COMPORTEMENTS DES HSH FACE AUX RISQUES DU VIH/SIDA

LA SEXUALITE ENTRE LES HOMMES

Généralités La sexualité entre hommes existe dans la plupart des sociétés, même si son ampleur varie selon le lieu. Malgré que les homosexuels sont acceptés et /ou tolérés dans plusieurs pays, certaines autorités refusent souvent d’admettre leur existence en référence à des préceptes religieux ou des tabous culturels, ou parce que le sujet les met personnellement mal à l’aise. Les actes sexuels entre hommes ont souvent été condamnés, par les responsables laïques et religieux, et criminalisés [5]. Dans certains pays, les peines sanctionnant les actes sexuels entre hommes sont parmi les plus sévères qui soient. Ailleurs, même là où le comportement homosexuel n’est pas illégal, les hommes dont les rapports sexuels avec d’autres hommes sont attestés ou supposés sont souvent victimes d’une persécution officieuse de la part des autorités (la police ou l’armée, par exemple), ou d’une discrimination ou d’une stigmatisation. Pour ces raisons, la plupart des rapports sexuels entre hommes restent cachés ou secrets dans de nombreuses régions du monde [6]. Cependant, malgré l’ostracisme, le désaveu et le rejet très répandus, les HSH dans le monde occidental ont joué un rôle clé dans les efforts de mobilisation sociale visant à enrayer la propagation du VIH/SIDA. Dans le cadre du contexte africain cependant, la question de l’existence des HSH rencontre généralement une hostilité farouche. Comparée à d’autres régions du monde, l’Afrique a le plus bas niveau dans la prise de conscience et la communication au sujet de l’homosexualité, et 55% des pays africains possèdent des lois contre les HSH. Le phénomène des HSH est considéré très marginal, étroitement associé à la contamination européenne ou occidentale, et il y a une forte conviction qu’il ne trouve pas ses racines dans la société traditionnelle africaine. Il existe en Afrique très peu d’études sociales et du comportement sur les HSH. La littérature anthropologique fait plusieurs références à l’homosexualité masculine dans différentes parties de l’Afrique. Au Sénégal, il a été décrit son existence dans la société Wolof, pour conclure que le phénomène y est bien ancré. Il y a eu une certaine documentation sur les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes dans les prisons en Afrique, en vue d’élaborer des stratégies de prévention du VIH/SIDA dans ce contexte. La Zambie fait état de 8,4% de prisonniers ayant eu des rapports homosexuels, bien que par questions indirectes la conclusion implique un chiffre beaucoup plus élevé. Les interviews avec des prisonniers au Nigeria suggèrent l’existence très répandue des rapports homosexuels. Toutefois, en dehors de la recherche menée dans les populations carcérales, il y a eu peu de travaux effectués par des chercheurs africains sur l’identité et le comportement des HSH, dans le but d’élaborer des programmes de prévention et de prise en charge qui répondent à leurs besoins. Au Sénégal, les forces culturelles et économiques forment leurs relations sexuelles et sociales [7]. Aujourd’hui, cette sexualité est sujette à de nombreux risques de maladies dont le sida. D’après l’ONUSIDA, le nombre de nouvelles infections tend à s’accentuer particulièrement en Afrique au Sud du Sahara où le nombre de personnes vivant avec le VIH est passé de 3 millions en 2003 à 3,2 millions en 2005. Il importe que des efforts soient perpétuellement déployés afin d’infléchir cette courbe de croissance exponentielle. Il faut donc, non seulement poursuivre les programmes de prévention en IST/VIH/SIDA déjà amorcés, mais aussi et surtout inventer de nouvelles réponses en prenant en compte les groupes spécifiques ou à haut risque comme les migrants, les consommateurs de drogue et les homosexuels [8].
