Technique de corrélation d’images
La technique de corrélation d’images (DIC : Digital Image Correlation) est une technique optique numérique permettant de suivre les déplacements d’un matériau se déformant [Sutton et al., 1983]. Il s’agit d’un outil de mesure non-destructif et non-intrusif.
Principe On cherche à déterminer le champ de déplacements produit entre deux instants d’acquisition d’image – l’instant de référence et l’instant déformé. Les deux images correspondantes ont leurs pixels codés en niveau de gris. Ainsi, on définit le niveau de gris f(x) associé au point x pour l’image de référence et le niveau de gris g(x) pour l’image déformée. Pour chaque point x de l’image de référence, une imagette centrée en ce point est déterminée (ZOI) sur laquelle le champ de déplacement u(x) est supposé invariant. On note que pour obtenir un niveau de gris satisfaisant sur l’ensemble des imagettes, un mouchetis doit être réalisé sur la surface du béton et analysé a priori. Si l’on suppose la conservation du niveau de gris après déformation – c’est-à dire qu’on néglige les bruits induits par l’éclairage et la caméra – il en découle que la déplacement du centre de la ZOI est directement lié au déplacement des niveaux de gris. On recherche donc dans l’image déformée l’endroit où l’on atteint le maximum de vraisemblance en terme de niveau de gris avec l’imagette de référence (voir figure 1.5). Le
déplacement entre les deux zones d’étude est le déplacement u inconnu que l’on cherche à déterminer au point x. L’estimation de u peut donc se faire en minimisant par les moindres carrés la fonctionnelle : Description à deux échelles des mécanismes locaux appliquée aux matériaux fragiles renforcés Le logiciel CORRELI, dans sa version CORRELI-Q4, développé au LMT Cachan, est utilisé ici. Plus d’informations peuvent être trouvées dans [Hild, 2002; Besnard et al., 2006; Hild et Roux, 2008].
Applications au béton : étude 2D de la fissuration La méthode de corrélation d’images est couramment appliquée au béton pour l’étude de la fissuration en surface. Une des premières études a été réalisée par Choi et Shah [1997] lors d’un test en compression afin de détecter les fissures et mesurer le champ de déformations. En plus de la détection de fissures, qui se fait généralement via le champ de déformations, on peut souhaiter extraire du champ de déplacements expérimental des informations fines sur ces fissures comme leur ouverture, l’emplacement de leur pointe ou la taille de la zone de micro-fissuration (FPZ). Le calcul de l’ouverture de fissure se fait en calculant le saut de déplacement le long d’une ligne perpendiculaire à la fissure [Corr et al., 2007]. Ce calcul est présenté sur la figure 1.6. Le calcul de l’emplacement de la pointe de fissure est moins aisé. Une première solution consiste à considérer que la pointe de la fissure est située au point d’ouverture nulle. Ce point d’ouverture nulle est soit obtenu visuellement [Shah et Chandra Kishen, 2011] soit interpolé linéairement à partir de la courbe d’évolution de l’ouverture en fonction de la longueur de fissure [Alam, 2011]. Une autre solution, développée par Mathieu et al. [2012], permet d’extraire le champ de déplacements comme solution d’un problème de mécanique de la rupture linéaire élastique pour lequel la position de la pointe est connue si le plan de propagation est droit. Malheureusement, cette méthode conçue pour les métaux est difficilement applicable dans le cas d’un matériau hétérogène comme le béton où la fissuration est discontinue et le trajet de propagation n’est pas droit [Leroux, 2012].2.13MicroTomographie X-Ray et corrélation d’images Les applications présentées précédemment ont toutes en commun l’étude en surface d’une éprouvette en béton fissurée. La technique de MicroTomographie X-Ray [Landis et Keane, 2010] permet d’accéder à une image 3D d’un matériau. Cette image 3D est construite à partir d’un ensemble de radiographies 2D du matériau sous des angles différents. La résolution obtenue pour chaque tranche 2D – et a fortiori pour l’image 3D –est importante et permet l’étude de la micro-structure interne du matériau voire de la FPZ dans le cas d’un matériau fissuré. Afin d’étudier le processus de fissuration sous chargement, des systèmes de chargement intégrés peuvent être développés permettant ainsi de scanner l’éprouvette au cours du chargement. Un exemple d’étude de la fissuration d’une éprouvette cylindrique sous compression est présenté figure 1.7. L’utilisation des images de tomographie permet d’étendre la technique de corrélation d’images à une étude 3D des fissures dans le béton comme proposé par Hild et al. [2013]. On note quand même que l’étude de la fissuration sous chargement de larges structures en béton est loin d’être réalisable.
