Comportement des adhésifs non-polymérisés
Comportement rhéologique des fluides
La classification rhéologique des fluides est basée sur le comportement des fluides sous cisaillement. Un fluide newtonien a une relation linéaire entre le taux de cisaillement et l’effort de cisaillement ; ce comportement n’est pas présenté pour les fluides dit nonnewtoniens . Les fluides non-newtoniens peuvent avoir un comportement dépendant ou non du temps ; dans la filière des fluides qui en dépendent, les rhéopectiques ont leur viscosité augmentée avec le temps et les fluides thixotropes ont la réponse inverse . Ceux dont le comportement ne dépend pas du temps peuvent encore appartenir à deux catégories, ceux dont l’écoulement commence sous l’effet d’un effort de cisaillement initial (Bingham et Herschel Bukley) et ceux qui s’écoulent sans effort initial appliqué (dilatant et pseudo plastique) (Barman et al., 2016). Au de-là de ces comportements déjà cités, un fluide peut aussi être considéré comme viscoélastique, s’il présente simultanément les deux comportements d’un fluide visqueux et d‘un solide élastique.
La grande majorité des fluides ont des propriétés non-newtoniennes. Le choix de la loi de comportement constitutive adoptée dépend du fluide considéré, mais aussi des hypothèses faites. A partir de cette liste présentée, il est possible distinguer les différents types de liquides, ainsi que les différentes lois de comportement généralement employées pour chacun de ces liquides.
Les adhésifs structuraux forment une catégorie très particulière, qui ne peut pas être généralisée. Le comportement rhéologie de chaque adhésif est lié à sa composition et température soumise. Comme les résines époxy, qui peuvent se comporter comme des fluides newtoniens à faible cisaillement et des fluides non newtoniens à fort cisaillement (Causse et al., 2015) (Hsissou et al., 2019). La représentation choisie doit être fonction des hypothèses établies et le comportement de l’adhésif prennent en compte ce qu’existe déjà dans la littérature.
Influence de la présence de particules dans l’adhésif
Rappelons ici que nous nous intéressons à des adhésifs chargés de particules dont l’objectif est de contrôler le désassemblage à la demande. L’intégration des particules dans l’adhésif est une des stratégies utilisées afin de modifier les propriétés physiques du matériau polymérisé et par conséquence, les propriétés du joint (Wypych, 2000). Le remplissage de l’adhésif avec différents taux de remplissage peut être utilisé, par exemple, comme renforcement du joint (Charles et al., 2020). C’est le cas, par exemple, de l’utilisation de nanoparticules de silice afin d’augmenter la résistance à la charge de traction (Conde et al., 2009). Les particules de verre peuvent aussi être utilisées pour améliorer des propriétés spécifiques, comme par exemple réduire la conduction thermique dans les structures sensibles au changement de température ou encore changer le module de compressibilité de l’adhésif selon le type de particule adopté (Zhu et al., 2012). La conductivité thermique peut également être modifiée par l’ajout de nanotubes de carbone qui, en outre, peuvent améliorer la conductivité électrique de la structure, par exemple dans les cas où la libération du courant de foudre est requise par exemple (Luo et al., 2016) ou encore pour des applications électroniques (Mir & Kumar, 2012). En outre, les adhésifs chargés peuvent également être utilisés comme stratégie de fonctionnalisation des joints, qui repose sur le principe de l’attribution d’une fonction supplémentaire au joint en plus de sa fonction structurelle. Banea et al. ont démontré, par exemple, la possibilité de transformer le joint en un mécanisme capable de démanteler la structure grâce à l’utilisation de Thermally Expandable Particles ou TEP (Banea et al., 2017).
Le chargement de l’adhésif peut donc, dans certains cas, améliorer différentes propriétés du joint après séchage, mais l’influence de ces particules sur la phase de fabrication et sur son étalement doit également être prise en considération. Un des inconvénients du chargement de l’adhésif est l’augmentation de la viscosité. Cette augmentation peut être estimée par l’équation d’Einstein (Eq. 2.1), qui permet de relier la viscosité de la suspension (η) avec la viscosité de l’adhésif (?0) et le taux de volume des particules (∅) (Sheppard et al., 1940). Par contre, il faut remarquer que cette équation n’est valable que pour des particules sphériques et que la viscosité dépend aussi de la température.
? = ?0 ( 1 + 2,5 ∅ ) Eq. 2.1
Outre la forme sphérique, il existe un nombre infini de formes de particules qui peuvent être regroupées en trois groupes des formes principales : cubique, plate et tubulaire. L’explication pour ce phénomène est liée directement à la forme géométrique cubique, qui à cause de ses coins rend difficile le mouvement relatif des particules.
Au-delà de la viscosité, les particules peuvent également être responsables de la perturbation de l’écoulement. Les études liées à l’étude de cette perturbation sont présentes dans plusieurs domaines, du domaine alimentaire comme l’écoulement des produits à base de tomates (Kubo et al., 2019) à l’étude de la migration des populations marines (Rossi et al., 2016). Ce type d’étude peut également être appliqué à la prévention des catastrophes pour les événements liés aux éruptions volcaniques, afin de prédire la zone impactée en considérant la température et la concentration des particules (Bernabeu, 2015). Dans le domaine de la construction civile, Spangenberg et al ont étudié la migration des particules dans le béton avant séchage afin de comprendre l’hétérogénéité du mélange final (Spangenberg et al., 2012).
