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VOIE DE SIGNALISATION
RECEPTEURS COUPLES AUX PROTEINES G
Gรฉnรฉralitรฉs
Les rรฉcepteurs couplรฉs aux protรฉines G (RCPG) sont une famille de rรฉcepteurs, qui comme leur nom lโindique, sont associรฉs ร des protรฉines hรฉtรฉrotrimรฉriques liant le GTP (guanosine triphosphate). Actuellement, plus de 800 RCPG diffรฉrents ont รฉtรฉ identifiรฉs, classรฉs en cinq grandes familles : rhodopsine, sรฉcrรฉtine, adhรฉsion, glutamate, frizzled/taste (67). Ceci permet dโassurer une large reconnaissance de signaux variรฉs quโils soient exogรจnes (odeurs, lumiรจre, molรฉcules du goรปt) ou endogรจnes (hormones et neurotransmetteurs). En effet, en fonction du couple agoniste/rรฉcepteur et du type cellulaire, les protรฉines G activรฉes engendrent un signal intracellulaire permettant la gรฉnรฉration dโune rรฉponse cellulaire appropriรฉe.
Les RCPG partagent tous une structure commune de sept domaines transmembranaires hydrophobes assez conservรฉs entre les diffรฉrentes familles, avec une extrรฉmitรฉ amino-terminale extracellulaire et une extrรฉmitรฉ carboxy-terminale intracellulaire toutes deux beaucoup plus spรฉcifiques ร chaque rรฉcepteur puisque permettant respectivement la liaison ร lโagoniste et la transduction du signal, via la protรฉine G (68).
Une protรฉine G comprend trois sous-unitรฉs Gฮฑ, Gฮฒ et Gฮณ, la sous-unitรฉ Gฮฑ liant une molรฉcule de GDP (guanosine diphosphate) au niveau de son domaine GTPase. Lโactivation du rรฉcepteur par son agoniste permet un couplage du rรฉcepteur ร la protรฉine G, et un รฉchange GDP/GTP au niveau de Gฮฑ entrainant ร son tour une dissociation du complexe hรฉtรฉrotrimรฉrique, Gฮฑ-GTP se dรฉsolidarisant du complexe Gฮฒ/Gฮณ. Gฮฑ-GTP va alors pouvoir activer des effecteurs spรฉcifiques, jusquโร la dรฉphosphorylation du GTP en GDP, ร lโorigine de la recomposition du complexe Gฮฑฮฒฮณ et de la fin de la transduction du signal. Il existe trois grands types de sous-unitรฉ ฮฑ de la protรฉine G (69,70):
– Gฮฑs et Gฮฑi, respectivement responsables dโune stimulation ou dโune inhibition de lโadรฉnylate cyclase membranaire produisant lโadรฉnosine 3โ, 5โ-monophosphate cyclique (AMPc) ร partir dโadรฉnosine triphosphate (ATP).
– Gฮฑq activant quant ร elle la phospholipase Cฮฒ, clivant le phosphatidyl-inositol-4,5-diphosphate en inositol-triphosphate (IP3) et en diacylglycรฉrol (DAG), seconds messagers impliquรฉs dans la voie de la Protรฉine Kinase C (PKC).
Locus GNAS
La sous-unitรฉ ฮฑ stimulatrice des protรฉines G est codรฉe par le locus complexe GNAS, localisรฉ sur le bras long du chromosome 20 (16). Comme dรฉtaillรฉ dans la figure 3, ce locus soumis ร empreinte parentale (21,26), peut gรฉnรฉrer plusieurs transcrits en fonction de lโexon 1 utilisรฉ. Les transcrits Gs et XLs, traduits en protรฉines, Gsฮฑ et XLsฮฑ, partagent les exons 2 ร 13, et diffรจrent par leur premier exon. XLsฮฑ, comme Gsฮฑ, est capable de coupler un rรฉcepteur activรฉ ร la stimulation de lโadรฉnylate cyclase (71,72).
Existence de 5 exons alternatifs dโinitiation de la transcription dont les 4 premiers sont localisรฉs dans des DMR (rรฉgion diffรฉrentiellement mรฉthylรฉe sur les deux allรจles) : NESP, mรฉthylรฉ sur lโallรจle paternel et exprimรฉ exclusivement par lโallรจle maternel ; AS (antisens), XLs et A/B, mรฉthylรฉs sur lโallรจle maternel et exprimรฉs exclusivement par lโallรจle paternel. Gsฮฑ (avec une transcription initiรฉe sur lโexon 1) est quant ร lui exprimรฉ de faรงon biallรฉlique, sauf dans certains tissus soumis ร lโempreinte parentale.
