Comportement en fatigue de pièces épaisses en matériaux composites

Grâce à leurs propriétés mécaniques spécifiques, les matériaux composites sont devenus une alternative intéressante aux matériaux métalliques. De plus, l’utilisation de stratifications judicieusement choisies permet d’ obtenir des propriétés mécaniques adaptées aux sollicitationx de la structure. Enfin ils sont considérés comme peu sensibles à la fatigue. C’est pour ces raisons que, au cours de ces dernières années, l’emploi des matériaux composites pour la réalisation de structures aéronautiques, navales ou ferroviaires c’est considérablement répandu. Si les matériaux composites présentent de très bonnes propriétés mécaniques, celles ci peuvent rapidement se dégrader, pour de faibles niveaux de chargements voire même durant le cycle d’élaboration du matériau. Ces dégradations sont dues à la présence d’endommagement au sein des plis du stratifié. La ruine des matériaux composites n’est pas liée à un unique mécanisme d’endommagement mais elle résulte de la somme de différents phénomènes qui interviennent à différentes échelles et qui peuvent interagir entre eux. Ainsi, dans le cas d’un composite stratifié à base de plis unidirectionnels, il est admis que le scénario de dégradation est le suivant :

1. Apparition d’endommagement à l’échelle de la fibre et de la matrice, dite échelle microscopique, qui se traduit par des dé-cohésions à l’interface fibre/matrice et la micro-fissuration de la matrice ;
2. Coalescence des micro-dommages (micro-fissures et dé-cohésions fibres/matrices) qui conduisent à l’apparition de fissures intra-laminaires visibles à l’échelle du pli, dite échelle mésoscopique. Ces fissures, parallèles aux fibres, apparaissent dans les plis désorientés par rapport à l’axe de chargement et peuvent conduire à des micro-délaminages entres plis d’orientations différentes du fait de la concentration de contraintes en pointe de fissure ;
3. Apparition de délaminage sur le bord libre, entre les plis de différentes orientations et/ou développement des micro-délaminage à l’échelle macroscopique ;
4. Ruptures de fibres conduisant rapidement à la ruine complète du stratifié.

Les géométries de plus en plus complexes des structures en composites additionnées au fait que les chargements mécaniques aux quels elles sont soumises font que le recours à des stratifiés de fortes épaisseurs est de plus en plus récurrent. Dans ces conditions, il devient primordial de pouvoir prévoir les effets des différents types d’endommagement sur le comportement du stratifié ainsi que leur cinétique d’évolution.

Quelques définitions…

Un matériau composite peut être défini comme un assemblage de plusieurs matériaux de natures différentes. Il est généralement constitué d’une matrice dans laquelle sont insérés des renforts. La matrice assure le maintien de l’assemblage et les transferts de charge entre les renforts qui assurent la tenue mécanique du composite grâce à leurs caractéristiques mécaniques élevées (module et limite d’élasticité, résistance mécanique,…)[Gay, 1991]. L’association de ces différents matériaux a pour but d’obtenir un matériau dont les propriétés mécaniques spécifiques  sont supérieures à celles de la matrice seule.

CLASSIFICATION – La nature du matériau constituant la matrice permet de classer les matériaux composites en trois catégories : les composites à matrice organique, les composites à matrice métallique et les composites à matrice minérale (céramique) [Berthelot, 1999]. Dans cette étude on s’intéressera uniquement aux composites à matrice organique.

LA MATRICE – Les matrices organiques se divisent en deux grandes familles, les résines thermodurcissables et les résines thermoplastiques :

– les résines thermoplastiques sont constituées de polymères à chaînes linéaires. Elles sont mises en forme par changement d’état, chauffage et durcissent au cours du refroidissement suivant une transformation réversible. L’intérêt des thermoplastiques réside dans leur faible coût qui reste cependant lié à des propriétés thermo-mécaniques faibles ;
– les résines thermodurcissables ont une structure réticulée sans point de fusion, c’est-à-dire qu’elles passent de manière irréversible de l’état liquide à l’état solide. Leur mise en oeuvre résulte d’une réaction chimique entre une résine de base et un durcisseur ou catalyseur. Après le durcissement il n’y a plus de fusion possible. Parmi les résines thermodurcissables on trouve principalement les résines polyester, époxydes et phénoliques.