De la Mécanique Linéaire de la Rupture aux Modèles à Interfaces Cohésives
La mécanique de la rupture permet de représenter simplement la propagation des fissures dans un milieu homogène. Trois modes de rupture sont distingués et présentés sur la figure 1.9, l’ouverture (mode I), le glissement plan (mode II) et le glissement anti-plan (mode III). Dans le cas de la mécanique linéaire de la rupture, le matériau est supposé avoir un comportement élastique linéaire. Le calcul du champ de contraintes autour d’une fissure sous un chargement donné peut être calculé analytiquement ou via la méthode des éléments finis. A une géométrie et un chargement donné – et donc à un champ de contraintes donné – peut être associé un facteur d’intensité des contraintes qui caractérise le problème. Il existe une valeur critique de ce facteur d’intensité des contraintes pour laquelle la fissure commence à se propager [Lemaitre et Chaboche, 1988]. A cette approche statique peut être associée une approche énergétique. En effet, la propagation d’une fissure s’accompagne d’une perte d’énergie emmagasinée. Il existe donc un taux de restitution d’énergie critique pour lequel la propagation de la fissure commence. La mécanique linéaire de la rupture ne peut pas correctement représenter le comportement quasi-fragile du béton. En effet, la zone non-linéaire de micro-fissuration qui apparaît en pointe de fissure n’est pas prise en compte dans ce type de modélisation. Afin d’appliquer les principes de la mécanique de la rupture au béton, l’introduction d’un comportement non-linéaire est nécessaire. L’une des adaptations proposées est le modèle de la fissure fictive ou fictitious crack model [Hillerborg, 1991] qui prend en compte l’énergie dissipée dans la zone de micro-fissuration en pointe de fissure. Le matériau est séparé en trois zones décrites sur la figure 1.10 :
– La zone élastique continue hors fissuration ;
– La fissure, où la contrainte σ est nulle et l’ouverture w augmente ;
– La zone de micro-fissuration, où la loi d’évolution σ(w) est adoucissante. La zone de micro-fissuration est une zone non-linéaire où les contraintes sont actives et dépendent de l’ouverture de la fissure. Lors du chargement, si la valeur de la contrainte dans la zone élastique dépasse une contrainte seuil (ft en mode I), alors la zone de microfissuration se propage dans la zone élastique. Ensuite, l’énergie se dissipe dans cette zone de micro-fissure entraînant sa dégradation et l’avancement de la fissure.
Introduction sur la loi d’effet d’échelle de Bažant
De nos jours, les campagnes expérimentales sur des ouvrages de Génie Civil sont rares car les coûts restent prohibitifs. Afin d’étudier le comportement du béton, des essais de laboratoire sur des structures de petites tailles sont donc réalisés. Pourtant, les matériaux quasi-fragiles tels que le béton subissent un effet d’échelle. Ainsi, la résistance d’une structure diminue avec l’augmentation de sa taille. Comme les modèles numériques sont validés et calibrés sur des essais de laboratoire de taille réduite, il faut s’assurer qu’ils représentent correctement l’effet d’échelle. De cette manière, les résultats obtenus en laboratoire pourront être extrapolés sur des structures réelles. La théorisation de l’effet d’échelle remonte à Léonard de Vinci (XVIe siècle) et Galilée (XVIIe siècle). Depuis, de nombreuses propositions ont été faites pour décrire ce phénomène. Une revue de ces propositions peut-être trouvée dans [Bažant, 1999] et plus récemment dans [Dufour, 2007]. L’approche statistique développée par Weibull [1939] introduit le concept de maillon faible. Ainsi, une structure est supposée présenter un ensemble de micro-fissures ou autres défauts avec une probabilité variée de devenir critique, c’est-à-dire d’engendrer une macro-fissure entraînant la ruine complète de la structure (voir figure 4.14). Cette approche ne permet pas de représenter correctement l’effet d’échelle observé pour les matériaux quasi-fragiles. Les limitations sont entre autre dues au fait que ni les longueurs internes liées aux hétérogénéités, ni la dissipation d’énergie liée à la formation de la FPZ, ni la géométrie de la structure ne sont prises en compte.