Gsฮฑ a une expression biallรฉlique dans la plupart des tissus, mais majoritairement maternelle dans dโautres, notamment le tubule proximal rรฉnal et certaines glandes. XLsฮฑ a une expression exclusivement paternelle dans tous les tissus. Comme dรฉjร รฉvoquรฉ prรฉcรฉdemment, des mutations inactivatrices de lโallรจle maternel de GNAS sont ร lโorigine de la PHP 1a, alors que des mutations inactivatrices de lโallรจle paternel sont responsable de pPHP ou de HOP (18). Une รฉtude rรฉcente sโest intรฉressรฉe aux consรฉquences de mutations dans lโexon 1 de Gsฮฑ (les autres transcrits nโรฉtant donc pas touchรฉs, contrairement aux mutations des exons 2 ร 13, les impactant tous) : le tableau est celui dโune OHA similaire ร celle observรฉe pour les mutations des exons 2 ร 13, illustrant bien que les autres transcrits, y compris XLsฮฑ, ne peuvent compenser lโabsence de Gsฮฑ (73). Les รฉpimutations du locus, entrainant des modifications de lโexpression des transcrits alternatifs au dรฉsavantage de celle de Gsฮฑ dans les tissus soumis ร empreinte (notamment le tubule proximal rรฉnal), sont ร lโorigine de la PHP 1b (25).
Dans lโos, et donc dans le cartilage de croissance, lโexpression de Gsฮฑ est supposรฉe รชtre bi-allรฉlique, et cโest donc son haplo-insuffisance qui serait ร lโorigine de lโOHA (via une rรฉsistance au PTHrp) prรฉsente dans la PHP1a et la pPHP mais pas dans la PHP 1b. En rรฉalitรฉ, plusieurs arguments vont ร lโencontre de ce dogme. Dโune part, dโun point de vue clinique, de plus en plus de publications signalent lโexistence de formes modรฉrรฉes dโOHA dans la PHP 1b (30โ32,74) et lโOHA semble plus sรฉvรจre dans la PHP 1a que dans la pPHP. Dโautre part, Gsฮฑ serait impliquรฉ dans la rรฉgulation de la diffรฉrenciation des cellules progรฉnitrices mรฉsenchymateuses en ostรฉoblastes et adipocytes (29,75โ77) et il a dรฉjร รฉtรฉ publiรฉ que lโexpression de Gsฮฑ nโest pas strictement bi-allรฉlique dans les progรฉniteurs osseux (78), expliquant ร la fois le phรฉnotype osseuse et lโobรฉsitรฉ frรฉquemment observรฉs dans les iPPSD.
PTHR1 et ses ligands, PTH et PTHrp
Le PTHR1 est un rรฉcepteur membranaire faisant partie de la famille des rรฉcepteurs couplรฉs aux protรฉines G ร sept domaines transmembranaires. Il est exprimรฉ principalement dans lโos, le cartilage et le rein, mais รฉgalement dans les endothรฉlium vasculaires et de nombreux tissus en cours de dรฉveloppement (79).
Ses deux ligands sont la parathormone (PTH) et le parathormone-related-peptide (PTHrp), deux peptides de respectivement 84 et 141 acides aminรฉs, partageant une similitude de sรฉquence dans leur extrรฉmitรฉ N-terminale de 34 rรฉsidus permettant leur couplage au rรฉcepteur (figure 4) (80).
La PTH est une hormone peptidique hyper-calcรฉmiante et hypo-phosphatรฉmiante sรฉcrรฉtรฉe par les glandes parathyroรฏdes en rรฉponse ร une levรฉe dโinhibition du rรฉcepteur sensible au calcium, le CaSR (rรฉcepteur ร sept domaines transmembranaires couplรฉ ร une protรฉine Gฮฑ11), suite ร une hypocalcรฉmie. Dans le tubule distal rรฉnal, elle augmente la rรฉabsorption tubulaire du calcium. Dans le tubule rรฉnal proximal, elle diminue la rรฉabsorption tubulaire des phosphates et active lโexpression de la 1ฮฑ hydroxylase, lโenzyme responsable de lโactivation de la 25(OH)-vitamine D en calcitriol (1,25(OH)2-vitamine D). A concentrations physiologiques, et secrรฉtรฉe sous forme pulsatile (environ un pic toutes les 7 ร 10 minutes), la PTH est anabolisante (elle favorise la minรฉralisation de lโos). Secrรฉtรฉe en excรจs, elle favorise la rรฉsorption ostรฉoclastique.
Prรฉsence dโune extrรฉmitรฉ commune N-terminale 1-34 permettant la reconnaissance du PTHR1 avec les 14 premiers rรฉsidus se liant au rรฉcepteur dans sa portion extracellulaire alors que les rรฉsidus 15 ร 34 se lient ร sa portion intramembranaire. La portion C-terminale joue un rรดle dans la reconnaissance dโautres protรฉines dโinteraction (81).
