Complications de la prématurité et évolution des prises en charge

Généralités

La prématurité est définie par une naissance avant 37 semaines d’aménorrhée (SA). L’OMS définit différents stades de prématurité en fonction du terme : la prématurité tardive (entre 34 et 36 SA), la prématurité modérée (entre 32 et 33 SA), la grande prématurité (entre 28 et 31 SA) et l’extrême prématurité (entre 22 et 27 SA). En 2017, dans l’étude EPIPAGE 2, la grande prématurité était définie par une naissance avant 32 SA .

Complications de la prématurité et évolution des prises en charge 

Mortalité et Morbidité 

Dans le monde, les naissances prématurées concernent 15 millions d’enfants par an soit 11 % des naissances vivantes. En France, tous les ans, 60 000 enfants naissent prématurément. (Torchin et al., 2015).

Malgré les progrès accomplis en terme de prise en charge et l’amélioration des connaissances, la prématurité est la première cause de mortalité infantile, (Torchin et al., 2015). Le taux de mortalité néonatale a diminué ces dix dernières années mais il reste élevé. Cela peut s’expliquer par la prise en charge d’enfants de plus en plus immatures, le taux de mortalité étant inversement corrélé à l’âge gestationnel. Dans la cohorte EPIPAGE 1, en 1997, le taux de mortalité des prématurés de moins de 29 SA admis en réanimation néonatale ou unité de soins intensifs de néonatalogie avoisinait les 10 %, (Beaino et al., 2010) alors que dans la cohorte EPIPAGE 2, en 2011, le taux de mortalité était de 6,4 % pour les prématurés entre 28 et 31 SA et 1,1 % entre 32 SA et 34 SA avec une survie de 0,7 % des prématurés nés avant 24 SA, 31,2 % à 24 SA, 59,1% à 25 SA et 75,3 % à 26 SA, (Ancel et al., 2015).

La morbidité néonatale reste également élevée. Plusieurs types de complications peuvent survenir chez les grands prématurés :

– les complications neurologiques (atteinte de la substance blanche, hémorragie intraventriculaire et/ou intra-parenchymateuse),
– des complications respiratoires (maladie des membranes hyalines, dysplasie broncho- pulmonaire),
– des complications digestives (entérocolite ulcéro-nécrosante),
– des complications infectieuses (infection materno-fœtale, infection nosocomiale),
– des complications ophtalmologiques (rétinopathie du prématuré).

Les lésions cérébrales du nouveau-né prématuré sont à l’origine d’un risque de handicap (moteur, neurosensoriel et comportemental) de sévérité variable à moyen et à long terme avec notamment un risque de paralysie cérébrale.

La paralysie cérébrale

Définition
Elle est définie par des troubles permanents du développement, du mouvement et de la posture, responsables de limitations d’activités, imputables à des évènements ou atteintes non progressives survenus sur le cerveau en développement du fœtus ou du nourrisson, (Rosenbaum et al., 2007).

Épidémiologie
Elle touche 1.5 à 2.5/1000 naissances vivantes et sa prévalence est inversement proportionnelle au terme et au poids de naissance, (Chang, 2015). L’incidence de la paralysie cérébrale a tendance à être stable depuis ces dernières années malgré les progrès de la prise en charge néonatale, (Hirvonen et al, 2015). Dans un travail de thèse effectué en 2016 chez les moins de 33 SA nés au CHU de Rouen entre 2007 et 2013, l’incidence de paralysie cérébrale par année était stable (p=0.43) et fluctuait non significativement entre 1,3 % (incidence minimum en en 2010) et 9 % (incidence maximum en 2009), l’incidence moyenne était de 4,2%, (Bertrand E, 2016). En Angleterre, le taux de paralysie cérébrale à 3 ans chez les enfants nés avant 27 SA était de 16 % en 1995 et en 2006, (Marlow et al, 2014). Dans la cohorte Epipage 1 (1997), chez les moins de 33 SA, la prévalence de la paralysie cérébrale était de 9 % à l’âge de 5 ans. Dans Epipage 2, le taux global de paralysie cérébrale à 2 ans était de 6,9 % pour les 24-26 SA, 4,3 % pour les 27-31 SA et 1,0 % pour les 32-34 SA, (Pierrat et al, 2017).

Étiologies et physiopathologie
La constitution des lésions de la substance blanche est un phénomène complexe combinant des facteurs prénatals, périnatals et postnatals, (Marret and Ancel, 2016). L’encéphalopathie du prématuré est le plus souvent multifactorielle. La naissance prématurée sépare le fœtus de son environnement naturel materno-placentaire avant la fin de la gestation normale et interrompt donc le développement normal du cerveau en supprimant des apports en nutriments, facteurs de croissance, hormones maternelles (facteurs endogènes protecteurs) fournies par la circulation placentaire. Parmi les autres facteurs de risques connus de lésions cérébrales on retrouve : des causes génétiques, des causes toxiques telles que l’alcool ou les médicaments (acide valproïque, (Bolaños and Medina, 1997)), les grossesses multiples (en cas de STT), la pré-éclampsie, la restriction de croissance intra-utérine, la dysthyroïdie maternelle, ou encore des facteurs infectieux et inflammatoires (foetopathie du groupe TORCH). Des facteurs postnatals peuvent intervenir, tels le stress induit par l’environnement, les infections secondaires et les entérocolites ulcéro-nécrosantes. Le statut socio-économique des parents peut également jouer un rôle. Dans une étude suédoise de 2008, il y avait une association entre incidence de la PC et le statut socio-économique de la mère, (Hjern A et al, 2008).

