Dépistage de la dysphagie oro-pharyngée chez les patients BPCO
La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une pathologie chronique caractérisée par une obstruction évolutive et persistante des voies aériennes. Chez les patients atteints de BPCO, des infections trachéo-bronchiques dues à des fausses routes silencieuses pourraient être à l’origine des exacerbations.Ces exacerbations augmentent la morbidité, la mortalité et le coût de la prise en charge de ces patients.
La déglutition est bien coordonnée à la ventilation. L’altération de la ventilation pourrait être à l’origine de dysphagies oro-pharyngées. L’objectif de ce travail était de faire un dépistage simple et rapide des dysphagies oro-pharyngées chez les patients BPCO. 117 sujets âgés de plus de 40 ans répartis en deux groupes : 46 sujets tabagiques non BPCO (âge moyen : 58,54 ± 1,47ans) et 71 patients BPCO (âgemoyen : 61,73 ± 1,12ans) ont été inclus dans cette étude. Après avoir confirmé lediagnostic de BPCO par la réalisation d’une spirométrie avec test de réversibilité, nous avons inclus dans le groupe BPCO tous les patients avec un rapport VEMS/CVF après prise de bronchodilatateur <0,7. La spirométrie nous a aussi permis d’étudier la sévérité de la BPCO. Le dépistage de la dysphagie oro-pharyngée a été fait par l’auto-questionnaire EAT 10 suivi par le test clinique V-VST test. Ont été considérés àrisque de dysphagie tous les patients qui présentaient un signe clinique d’altération de la sécurité (toux, désaturation supérieure à 3% ou voix mouillée) ou de l’efficacité (présence d’un résidu oral ou pharyngé au décours de la déglutition, nécessité dedéglutitions multiples ou présence de bavage) au cours de la déglutition. Le EAT 10 était pathologique si son score était supérieur à 3.
Les deux groupes de sujets étaient comparables pour l’âge, le sexe ratio, l’index de masse corporelle et le EAT 10. Ni les patients du groupe BPCO niceux du groupe non BPCO ne se plaignaient de dysphagies et avaient une moyenne de EAT 10 basse qui était respectivement de 1,75 ± 0,43 et 1,69 ± 0,42.
Dans le groupe BPCO la fonction ventilatoire était plus altérée en comparaison avec le groupe des tabagiques non BPCO. Leur VEMS moyen post-bronchodilatateur était respectivement de 47,00 ± 2,16 et 79,83 ± 2,10%.
Parmi les 71 patients BPCO, 62% avaient un VVST altéré dont 27% avaient une sécurité altérée et 35% une efficacité altérée. Dans le groupe des tabagiques non BPCO, seulement 30% avaient un test anormal.
Chez les sujets qui avaient présentaient des déglutitions multiples lors du VVST test, le nombre de déglutitions par bolus était statistiquement plus élevé dans le groupe BPCO en comparaison avec le groupe non BPCO. En étudiant la sévérité de la BPCO, nous n’avons trouvé aucune corrélation entre la sévérité de la BPCO et la dysphagie oro-pharyngée. Ces résultats viennent rejoindre les conclusions d’autres études qui ont montré une augmentation de risque de dysphagies chez les patients BPCO (Gross et al 2009, Ghannouchi et al 2016). Cette augmentationdu nombre de déglutition chez les patients BPCO pourrait nous faire évoquer une éventuelle atteinte des muscles impliqués dans la déglutition dans ce groupe de patients. Ceci a déjà était évoqué par Garand et al ainsi que par Jones et al qui avaient décrit une sarcopénie dans 15% des muscles des patients BPCO (Garand et al 2018, Jones et al 2015).
Les résultats de cette étude nous a permis de conclure que les patients BPCO étaient plus à risque d’altérer l’efficacité que la sécurité de leur déglutition. Cette efficacité était altérée surtout par une augmentation du nombre de déglutition par bolus donné.
Introduction
La broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une maladierespiratoire chronique définie par une obstruction permanente et progressive des voies aériennes.
Son évolution est marquée par un déclin de la fonction respiratoire pouvant aboutir à l’insuffisance respiratoire chronique et un risque d’exacerbations pouvant mettre en jeu le pronostic vital.
