Comportement biomécanique dentaire et implantaire

Comportement biomécanique dentaire et implantaire

Généralités

Le terme biomécanique est une notion de base indispensable à la compréhension des comportements dentaires et implantaires. On peut la définir comme l’application des principes mécaniques aux systèmes et appareils biologiques. Dès l’Antiquité, l’anatomie et la physiologie sont étudiées dans un contexte mécanique afin de comprendre et d’établir le lien existant entre ces disciplines. Deux aspects sont indissociables, l’aspect biologique que l’on peut définir comme la compréhension du fonctionnement biologique des systèmes vivants et l’aspect mécanique, qui est issue de la physique ; c’est l’étude du mouvement, des déformations ou des états d’équilibre des systèmes physiques, en fonction des forces qui leur sont appliquées. Il est important de comprendre la réponse des systèmes étudiés à des forces fonctionnelles et para-fonctionnelles pour pouvoir anticiper les causes d’échecs des prothèses fixées.(1) La pérennité des réhabilitations orales est totalement dépendante des forces appliquées aux éléments prothétiques et de la réponse des tissus environnants. (Annexe 1) Il faut donc tenir compte des conséquences biologiques et mécaniques que cet élément aura sur son environnement à plus ou moins long terme. La mauvaise compréhension de ces conséquences est à l’origine de nombreuses causes d’échec en prothèse fixée.

Parmi ces motifs de dépose, tous peuvent être directement et/ou indirectement liés à une mauvaise intégration biomécanique de l’élément prothétique, qui occupe donc une place primordiale dans la pérennité des restaurations prothétiques fixées. Afin de déterminer le niveau de faisabilité biomécanique des bridges dento implantoportés, il est donc nécessaire de comparer les différences de comportement face aux forces occlusales entre une dent naturelle et une prothèse implanto-portée.

Comparaison des systèmes d’attache dentaire et implantaire

L’absence de ligament parodontal est une différence plus que significative entre la racine naturelle et la racine artificielle.

L’ancrage de la racine naturelle dans l’os alvéolaire

Généralités
La dent naturelle est organisée en différents tissus. La couronne dentaire, émergeant dans la cavité orale, est protégée en périphérie par un tissu dur appelé émail. La pulpe dentaire est constituée par une substance gélatineuse parcourue par des fibres de collagène entrelacées, servant d’armature pour le plexus vasculo-nerveux. Celui-ci pénètre dans la pulpe par le foramen apical et des foramens accessoires. En périphérie, la pulpe est tapissée d’odontoblastes, cellules produisant la dentine tout au long de la vie. Il en résulte que le volume de la lumière canalaire a tendance à diminuer graduellement avec le temps.

Le parodonte est lui constitué de quatre tissus : l’os alvéolaire, la gencive, le cément et le ligament parodontal, ou desmodonte.

Le ligament parodontal

Le ligament parodontal se définit comme la structure conjonctive molle, hautement vascularisée située entre le cément recouvrant la racine, et l’os alvéolaire, reliant ainsi les dents aux maxillaires par les fibres de Sharpey. (4)(5) Il constitue un mécanisme très évolué par sa viscoélasticité et son système sensoriel sophistiqué, destiné à assurer le soutien et le maintien des dents naturelles.(6) Dans des conditions physiologiques, sa largeur est d’environ 0,5 mm, mais celle-ci est variable en fonction de l’âge, des fonctions de la dent et des facteurs externes entraînant une inflammation de celui-ci (parodontopathie, contraintes mécaniques imposées à la dent, …) ou au contraire le manque de fonction de la dent, pouvant entraîner la disparition du ligament alvéolo-dentaire et la jonction entre la racine dentaire et l’os alvéolaire, on parle alors d’ankylose. C’est au niveau du tiers moyen radiculaire que sa largeur est la plus faible, conférant au desmodonte un aspect de sablier. Le ligament parodontal est constitué de cellules et de fibres, ces dernières représentant 70 à 80% de son volume.