En plus de modifier les propriétés macroscopiques résultantes de viscosité, les particules interagissent entre elles. Ainsi, Rueda (Rueda et al., 2017) a démontré que des forces de capillarité existent entre les particules et que celles-ci ont tendance à s’agglomérer lorsque le fluide est suffisamment peu visqueux. In fine, cela contribue à changer la viscosité macroscopique du mélange, et très certainement les capacités de distribution de l’adhésif et de ses paquets de particules. Ces forces de capillarité qui doivent être prises en compte dépendent d’échelle du calcul. Comme montré par C. Li et al. (C. Li et al., 2020) l’influence des forces de capillarité ne peuvent pas être néglige à l’échelle micro, cette-à-dire à l’échelle de la fibre pour son cas et à l’échelle de particule pour notre cas.
Afin d’évaluer en quoi ces comportements de l’adhésifs non-polymérisés modifient la capacité d’étalement en échelle macroscopique, il est nécessaire de déterminer quels essais et quelles mesures existent.
Essais expérimentaux liés au procédé d’accostage
Le choix d’un adhésif structurel ne réside pas que sûr la description du comportement de l’adhésif seul, mais aussi sur ses interactions avec les substrats, et sur le processus de fabrication. Une bonne mouillabilité, par exemple, est préférable pour assurer une distribution uniforme de l’adhésif et des propriétés, et limiter les imperfections de recouvrement. La tension superficielle et l’angle de contact peuvent aussi être utilisés car ils permettent de quantifier l’étendue du contact entre un adhésif et le substrat à l’équilibre. Les deux prochaines soussections sont dédiées à la présentation des méthodes pour la mesure de ces paramètres.
Toutefois, ce choix peut aussi être basé sur différentes propriétés finales visées du joint, comme la résistance, la flexibilité ou la conductivité. Ces propriétés de la structure assemblée dépendent du choix de l’adhésif, et aussi beaucoup du procédé d’accostage. En effet lors de l’accostage, l’adhésif se trouve piégé entre deux substrats. Pour des géométries non planes en vis-à-vis, l’adhésif confiné va faire apparaitre d’autres comportements que celui d’une surface libre. Nous nous intéressons à ces effets en fin de la section où nous présentons des exemples de tests expérimentaux utilisés pour étudier le phénomène de l’étalement dans divers domaines.
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Table des matières
1. INTRODUCTION GENERALE
1.1. Contexte
1.2. Projet de thèse
1.3. Structure du mémoire
2. ACCOSTAGE ET ETALEMENT DE L’ADHESIF
2.1. Introduction
2.2. Etat de l’art
2.2.1. Comportement des adhésifs non-polymérisés
2.2.2. Essais expérimentaux liés au procédé d’accostage
2.2.3. Méthodes numériques utilisées pour simuler l’accostage
2.2.4. Synthèse de l’état de l’art
2.3. Dépôt d’adhésif en chute libre
2.3.1. Essais de caractérisation du comportement de l’adhésif non-polymérisé en chute libre et dépôt
2.3.2. Prédiction de la forme de la goutte après le détachement
2.4. Forme finale de l’adhésif pendant et après l’accostage
2.4.1. Distribution de l’adhésif pendant et après l’accostage
2.4.2. Développement d’un montage expérimental
2.4.3. Application à la réparation de structures sandwich d’une aile d’avion (ATL2)
2.5. Synthèse
3. COMPORTEMENT D’UN ADHESIF EPOXY 3MTM EC2216 EN VOLUME
3.1. Introduction
3.2. Etat de l’art
3.2.1. Synthèse sur les polymères
3.2.2. Caractérisation en volume des polymères
3.2.3. L’influence de la présence des particules sur la tenue
3.2.4. Synthèse de l’état de l’art
3.3. Fabrication et plan de caractérisation des éprouvettes
3.3.1. Protocole de fabrication
3.3.2. Plan des essais mécaniques
3.4. Caractérisation de l’adhésif EC2216
3.4.1. Analyse Mécanique Dynamique
3.4.2. Influence de la vitesse de chargement
3.4.3. Influence de la température
3.5. Influence de la présence de TEP et bulles d’air
3.5.1. Température de transition vitreuse
3.5.2. Résistance à la traction
3.5.3. Défaut critique et résistance à la traction
3.5.4. Amorçage et propagation des fissures
3.5.5. Distribution des défauts 3D
3.6. Caractérisation du comportement en mode I en volume
3.6.1. Protocole expérimental
3.6.2. Influence de la distance entre appuis
3.6.3. Taux de restitution d’énergie et ténacité en mode I
3.7. Prédiction du comportement par modèle numérique en traction
3.6.1. Modèle numérique avec les propriétés uniformes
3.6.2. Modèle numérique avec distribution de propriétés de l’enveloppe complète
3.6.3. Modèle numérique avec distribution de propriétés en fonction de la température
3.8. Synthèse
4. DESASSEMBLAGE CONTROLE ET A LA DEMANDE
4.1. Introduction
4.2. Etat de l’art
4.2.1. Méthodes de désassemblage
4.2.2. Désassemblage par l’addition des particules thermiquement expansibles
4.2.3. Synthèse de l’état de l’art
4.3. Protocoles de fabrications et plans des essais
4.3.1. Les essais DCB
4.3.2. Les essais de démantèlement
4.3.3. Les éprouvettes Double Cantilever Beam (DCB)
4.3.4. Plan des essais mécaniques
4.4. Caractérisation de l’adhésif en mode I en couche mince
4.4.1. Influence du traitement de surface
4.4.2. Influence de la vitesse 168
4.4.3. Influence de l’ajout d’éléments de contrôle du désassemblage
4.5. Désassemblage contrôlé
4.5.1. Capacité d’échauffement
4.5.2. Désassemblage en mode I
4.6. Cas d’application
4.6.1. Protocole de fabrication et d’essais Single-Lap Joint (SLJ)
4.6.2. Démontabilité des structures composites
4.7. Synthèse
5. CONCLUSION