Selon les dernières estimations de l’OMS (2004), 64 millions de personnes ont une BPCO et 3 millions de personnes en sont mortes. Les dernières études prévoient que la BPCO deviendra la troisième cause de décès dans le monde en 2020 (Murray et al 1997).
Parmi les facteurs pronostiques, outre la fonction respiratoire, la fréquence et la sévérité des exacerbations ont été soulignées. En effet, les exacerbations caractérisées par une altération aigue de la fonction respiratoire, augmentent la morbidité, la mortalité et le coût de prise en charge des patients. Une des principales causes d’exacerbation chez les patients BPCO est les infections des voies aériennes.
Ces infections sont souvent la conséquence de fausses routes passées inaperçues (GOLD 2003).
La déglutition est un acte moteur qui comprend une phase orale volontaire, une phase pharyngée et une phase œsophagienne qui sont involontaires. Elle est déclenchée par l’activation de neurones centraux situés dans le tronc cérébral au niveau du groupe dorsal du noyau du tractus solitaire (Jean et al 2001).
La réponse nerveuse est à l’origine de contractions musculaires pharyngées et laryngées bien coordonnées et responsables d’une élévation et d’une rétraction du voile du palais, d’une fermeture du nasopharynx, d’une ouverture du sphincter supérieur de l’œsophage, d’une fermeture du larynx au niveau de son vestibule, d’une propulsion du bol alimentaire par la base de la langue et enfin d’une propulsion pharyngée. Ces événements sont parfaitement synchronisés de façon àtransformer transitoirement le pharynx en une voie digestive (Jean et 2001, Cook et al, 1999, Medda et al 2003, Lang et al 2009). La dynamique laryngéeest responsable de la protection des voies aériennes supérieures par fermeture réflexe des cordes vocales lors du passage du bol alimentaire, réalisant une interruption transitoire de la Articles ventilation. Cette fermeture glottique ne peut pas être considérée comme étant le seul déterminant du comportement ventilatoire pendant la déglutition (Boden et al 2009).
Chez l’adulte sain, la majorité des apnées de déglutitionsont précédées et suivies par une expiration dont le rôle paraît important pour éviter les fausses routes en créant essentiellement une pression positive dans le pharynx à la fin de la déglutition (Boden et 2009, Martin-Harris et al 2005, Klahn et al 1999, Preiksaitis et al, 1996).
Des neurones sensori-moteurs et des interneurones sont donc impliqués dans la ventilation et la déglutition ce qui suggère que le traitement et l’intégration des informations sensorielles entre ces deux systèmes sont possibles (Ertekin et al 1997, Dantas et al 1990).
EAT 10
La moyenne du score de test EAT10 était de 1,75±0,43 pour legroupe BPCO avec un minimum et maximum respectivement à 0 et 15. Cette moyenne était de 1,69±0,42avec des scores variant entre 0 et 8 dans le groupe des non BPCO. Il n’y avait pas de différence significative dans les scores du groupe BPCO et groupe tabagique non BPCO (p=0,9).
VVST test
Dans le groupe des BPCO, 44% des sujets avaient un VVST test altéré alors que dans le groupe tabagique non BPCO seul14% des sujets avaient un test altéré (p <0,0001).
Discussion
Le but de cette étude était le dépistage simple et rapide des patients BPCO à risque de dysphagie ainsi qu’éventuellement objectiver le type de dysphagie oro-pharyngée qu’ils présentent. Bien que les patients BPCO ne se plaignaient pas de dysphagie plus que les patients tabagiques non BPCO, le dépistage des troubles de la déglutition oropharyngés par le VVST test avait montré que les patients BPCO avaient un VVST statistiquement plus altéré que le groupe tabagique non BPCO. L’altération touchait aussi bien la sécurité que l’efficacité de la déglutition.L’étude avait aussi objectivé que les patients BPCO avec une efficacité altérée avaient un nombre de déglutition significativement plus élevé que ceux du groupe non BPCO. La BPCO serait donc un facteur favorisant l’altération de la déglutition et ceci indépendamment de la sévérité de la BPCO. Cette conclusion vient rejoindre les conclusions de la revue systémique réalisée par Ghannouchi et al qui avaient trouvé que tous les articles avaient montré que la déglutition était compromise chez les patients BPCO en comparaison avec des sujets non BPCO (Ghannouchi et al, 2016). Sur les 26 études inclues dans cet article, 15 études se sont intéressées particulièrement à la BPCO et son retentissement sur la déglutition. Selon ces études, cette altération de la déglutition pourrait être expliquée par une altération de la coordination déglutition ventilation chez les patients BPCO.