Parmi celles-ci, on compte environ 90% de collagène, organisé en faisceaux, dont l’orientation varie en fonction de leur localisation le long de la racine dentaire. Cette orientation est déterminante d’un point de vue mécanique, elle ne se met en place qu’après l’éruption de la dent et sa mise en fonction occlusale :
-Les fibres obliques, (80 à 85% de l’ensemble des fibres) occupent près des deux tiers apicaux du ligament. Leur présence est primordiale pour absorber les forces verticales générées lors de la mastication, et les transférer à l’os alvéolaire (7)
-Les fibres horizontales, présentes dans le tiers coronaire du ligament, qui représentent 10 à 15% des fibres du desmodonte
-les fibres trans-septales s’étendent en direction de l’os alvéolaire et vont rejoindre le cément de la dent adjacente
-les fibres crestales, ayant une orientation oblique entre la crête alvéolaire d’une part et l’attache épithéliale d’autre part, permettent un amortissement des mouvements latéraux de la dent, et exercent une résistance contre l’extrusion (Carranza 1956)
-les fibres apicales sont disposées en rayon sur le pourtour de l’apex radiculaire ; elles apportent une résistance à la dent contre les forces de luxation et protègent également les éléments anatomiques vasculaires et nerveux situés au niveau de l’apex
-les fibres inter-radiculaires, pour les dents pluri-radiculées.

Le ligament alvéolo-dentaire joue les rôles suivants :

– Rôle mécanique et protecteur : Absorption des chocs
Il permet la fixation de la dent dans son alvéole, en établissant le lien mécanique nécessaire entre le cément et l’os alvéolaire. Ceci est permis par la présence des fibres cémento-alvéolaires. Le desmodonte est capable de se comporter tel un amortisseur hydraulique, et d’amortir les forces fonctionnelles et para-fonctionnelles engendrées par les contacts occlusaux en les transmettant à l’os sous-jacent.

Lors d’une charge, les fibres alvéolaires se trouvent en état de tension et s’aplatissent, ce qui a pour conséquence d’obstruer les espaces conjonctifs. Le flux sanguin et lymphatique des vaisseaux est ainsi chassé. La pression artérielle créée un effet amortisseur en y opposant une certaine résistance.

– Rôle nutritif
L’irrigation sanguine apportée par le système artério-veineux assure à la fois la nutrition du tissu conjonctif desmodontal et des tissus minéralisés (cément et os alvéolaire) qui le bordent.

– Rôle sensoriel
Le ligament parodontal est à la fois pourvu d’une irrigation sensitive et proprioceptive. Cette dernière fournit au système nerveux central les informations nécessaires concernant les positions et les mouvements dentaires, permettant la mise en œuvre des mouvements réflexes d’évitement en cas de surcharge occlusale.

– Rôle dans la cicatrisation du parodonte
Suite à une lésion parodontale ou à une chirurgie invasive, c’est le desmodonte qui fournit les cellules chargées de reconstruire les structures parodontales. Ces cellules, indifférenciées, seront capables de pourvoir des fibroblastes qui produiront les fibres de collagène, des pré-cémentoblastes, ainsi que des cellules osseuses (ostéoblastes et ostéoclastes) participant au remodelage osseux.

– Rôle dans l’immunité du parodonte
Les cellules immunitaires présentes au niveau du desmodonte jouent un rôle primordial. Notamment les macrophages, et les mastocytes intervenant essentiellement dans les processus inflammatoires et cicatriciels .

L’ancrage de la racine artificielle, ou implant dentaire, dans l’os alvéolaire : l’ostéointégration

L’absence de ligament parodontal est à l’origine de la différence de comportement biomécanique des prothèses implanto-portées. En effet, les forces occlusales sont directement transmises à l’os sous-jacent et les contraintes se concentrent au niveau de l’os cortical dans la région cervicale. (9) Il existe des facteurs tels que le type de forces en présence, les propriétés mécaniques des matériaux, la dimension des implants ainsi que leur état de surface et leur géométrie, qui influencent les transferts des charges à l’interface os-implant. (Annexe 2) Le concept d’ostéointégration s’oppose à celui de fibro-intégration, correspondant à l’interposition d’un tissu fibreux conjonctif entre l’os et la surface implantaire, et par conséquent à l’encapsulation fibreuse des implants et leur isolation du tissu osseux. Les auteurs pensaient que ce pseudo-ligament péri-implantaire aurait le même effet sur l’implant que le ligament alvéolo-dentaire sur la dent. Ce concept a été rapidement abandonné en raison d’un faible taux de succès. L’évolution de l’implantologie, avec notamment l’avènement du Titane, a érigé le concept d’ostéointégration en une référence et une condition de réussite d’un traitement implantaire.

