Le terme stomie est emprunté au grec «stoma» qui signifie «bouche». Dans le langage médical, une stomie se définit par l’abouchement d’un viscère à la peau, en dehors de son emplacement naturel [10]. Les stomies digestives sont réalisées dans le but d’une dérivation permanente ou temporaire du transit digestif, dans l’attente de réaliser la cure de la pathologie sous jacente [78]. Les entérostomies sont devenues des gestes de réalisation courante en chirurgie digestive. En s’abstenant de pratiquer des anastomoses intestinales en milieu septique, l’on évite leur fistulisation ou leur désunion dans la grande cavité péritonéale de malades déjà affaiblis par une entéropathie évoluant souvent depuis plusieurs jours [78]. Selon que l’objectif sera l’ingestion ou l’évacuation, l’opération portera soit sur la partie haute de l’intestin et sera appelée jéjunostomie, soit sur la partie basse et sera appelée iléostomie, ou encore colostomie dans le cas où elle serait pratiquée sur le côlon [78]. Les indications des stomies sont essentiellement représentées par les pathologies d’urgence (péritonite, volvulus). Elles peuvent être réalisées dans le cadre de la chirurgie programmée notamment pour pathologies tumorales de l’intestin [37]. Bien qu’elle soit souvent considérée comme un geste opératoire simple, une stomie expose à des complications. Qu’elle soit latérale, à priori transitoire, ou terminale définitive, il est classique de distinguer les complications précoces apparaissant dans le premier mois postopératoire, qui peuvent mettre en jeu le pronostic vital de l’opéré, des complications tardives de survenue ultérieure, sources de difficultés d’appareillage et de mauvaise qualité de vie.
HISTORIQUE
C’est la patiente anglaise Margareth White qui fût considérée comme la première patiente stomisée de l’histoire. William Cheselden fut le chirurgien qui l’opéra vers 1780 [in 100]. L’étude de l’entérostomie en canon de fusil remonte à 1700, avec Littré [in 79]. C’était le mode de terminaison habituel de toutes les résections intestinales, et notamment pour gangrènes herniaires. Créée en 1818 par Maunoury (de Chartres), l’iléostomie latérale fut exécutée pour la première fois à Paris en 1838 par Gustave Monod. Mais c’est Auguste Nélaton, qui en 1857, fit connaître cette opération, précisa ses indications dans l’occlusion intestinale et régla sa technique [in 79].
RAPPEL ANATOMIQUE
JEJUNUM ET ILEON
Anatomie descriptive
Le jéjunum et l’iléon représentent la portion mobile de l’intestin grêle : le jéjunum correspondant à la partie proximale (2/5) et l’iléon, à la partie distale (3/5). Ils s’étendent de l’angle duodéno-jéjunal à l’angle iléo-cæcal [52].
Les anses grêles occupent l’étage sous-mésocolique de l’abdomen ; il existe environ 16 anses grêles en forme de U avec 2 branches parallèles : la branche afférente et la branche efférente. Les anses proximales, constituant le jéjunum, sont empilées de façon horizontale et occupent la partie supéro-gauche de l’étage sous-mésocolique de l’abdomen. Les anses distales, constituant l’iléum, sont juxtaposées de façon verticale et occupent la partie inféro-droite de l’étage sous-mésocolique (Figure 1). Chaque anse mesure 30 à 40 cm de longueur, et a un diamètre de 3 cm. La totalité de l’intestin grêle mobile mesure 5 à 6 m [57].
Moyens de fixité
Le jéjunum et l’iléum sont appendus à la paroi abdominale dorsale par le mésentère . Le mésentère est un méso à double lame péritonéale, d’aspect godronné, qui présente :
– 2 faces, antérieure et postérieure ;
– 1 bord adhérent à la paroi dorsale, la racine du mésentère.
Longue de 15 cm, la racine du mésentère commence à gauche de la 2e vertèbre lombaire, puis elle descend obliquement à droite pour se terminer à droite de la 5e vertèbre lombaire. Dans son trajet, elle longe le bord droit de la partie ascendante du duodénum, puis surcroise successivement le processus unciné du pancréas, la partie horizontale du duodénum, la veine cave inférieure, l’uretère droit et les vaisseaux testiculaires ou ovariques droits. La hauteur maximale du mésentère est d’environ 20 cm.