Le PTHrp, sรฉcrรฉtรฉ par de nombreux tissus en dรฉveloppement, exerce quant ร lui un effet essentiellement paracrine sur lโos et le cartilage de croissance. Outre le rรดle qu’il joue dans la pathogรฉnie des hypercalcรฉmies humorales malignes, le PTHrp a des actions physiologiques propres pendant la vie fลtale et la croissance, en particulier pour la chondrogenรจse, en ayant un rรดle dans la diffรฉrenciation et la prolifรฉration des chondrocytes de la plaque de croissance (58,82). Plusieurs voies de signalisation cellulaire peuvent รชtre activรฉes par la liaison de la PTH ou du PTHrp au PTHR1. En premier lieu, le PTHR1 est couplรฉ ร une protรฉine Gs dont la sous-unitรฉ ฮฑ stimule l’adรฉnylate cyclase et active la voie de signalisation AMPc/PKA que nous allons dรฉcrire en dรฉtails plus loin. Mais il a รฉgalement รฉtรฉ montrรฉ que le PTHR1 peut aussi รชtre couplรฉ ร Gqฮฑ, Gฮฑ12-13 ou ร des ฮฒ-arrestines et activer ainsi respectivement la voie de la PKC, de RhoA et de ERK1-2 (81).
La rรฉgulation du signal engendrรฉ par la liaison du PTHR1 ร lโun de ses ligands peut faire intervenir des phรฉnomรจnes de dรฉsensibilisation des rรฉcepteurs (par leur internalisation le plus souvent), de rรฉtrocontrรดle hormonal et de clairance des hormones, comme on le dรฉtaillera dans le chapitre 2.6 (p.52).
AMP CYCLIQUE
Bases biochimiques
Lโadรฉnosine 3โ,5โ monophosphate cyclique (AMPc), second messager identifiรฉ en 1958 par Sutherland et Rall (83,84), est un nuclรฉotide cyclique de faible poids molรฉculaire, impliquรฉ dans un grand nombre de fonctions biologiques. Il se compose dโun rรฉsidu dโadรฉnine, et dโun ribose estรฉrifiรฉ par un groupe phosphate.
Il est synthรฉtisรฉ ร partir de lโadรฉnosine triphosphate (ATP) par les adรฉnylcyclases sous lโaction dโune protรฉine Gsฮฑ libรฉrรฉe aprรจs activation dโun RCPG (70,85) et dรฉgradรฉ en AMP par les phosphodiestรฉrases (84) (figure 5).
Les AC membranaires sont codรฉes par neuf gรจnes. Elles se composent de deux domaines transmembranaires (M1 et M2) et de deux domaines cytoplasmiques (C1 et C2). Une dixiรจme adรฉnylate cyclase, soluble et cytosolique, a plus rรฉcemment รฉtรฉ identifiรฉe, et est codรฉe par un dixiรจme gรจne. Les AC peuvent รชtre stimulรฉes par la forskoline et inhibรฉes par certains analogues de lโadรฉnosine (3โAMP, 2โ-deoxy-3โ-AMP) (86).
Cibles de lโAMPc
Aprรจs sa synthรจse ร la membrane cellulaire, lโAMPc va avoir principalement 3 voies dโutilisation en compรฉtition que nous allons dรฉcrire en dรฉtails par la suite : activation de la protรฉine kinase A, activation de la voie Epac/Rap/ERK, et dรฉgradation par les phosphodiestรฉrases (87โ89). Ces trois voies sโentrecroisent ร de nombreux niveaux et se rรฉgulent entre elles (figure 6).
Aprรจs sa production par les adรฉnylcyclases secondairement ร la liaison dโun agoniste et de son RCPG, lโAMPc , en tant que 2nd messager intracellulaire, va pouvoir activer la voie de la PKA, la voie EPAC ou รชtre dรฉgradรฉ par les PDE. A noter que dans certaines cellules, notamment myocardiques, lโAMPc peut รฉgalement directement interagir avec des canaux calciques membranaires.
Il existe alors diffรฉrents gradients des taux dโAMPc intracellulaires, avec une modulation de lโamplitude, de la durรฉe et de la localisation de ce second messager. Plusieurs phรฉnomรจnes concordent ร un arrรชt du signal avec une diminution de la quantitรฉ dโAMPc : lโarrรชt de la synthรจse dโAMPc (internalisation et/ou phosphorylation des rรฉcepteurs, dรฉcouplage entre le RCPG et la protรฉine G) et sa dรฉgradation par les PDE.