Ces patients avaient tendance à déglutir moins fréquemment enexpiration par rapport à leur groupe contrôle (Cvejic et al 2011, Gross et al 2009, Shaker et al 1992). Les déglutitions en temps inspiratoire augmenteraient le risque de fausse route à cause de la pression négative présente dans le thorax en fin d’inspiration (Gross et al 2009).
Une autre hypothèse a cette modification de la déglutition était la présence d’une adaptation des patients BPCO qui modifiaient la physiologie de leur déglutition afin d’éviter les fausses routes (De Deus Chaves et al 2014, Mokhlesi et al 2002, Cassiani et al 2015). Les patients BPCO présenteraient aussi une altération de leur réflexe de déglutition qui expliquerait l’augmentation du risque dedysphagie chez ces patients (Terada et al 2010).
Pour explorer les dysphagies oro-pharyngées, certes la vidéofluoroscopie(VFS) ainsi que le FEES restent les Gold standard, mais ces examens ne sont malheureusement pas disponibles dans tous les centres, invasifs, couteux et nécessitent un opérateur expérimenté. Le dépistage des troubles de la déglutition devrait être fait par des tests faciles, rapides, non couteux et surtout avec une bonne sensibilité. Pour cela, nous avons opté dans notre étude pour l’association d’un auto-questionnaire (EAT 10) et du VVST test pour le dépistage des troubles de la déglutition. Nous avons utilisé le questionnaire EAT 10 traduit et validé en langue française (Lechien et al 2019). Ce test a une bonne sensibilité de 83% et une spécificité de25% (Rofes et al 2014). C’est un outil de première ligne dans le dépistage systématique des patients à risque de dysphagie (Rofes et al 2014). Regan et al, dans leur étudeà la recherche d’un moyen de dépistage des dysphagies chez les patients BPCO avaient trouvéque le EAT 10 avec un cut-off à 9 était un bon moyen d’exclure les patients qui ne sont pas à risque de fausse route (Regan et al 2017). Nous n’avons pas trouvé de différence significative entre le groupe BPCO et celui des tabagiques non BPCO avec unemoyenne du EAT 10 basse dans les deux groupes. Ces résultats sont comparables à ceux de Garand et al dont le EAT 10 moyen était de 2,5 (Garand et al 2018). Ils rejoignent aussi les conclusions de Cvejic et al qui avaient trouvé qu’aucun des sujets interrogés ne rapportait des troubles de la déglutition (Cvejic et al 2011). Clayton et al et Mokhlesi et al avaient trouvé que respectivement 15 et 20% de leurs patients BPCO se plaignaient de dysphagie (Clayton et al 2014, Mokhlesi et al 2002). D’un côté, l’absence de plaintes pourrait être expliqué par le fait que les patients BPCO se plaignent plus des gênes occasionnées par leur pathologie respiratoire qui les handicape dans leurs activités journalières. Nous savons que les fausses routes se manifestent par la toux.
Or les patients BPCO sont habitué à tousser c’est ce qui pourrait masquer une éventuelle dysphagie. D’un autre côté dans notre étude le questionnaire étant en français, nous avons préféré donc le remplir par l’examinateur qui l’a traduit en tunisien. Cette traduction pourrait biaiser le résultat même si nous avons rempli le questionnaire par le même examinateur qui a essayé d’utiliser les mêmes termes.
Le choix de l’EAT 10 est lui-même discutable selon certains auteurs. En effet, Wilmskoetter et al avaient rapporté que le EAT 10 présenterait certaines faiblesses dans le choix des items et nécessiterait une révision afin qu’il soit plus complet (Wilmskoetter et al 2019). Speyer et al avaient critiqué le manque de spécificité du test. Il n’y avait aucune référence à l’âge, au sexe, aux caractéristiques de la pathologie causant la dysphagie ni au pays du patient (Speyer et al 2014) rendant ce test peu spécifique. Il n’y avait non plus pas de données sur la validité de ce test (Speyer et al 2014).