Il contient, noyés dans la graisse, l’artère et la veine mésentériques supérieures, les nœuds et vaisseaux lymphatiques mésentériques supérieurs et les rameaux nerveux du plexus mésentérique supérieur [57].
VASCULARISATION ET INNERVATION
Artères
Le jéjunum et l’iléon sont vascularisés par les artères jéjunales et iléales, branches de l’artère mésentérique supérieure. Au nombre de 12 à 15, elles naissent du bord gauche de l’artère mésentérique supérieure et descendent dans le mésentère. Ces artères sont richement anastomosées entre elles, dessinant des arcades vasculaires de 1er, 2ème, 3ème, et même de 4ème ordre. Les artères droites sont issues des arcades juxta intestinales de 1er ordre, perpendiculairement à l’intestin,. Chaque artère droite se divise en 2 rameaux pour chacune des faces de l’intestin. Ces rameaux sont parfois anastomosés à l’intérieur de la paroi intestinale .
Lymphatiques
Trois réseaux d’origine s’anastomosent : un réseau muqueux, un sous muqueux et un sous séreux. Très développés, ils jouent un rôle dans l’absorption digestive au niveau de la muqueuse iléale. Les collecteurs lymphatiques très nombreux, sont arrêtés par 3 relais ganglionnaires : périphérique, intermédiaire et central. Ensuite, le tronc iléal véhicule la lymphe vers le tronc lombaire gauche, puis vers l’origine du canal thoracique [57].
COLON
Anatomie descriptive
Le côlon, ou gros intestin, s’interpose entre grêle et rectum. Pour le chirurgien, il comporte principalement 2 portions : le côlon droit vascularisé par les branches de l’artère mésentérique supérieure, et le côlon gauche vascularisé par l’artère mésentérique inférieure [32]. Il comprend 5 parties : cœcum, côlon ascendant, côlon transverse, côlon descendant et sigmoïde. Sa disposition anatomique et fonctionnelle permet de le considérer comme l’union de deux hémi-côlons :
– le côlon droit : sous la dépendance de l’artère mésentérique supérieure siège de la réabsorption électrolytique ;
– le côlon gauche : sous la dépendance de l’artère mésentérique inférieure, siège du transit et du stockage des matières.
Le côlon a la disposition d’un cadre en U renversé. Distingué par son aspect bosselé et blanchâtre, son calibre est important, et sa longueur est d’environ 1,30 m. Il est formé par la succession de bosselures séparées par des plis semi- lunaires et traversées par des bandelettes.
La paroi est faite de 4 tuniques : la séreuse, la musculeuse, la sous-muqueuse, et la muqueuse.
Moyens de fixité
Le cœcum, les courbures droite et gauche sont fixés au péritoine pariétal par les plis cœcaux et les ligaments phrénico-coliques. Les ¾ gauches du côlon transverse et le côlon sigmoïde sont libres et mobiles, contenus dans un méso (mésocôlon transverse et mésocôlon sigmoïde). Le côlon transverse est maintenu au bord inférieur de la grande courbure gastrique par le ligament gastro-colique .
Vascularisation, drainage lymphatique et innervation
Les artères coliques
La vascularisation colique est sous la dépendance de 2 systèmes artériels :
– l’artère mésentérique supérieure qui vascularise le côlon ascendant et les 2/3 droits du côlon transverse ;
– l’artère mésentérique inférieure qui vascularise le 1/3 gauche du côlon transverse et le côlon descendant . Il existe donc 2 territoires coliques vasculaires distincts anastomosés entre eux par une arcade située à proximité du côlon transverse.
– Les artères du côlon ascendant
Les branches coliques de l’artère mésentérique supérieure sont au nombre de 2 à 3. Elles se détachent du bord droit de l’artère, empruntent le mésocôlon droit et abordent le côlon ascendant par son bord médial. L’artère colique droite se dirige vers la courbure colique droite où elle se divise en deux branches en T : l’une longe le côlon transverse, l’autre le côlon ascendant. L’artère colique ascendante, issue de l’artère iléo-colique, assure la vascularisation de la partie initiale du côlon ascendant par sa branche colique, et la vascularisation du cœcum et de l’appendice par les branches cœcales antérieure, postérieure et appendiculaire. Dans quelques cas, une branche intermédiaire alimente la partie moyenne du côlon ascendant.