Afin dโรฉtudier au mieux les propriรฉtรฉs pharmacologiques des diffรฉrents activateurs et inhibiteurs de ces voies de signalisation, de nombreux analogues de lโAMPc ont รฉtรฉ synthรฉtisรฉs, certains รฉtant permรฉables aux membranes cellulaires. On peut citer notamment le 8-bromo-AMPc, moins sensible aux PDE, le 8-piperidino-AMPc (8-PIP-AMPc) et le 8-aminihexylamino-AMPc (8-AHA-AMPc) qui se lient respectivement et spรฉcifiquement aux domaines A et B des sous-unitรฉs rรฉgulatrices de la PKA, et les analogues de lโAMPc modifiรฉs en 2โ-OH qui activent spรฉcifiquement Epac (90).
PROTEINE KINASE A
Les gรจnes codant pour des protรฉines kinases reprรฉsentent 2% du gรฉnome humain. Toutes ces enzymes partagent un noyau catalytique trรจs conservรฉ (91). La protรฉine kinase AMPc-dรฉpendante, ou PKA, est la premiรจre ร avoir รฉtรฉ cristallisรฉe (92). Elle avait รฉtรฉ identifiรฉ en 1968, comme รฉtant la cible principale de lโAMPc (93).
A lโรฉtat basal, la PKA est un hรฉtรฉrotรฉtramรจre composรฉ de 2 sous-unitรฉs rรฉgulatrices sรฉquestrant 2 sous-unitรฉs catalytiques. Divers travaux depuis plus de trente ans, en grande majoritรฉ par lโรฉquipe de Susan Taylor, utilisant des techniques de cristallographie, de rรฉsonance magnรฉtique nuclรฉaire, de fluorescence et de spectromรฉtrie de masse, nous permettent dโavoir une vision de plus en plus claire des mรฉcanismes dynamiques ร lโorigine de la rรฉgulation de cette signalisation aprรจs augmentation des taux intracellulaires dโAMPc (88,94โ98).
Description
Sous-unitรฉs catalytiques
Il existe deux isoformes de sous-unitรฉ catalytique : Cฮฑ qui est ubiquitaire et Cฮฒ. Cette protรฉine de 40 kDa se compose dโun noyau catalytique type serine/thrรฉonine kinase trรจs conservรฉ flanquรฉ de rรฉsidus spรฉcifiques ร la PKA, lโextrรฉmitรฉ N-terminale (39 acides aminรฉs) permettant le rapprochement du substrat vers le noyau catalytique et lโextrรฉmitรฉ C-terminale (50 acides aminรฉs) permettant la liaison aux protรฉines partenaires et la reconnaissance du substrat (figure 7).
Le noyau catalytique se compose dโun petit lobe en N terminal, riche en feuillets ฮฒ, trรจs mobile, avec un site de liaison ร lโATP au sein dโune poche hydrophobe et dโun grand lobe en C terminal, majoritairement composรฉ dโhรฉlices ฮฑ, trรจs stable et porteur des structures de positionnement de lโatome de phosphore (boucle riche en glycine, boucle dโactivation). Ces deux lobes sont sรฉparรฉs par une fente porteuse du site catalytique ร proprement parler dans laquelle le substrat (avec un site consensus Arg/Lys-Arg-X-Ser/Thr-rรฉsidu hydrophobe) et un complexe Mg-ATP sont rapprochรฉs (92,95,99,100).
Plusieurs variants dโรฉpissage existent au niveau de lโextrรฉmitรฉ N-terminale, permettant probablement ร chacun une localisation variable des sous-unitรฉs catalytiques dans des microdomaines cellulaires (101).
Deux sites de phosphorylation ont รฉtรฉ identifiรฉs dans ces sous-unitรฉs (102,103):
– le premier en position Ser338, dans lโextrรฉmitรฉ C-terminale, avec une auto-phosphorylation en cis, par le site catalytique de cette mรชme sous-unitรฉ lui-mรชme, et qui intervient alors que la sous-unitรฉ catalytique est encore en cours de synthรจse dans le ribosome, sans laquelle la suite de la traduction est bloquรฉe et qui confรจre une forme active dโemblรฉe ร lโenzyme
– le second au niveau de Thr197, au sein de la boucle dโactivation catalytique, avec une phosphorylation en trans par une autre sous-unitรฉ catalytique de la PKA, รฉgalement indispensable pour lโactivitรฉ catalytique de la PKA.