Maillage contraint par l’armature
La méthode classique [Meguro et Hakuno, 1989; Shiu et al., 2009] consiste à mailler l’armature en alignant les particules le long de celle-ci et en imposant leur taille pour retrouver son diamètre (voir figure 5.1). Les armatures sont donc maillées explicitement et la représentation géométrique est exacte. Le comportement global de l’armature est donné par l’ensemble des particules alignées. Les lois de cohésion entre ces particules doivent cependant être modifiées pour représenter correctement l’acier. En effet le comportement non-linéaire de l’acier est différent de celui du béton et ne peut plus être représenté via une loi de fragilité classique. Rousseau [2009] propose d’implanter un modèle plastique avec écrouissage. De même, il faut implémenter une nouvelle loi de cohésion entre les particules constituant l’acier et les particules constituant le béton. De cette manière, le comportement imparfait de l’interface acier-béton sera reproduit. Rousseau [2009] présente une liaison permettant de reproduire le comportement d’un élément joint via une loi tangentielle et une loi normale.
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Table des matières
Remerciements
Résumé
Abstract
Table des figures
Liste des tableaux
Introduction
1 Contexte de l’étude
2 Démarche adoptée
3 Plan du manuscrit
1 Bibliographie
1 Phénomène de fissuration du béton
1.1 Comportement quasi-statique
1.2 Caractérisation du processus de fissuration
2 Etude expérimentale de la fissuration du béton .
2.1 Technique de corrélation d’images
2.2 Technique des émissions acoustiques
3 Étude numérique de la fissuration du béton
3.1 Méthodes discontinues basées sur une discrétisation par éléments finis
3.2 Méthodes continues basées sur une discrétisation par éléments finis
3.3 Méthodes basées sur une discrétisation par éléments discrets
3.4 Méthodes mixtes
4 Conclusions
2 Modèle particulaire DEAP
1 Introduction
2 Présentation de DEAP
2.1 Maillage
2.2 Cohésion
2.3 Comportement quasi-fragile
2.4 Algorithme de résolution en statique
3 Dépendance au maillage
3.1 Mise en évidence
3.2 Solutions
4 Étude fine de la fissuration
4.1 Étude d’une micro-fissure
4.2 Étude de la micro-fissuration
4.3 Extraction de la macro-fissure
4.4 Exemple : Wedge Splitting Test
5 Homogénéisation
5.1 Calcul de la déformation
5.2 Calcul de la contrainte
5.3 Choix du Volume Élémentaire Représentatif et dualité
5.4 Calcul de l’énergie dissipée
5.5 Exemple : Dogbone Tensile Test
6 Conclusions et perspectives
3 Présentation de la méthode d’analyse globale/locale
1 Introduction
2 Description de la méthode
2.1 Etat de l’art sur les méthodes de sub-modeling
2.2 Développement d’une méthode globale/locale pour la fissuration
3 Choix de la quantité de couplage
3.1 Type d’interface
3.2 Couplage en déplacement et couplage mixte effort-déplacement
3.3 Cas particulier de la rotation
4 Outils de vérification
4.1 Écart en déplacement
4.2 Écart en effort
4.3 Écart en contrainte
4.4 Écart en énergie dissipée
5 Procédure d’identification des paramètres du modèle discret
5.1 Densité du maillage
5.2 Identification des paramètres élastiques
5.3 Identification des paramètres de rupture
6 Influence du type de modélisation globale
6.1 Type de modèle global
6.2 Influence du maillage élément finis
7 Choix de la ROI
7.1 Taille de la région d’intérêt
7.2 Emplacement de la ROI
8 Conclusions et recommandations
4 Cas Tests 2D
1 Introduction
2 Poutre entaillée en flexion trois points
2.1 Campagne expérimentale
2.2 Analyse globale
2.3 Réanalyse locale
3 Etude de l’effet d’échelle
3.1 Introduction sur la loi d’effet d’échelle de Bažant
3.2 Campagne expérimentale
3.3 Analyse globale
3.4 Réanalyse locale pour l’étude de la macro-fissure
3.5 Réanalyse locale pour l’étude de la zone de micro-fissuration
4 Conclusions
5 Extension 3D sur béton armé
1 Introduction
2 État de l’art
2.1 Maillage contraint par l’armature
2.2 Maillage libre autour de l’armature
2.3 Maillage excluant l’armature
3 Maillage 3D du béton armé – Implantation dans DEAP
3.1 Alignement local des liens
3.2 Découpe du maillage
4 Cas test : Poutre faiblement armée en flexion trois points
4.1 Montage expérimental
4.2 Analyse globale
4.3 Réanalyse locale
5 Cas test CEOS.fr : Retrait Libre
5.1 Montage expérimental
5.2 Analyse globale
5.3 Réanalyse locale
6 Conclusions
Conclusion
1 Analyse de l’existant
2 Proposition d’une méthode de couplage
3 Application au calcul de structures
4 Perspectives
Bibliographie
A Plans de la poutre en béton armé RL
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