Terminologies identitaires [8] Il existe des termes par lesquels on désigne les homosexuels ou par lesquels euxmêmes se désignent. Ils préfèrent le mot gay à celui d’homosexuel qui, apparaît péjoratif ou trop générique, étant entendu que ce vocable regroupe aussi les homosexuelles ou lesbiennes. GAY est en fait un acronyme anglais qui signifie Good As You (Aussi beau que toi). On pourrait y voir la revendication d’une identité mais aussi d’une dignité, au même titre que celles dues aux hétérosexuels. Chez les gays, on distingue les passifs, les actifs, les versatiles et les bisexuels.
a. Les passifs : Ils sont les ¨femmes¨. C’est eux qui, comme femmes ou filles, se font pénétrer par leurs partenaires. Cette pénétration se fait dans l’anus ou dans la bouche. Cette orientation sexuelle n’est ni un choix ni une mode, c’est une pulsion naturelle. Les passifs se sentent réellement avoir un sexe féminin. Un ¨vrai¨ passif devient donc difficilement un actif, un bisexuel ou un versatile. C’est cette tendance naturelle qui les confine dans les rôles et métiers généralement réservés aux femmes. Plus que le métier et le rôle sexuel, c’est par des signes extérieurs comme l’habillement, la démarche, la voix, que l’on reconnaît les passifs. Certains enquêtés se distinguent effectivement des autres par leurs tenues moulantes, leurs maquillages, leurs gestes de mains, leurs démarches et leurs voix très proches de celles des femmes.
b. Les actifs : Les actifs sont les ¨hommes¨. C’est eux, qui pénètrent les passifs au cours de l’acte sexuel. Etre actif n’est pas une question de mode ou de simple choix, c’est une pulsion naturelle qui les fait préférer la pénétration de l’anus ou la bouche d’un homme que celle du vagin. Comparativement aux passifs, il est difficile de repérer un actif par quelques signes extérieurs que ce soit.
c. Les versatiles : Les versatiles sont ceux qui sont à la fois passifs et actifs. Les circonstances ou les raisons de ce passage à l’un ou à l’autre de ces modes ne sont pas connues. Il existerait ainsi des partenaires ou des couples qui vivent durablement cette versatilité sexuelle. Ce qui pose aussi le problème de statut ou de genre dans ce partenariat, à savoir qui est ¨l’homme¨, qui est la ¨femme¨ ? En dehors de ces trois types de gays, il existe des bisexuels. Les bisexuels expliquent leur instabilité sexuelle par la découverte tardive de leur homosexualité et dans la plupart des cas, ils ont été déjà mariés ou obligés socialement de l’être, ils ne peuvent que cacher leur homosexualité.
Ampleur des problèmes sanitaires et sociaux des HSH [2,9,10]
a. Vulnérabilité face au VIH/Sida : La forte prévalence du VIH chez les Africains ayant des pratiques homosexuelles a été confirmée au Mexique pour différents pays, lors de la réunion internationale sur le SIDA et HSH, par exemple au Sénégal (21,5%). Ailleurs la situation est sous-documentée par la recherche. Mais elle est aussi en grande partie méconnue des intéressés eux-mêmes. Les raisons de la forte exposition des HSH sont d’ordre sociologique, culturel et physiologique. Des enquêtes montrent que chez les hommes ayant des pratiques homosexuelles en Afrique, la fréquence des pénétrations anales non protégées est élevée et le niveau de connaissance sur les risques de transmission du VIH est parfois faible. De façon scientifique, on explique surtout pourquoi, les actes homosexuels sont plus à risques que les rapports entre hétérosexuels. « La muqueuse anale est beaucoup plus fragile et propice à la pénétration du VIH ». Les experts de la lutte ont donc pris conscience qu’il était urgent de toucher cette catégorie de personnes s’ils voulaient durablement stabiliser à son plus faible niveau la propagation de la pandémie.
