Communication scientifique en situation de crise sanitaire

Impact de la crise sanitaire sur la communication scientifique 

La communication est inhérente à la pratique scientifique. La transmission, l’échange et la mise en commun des connaissances s’opèrent principalement par la publication dans des revues spécialisées. Validés par les pairs, les résultats ont alors vocation à être communiqués hors de la sphère scientifique pour informer le public et accompagner, éventuellement, la décision politique. Mais la crise sanitaire a profondément bouleversé ce schéma de communication. Les politiques éditoriales des revues scientifiques ont été assouplies, l’ouverture des données et des publications ont autorisé la diffusion sans délai de résultats potentiellement importants. Les plateformes de prépublications ont stimulé les échanges entre scientifiques. Le monde de la recherche s’est fortement mobilisé pour informer sans délai le public des connaissances acquises. Les médias dans toute leur diversité ont été des médiateurs de l’information omniprésents.

Le succès d’une communication se mesure à sa capacité d’informer de manière rigoureuse, honnête et objective de façon à ce que chacun soit en mesure de se faire sa propre opinion. Dans le contexte de la crise, ces objectifs n’ont été qu’imparfaitement atteints. Les raisons en sont multiples.

(i) La communication entre scientifiques a été incontestablement d’une immense richesse mais aussi marquée par des disfonctionnements qui ont impacté à la fois la communauté scientifique et le public.
(ii) La finalité de la communication scientifique a été détournée par certains médias qui l’ont traité comme un outil de marketing. Ils ont ainsi contribué à entretenir la confusion entre vérité scientifique et opinion, confusion qui a été par ailleurs alimentée par plusieurs acteurs de la recherche peu respectueux des principes d’intégrité scientifique et qui se sont servi de ces médias pour faire passer des messages à la finalité discutable.
(iii) Des réseaux sociaux et divers blogs ont servi de tribune à des acteurs de la recherche pour y communiquer des informations scientifiquement contestables, non validées par les pairs, leur servant à défendre des positions idéologiques sur des sujets éloignés de leur compétence professionnelles tout en entretenant une confusion entre leur expression à titre personnel et au titre de leur institution.
(iv) Les connaissances sur le virus et la pandémie étant en constante évolution, toute information considérée comme vérité un jour, peut se trouver contestée le lendemain. Or, dans le contexte anxiogène de la pandémie, le public ne peut se satisfaire de réponses qui paraissent ambiguës ou incertaines alors qu’elles ne sont que le reflet des phases évolutives de la recherche. Cette situation déstabilisante peut le conduire à choisir l’information qui le rassure ou conforte son opinion. Ce comportement est d’autant plus exacerbé que les médias de grande écoute, relayés par les réseaux sociaux, favorisent ce qui peut contenter le public.
(v) La peur engendrée par la pandémie favorise la recherche d’exutoires que certains citoyens trouvent dans des réseaux sociaux véhiculant à grande échelle la désinformation, voire des croyances complotistes. Près de dix-huit mois après le début de la crise sanitaire, et alors qu’elle n’est pas encore achevée, il nous a semblé opportun de faire le point sur l’abondante communication scientifique qu’elle a générée. Identifier et analyser les forces et faiblesses de cette communication, ses excès et dérives, réclame que l’on appréhende ce qu’ont été les attentes et les finalités de ses différents acteurs et en quoi leur message a pu être audible par certains et inaudible par d’autres.

La communication au sein de la communauté scientifique

En avant-propos de ce chapitre, il faut souligner la forte mobilisation de la communauté scientifique internationale dès le début de la pandémie de COVID-19. En France, cette mobilisation a concerné non seulement les sciences de la vie et de la santé mais toutes les disciplines de la recherche depuis les mathématiques et l’informatique jusqu’aux sciences humaines et sociales . De nombreux appels à projets ont été ouverts dans des délais inédits par les organismes de recherche, universités et agences de recherche. Des procédures exceptionnelles de sélection et de financement des projets ont été mises en place. Si l’on peut se féliciter de cette réactivité, il faut néanmoins faire le constat qu’elle s’est accompagnée d’un certain manque de coordination et de communication entre les instances et entre les chercheurs, comme l’a souligné une note de synthèse du Sénat.

La réactivité des institutions ne doit pas non plus masquer que pendant plusieurs décennies, la recherche en virologie a été un parent pauvre de la biologie, la recherche sur le SIDA faisant exception. Le COMETS ne peut qu’adhérer à l’analyse du virologue Bruno Canard, spécialiste au CNRS de la réplication des virus à ARN dont les coronavirus font partie. La recherche à long terme est nécessaire pour anticiper les évolutions du monde viral et « la science fondamentale est notre meilleure assurance contre les épidémies ».

