Les matériaux sandwichs connaissent un essor important, tant dans les applications les utilisant, que dans les technologies les mettant en œuvre. Ils présentent un intérêt pour les applications qui requièrent à la fois rigidité et légèreté, notamment les transports, la marine, le nautisme, l’aéronautique, l’aérospatial, les sports et loisirs, l’industrie lourde, le génie civil et l’armée. Les matériaux sandwichs sont constitués d’une âme, souvent épaisse et de faible masse volumique, enserrée entre deux peaux à la fois rigides et minces. Du fait que l’on peut modifier la nature des matériaux constitutifs d’âme et de la peau (densité, propriétés mécaniques, physiques et chimiques), il est possible de concevoir des structures adaptées aux applications bien définies.
Lors de la sollicitation en flexion des matériaux sandwichs, la décohésion (décollement) entre la peau et l’âme est l’un des modes d’endommagement observé par de nombreux chercheurs dans le cas des essais de fatigue en flexion. Cet endommagement peut aussi survenir à la suite des imperfections dans le processus de fabrication, le dégazage de l’âme en mousse sous l’exposition directe du soleil, soit résulter des charges externes au cours de la vie d’opération, comme l’impact par des objets étrangers, soit encore résulter par la capacité d’absorption d’eau des âmes cellulaires. La présence de la décohésion affecte le comportement local et global en statique et en dynamique du matériau sandwich. En outre, lors de l’utilisation du matériau sandwich en présence de la décohésion, celle-ci peut se propager et provoquer de nouveaux modes d’endommagement tels que le flambage localisé de la peau, le délaminage de la peau, la fissuration en cisaillement de l’âme, etc. Ces modes d’endommagement peuvent interagir entre eux et aboutir à une défaillance prématurée de la structure en matériau sandwich.
Matériaux sandwichs et leurs constituants
Introduction
Les matériaux sandwichs (fig. 2.1) sont obtenus à partir de deux peaux, de faibles épaisseurs, constituées de matériaux ayant de très bonnes caractéristiques mécaniques, collées sur une âme beaucoup plus épaisse et constituée d’un matériau très léger et ayant de faibles caractéristiques mécaniques. La colle ou l’adhésif est le troisième composant du matériau sandwich. C’est ce dernier qui permet un bon assemblage de la structure et une bonne transmission des contraintes d’un milieu à un autre. De part la constitution des matériaux sandwichs, on peut adapter leurs propriétés mécaniques en faisant varier la nature des peaux (identiques ou non) et de l’âme ainsi que l’épaisseur de chacun des constituants.
Âmes
Le rôle principal de l’âme dans le matériau sandwich est de résister aux efforts de cisaillement. Par ailleurs, l’âme doit pouvoir supporter des charges localisées de poinçonnement. Dans les faits, c’est le constituant de l’âme qui permet de classer les différentes structures en matériau sandwich. Parmi les âmes les plus utilisées, citons celles en mousse, en nid d’abeilles et en bois de balsa:
– Les mousses: se sont les plus fréquemment utilisées, elles sont produites à partir de polychlorure de vinyle, polystyrène, polyuréthane ou d’autres polymères synthétiques. Elles sont thermoformables et permettent donc de réaliser des pièces de formes complexes. Leurs propriétés mécaniques sont bonnes, elles adhèrent bien à la résine et absorbent peu d’eau. Néanmoins, leur point faible réside dans une faible résistance à l’impact.
– Le bois : il est utilisé pour sa très bonne résistance à la compression notamment pour les supports d’accastillage. Le bois le plus utilisé comme matériau d’âme est le balsa. Les âmes en balsa ont été utilisées pour la première fois dans les années 1940 sur des hydravions. Le bois de balsa est aussi un isolant thermique mais pour conserver cette propriété, il doit être traité avec un produit hydrofuge puisqu’il est très hygroscopique.
– Le nid d’abeilles : l’âme en nid d’abeilles, connue sous le nom «Nida », est un matériau structural souple constitué de mailles hexagonales. Elle est réalisée à partir de différents matériaux comme par exemple le papier ou l’aluminium. Le Nida étant une structure anisotrope, ses propriétés varient selon le sens transversal ou longitudinal des alvéoles (taille de mailles). De plus, la taille de celles-ci, l’épaisseur des parois du Nida et la méthode de mise en œuvre sont des paramètres qui influencent la résistance au cisaillement transversal et longitudinal du Nida. Les variétés les plus courantes sont le Nomex et le Korex et sont fabriquées à partir du Kevlar.