Protรฉine composรฉe de 350 acides aminรฉs, avec un petit lobe constituรฉ des rรฉsidus 40 ร 128 et dโun grand lobe constituรฉ des rรฉsidus 129 ร 350. Lโextrรฉmitรฉ N terminale (rond vert) permet le rapprochement entre le substrat et le noyau catalytique, tandis que lโextrรฉmitรฉ C terminale (rond violet) permet la reconnaissance du substrat. A noter le positionnement des deux rรฉsidus soumis ร phosphorylation : Thr197 dans le grand lobe et Ser 338 dans lโextrรฉmitรฉ C terminale. Le noyau catalytique se situe dans une poche formรฉe dans lโespace entre les deux lobes. Sur la droite, schรฉmatisation de la conformation tridimensionnelle de la protรฉine.
La sous-unitรฉ catalytique sous forme active agit selon un cycle dโouverture et de fermeture de la fente situรฉe entre les deux lobes : cโest dans cette derniรจre que, dans le site catalytique, viennent se rencontrer le substrat protรฉique ร phosphoryler en sรฉrine/thrรฉonine, lโatome de phosphore sur le noyau de lโadรฉnosine. Ces diffรฉrentes conformations ouvertes et fermรฉes de la sous-unitรฉ ont รฉtรฉ mises en รฉvidence par cristallographie (94,95,99,104).
Sous-unitรฉs rรฉgulatrices
Il existe quatre isoformes de sous-unitรฉs rรฉgulatrices, de 50-57 kDa : R1ฮฑ et R2ฮฑ qui sont ubiquitaires tandis que R1ฮฒ et R2ฮฒ sont tissus spรฉcifiques (respectivement dans le cerveau et les testicules, et les surrรฉnales et le tissu adipeux) (105), aucune nโรฉtant redondante (106,107). Les sous-unitรฉs R1 sont beaucoup plus affines ร lโAMPc (108).
Elles se composent (100,109โ111) (figure 8):
– dโun domaine de dimรฉrisation/ancrage (DD pour dimerization/docking) en rรฉgion N-terminale servant ร la fois ร la dimรฉrisation entre deux sous-unitรฉs rรฉgulatrices et ร la fixation aux AKAP (A Kinase Anchor Protein) permettant comme on le dรฉtaillera plus loin de fixer la PKA dans des gros complexes protรฉiques variants selon les domaines cellulaires
– dโune rรฉgion de liaison porteuse du site inhibiteur consistant en un pseudo substrat de la sous-unitรฉ catalytique et sensible aux protรฉases
– puis de deux sites de liaisons ร lโAMPc en rรฉgion C-terminale: les domaines A et B, hautement conservรฉs, associant un feuillet ฮฒ (contenant une Phospho-Binding Cassette, PBC) et une hรฉlice ฮฑ.
Figure 8 : sous-unitรฉ rรฉgulatrice de la PKA.
En haut, schรฉmatisation en 2D avec de gauche ร droite, lโextrรฉmitรฉ N terminale, le domaine de dimรฉrisation DD permettant la liaison aux AKAP, le site auto-inhibiteur IS agissant comme pseudo substrat des sous-unitรฉs catalytiques, les domaines A et B de liaison ร lโAMPC contenant tous deux une PBC) et lโextrรฉmitรฉ C terminale. En bas, schรฉmatisation en 3D sous forme de homodimรจre liรฉ ร une AKAP.
Conformation tรฉtramรฉrique et cycle activation/dรฉsactivation
A lโรฉtat basal, en lโabsence dโAMPc, la protรฉine kinase A est un tรฉtramรจre trรจs stable, avec une grande surface dโinteraction entre sous-unitรฉ (3-4000 ร
) due ร un รฉtirement maximal de chaque sous-unitรฉ rรฉgulatrice pour englober une sous-unitรฉ catalytique. Ainsi, le domaine A recouvre le grand lobe, le domaine B le petit lobe, tandis que le site inhibiteur bloque le site catalytique. Les sous-unitรฉs catalytiques sont ainsi sรฉquestrรฉes ร lโรฉtat actif, cโest ร dire dรฉjร phosphorylรฉes par de lโATP, et prรชtes ร phosphoryler ร leur tour un substrat ร leur libรฉration (98,100). Aprรจs stimulation par un agoniste et libรฉration dโAMPc dans la cellule, ce dernier va dโabord se lier au domaine B entrainant un 1er changement conformationnel de la sous-unitรฉ rรฉgulatrice permettant la libรฉration du domaine A, auquel peut ainsi รฉgalement se lier lโAMPc. Il existe alors un 2รจme changement conformationnel entrainant la dissociation et la libรฉration des sous-unitรฉs catalytiques. Les sous-unitรฉs rรฉgulatrices sont ร ce moment-lร sous forme compactรฉe, compartimentalisรฉes ร distance des sous-unitรฉs catalytiques par les AKAP. Secondairement ร la diminution de la concentration intra-cellulaire dโAMPc, les domaines A et B sont libรฉrรฉs, amenant au rรฉ-รฉtirement des sous-unitรฉs rรฉgulatrices qui peuvent ร nouveau se fixer aux catalytiques et reconformer ainsi le tรฉtramรจre inactivรฉ (figure 9).