Le dépistage de la dysphagie a été complété dans notre étude par le VVST test. Ceci a révélé qu’aussi bien la sécurité que l’efficacité étaient altérées chez les patients BPCO. Ce test clinique rapide, simple et sûr a une sensibilité de 88,2% pour détecter une altération de la sécurité. Cette sensibilité est de 88,4% pour l’altération de l’efficacité et de 100% pour les fausses routes (Clave et al 2008).
Dans notre étude, le nombre de déglutition chez les patients BPCO présentant une altération de l’efficacité était statistiquement plus élevé que dans le groupe des tabagiques non BPCO. Ceci pourrait être expliqué par l’altération de la propulsion due à une atteinte des muscles squelettiques de la déglutition. Cette conclusion vient rejoindre l’hypothèse émise par Garand et al (Garand et al 2018). Ils avaient observé une faiblesse de la langue et une rétraction de la base de la langue pouvant expliquer l’augmentation du résidu pharyngée. Cette atteinte des muscles de la déglutition serait comparable à l’atteinte des muscles squelettiques observée chez les patients BPCO (Maltais et al 2014). Cette faiblesse musculaire pourrait aussi être due à la sarcopénie observé chez 15% des patients BPCO (Jones et al 2015).
Conclusion
Dans cette étude, bien que les patients ne se plaignait pas de dysphagie oropharyngée en répondant au questionnaire EAT10, le dépistage a objectivé plus d’altération de la déglutition dans le groupe BPCO en lecomparant au groupe non BPCO. Ces altérations touchaient essentiellement l’efficacité de la déglutition et les patients avaient tendance à augmenter le nombre de déglutition par bolus ingéré. Ces troubles serait-elle en relation avec un trouble de propulsiondu bolus alimentaire par atteintes des muscles squelettiques impliqués dans la déglutition ?
Effet de la section du nerf phrénique sur la coordination ventilation déglutition
Le nerf phrénique est un nerf dont l’altération pourrait perturber la ventilation. Cette perturbation est causée aussi bien par les fibres efférentes quicommande le muscle diaphragmatique que par les fibres afférentes qui se projettent au niveau du CPG de la ventilation. Notre hypothèse était que la modificationde la ventilation par section du nerf phrénique altérerait la déglutition et la coordination déglutition ventilation.
Pour cela nous avons réalisé la section du nerf phrénique droit ou gauche chez 20 rats. La section a été faite au niveau de l’émergence du nerf phrénique dans le thorax.
Un groupe sham comporte 20 rats chez qui nous avons juste exposé le nerf puis refermé. L’étude de la ventilation a été réalisée au moyen d’un pléthysmographe barométrique et l’enregistrement a été fait pour rat au repos et lors de la déglutition.
Les rats ayant subi la section du nerf phrénique n’ont pas modifié leur ventilation au repos. En effet, leurs paramètres ventilatoires hormis le TE étaient comparables au groupe sham. L’enregistrement au cours de la déglutition avaitmontré une diminution aussi bien de la ventilation que du contrôle de la ventilatoire. Cette diminution était associée à une augmentation de la fréquence de déglutition en comparaison avec le groupe sham. Elle était respectivement de 26±6 et 20±5; p=0,014. Ces déglutitions étaient de 17% en temps inspiratoire dans le groupe de rats ayant eu une section du nerf phrénique et de 4% dans le groupe sham (p=0,0002). Ces résultats pourraient être expliqués par l’action des fibres afférentes dont la stimulation active les groupes respiratoires ventral et dorsal (Malakhova et al 2001). L’altération de la ventilation et donc de la déglutition pourrait aussi être expliquée par l’inhibition de l’effet des fibres efférentes sur le muscle diaphragmatique. La modification de la contraction de ce muscle pourrait altérer la déglutition. En effet, il y a de plus en plus d’étude qui montre que le diaphragmatique n’est totalement relaxé au cours de l’apnée de déglutition (Uyasal et al 2013, Hardemark et al 2009).