Les atteintes cérébrales prédominent dans la substance blanche. En effet, entre 24 et 30 SA, les cellules progénitrices d’oligodendrocytes et pré-oligodendrocytes sont les cellules prédominantes de la substance blanche du cerveau du prématuré. Ces cellules, de par leur immaturité, sont particulièrement vulnérables au stress environnemental, (Rumajogee et al., 2016).

Malgré de nombreux travaux de recherche sur les lésions cérébrales du nouveau-né, leur pathogénie reste partiellement expliquée et plusieurs facteurs confondants peuvent être impliqués d’où l’importance de mener des études épidémiologiques afin d’évaluer l’évolution de la morbidité néonatale en parallèle de l’évolution des pratiques.

Stratégies de neuroprotection

Aujourd’hui il n’existe pas de traitement curatif de la paralysie cérébrale. Cependant il existe plusieurs pistes thérapeutiques afin de prévenir celle-ci, comme l’utilisation de la bétaméthasone, de l’erythropoïetine, de la mélatonine ou encore du sulfate de magnésium, (Favrais et al, 2014). Concernant les corticostéroïdes administrés en anténatal à la mère, la méta analyse de Roberts et Dalziel retrouvait une réduction de 45 % des hémorragies intra-crâniennes chez les enfants des mères ayant reçu de la bétaméthasone en anténatal, (Roberts and Dalziel, 2006). La mélatonine offre également des pistes de recherche avec des effets neuroprotecteurs dans les modèles animaux. Dans des modèles d’hypoxie ischémie (modèles murins), la mélatonine diminue la taille de la lésion cérébrale, l’inflammation et la mortalité neuronale. Elle favorise aussi la maturation des oligodendrocytes, (Husson et al, 2002) Le sulfate de magnésium, administré chezla mère en menace d’accouchement prématuré pour ses effets tocolytiques, a montré un effet préventif sur la survenue des atteintes cérébrales. En effet, une réduction de 32 % du risque de paralysie cérébrale et de 39 % du risque de troubles de la motricité globale chez les enfants âgés de 2 ans a été montrée dans la méta analyse internationale, (Doyle et al, 2009). De plus, dans 3 essais randomisés : PREMAG (Marret, 2007 et 2008), ACTOMgSO4 (Crowther, 2003) et BEAM (Rouse, 2008), il est démontré que le MgSO4 réduit significativement le développement de la paralysie cérébrale, les troubles de développement moteur ou les troubles de développement moteur combiné au décès. En pratique, l’injection de sulfate de magnésium est recommandée chez toutes les patientes dont l’accouchement est attendu avant 32 SA. Il est recommandé de réaliser une dose de charge de 4 grammes intra-veineuse puis un gramme par heure jusqu’à l’accouchement sans dépasser 12 heures (Marret et al, 2016).

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Table des matières

1. Introduction
1.1 Généralités
1.2 Complications de la prématurité et évolution des prises en charge
1.2.1 Mortalité et morbidité
1.2.2 La paralysie cérébrale
1.3 Stratégies de neuroprotection
1.4 Les soins de développement
1.5 Politique de périnalité
1.6 Étude de cohortes
1.6.1 À l’échelle nationale
1.6.2 À l’échelle locale
1.7 Objectifs de l’étude
2. Matériels et méthodes
2.1. Étude 2015
2.1.1 Critères d’inclusion
2.1.2 Critères d’exclusion
2.1.3 Données recueillies
2.2 Études 2005 et 2010
2.3 Étude HANDINNOR
2.4 Analyses statistiques
3. Résultats
3.1. Caractéristiques de la cohorte 2015
3.1.1 Anamnèse obstétricale et antécédents maternels
3.1.2 Naissance
3.1.3 Morbidité en cours d’hospitalisation
3.1.4 Thérapeutiques post-natales
3.1.5 Mortalité
3.1.6 Sortie de l’enfant
3.2. Comparaison des études 2015, 2010, 2005 et HANDINNOR
3.2.1 Caractéristiques des cohortes
3.2.2 Évolution de la prise en charge obstétricale
3.2.3 Évolution des morbidités néo-natales
3.2.4 Évolution de la prise en charge post-natale
3.2.5 Évolution de la mortalité en cours d’hospitalisation
3.2.6. Comparaison des paramètres de sortie de l’enfant
4. Discussion
4.1 Principaux résultats
4.2 Validité interne
4.3 Validité externe
5. Conclusion
6. Bibliographie
7. Annexes

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