Peaux
Un module d’élasticité élevé ainsi qu’une grande résistance à la compression et à la traction sont les principales qualités recherchées pour les peaux des matériaux sandwichs. Les peaux des sandwichs sont généralement constituées de fibres (mat ou tissu) enrobées d’une matrice à base de résine. Il existe plusieurs types de fibres parmi lesquelles on trouve :
— les fibres de verre : les filaments sont obtenus par filage de verre (silice+carbonates de sodium et de calcium) en fusion (T>1000°C), à travers des filières en alliage de platine.
— les fibres de kevlar : c’est une fibre aramide, de couleur jaune paille, mise au point par la société Du Pont de Nemours (USA). Ce sont des polyamides aromatisés obtenus par synthèse à -10 °C, puis filés et étirés pour obtenir un module d’élasticité élevé. Ces fibres ont des modules allant de 60 à 180 GPa et une masse volumique d’environ 1400 kg m–3. Ces fibres ont deux avantages particuliers, elles sont les moins denses et les plus résistantes à l’impact.
— les fibres de carbone : sont des filaments acryliques de tergal ou de rayonne obtenus à partir de la distillation de houille ou de pétrole. Ils sont oxydés à chaud (300°C) puis chauffés à 1500°C dans une atmosphère d’azote. Il ne subsiste alors que la chaine hexagonale des atomes de carbone. On obtient des filaments noirs et brillants. Le module d’élasticité élevé est obtenu par filage à chaud. Les fibres de carbone ont des modules qui varient de 150 à 800 GPa et une masse volumique en général inférieure à 2000 kg m–3. leur résistance à l’impact est mauvaise, d’autre part elles sont inflammables et conduisent l’électricité.
Adhésifs
L’assemblage des peaux et de l’âme est réalisé par collage. Les adhésifs ont pour rôle de transférer les sollicitations mécaniques aux fibres et à l’âme et de les protéger de l’environnement extérieur. Les adhésifs sont généralement des résines. Il existe différents types des résines:
— Les résines à base de polyester : elles sont surtout employées pour les stratifiés composites avec de la fibre de verre pour réaliser par coulée des objets opaques ou transparents. Elles sont constituées par de longues chaînes de monomères comprenant des groupes esters et des sites réactifs au carbone. L’inconvénient du polyester est la présence des groupements esters qui peuvent réagir avec les différents agents chimiques et ainsi rompre les réseaux constitués.
— Les résines à base vinylesters : le terme vinylester désigne le plus souvent le produit de la dissolution du vinylester dans un solvant copolymérisable, le plus utilisé étant le styrène. Les résines vinylesters se rapprochent des résines polyesters par leur mode de polymérisation et leurs applications (qui sont aussi celles des résines époxydes). En revanche, leurs modes de mise en œuvre sont très différents ainsi que les propriétés physiques et chimiques des produits finis. C’est pourquoi, la nouvelle appellation des résines Dow (premier producteur mondial) est à présent résines époxy vinylesters afin de bien accentuer les similitudes entre les familles des résines époxydes et vinylesters.
— Les résines époxydes : Les résines époxydes possèdent de bonnes caractéristiques mécaniques. Le terme époxyde désigne une grande variété de prépolymères comportant un ou plusieurs motifs époxydiques qui, après polycondensation avec un durcisseur, conduisant à des produits thermodurcis dont les principales applications concernent le collage et les matériaux composites (matrice époxyde avec des renforts en fibre de verre ou de carbone). Il s’agit de produits performants qui rentrent dans un très grand nombre d’applications, dont certaines sont d’un niveau technique incontestablement élevé :
— industrie aéronautique et automobile (collages de structures et de panneaux),
— industrie électrique moyenne et haute tension (surtout appareillage électrique),
— électronique (enrobages de condensateurs, confection de circuits imprimés, etc.),
— sport (skis, raquettes, arcs et flèches de compétition, cadres de vélos en carbone, roues lenticulaires…),
— outillages (modèles à reproduire, maîtres modèles, boîtes à noyaux, etc.),
— stratifiés et composites (nids d’abeilles, structures triangulaires, arbres de transmission, carrosseries de voitures de sport…),
— revêtements résistants aux agents chimiques, réparation de fissures de barrages,…etc.