b. Stigmatisations et discriminations : Selon les données de Solidarité Plus (association de personnes vivant avec le VIH), la stigmatisation et la discrimination liées au VIH/SIDA constituent les plus grands obstacles à la prévention de l’infection à VIH. Elles constituent la 3ème phase de l’épidémie après la propagation et l’incidence. La stigmatisation caractérise tout ce qui discrédite significativement un individu aux yeux des autres. Il s’agit d’un processus dynamique de dévaluation. Quant à la discrimination (conséquence de la stigmatisation), elle se produit lorsqu’on fait une distinction entre des personnes et qu’elles sont traitées de façon inégales et injustes parce qu’elles sont infectées par le VIH. La manifestation de la stigmatisation et de la discrimination est diverse, cela va de l’utilisation d’un mot, d’un geste inconscient à une décision argumentée, d’une négligence passive à un rejet emprunt de violence. La discrimination se manifeste dans le contexte familial et communautaire. Et aussi dans le lieu de travail : par le refus d’accorder un emploi en raison du statut sérologique. De l’imposition du dépistage obligatoire pour celui soupçonné d’être séropositif et de l’exclusion des PVVIH des régimes de prévoyance des prestations médicales.
c. L’homosexualité et la loi : Selon un rapport de l’ONU sida, Quatre-vingt-six pays dans le monde, dont plus de la moitié des pays africains, criminalisent les rapports sexuels entre deux hommes adultes consentants. Sept Etats punissent de mort les relations homosexuelles entre adultes consentants : Arabie saoudite, Emirats arabes unis, Iran, Mauritanie, Nigeria, Soudan et Yémen. Ailleurs dont à Madagascar, aucune loi n’est répressive envers les comportements homosexuels entre adultes consentants, cependant les HSH séropositifs sont confrontés à ce qu’on appelle la double discrimination. Elle est d’abord liée à leur statut sérologique et ensuite à leurs mœurs sexuels ». Les manifestations courantes de la discrimination comme : l’isolement, le refus de logement ou d’emploi, le refus de mariage, le rejet par la communauté, le refus d’assistance médicale, le retard dans l’administration des ARV, les injures, les atteintes physiques, les humiliations de toutes sortes sont des faits vécus et subis par les HSH. Le code pénal de quelques pays africains condamne l’homosexualité :
– au Cameroun, l’article 347 bis sur l’homosexualité spécifie “Est punie d’un emprisonnement de six mois à cinq ans et d’une amende de 20.000 à 200.000 francs toute personne qui a des rapports sexuels avec une personne de son sexe.”
– Au Maroc, l’article 489 dit, que « toute personne qui commet des actes obscènes ou contre-natures avec une personne du même sexe sera punie d’une peine d’emprisonnement allant de 6 mois à 3 ans et à une amende de 120 à 1.000 Dirhams à moins que les circonstances de la commission des faits ne constituent un facteur aggravant »,
– enfin, en République Démocratique du Congo : «Quiconque aura attenté aux mœurs en excitant, facilitant ou favorisant pour satisfaire les passions d’autrui, la débauche ou la corruption des personnes de l’un ou de l’autre sexe, âgées ou apparemment âgées de moins de vingt et un ans, sera puni d’une servitude pénale de trois mois à cinq ans et d’une amende de cinquante à mille zaïres. L’âge des personnes pourra être déterminé notamment par examen médical, à défaut d’état civil »