(1) Liaison de lโAMPc (รฉtoile noire) aux domaines B des sous-unitรฉs rรฉgulatrices de la PKA. (2) Changement conformationnel avec libรฉration des domaines A sur lesquels peut se fixer lโAMPc. (3) Nouveau changement conformationnel avec รฉtirement des sous-unitรฉs rรฉgulatrices et dissociation de la rรฉgion auto-inhibitrice (losange bleu) du site catalytique. (4) Dissociation entre les sous-unitรฉs rรฉgulatrices dans une forme compactรฉe et des sous-unitรฉs catalytiques. (5) Sรฉquestration des sous-unitรฉs rรฉgulatrices par les AKAP (rectangle turquoise accrochรฉ au domaine de dimรฉrisation) tant que la concentration dโAMPc est suffisante. (6) Avec la dรฉcroissance des taux dโAMPc, rรฉ-รฉtirement des sous-unitรฉs rรฉgulatrices qui se relient aux sous-unitรฉs catalytiques sous la forme de lโholoenzyme PKA tรฉtramรฉrique.
Cibles de phosphorylation
On distingue couramment deux types dโaction distincts de la PKA :
โข la phosphorylation directe de nombreuses protรฉines, membranaires, cytosoliques ou dรฉtaillerons plus loin, la PKA phosphoryle et active notamment la PDE4D, entrainant par consรฉquent une auto-rรฉgulation via une diminution des taux dโAMPc intracellulaires (112)
โข lโactivation transcriptionnelle secondaire ร la phosphorylation en Ser133 de la protรฉine CREB (cAMP-responsive element binding protein), un facteur de transcription ร domaine bZIP se liant sur l โADN ร des รฉlรฉments CRE, des palindromes de 8 paires de bases ยซTGACGTCAยป trรจs conservรฉs (113) entrainant ainsi la transcription de gรจnes via le recrutement du complexe RNA polymรฉrase II (114,115) puis la synthรจse de protรฉines spรฉcifiques.
Compartimentalisation cellulaire
ยซ Cycle ยป intra-extra nuclรฉaire
Comme vu prรฉcรฉdemment, lors de lโaugmentation des taux intracellulaires dโAMPc, lโholoenzyme PKA cytosolique se dissocie, libรฉrant les sous-unitรฉs catalytiques dans une forme active, phosphorylant leurs cibles ร la chaรฎne selon un cycle rรฉgulier leur confรฉrant le qualificatif de ยซ molecular switch ยป ou interrupteur molรฉculaire.
Ces sous-unitรฉs catalytiques peuvent soit rester dans le cytosol, et seront inactivรฉes ร la dรฉcroissance des taux dโAMPc (entre autres sous lโaction des phosphodiestรฉrases) par la reconformation du tรฉtramรจre (116), soit passer dans le noyau avec un passage facilitรฉ par des AKIP (A kinase interacting protein) pour faciliter lโactivation transcriptionnelle secondaire ร la phosphorylation de CREB (117). Dans cette deuxiรจme situation, lโexport nuclรฉaire des sous-unitรฉs catalytiques est favorisรฉ par le PKI (protein kinase inhibitor) agissant รฉgalement comme un pseudo-substrat avec un motif de rรฉsidus Arg-Arg-Gly-Ala-Ile (92,118โ120) (figure 10).
Des travaux rรฉcents mettant en รฉvidence lโexistence dโune holoenzyme PKA intra-nuclรฉaire bouscule un peu le dogme du cycle nuclรฉaire de la PKA, suggรฉrant que ce pool intra-nuclรฉaire pourrait รชtre mobilisรฉ rapidement pour activer la transcription de certains gรจnes (121).
(1) stimulation du RCPG par liaison dโun agoniste. (2) Synthรจse dโAMPc aprรจs stimulation de lโadรฉnylate cyclase par Gsฮฑ. (3) Liaison de lโAMPc aux domaines B puis A des sous-unitรฉs rรฉgulatrices de la PKA avec libรฉration des sous-unitรฉs catalytiques. (4) Translocation intranuclรฉaires des sous-unitรฉs catalytiques favorisรฉe par AKIP. (4โ) Dรฉgradation de lโAMPc en AMP sous lโaction des PDE, notamment PDE4D. (5) Activation transcriptionnelle par CREB phosphorylรฉ se liant sur lโADN ร CRE. (6) Rรฉtrocontrรดle du signal avec PKI inhibant le site catalytique et favorisant le clivage des sous-unitรฉs catalytiques dans le cytosol avec reconformation de lโholoenzyme PKA inactive.