Le composite stratifié 

Les échelles usuelles de travail 

Un composite stratifié  est constitué d’un empilement de plusieurs couches élémentaires (dans notre cas le pli unidirectionnel) orientées dans différentes directions. Usuellement, on définit trois échelles de travail (FIG. 2.1) :
– celle des constituants (échelle microscopique, les grandeurs caractéristiques sont de l’ordre de quelques µm) : on distingue alors les fibres de la matrice (FIG. 2.1 a) ;
– celle des plis (échelle mésoscopique, les grandeurs caractéristiques sont de l’ordre de quelques mm) : on ne distingue pas les fibres de la matrice dans chaque couche qui est considérée comme homogène (FIG. 2.1 b) ;
– celle du stratifié (échelle macroscopique, les grandeurs caractéristiques sont de l’ordre de quelques mm, voire plus) : on ne distingue pas les couches de la séquence d’empilement, le stratifié est considéré comme homogène (FIG. 2.1 c) .

Les mécanismes d’endommagement. Généralités

La ruine des matériaux composites n’est pas initiée par un unique mécanisme d’endommagement, mais elle est la conséquence de l’accumulation de plusieurs modes de dégradations. En effet, par endommagement on entend le développement plus ou moins progressif de micro-défauts (micro-vides, micro-fissures…) qui conduisent par coalescence à des macro-défauts (fissures, dé-cohésions…) menant ainsi à la ruine de la structure. Les mécanismes d’endommagement dans les composites stratifiés à fibres longues sont aujourd’hui clairement identifiés. Différents facteurs peuvent influencer l’apparition et le développement de ces dégradations : la séquence d’empilement, la nature de la matrice, le procédé de fabrication… Ainsi, soumis à des sollicitations externes, les matériaux composites sont le siège de dégradations au niveau des fibres (ruptures de fibres), de la matrice (micro-vides, fissures intra-laminaires) ou encore au niveau des interfaces fibre/matrice (dé cohésions fibre/matrice) ou des interfaces inter-plis (délaminage). La figure 2.3 présente de façon schématique les différents mécanismes d’endommagement. Dans ce qui suit nous proposons de détailler les caractéristiques des différents mécanismes. Afin de fixer un cadre, précisons dès maintenant que les caractéristiques présentées dans la suite ont été dégagées d’observations effectuées lors d’essais sur des éprouvettes planes sollicitées en traction uni-axiale. Cela a pour principale conséquence d’entraîner un état de contrainte uniforme dans la zone utile de l’éprouvette mais aussi implique la présence de bords libres qui, nous le verrons, ont une influence sur l’endommagement.

LA DÉCOHÉSION FIBRE/MATRICE ET LES MICRO-VIDES – Au niveau microscopique, des dé-cohésions apparaissent aux interfaces entre les différents constituants (fibres et matrice). C’est le premier type d’endommagement qui apparait au sein des matériaux composites. Les zones de dé-cohésion sont des lieux privilégiés pour l’amorçage de la fissuration intra-laminaire. Ces dégradations sont initiées par des micro-défauts au sein de chaque pli. Par ailleurs, du fait des processus de fabrication, la répartition des fibres dans la matrice est souvent aléatoire. VIOLEAU [Violeau, 2007] montre que la répartition des fibres peut être à l’origine de zones de concentration de contraintes où peuvent s’initier des dé cohésions (FIG. 2.5). Enfin le procédé de fabrication peut entraîner l’apparition de contraintes d’origine thermique responsables elles aussi de dé-cohésions. A cela s’ajoutent les problèmes d’adhésion entre les fibres et la matrice ainsi que des micro-vides qui peuvent coalescer pour former une fissure à l’échelle mésoscopique (FIG. 2.4). L’influence des dé-cohésions fibre/matrice sur le comportement du matériau reste toutefois difficile à évaluer .

LE DÉLAMINAGE – Dans le cas d’un composite stratifié, aux mécanismes élémentaires décrits précédemment, s’ajoute un mécanisme de décollement inter couches appelé délaminage. Les différentes orientations des plis formant le stratifié entraînent des différences d’anisotropie par rapport au repère de référence qui sont à l’origine de contraintes interlaminaires. Ce sont ces contraintes qui pilotent l’apparition et la propagation du délaminage. Une structure de type plaque plane présente des bords libres qui peuvent être à l’origine de singularités au niveau des contraintes interlaminaires proches des bords libres. Ce phénomène, plus couramment appelé « l’effet de bord », peut accélérer le développement du délaminage. D’abord étudiées de manière analytique [Pipes and Pagano, 1970], [Puppo and Evensen, 1970], les singularités de contraintes aux bords libres font depuis longtemps l’objet de nombreuses investigations numériques basées sur différentes techniques. Parmi les principales, on trouve la méthode des différences finies [Ye and Yang, 1988], la méthode des éléments finis [Engrand, 1981], des modèles multi-particulaires [Caron et al., 2006] ou encore des modèles de zones cohésives [Camanho and Dàvilla, 2002].