Introduction
La relation entre la ventilation et la déglutition à l’état physiologique a bien été démontrée. Chez le sujet sain, la déglutition survient préférentiellement au cours de l’expiration (Martin-Harris, 2008). Il a été déjà prouvé qu’il existait de nombreuses interactions entre la ventilation et la déglutition chez l’animal avec un impact majeur de l’augmentation des afférences ventilatoires sur l’alternanceventilation déglutition.
En effet, dans une étude précédente nous avons montré que l’hypercapnie par augmentation des afférences ventilatoires, était responsable d’une modification de la coordination ventilation déglutition (Ghannouchi et al 2013). Notre hypothèse était qu’il existait un lien fort entre le contrôle de la ventilation et le contrôle de la déglutition avec des interactions nombreuses entre ces deux générateurs de rythme. L’altération des afférences ventilatoires pourrait donc être une source de dysphagie.
Le nerf phrénique est un nerf mixte. Il est surtout connu pour être moteur pour le diaphragme. Son rôle sensitif pour la ventilation a bienété démontré. En effet, le nerf phrénique contient des fibres myélinisées afférentes ayant une projection centrale de courte latence sur le cortex somesthésique SI (Davenport et al 2010). Les afférences ventilatoires ont été mise en évidence en les stimulant soit par augmentation de la charge mécanique au cours de l’inspiration(Davenport et al 1985, 1993 et 2002) soit par stimulation électrique du nerf phrénique (Aubert et al 1970, Davenport et al 1985 et 1993, Yates et al 1994). Ces afférences se projettent sur le cortex somesthésique SI au niveau des aires 3a et 3b de Brodmann (Yates et al 1994).
Le muscle diaphragmatique isolé contient des mécanorécepteurs à savoir les organes tendineux de golgi et les fuseaux neuromusculaires (Holt et al 1991). Tous ces résultats soutiennent l’hypothèse que les afférences phréniques fournissent des informations somato-sensoriel au cortex cérébral qui peuvent être utilisées pour la proprioception des muscles diaphragmatique et respiratoire (Davenport et al 2010).
Les pathologies respiratoires chroniques modifient la commande ventilatoire centrale s’il y a une modification de la mécanique ou des échanges gazeux. Une altération de la mécanique est plus particulièrement une modification de lagéométrie de la cage thoracique est détectée par mécanorécepteurs contenus dans les muscles respiratoires. Les muscles intercostaux sont riches en organes tendineux de Golgi et en fuseaux neuromusculaires, dont l’activité augmente en réponseà leur étirement. A l’inverse le diaphragme contient peu de fuseaux neuromusculaires. Il contient essentiellement des organes tendineux de Golgi. Ces afférences mécaniques sont véhiculées par le nerf phrénique (Raux et al 2007).
Autre ce rôle de proprioception pour le muscle diaphragmatique, les afférences phréniques auraient aussi des projections au niveau du tronc cérébral, du cervelet et du thalamus (Nair et al 2017). En effet, la stimulation du nerf phrénique peut activer la formation réticulée ainsi que les groupes respiratoires ventral etdorsal (Malakhova et al 2001, Shannon et al 1985) et le thalamus. Ces neurones afférents auraient un impact direct et indirect sur le contrôle de la ventilation.
Le but de ce travail était d’étudier l’effet de l’atteinte de l’afférence ventilatoire sur la coordination déglutition-ventilation. Notre hypothèse était qu’une atteinte phrénique modifierait le contrôle de la ventilation et l’alternance ventilation déglutition. L’objectif de cette étude était donc d’analyser l’effet de la section du nerf phrénique sur l’alternance ventilation déglutition chez le rat non contraint.
Matériels et Méthode
Quarante rats Wistar male (250- 350 g ; Charles River, 69592 Arbresle, France) ont été inclus dans cette étude. Ils ont été subdivisés en 2groupes : un groupe de rat ayant subi une section du nerf phrénique et un groupe sham.