AKAP
Les AKAPs (A Kinase Anchoring Proteins) sont une famille dโune cinquantaine de protรฉines dont le rรดle principal est de sโancrer aux sous-unitรฉs rรฉgulatrices de la PKA afin de positionner lโholoenzyme dans les compartiments cellulaires voulus. Elles assurent ainsi le contrรดle spatial et temporel de la transduction du signal (122).
Les AKAPs possรจdent :
– un domaine conservรฉ de liaison ร la PKA, le AKB (A-kinase binding domain) interagissant avec le domaine de dimรฉrisation dโun homodimรจre de sous-unitรฉs rรฉgulatrices (123โ 125), en se logeant dans une hรฉlice ฮฑ amphipathique, ร savoir possรฉdant une face hydrophile et un face hydrophobe (111,126)
– un domaine dโadressage spรฉcifique leur permettant de se lier ร des structures du cytosquelette (actine, tubuline notamment) ou des organelles afin dโen rapprocher la PKA (127).
Les AKAPs peuvent รฉgalement sโassocier ร dโautres kinases, des phosphatases, des phosphodiestรฉrases et Epac (128,129).
In fine, les AKAP crรฉent des microdomaines en rapprochant la PKA de ses substrats et interviennent dans lโarrรชt du signal en colocalisant la PKA et certaines PDE, Epac, des adรฉnylcyclases (87,122,127,130โ132) (figure 11).
Les diffรฉrentes AKAP colocalisent la PKA dans un domaine cellulaire avec ses substrats et dโautres enzymes pouvant rรฉguler le signal.
Mutations identifiรฉes de PRKAR1A
Lโarticle princeps de notre รฉquipe, en collaboration avec E. Clauser, publiรฉe dans le NEJM en 2011 (41) a dรฉcrit une mutation ponctuelle non-sens rรฉcurrente de PRKAR1A, remplaรงant en position c.1102 une cytosine en thymine, ร lโorigine dโune protรฉine tronquรฉe avec remplacement dโune arginine par un codon-stop en position 368 (mutation R368X). Cette mutation est localisรฉe dans le domaine B de fixation de lโAMPc, et la protรฉine tronquรฉe perd son affinitรฉ pour ce dernier. Comme expliquรฉ prรฉcรฉdemment, cette liaison de lโAMPc au domaine B est le phรฉnomรจne initiateur de la dissociation des sous-unitรฉs rรฉgulatrices et catalytiques de la PKA et dans cette situation, il ne peut pas y avoir libรฉration des sous-unitรฉs catalytiques. Il avait dโailleurs dรฉjร รฉt illustrรฉ que la tyrosine positionnรฉe en 371 รฉtait primordiale ร lโinitiation des changements conformationnels de la protรฉine PRKAR1A secondaire ร la liaison de lโAMPc au domaine B (figure 12) , et cette derniรจre est absente dans la protรฉine tronquรฉe (100).
La liaison de lโAMPc au domaine B entraine la captation de sa PBC par Tyr371 ร lโorigine de la cassure dโun pont entre Glu261 et Arg366 responsable dโun changement de la configuration 3D de la protรฉine avec libรฉration du domaine A sur lequel lโAMPc peut se fixer, entrainant alors un nouveau changement conformationnel et la libรฉration des sous-unitรฉs catalytiques.
Lโรฉtude fonctionnelle des consรฉquences de cette mutation a mis en รฉvidence des concentrations dโAMPc plasmatiques et urinaires plus รฉlevรฉes chez les patients que chez les contrรดles, une diminution de lโactivitรฉ transcriptionnelle secondaire ร une stimulation de la voie RCPG/PKA dans les HEK293 transfectรฉes avec un plasmide permettant lโexpression de la PRKAR1A mutรฉe R368X, et une diminution de la dissociation des sous-unitรฉs rรฉgulatrices et catalytiques รฉtudiรฉe par technique de bioluminescence en couplant les sous-unitรฉs rรฉgulatrices et catalytiques ร des fluorophores (technique de BRET dรฉtaillรฉe dans le chapitre ยซ Matรฉriels et Mรฉthodes ยป). Par ailleurs, nous avons constatรฉ que la protรฉine tronquรฉe est exprimรฉe en quantitรฉ plus importante que la protรฉine sauvage dans les cellules des patients (quantification par Western Blot) ce qui sโexplique probablement par la dรฉgradation plus rapide de la protรฉine sauvage, plus fragile quand non incluse au sein de lโholoenzyme PKA. Il y a donc plus dโholoenzyme contenant la protรฉine tronquรฉe, expliquant ainsi lโeffet dominant nรฉgatif de cette mutation hรฉtรฉrozygote (41).