Effets des paramètres expérimentaux
• La forme d’onde
La forme d’onde cyclique peut avoir une influence sur la durée de vie en fatigue. Pendant une période donnée de vague (fréquence constante), la forme de l’onde est caractérisée par le type du signal, le taux de chargement et le temps à la charge maximale. La forme d’onde la plus commune est le chargement sinusoïdal mais les formes d’ondes carré et triangulaire représentent les limites extrêmes qui peuvent affecter la durée de vie en fatigue. D’une manière générale, l’onde carrée représente la dissipation maximum d’énergie par cycle. La forme d’onde sinusoïdale est un niveau intermédiaire tandis que la forme d’onde triangulaire représente le niveau le plus bas de dissipation d’après Trantima et Ninmer [2]. Mandell et Meier [3] ont constaté qu’une forme d’onde carrée a donné des durées de vies en fatigue inferieures que celles d’une forme d’onde sinusoïdale lors d’essais sur des stratifiés croisés 0/90 verre/époxyde. Les formes d’onde jouent un rôle important dans le taux de déformation en fluage par cycle. Ceci dépend essentiellement du temps de la charge maximale pendant chaque cycle. Une charge constante et une onde impulsion (avec une composante du temps négligeable) représentent respectivement les limites qui sont essentiellement le fluage pur et la fatigue pure. Entre ces limites, les taux relatifs de la fatigue et du fluage peuvent être contrôlés en variant le temps à la contrainte maximale dans chaque cycle de chargement. Dans ce type de chargement, les éléments de la fatigue et du fluage sont intimement mélangés provoquant ainsi des effets possibles d’interaction de fluage/fatigue et réduisant les durées de vies d’après Bowman et Baker [4]. C’est particulièrement le cas pour beaucoup de polymères sollicités à des fréquences cycliques basses (typiquement en dessous de 1 Hz) où le temps de la charge maximale est plus grand provoquant des effets significatifs de fluage. Ainsi, la forme d’onde sinusoïdale est un peu plus compliquée car le changement de la fréquence change le taux de contrainte, mais généralement la même tendance globale est obtenue. Ainsi, la forme d’onde cyclique a une influence sur les mécanismes d’endommagement en fluage/fatigue et sur le taux de propagation des fissures.
• Influence du rapport de chargement
Le rapport de chargement R a une influence considérable sur la durée de vie en fatigue. Les types de chargement peuvent être : tension-tension, compression-compression ou tension compression. Il a été établi pour beaucoup de matériaux comme les stratifiés et les polymères que le chargement compressif est plus préjudiciable que le chargement de tension, soulignant ainsi que des rapports R avec des valeurs négatives qui tendent à ramener les durées de vie de fatigue les plus courtes. Plusieurs auteurs ont étudié l’influence du rapport R comme EL Kadi et Ellyin [5] et Rotem [6]. Mandell et Meier [3] ont étudié des stratifiés croisés (0/90) verre/époxyde, avec des valeurs du rapport R positives allant de 0 à 1. L’augmentation de R permet l’augmentation de la durée de vie en fatigue jusqu’à l’obtention d’une charge constante régulière (charge de fluage, R=1). Ceci indique qu’une charge cyclique permet un endommagement plus important qu’un chargement en fatigue statique. Pour des structures en matériau sandwich, Burman et Zenkert [https://www.chatpfe.com] se sont intéressés à l’influence du rapport de chargement sur la propagation de fissures dans les âmes en mousses. Ils ont conclu que pour les valeurs de R inferieures à zéro, les durées de vie en fatigue sont plus courtes et les fissures se propagent dans deux directions au lieu d’une direction pour des valeurs de R au dessus de zéro.
• Effet de la fréquence
Olsson et Lönnö [8] ont montre qu’une augmentation de la température se produit dans l’âme en PVC pour des éprouvettes en matériaux sandwichs soumises à la fatigue. Après une phase transitoire, la température atteint une valeur constante qui dépend fortement de la fréquence f. L’augmentation de la température mesurée est inférieure à 5°C pour f=1Hz et plus élevée que 15°C pour f=5Hz. Puisque la température de transition vitreuse du PVC est d’environ 80°C, il est raisonnable de s’attendre à ce que cette variation de température affecte de manière significative les propriétés mécaniques de l’âme.