La ventilation a été étudiée grâce à un pléthysmographe barométrique à double chambre (Emka, 75015 Paris, France) muni d’un capteur de pression (0 – 2,5 cm H2O, Emka, Paris, France) permettant de mesurer la différence de pression entre une chambre de référence et une chambre d’analyse dans laquelle est placé l’animal à explorer. La chambre d’analyse comporte aussi une ouverture qui s’adapte avec l’extrémité d’un biberon contenant de l’eau.
L’acquisition et le traitement des signaux ont étéassurés par un amplificateur (100 à 240 V, Emka, 75015 Paris, France) relié à une chaîne d’acquisition (Powerlab 16/30, AD Instruments, United Kingdom). La fréquence d’acquisition des signaux a étéfixée à 1000 Hz. Une caméra (Logitech caméra, Logitech, Chine) placée à l’extérieur a permis de filmer le rat durant toute la durée de l’exploration. Les signaux vidéo (60 images/sec) ont étésynchronisés avec les signaux analogiques et enregistrés sur un ordinateur (Apple, Audiofenzine, Californie).
Discussion
Cette étude est la première, à notre connaissance, à avoir étudié l’effet de la section du nerf phrénique sur la déglutition ainsi que sur la coordination ventilation déglutition. Il a été démontré que la section du nerf phrénique modifiait peu la ventilation au repos alors que cette dernière est diminuée aucours de la déglutition.
Une augmentation de la fréquence de déglutition ainsi qu’une altération de la ventilation déglutition ont aussi été objectivés laissant penser que l’atteinte du nerf phrénique augmenterait le risque de fausses routes.
Le nerf phrénique innerve la totalité du diaphragme. C’estun nerf mixte émerge de C4 et C6 et descend jusqu’au diaphragme (Mendelsohn et al 2011). VT(kg)/TId graph P Sham Trente à Quarante-cinq pour cent des fibres du nerf phrénique sont des fibres afférentes (Duron et al 1978) dont l’activation entraine diverses réponses telles qu’une inhibition de courte durée des motoneurones (Marlot et al 1987) et une augmentation de la ventilation (Marlot 1987, Revelette et 1988). La neurophysiologie et l’étude histologique du nerf phrénique ont confirmé la projection de ce nerf au niveau du tronc cérébral et des parties supérieurs du cortex (Davenport et al, 2005) (Figure 3). En effet, la stimulation du nerf phrénique active la formation réticulée (Macron et al 1985) ainsi que les groupes respiratoires ventral et dorsal (Malakhova et al 2001).
Dans les années soixante, on pensait que les afférences du nerf phrénique avaient peu voire pas d’effet sur les centres respiratoires. Cependant, des études plus récentes ont prouvé le contraire et ont montré que ces afférences jouaient un rôle important dans la modulation du débit ventilatoire (Nair etal 2017).
Ces données pourraient expliquer l’effet de la section du nerf phrénique sur la déglutition et la coordination ventilation déglutitionpar son action sur les centres de contrôle de la ventilation. Ces résultats viennent compléter les études antérieures dans lesquelles il a été démontré que l’hypercapnie altérait la déglutition ainsi que la coordination ventilation déglutition (Ghannouchi et al, 2013). Dans cette étude, nous avons aussi observé une diminution de la fréquence de déglutition et la proportion déglutition de type expiratoire. Ceci augmenterait le risque de fausse route. Ces résultats rejoignent aussi ceux de Nishino et al qui avaient trouvé que l’hypercapnie diminuait la protection des voies aériennes lors de la déglutition (Nishino et al, 1998).
L’altération du réflexe de déglutition en hypercapnie conforte l’idée que l’hypercapnie augmente le risque de troubles de déglutition (Nishino et al, 1998).
Conclusion
Dans cette étude, la section du nerf phrénique avait induit une diminution de la réponse diaphragmatique par baisse du volume courant. Une altération du contrôle ventilatoire lui était associée et avait modifié la déglutition et augmentait les déglutitions en inspirations augmentant ainsi le risque de fausse route. Ces résultats viennent confirmer que l’altération d’une afférence ventilatoire altère la coordination ventilation déglutition.
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Table des matières
Table des matières
Liste des figures
Liste des abréviations
Introduction
Articles
• Article 1
• Article 2
• Article 3
• Article 4
Discussion
Conclusion
Bibliographie