O) et de la sidérite (FeCO3) (Hlavackova 2005). Dans les sédiments de l’estuaire de la Seine, il existe un certain pourcentage de calcites. Elles présentent la propriété de tampon contre la variation du pH dans le sédiment. D’autre part, des oxydes MxOy métalliques, hydroxydes M(OH)x et oxyhydroxydes MxOy(OH)z sont plus ou moins présents dans les sédiments. Les éléments métalliques peuvent être le fer, l’aluminium, mais éventuellement certains métaux lourds.
Fraction organique
La fraction organique du sol comprend tous les composés organiques simples ou complexes, isolés ou bien associés entre eux dans des ensembles vivants ou non vivants (Hlavackova 2005). Il s’agit de débris végétaux, micro-organismes, acides fulviques et humiques. D’après Schneider (2001), la proportion de matière organique dans la matière sèche des sédiments varie entre 90%, dans le cas de la tourbe, et 2% pour les sables de rivière En général, la proportion de matière organique est de l’ordre de 2 à 10% pour les sédiments des cours d’eaux vives et elle est constituée à 60% de composés humiques.
La matière organique, notamment humique, a beaucoup d’affinité pour les polluants qu’ils soient organiques ou inorganiques, car elle possède une grande surface spécifique et un caractère lipophile (présence de nombreux noyaux aromatiques reliés par des chaines aliphatiques) (Ammami 2013). La présence des matières organiques provoque une modification des caractéristiques géotechniques du sol. En effet l’interaction entre les matières organiques et les fractions minérales modifie les caractéristiques géotechniques du sol (Silitonga 2010). Certains éléments dans la fraction minérale (éléments traces métalliques) et la fraction organique (HAP, TBT…) sont des contaminants.
Dragage
Les activités de dragage concernent en premier lieu les ports et les voies navigables, pour lesquels ces opérations constituent une nécessité vitale au maintien de leur activité. Ils sont justifiés par l’accumulation dans les ports et dans les chenaux de navigation, de matériaux provenant des bassins versants et/ou de la mer et visent ainsi à rétablir des tirants d’eau suffisants pour permettre la libre circulation et la sécurité des navires. Ils sont également employés dans le cadre de travaux neufs pour créer de nouveaux espaces navigables ou de nouvelles infrastructures portuaires.
Quantités de matière draguées en France
Chaque année, en moyenne 25 millions de tonnes des matières sèches sont dragués par an dans les ports français (El Fadili et Marion 2015). En 2011, les sept Grands Ports Maritimes (Dunkerque, Le Havre, Rouen, Nantes, La Rochelle, Bordeaux, Marseille) comptabilisaient à eux seuls 88 % du total (GÉODE 2012). la plupart des activités de dragage est concentrée sur les façades de la Manche, de la Mer du Nord et de l’Atlantique. Mais, la Méditerranée est en constante augmentation depuis 2005.
Les enjeux des activités de dragage
L’activité de dragage est généralement faite selon les trois étapes suivantes : le curage (l’opération de dragage), le transport et la disposition des sédiments dragués (Manap et Voulvoulis 2015).
Techniques de dragage (le curage)
En fonction des moyens et du volume de matériaux à draguer, il peut s’agir de dragage mécanique (à benne preneuse), de dragage hydraulique (aspiration à travers un tube), de déroctage (fragmentation de la roche avant extraction), de dragage hydrodynamique (utilisation des courants comme moyen de transport des sédiments) ou pneumatique (par pompe à air comprimé) (Alzieu 1999; Hamdoun 2013). Parmi ces techniques, le dragage hydraulique et le dragage mécanique sont les deux moyens les plus souvent utilisés. Certaines opérations ont nécessité l’utilisation d’une technique de dragage dite mixte, associant dragues mécaniques et hydrauliques (Le Guyader 2013). En 2010, pour les grands ports maritimes en France, 71,3% des sédiments ont été dragués avec la technique hydraulique et 24,6% pour la technique mixte. Mais, le dragage mécanique reste très anecdotique avec une valeur de 0,3%.
Transport des sédiments de dragage
Le choix des moyens de transport des sédiments de dragage dépend du lieu de leur dépôt. Par exemple, les sédiments peuvent être transportés par bateaux pour arriver aux zones d’immersion ou par camions pour être déposés à terre. À cause de l’état des sédiments représentant un grand volume avec une teneur en eau importante (>100%), le transport de ce type de matériau pose de nombreux défis économiques et écologiques à relever. Par conséquent, un processus de déshydratation des sédiments afin de réduire leur teneur en eau et leur volume est nécessaire.