Par la suite, dโautres publications ont suivies, la premiรจre ayant confirmรฉ pour une nouvelle mutation (p.T239A) le dรฉfaut fonctionnel que nous avions mis en รฉvidence pour la mutation p.R368X (47). Il existe ร lโheure actuelle 18 mutations ponctuelles de PRKAR1A publiรฉes responsables dโacrodysostose (tableau 5), dont 13 dans le domaine B et 5 dans le domaine A de liaison ร lโAMPc. La sรฉquence en acides aminรฉs de la PRKAR1A est trรจs conservรฉe entre les espรจces, et toutes ces mutations affectent des acides aminรฉs conservรฉs.
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Table des matiรจres
INTRODUCTION
1. PATHOLOGIES DE LA SIGNALISATION DE LโAMP CYCLIQUE
1.1 PSEUDOHYPOPARATHYROIDIE
1.1.1 Classification historique des pseudohypoparathyroรฏdies
1.1.2 Gรฉnรฉtique des pseudo-hypoparathyroรฏdies
1.2 ACRODYSOSTOSE
1.2.1 Description clinique historique
1.2.2 Gรฉnรฉtique
1.2.3 Modรจle murin
1.3 COMPARAISON DES PHENOTYPES
1.4 NOUVELLE CLASSIFICATION
2. VOIE DE SIGNALISATION
2.1 RECEPTEURS COUPLES AUX PROTEINES G
2.1.1 Gรฉnรฉralitรฉs
2.1.2 Locus GNAS
2.1.3 PTHR1 et ses ligands, PTH et PTHrp
2.2 AMP CYCLIQUE
2.2.1 Bases biochimiques
2.2.2 Cibles de lโAMPc
2.3 PROTEINE KINASE A
2.3.1 Description
2.3.2 Compartimentalisation cellulaire
2.3.3 Mutations identifiรฉes de PRKAR1A
2.4 PHOSPHODIESTERASES
2.4.1 Gรฉnรฉralitรฉs
2.4.2 La phosphodiestรฉrase 4D
2.4.3 Mutations identifiรฉes dans lโacroPDE
2.4.4 Etudes fonctionnelles des mutations
2.5 EPAC
2.5.1 Dรฉfinition
2.5.2 Structure protรฉique
2.6 REGULATION DU SIGNAL
2.6.1 Rรฉgulation du signal au niveau du couple agoniste / RCPG
2.6.2 Gรฉnรฉration de microdomaines cellulaires
OBJECTIFS DU TRAVAIL
MATERIELS ET METHODES
1. CULTURE CELLULAIRE
1.1 Mise en culture dโune biopsie cutanรฉe
1.2 Entretien de lignรฉes de fibroblastes
1.3 Lignรฉes immortalisรฉes
1.4 Stimulation des cellules
2. TECHNIQUES ยซ COURANTES ยป
2.1 RT-PCRq
2.1.1 Extraction des ARNs
2.1.2 PCR quantitative en temps rรฉel
2.2 Dosage immuno-enzymatique dโAMPc
2.3 Western blotting
2.3.1 Prรฉparation des รฉchantillons protรฉiques
2.3.2 Electrophorรจse dรฉnaturante en gel de polyacrylamide (SDS- PAGE)
2.3.3 Transfert des protรฉines sur membrane de nitrocellulose
2.3.4 Immunomarquage, rรฉvรฉlation et quantification
2.4 Activitรฉ CRE-lucifรฉrase
2.5 Analyses statistiques
3. AUTRES TECHNIQUES
3.1 Analyse en temps rรฉel de la concentration dโAMPc par BRET
3.1.1 Principe du BRET
3.1.2 Description et fonctionnement du plasmide CAMYEL
3.1.3 Protocole expรฉrimental
3.2 Pull-down Rap1
3.2.1 Principe
3.2.2 Protocole expรฉrimental
RESULTATS
1. ETUDES IN VITRO DE LA MODULATION DE LA VOIE DE LโAMP CYCLIQUE PAR LES PDE4
1.1 Introduction
1.2 Article
1.3 Discussion complรฉmentaire
2. COMPARAISON DES PHENOTYPES DE FIBROBLASTES DE PATIENTS PHP1A, ACRO-R1A ET ACRO-PDE
2.1 Introduction
2.2 Rรฉsultats
2.2.1 Expression des transcrits et des protรฉines de la voie de signalisation
2.2.2 Exploration de la rรฉponse aux agonistes en prรฉsence ou non dโinhibiteur de PDE
2.3 Discussion
3. ETUDE FONCTIONNELLE DES MUTATIONS DU GENE PDE4D
3.1 Mise au point de la technique
3.2 Etude de la mutation S190A localisรฉe en UCR1
3. 3 Discussion
CONCLUSIONS
BIBLIOGRAPHIE
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