Publier la science. Des initiatives bienvenues mais aussi des dérives

Le SARS-CoV-2 et la pandémie de COVID-19 ont fait l’objet d’un nombre considérable de travaux de recherche qui ont eu, pour certains, un impact décisionnel sur les politiques de santé et sur l’économie. En témoignent les 272 000 publications et 42 000 prépublications répertoriées pour l’année 2020 dans la base de données Dimensions  . Il sera très intéressant d’analyser, avec le recul, le devenir de cette abondante littérature mais nous pouvons, dès à présent, porter un éclairage sur ses forces et faiblesses.

Partage des données de la recherche et ouverture des publications

Il faut souligner la rapidité avec laquelle les connaissances sur le SARS-CoV-2 ont été acquises et mises en commun. Les données sur le virus ont été librement accessibles aux chercheurs dès son identification début janvier 2020 et son génome mis en accès ouvert sur la plate-forme GISAID et sur les portails COVID-19 Data Portal, et Research Data Alliance (RDA). La plate-forme PubMed Central (PMC) a autorisé un large accès ouvert aux articles publiés.

L’accès ouvert aux données permet, entre autres, d’en vérifier la fiabilité comme le montre une étude de l’analyse du réseau phylogénétique du génome du virus , dont la portée était supposée avoir de profondes implications pour comprendre et gérer la pandémie de COVID-19, L’impact de la publication fut immédiat (score Altmetrics : 7016). Mais, après ré-analyse des données, un consortium international de 37 chercheurs concluait à leur caractère biaisé et non fiable, obligeant l’éditeur à apporter un correctif. Le mécanisme d’auto-correction a ici pleinement fonctionné tant au niveau des scientifiques que de l’éditeur. Toutes ces initiatives constituent un signal fort qui milite pour un renforcement de la Science ouverte.

Face à la nécessité de communiquer les résultats de recherche dans les meilleurs délais, les éditeurs de revues scientifiques ont « adapté » leurs standards éditoriaux. L’EASE (European association of scientific editors) a reconnu la nécessité de réduire le délai de la communication d’informations . Certains éditeurs ont accepté la publication de résultats préliminaires et ont admis que leur évaluation soit faite par l’éditeur lui-même ou par un seul expert. EMBO Press  et l’éditeur Wiley se sont engagés à ce que tous les manuscrits et les données sources en lien avec la COVID-19 soient publiés sans paiement d’APC (Article proceeding charges) et immédiatement accessibles en libre accès. Ils ont aussi accepté de partager les informations avec l’Organisation Mondiale de la Santé.

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Table des matières

INTRODUCTION
I. RESUMÉ
II. AUTO-SAISINE
III. ANALYSE
A. . Impact de la crise sanitaire sur la communication scientifique
B. La communication au sein de la communauté scientifique
1. Publier la science. Des initiatives bienvenues mais aussi des dérives
a. Partage des données de la recherche et ouverture des publications
b. Des défaillances dans la gestion des données de la recherche
2. Des écarts à l‘intégrité scientifique, à la déontologie et à l’éthique lourds de conséquences
3. Une croissance inédite des prépublications. Un progrès mais des dérives
4. Vers le développement d’une communication « virtuelle » entre scientifiques ?
C. Communication scientifique à destination du public
1. La communauté scientifique au service de l’information du public
2. L’information scientifique dans les médias
c. Le journalisme scientifique à l’épreuve du SARS-CoV-2
d. Communication scientifique et médias à large diffusion : les dérives de la science spectacle
D. Communication scientifique à destination des politiques : des experts pour éclairer leurs décisions
E. Défiance envers la science. Quand la parole du scientifique est confrontée au « populisme scientifique »
F. Conclusion
IV. RECOMMANDATIONS
A. Communication à destination de la communauté scientifique
1. Données de la recherche
2. Publications
B. Communication scientifique dans l’espace public
1. Rappels sur les droits et devoirs des chercheurs intervenant dans l’espace public
2. Recommandations pour favoriser les échanges entre scientifiques, journalistes et médias
C. Recommandations aux établissements de recherche et d’enseignement supérieur sur la communication scientifique
CONCLUSION
V. ANNEXES
A. Annexe 1
B. Annexe 2
VI. PERSONNALITÉS CONSULTÉES
VII.GLOSSAIRE DES ABREVIATIONS

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