L’ostéointégration est un concept développé par Per-Ingvar Brånemark, qu’il a d’abord défini comme étant une apposition osseuse directe sur la surface implantaire (10). Cette définition n’a cessé d’être complétée au cours du temps. En effet, Shroeder et coll. ont défini ce concept comme un état d’ankylose fonctionnelle de l’implant dentaire au contact de l’os alvéolaire. (11) Actuellement et depuis 1985, l’ostéointégration est décrite de la manière suivante : c’est la jonction anatomique et directe entre l’os vivant remanié et la surface de l’implant mis en charge. (12) C’est ce phénomène qui permet le maintien de l’implant dans l’os, le ligament parodontal est donc inexistant. Enfin, pour Zarb et Albrektsson (1991), c’est le processus par lequel est obtenue une connexion rigide et cliniquement asymptomatique entre un matériau inerte et l’os. Cette connexion est maintenue sous une charge fonctionnelle. (13) On doit donc obtenir une cicatrisation osseuse dans la région péri-implantaire, ce processus devant aboutir à l’ankylose de l’implant. Cette réponse osseuse périimplantaire est également influencée par la mise en fonction de l’implant après la réalisation de la prothèse implanto-portée, en fonction de l’intensité, la durée, la direction, et la fréquence des forces appliquées.

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Table des matières

Introduction
I. Comportement biomécanique dentaire et implantaire
I.1. Généralités
I.2. Comparaison des systèmes d’attache dentaire et implantaire
I.2.1. L’ancrage de la racine naturelle dans l’os alvéolaire
I.2.1.a. Généralités
I.2.1.b. Le ligament parodontal
I.2.2. L’ancrage de la racine artificielle, ou implant dentaire, dans l’os alvéolaire : l’ostéointégration
I.3. Différences de comportement biomécanique entre la dent et l’implant
I.3.1. Différences induites par le ligament parodontal
I.3.1.a. Amortissement
I.3.1.b. Proprioception
I.3.1.c. Puissance masticatoire
I.3.2. Différences induites par la forme géométrique
I.3.3. Schéma et tableau de synthèse
II. La prothèse fixe dento-implanto portée : données actuelles
II.1. Définition
II.2. Risques techniques et biologiques
II.2.1. Manifestations dentaires
II.2.1.a. Le risque d’intrusion du pilier dentaire
II.2.1.b. Autres manifestations dentaires
II.2.2. Manifestations prothétiques
II.2.3. Manifestations osseuses
II.2.4. Mise en évidence clinique des risques encourus
II.3. Intérêts potentiels des bridges dento-implanto-portés
II.3.1. Augmentation du nombre de possibilités thérapeutiques
II.3.1.a. Restrictions anatomiques
II.3.1.b. Défaut osseux localisé
II.3.1.c. Echec lié à l’état général du patient
II.3.1.d. Manque d’espace mésio-distal
II.3.2. Solidarisation d’une dent mobile à un implant
II.3.3. Apport de proprioception grâce aux éléments dentaires
II.3.4. Diminution du coût et du temps de traitement
II.3.5. Pallier l’absence d’un pilier dentaire
II.4. Données actuelles et recommandations de bonne pratique
II.4.1. Type de connexion réalisée
II.4.2. Sélection des dents piliers
II.4.3. Prise de décision en fonction de la situation globale : exemples cliniques
II.4.3.a. Remplacement d’une seconde prémolaire maxillaire
II.4.3.b. Remplacement d’une incisive maxillaire
II.4.3.c. Réalisation d’une restauration fixée de moyenne ou grande étendue
III. Perspectives d’avenir : l’implant biologique
III.1. Le développement d’un implant amorti par un ligament artificiel
III.2. L’ingénierie tissulaire
III.2.1. Définition et principe
III.2.2. L’ingénierie tissulaire au service de la parodontologie et l’implantologie
III.3. Données de la littérature
III.3.1. Développement d’un implant bio-hybride grâce aux cellules souches embryonnaires du follicule dentaire
III.3.2. Développement d’un implant biologique grâce aux cellules du ligament parodontal
Conclusion
IV. Annexes

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