LES RUPTURES de FIBRES – Au sein d’un composite stratifié sollicité en traction uni-axiale, les fibres sont sollicitées différemment suivant l’orientation du pli dans lequel elles se trouvent. Les ruptures de fibres interviennent de façon brutale dans les plis pour lesquels la contrainte suivant l’axe e1 est suffisamment importante. Ce phénomène se produit majoritairement dans les plis orientés dans la direction de la sollicitation. Dans ces plis, les zones situées à proximité des fissures intra-laminaires présentes dans les plis adjacents sont des lieux privilégiés pour les ruptures de fibres. En effet, des auteurs [Gamstedt and Sjören, 2002][Stinchcomb, 1986] constatent que la présence des fissures est à l’origine de zones de concentrations de contraintes favorisant les ruptures de fibres. L’apparition de ruptures de fibres conduit généralement à la rupture totale du stratifié. COX [Cox, 1952] propose une approche analytique unidimensionnelle pour étudier les transferts de charges qui se produisent au sein d’un unidirectionnel lors de la rupture d’une fibre. Il introduit ainsi le concept de « Shear Lag Analysis ». Son approche a été reprise et étendue aux cas bidimensionnel [Hedgepeth, 1961] et tridimensionnel [Hedgepeth and Van Dyke, 1967]. La puissance des ordinateurs permet aujourd’hui d’étudier ce phénomène au sein de structures réelles (type réservoir) par la méthode des éléments finis à l’aide d’un procédé multi-échelles [Blassiau et al., 2008].

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Table des matières

1 Introduction générale
2 Matériaux composites, endommagement et fatigue : quelques repères bibliographiques
2.1 Quelques définitions
2.2 Le composite stratifié
2.2.1 Les échelles usuelles de travail
2.2.2 Les différents repères liés aux stratifiés
2.2.3 Comportement mécanique du pli unidirectionnel
2.3 Les mécanismes d’endommagement. Généralités
2.4 Intéractions entre les différents mécanismes d’endommagement
2.5 La fissuration intra-laminaire
2.5.1 Evolution et influence de l’épaisseur
2.5.2 Influence de la séquence d’empilement
2.6 Modélisation des stratifiés endommagés
2.6.1 Les approches micro-mécaniques
2.6.2 Les approches basées sur la Mécanique de l’Endommagement
2.7 La fatigue : étude critique et comparative de l’existant
2.7.1 Modèles visant à prédire la durée de vie
2.7.2 Approches phénoménologiques
2.7.3 Approches visant à décrire l’évolution de l’endommagement
2.8 Discussion
3 Etude expérimentale de l’endommagement dans les stratifiés
3.1 Introduction
3.2 Choix des stratifications
3.3 Élaboration des stratifiés
3.3.1 Préparation des échantillons
3.3.2 Observations microscopiques
3.4 Dispositif expérimental
3.4.1 Machines d’essais mécaniques et instrumentation des éprouvettes
3.4.2 Les moyens d’observation
3.4.3 Montage d’observation optique in-situ
3.5 Comportement mécanique du matériau unidirectionnel
3.5.1 Protocole expérimental
3.5.2 Essais de traction uni-axiale dans l’axe des fibres
3.5.3 Essais de traction uni-axiale dans le sens transverse
3.5.4 Essais de traction uni-axiale hors-axe
3.5.5 Conclusion
3.6 La fissuration intra-laminaire : aspects qualitatifs
3.6.1 Des chargements spécifiques
3.6.2 Caractéristiques physiques de la fissuration
3.6.3 Influence de l’épaisseur du pli fissuré
3.6.4 Interaction fissuration/délaminage
3.7 Comportement du stratifié et analyse de l’endommagement sous sollicitations quasi-statiques
3.7.1 Introduction
3.7.2 Essais de traction quasi-statique monotone sur stratifiés
3.7.3 Analyse de la fissuration sous chargements quasi-statiques
3.8 Comportement du stratifié et analyse de l’endommagement en fatigue
3.8.1 Introduction
3.8.2 Analyse de l’évolution de l’endommagement
3.8.3 Comparaison quasi-statique/fatigue
3.8.4 Essais à deux niveaux de chargement
3.8.5 Cumul de l’endommagement
3.9 Conclusion
4 Une modélisation du matériau unidirectionnel
4.1 De l’expérience à la loi de comportement
4.2 Description du modèle de comportement retenu
4.2.1 Analyse physique de la fissuration
4.2.2 Cadre et hypothèses du modèle
4.2.3 Choix des variables d’état et description des fissures
4.2.4 Potentiel thermodynamique et Théorie des Invariants
4.2.5 Écriture des lois d’état
4.2.6 Lois complémentaires et évolution de l’endommagement
4.3 Conclusion
5 Conclusion

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