Transmission mère-enfant [24,25,26,27]

                 En l’absence de mesures prophylactiques le risque de transmission est de 15 % en Europe et 30-40 % en Afrique, principalement en période néonatale (fin de grossesse, accouchement), le risque étant majoré par la gravité de la maladie de la mère, et minoré par l’administration de zidovudine chez les mères non antérieurement traitées et par l’accouchement par césarienne programmée. Ces deux mesures associées amènent le risque de transmission à 1-2 %. De plus, la transmission par l’allaitement maternel étant avérée, celui-ci doit être interdit dans la mesure du possible.

Diagnostic

            La première étape en est la positivité d’un test de dépistage qui indique qu’il y a eu contamination par le virus. Par la suite, le diagnostic de Sida déclaré est établi sur la base d’une part du nombre de lymphocytes TCD4 par millimètre cube de sang et d’autre part de l’apparition des maladies dites opportunistes.

Caractéristiques sociodémographique des HSH

                   Notre enquête a porté sur 141 HSH âgés de 14 ans pour le plus jeune et 48 ans pour le plus âgé avec un âge moyen de 21,7 ans. Nos cas concernaient des adultes jeunes en période d’activité sexuelle car 92% de la population étudiée avaient moins de 34 ans. Ils étaient des victimes potentielles du VIH qui est une menace pour la population jeune. Selon les recommandations de l’Organisation Mondiale de la Santé ou OMS «…la population du groupe de 15 à 24 ans est la plus vulnérable et devrait être activement protégée contre la pandémie VIH/SIDA… » [33]. Cette tranche d’âge correspond à 77% des effectifs de notre étude ce qui n’est pas loin des résultats de la recherche réalisée en 2008 par N. El-Sayyed et Al, au Caire en Egypte qui a montré que 79.5% des HSH se trouvaient dans la tranche d’âge de 15 à 24 ans [34]. A Madagascar, près de 50% de la population est jeune [35]. Cette situation expliquerait la prédominance des jeunes dans notre échantillon. Par contre une étude réalisée au Canada sur un échantillon représentatif chez les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes soit 4 838 hommes dans cinq sites sentinelles en (2005- 2007) ont montré que la plus forte proportion des répondants était âgée entre 30 et 49 ans (54 %), le pourcentage de répondants de 15 à 29 ans et de plus de 50 ans étant plus faible, soit 26 % et 20 % [36]. En ce qui concerne le niveau d’instruction, 98% des enquêtés étaient scolarisés dont le niveau le plus représenté était celui du secondaire pour près de 70%, 26% étaient en primaires et seulement 2% étaient universitaires. Ces chiffres corroborent le rapport sur le développement humain 2007/2008 du PNUD [37] sur le taux d’alphabétisation des adultes qui est de 70,7% à Madagascar ; cependant on peut conclure que les HSH de notre étude étaient plus qu’alphabétisés, ils ont étudié. Au Togo, l’unité de recherche démographique de l’Université de Lomé, dans une étude réalisée en 2006 avec PSI a trouvé un résultat proche du notre car les HSH de leur échantillon de 122 personnes avaient un niveau d’instruction relativement élevé (78% avaient le niveau secondaire ou plus) [8]. Quant aux études réalisées dans d’autres pays très peu de publication concerne les HSH du fait des tabous qui entourent le phénomène, il s’agit d’une population particulièrement difficile à toucher, de par sa tendance à s’isoler et de par la tendance des autres populations à la criminaliser et à la marginaliser surtout en Afrique où des lois contre l’homosexualité sont encore en vigueur [38]. En ce qui concerne la situation matrimoniale 77% des enquêtés étaient célibataires, 19% étaient mariés et seulement 4% étaient séparés ou divorcés. Au Togo 85% des HSH étaient célibataires. D’après Fils-Lien Ely Thélot et Al, dans la plupart des pays africains les circonstances discriminantes poussent à la dissimulation de l’homosexualité, y compris par voie hétérosexuelle (et donc vers la population générale). De nombreux hommes homosexuels (ou qui ont des relations homosexuelles), s’installent dans une relation de couple hétérosexuelle, se marient, ont des enfants, pour respecter les conventions sociales et ont des relations sexuelles avec une personne de même sexe pour avoir du plaisir. [39] Quant à leur profession, 30% étaient des chômeurs, 45% avaient des professions et 25% étaient des élèves ; malgré un niveau d’étude plutôt correct les HSH ne sont pas intégrés dans la vie socio économique. La plupart des HSH ont peur de la discrimination et de la stigmatisation ceci les poussant à exercer des activités plutôt individuelles qu’associatives [40].

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
I.1- LA SEXUALITE ENTRE LES HOMMES
I.1.1-Généralités
I.1.2-Terminologies identitaires
I.1.3-Ampleur des problèmes sanitaires et sociaux des HSH
I.2-GENERALITES SUR VIH/SIDA
I.2.1-Quelques définitions
I.2.2-Historique
I.2.3-Agents responsables
I.2.4-Physiopathologie
I.1.5-Epidémiologie
I.2.6-Transmission
I.2.7-Clinique
I.2.8-Dépistage et diagnostic
I.2.9-Prévention contre le VIH/sida
DEUXIEME PARTIE : METHODOLOGIE ET RESULTATS
II.1-METHODOLOGIE
II.2-RESULTATS
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES ET DISCUSSIONS
RECOMMANDATIONS
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXE

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