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Table des matières
CHAPITRE 1 Introduction
CHAPITRE 2 Analyse bibliographique
2.1 Introduction
2.2 Matériaux sandwichs et leurs constituants
2.2.1 Introduction
2.2.2 Âmes
2.2.3 Peau
2.2.4 Adhésifs
2.3 Comportement mécanique des composites sandwichs en statique et en fatigue
2.3.1 Comportement en statique
2.3.2 Comportement en fatigue
2.3.2.1 Introduction
2.3.2.2 Effets des paramètres expérimentaux
2.3.2.3 Comportement des matériaux sandwichs en flexion
2.3.2.4 Énergie dissipée et amortissement en fatigue
2.4 Comportement en vibration des composites sandwichs
2.4.1 Introduction
2.4.2 Analyse expérimentale
2.4.2.1 Analyse à partir des vibrations des poutres
2.4.2.2 Amortissement
2.4.3 Quelques approches pour la détermination de l’amortissement
2.5 Modes de dégradation des matériaux sandwichs
2.5.1 Introduction
2.5.2 Rupture de la peau en traction ou en compression
2.5.3 Poinçonnement
2.5.4 Rupture de l’âme en cisaillement
2.5.5 Décollement entre la peau et l’âme (debonding)
2.5.6 Flambage localisé (wrinkling)
2.6 Comportement des matériaux sandwichs en présence d’un endommagement
2.6.1 Introduction
2.6.2 Comportement en statique et en fatigue en présence d’un endommagement
2.6.3 Comportement vibratoire en présence d’un endommagement
2.7 Synthèse et position du problème
CHAPITRE 3 Analyse du comportement mécanique en statique et en fatigue cyclique des composites sandwichs avec une décohésion
3.1 Introduction
3.2 Comportement des matériaux sandwich
3.2.1 Introduction
3.2.2 Analyse à l’aide de la théorie des plaques sandwichs
3.2.2.1 Équations générales
3.2.2.2 Essai de flexion 3-points
3.2.3 Évaluation des performances en statique des matériaux sandwichs
3.2.3.1 Mise en œuvre
3.2.3.2 Procédures expérimentales
3.2.3.3 Comportement statique des matériaux sains
3.2.3.4 Effet de la longueur de la décohésion
3.2.3.5 Module de cisaillement et module de flexion
3.3 Comportement en fatigue cyclique des matériaux sandwichs avec une décohésion
3.3.1 Introduction
3.3.2 Essais
3.3.3 Comportement en fatigue du matériau sandwich sain
3.3.4 Effet de la longueur de fissure sur le comportement en fatigue
3.3.4.1 Rigidité
3.3.4.2 Cycle d’hystérésis
3.3.4.3 Énergie dissipée
3.3.4.4 Amortissement
3.4 Conclusions
CHAPITRE 4 Analyse expérimentale et par éléments finis du comportement vibratoire des matériaux sandwichs endommagés
4.1 Introduction
4.2 Équation des vibrations transverses d’une poutre orthotrope
4.2.1 Équation du mouvement
4.2.2 Vibration transverse amorties d’une poutre
4.2.3 Réponse dans le cas d’une charge concentrée impulsionnelle
4.3 Analyse expérimentale effectuée
4.3.1 Dispositif expérimental
4.3.2 Méthode d’analyse des résultats expérimentaux
4.4 Évaluation expérimentale de l’amortissement du matériau sain
4.4.1 Amortissement des composites à fibres croisés (peaux)
4.4.2 Amortissement des mousses en PVC (âmes)
4.4.3 Amortissement des matériaux sandwichs
4.5 Analyse par éléments finis
4.5.1 Formulation de l’équation de la dynamique
4.5.2 Équation dynamique en absence d’amortissement
4.6 Modélisation par éléments finis
4.6.1 Géométrie et caractéristiques mécaniques
4.6.2 Effet de la décohésion sur les fréquences propres
4.7 Modélisation de l’amortissement d’une structure en matériau sandwich
4.7.1 Évaluation des énergies de déformation
4.7.2 Évaluation de l’amortissement
4.7.3 Comparaison des amortissements obtenus expérimentalement et par éléments finis en présence d’une décohésion
4.7.4 Contribution à l’amortissement des différentes énergies dissipées
4.7.4.1 Introduction
4.7.4.2 Énergies dissipées dans les constituants (peaux et âme)
4.7.4.3 Énergie dissipée dans les différentes directions des peaux
4.7.4.4 Énergie dissipée dans les différentes directions de l’âme
4.8 Conclusions
CHAPITRE 5 Caractérisation par vibration non linéaire des matériaux sandwichs endommagés
5.1 Introduction
5.2 Méthode de résonance non linéaire
5.2.1 Procédure expérimentale
5.2.2 Détermination des caractéristiques des courbes de résonance
5.3 Caractérisation non linéaire par résonance du composite sandwich
5.3.1 Courbes de résonances
5.3.2 Effet du niveau d’excitation sur la fréquence de résonance
5.3.3 Effet du niveau d’excitation sur l’amortissement
5.4 Analyse des résultats
5.4.1 Introduction
5.4.2 Modélisation du comportement non linéaire
5.4.3 Décalages fréquentiel et amortissement non linéaire
5.4.4 Application de la modélisation au décalage fréquentiel
5.4.5 Application de la modélisation au décalage de l’amortissement
5.4.6 Paramètres non linéaires
5.5 Sensibilité des paramètres linéaires et non linéaires
5.6 Conclusions
CHAPITRE 6 Conclusions
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