– Les artères du côlon transverse
Le côlon transverse est le plus souvent vascularisé par une branche directe de l’artère mésentérique supérieure : l’artère colique moyenne, et par l’anastomose des branches ascendantes de la colique supérieure droite et la colique supérieure gauche appelée l’arcade de Riolan.
– Les artères du côlon gauche
Ils proviennent de l’artère mésentérique inférieure et se répartissent en artère colique gauche et en artères sigmoïdiennes. Chaque artère colique ou sigmoïdienne se divise en T à proximité du côlon et s’anastomose avec l’artère voisine. L’ensemble forme une arcade artérielle marginale paracolique qui porte le nom du côlon vascularisé. De l’arcade paracolique partent les vaisseaux droits qui sont le point de départ d’un riche réseau sous-muqueux.
Les veines du côlon
Les veines coliques droites suivent les artères du même nom. Elles se jettent sur le bord droit de la veine mésentérique supérieure, soit directement, soit par l’intermédiaire du tronc gastro-colique . Le plan veineux mésentérique supérieur est toujours situé en avant du plan artériel et le croise en X allongé. Les veines sigmoïdiennes se réunissent à la veine rectale supérieure et forment l’origine de l’artère mésentérique inférieure. La veine mésentérique inférieure remonte verticalement, suit l’artère colique gauche et reçoit la veine de même nom. Elle forme à ce niveau l’arc vasculaire de même nom .
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I.Historique
II. Rappel anatomique
II.1 Jéjunum et iléon
II.1.1 Anatomie descriptive
II.1.2. Moyens de fixité
II.1.3. Vascularisation et innervation
II.2 Côlon
II.2.1 Anatomie descriptive
II.2.2 Moyens de fixité
II.2.3 Vascularisation, drainage lymphatique et innervation
III. Rappel physiologique
III.1Histologie de l’intestin
III.2 L’absorption intestinale
III.2.1 Eau et les électrolytes
III.2.2 Les glucides
III.2.3 Les protéines
III.2.4 Les lipides
III.2.5 Les vitamines
IV- Techniques opératoires des stomies
IV- 1 Entérostomies
IV.1.1 Jéjunostomies
IV-1-2 Iléostomies
IV-2 Colostomies
IV-2-1 Colostomies latérales
IV-2-2 Cœcostomie
IV-2-3 Colostomies terminales
IV-2-4 Technique laparoscopique
IV-2-5 Colostomies continentes
V. Complications et traitement
V.1 Complications chirurgicales
V.1.1 Complications précoces
V.1.2 Complications tardives
V.1.3 Autres complications
V.2 Complications médicales
V.2.1 Complications métaboliques
V.2.2 Retentissement psychologique
VI. Soins de stomie
VI.1 Alimentation
VI.2 Appareillage
VI.2.1 Matériel de recueil
VI.2.2 Réalisation de l’appareillage
VI.2.3 Conseils
DEUXIEME PARTIE : NOTRE TRAVAIL
PATIENTS ET METHODES
I. Patients
II. Méthodes
I. 1 Type d’étude
I.2 Critères de sélection
III. Paramètres étudiés
IV. Collecte et traitement des données
RESULTATS
I. Fréquence
II. Antécédents
III. Niveau de l’opérateur
IV. Pathologie initiale
V. Caractères de la stomie
V.1 Site de la stomie
V.2 Siège de la stomie (segment intestinal)
V.3 Type de stomie
VI. Complications des stomies
VI.1 Fistule péristomiale
VI.2 Nécrose de stomie
VI.3 Rétraction de la stomie
VI.4 Eviscération péristomiale
VI.5 Erosion cutanée
VI.6 Fistule digestive après rétablissement de la continuité
VI.7 Eventration
VII. Morbidité
VIII. Mortalité
DISCUSSION
I. Epidémiologie
I.1 Fréquence
I.2 Age
I.3 Sexe
II. Mode de recrutement
III. Antécédents
IV. Niveau de l’opérateur
V. Indications de la stomie
VI. Type de stomie
VII. Complications des stomies
VII.1 Fistule péristomiale
VII.2 Nécrose de stomie
VII.3 Rétraction de la stomie
VII.4 Eviscération péristomiale
VII.5 Erosion cutanée
VII.6 Fistule digestive après rétablissement de la continuité
VII.7 Eventration
VIII. Morbidité
IX. Mortalité
X. Retentissement psycho-social
Conclusion
REFERENCES