Les techniques de déshydratation des sédiments, aussi dites prétraitement, peuvent être traditionnellement classées en plusieurs catégories : bassins de décantation, techniques mécaniques (compression, filtres à presse ou à bande, consolidation sous vide, centrifugation…) ou thermiques (évaporation). Ces processus de déshydratation sont en général peu coûteux et faciles à mettre en œuvre, mais ils peuvent s’avérer longs et leur efficacité est plus ou moins bonne. Cependant, la technique d’électrodéshydratation peut palier à ces faiblesses à cause de la forte teneur en eau et la faible perméabilité des boues d’épuration ou des sédiments de dragage (Citeau et al. 2012; Ammami 2013). Après l’application une tension électrique directe par deux électrodes sur les sédiments, l’eau dans la matrice peut être transportée vers la cathode en raison de l’effet d’électro-osmose. Cette technique présente l’avantage d’accélération du processus de déshydratation avec une plus faible consommation d’énergie par rapport à la méthode thermique (Mahmoud et al. 2011). Dans une étude précédente, nous avons montré que l’effet de déshydratation peut être amélioré avec l’application d’une contrainte mécanique sur les deux électrodes (Ammami 2013).
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre I. Synthèse bibliographique
I.1. Définition d’un sédiment
Granulométrie
Composition minéralogique des sédiments
Fraction minérale
Fraction organique
I.2. Dragage
Quantités de matière draguées en France
Les enjeux des activités de dragage
Techniques de dragage (le curage)
Transport des sédiments de dragage
Dépôt des sédiments
Immersion des sédiments
Référentiel français (GÉODE)
Dépôt des sédiments à terre
Chambre de dépôt de Tancarville
I.3. Contaminants
Eléments traces métalliques (ETM)
Contaminants organiques
I.4. Technologies de remédiation
Méthodes d’extraction des polluants
Rinçage des sédiments
Traitement thermique
Bioremédiation
Phytoremédiation
Traitement électrocinétique
Méthodes d’immobilisation des polluants
Solidification/Stabilisation (S/S)
Vitrification
I.5. Conclusions
Chapitre II. Caractérisation des sédiments
II.1. Prélèvements des sédiments
II.2. Caractérisation géotechnique des sédiments
Analyse granulométrique des sédiments (NF ISO 13320-1)
Argilosité
Limites d’Atterberg (NF P 94-051)
II.2.2.1.1. Limite de liquidité (WL)
II.2.2.1.2. Limite de plasticité (WP)
II.2.2.1.3. Indice de plasticité (IP)
Valeur au bleu de méthylène (NF P 94-068)
Classification selon la nature (GTR 1992)
Essais Proctor Normal et Modifié (NF P 94-093)
Teneur en matière organique (NF EN 12879-2000)
II.3. Propriétés chimiques des sédiments
pH (NF X 31-103) et Conductivité électrique (NF X 31-113)
Détermination des teneurs en éléments traces métalliques (ETM)
Chapitre III.Traitement électrocinétique des sédiments de dragage
III.1. Introduction
Transport électrocinétique
L’électromigration
L’électro-osmose
L’électrophorèse
Les réactions électrochimiques
Traitement électrocinétique amélioré
Techniques utilisées pour solubiliser les contaminants
III.1.2.1.1. Techniques d’acidification
III.1.2.1.2. Les agents d’amélioration
Techniques de contrôle du pH
Les autres techniques de remédiation combinées avec la méthode électrocinétique
III.2. Méthodes et appareils
Cellule d’électroremédiation
Dispositif d’électroremédiation en semi-pilote
Mesures des paramètres électrochimiques
Programme expérimental
III.3. Résultats et discussion
Traitement des sédiments avec de l’eau distillée, sans réactif (EK0)
Évolution de l’intensité du courant électrique
Flux électro-osmotiques cumulatifs (EOF)
Variation du pH et de la conductivité électrique (CE)
Effet de décontamination des ETM
Efficacité énergétique de EK0
EK-Traitements améliorés des sédiments avec des réactifs et contrôle du pH
à la cathode, sans/avec tensio-actif (EK1 à EK3)
Évolution de l’intensité du courant électrique
Flux électro-osmotiques cumulatifs (EOF)
Variation du pH
Variation de la conductivité électrique (CE)
Effet de décontamination des ETM
EK-traitements améliorés des sédiments avec contrôle du pH avec la condition des orifices ouverts (EK4 à EK6)
Évolution de l’intensité du courant électrique
Flux électroosmotiques cumulatifs (EOF)
Variation du pH
Variation de la conductivité électrique (CE)
Effet de décontamination des ETM
Efficacité énergétique
EK-traitements améliorés des sédiments par les agents chélatants (EK7 à EK10)
Évolution de l’intensité du courant électrique
Flux électroosmotiques cumulatifs (EOF)
Variation du pH
Variation de la conductivité électrique (CE)
Effet de décontamination des ETM
Efficacité énergétique
Semi-pilote avec l’EK-traitement des sédiments (EK11)
Évolution d’intensité du courant électrique
Variation de la température
Flux électro-osmotiques cumulatifs (EOF)
Variation du pH
Variation de la conductivité électrique (CE)
Abattement des ETM
III.4. Conclusions
Chapitre IV.Valorisation des sédiments par Solidification/Stabilisation
Conclusion générale