Comment la numération est-elle enseignée ?

Comment la numération est-elle enseignée ?

Dans leurs travaux, Bednardz et Janvier (1984) relèvent d’abord une « grande insistance mise sur le passage de l’écriture symbolique du nombre “ chiffre, position ” à la symbolisation “ unités, dizaines, centaines, …” ». Ainsi, un enfant aura tendance à toujours associer à chaque chiffre d’un nombre l’unité de numération correspondante. Si pour former 421, on lui propose 42 dizaines 4 centaines 1 unité, il choisira 4 centaines et 1 unité mais sera bloqué par l’absence de 2 dizaines. Selon Bednarz et Janvier, la traduction entre les deux écritures ne conduit pas l’élève à une véritable compréhension de la valeur associée aux chiffres d’un nombre. Par ailleurs, elles relèvent également que « la représentation du nombre apparaît selon un alignement reprenant l’ordre de l’écriture conventionnelle du nombre ». Elles en viennent ainsi à la conclusion qu’« imposer prématurément une présentation ordonnée conduit nécessairement l’enfant à une interprétation de l’écriture en termes de découpage, d’ordre, de position, et écarte toute signification véritable accordée à cette position en termes de groupements ».
Comme le relève Chaachoua (2016), Tempier (2010) au travers de son analyse en vient aux mêmes constats de difficultés, près de 30 ans après. Il semble douter de la correcte prise en charge des deux aspects de la numération. Pourtant, il concède que ces difficultés ne sont pas liées au manque de connaissances des enseignants dans ce domaine mais plutôt à leurs habitudes de travail. Celles-ci étant liées aux programmes qu’ils doivent suivre et aux manuels qu’ils ont à disposition, il décide par une étude des programmes officiels, des évaluations nationales et des manuels, de comprendre comment les enseignants sont orientés dans la prise en charge de l’enseignement de la numération.
C’est bien l’enseignement de la numération qui est ici remis en question et il revient donc à l’enseignant de proposer des situations qui permettent d’éviter les difficultés évoquées. Or, l’enseignant s’appuie sur des programmes, des ressources d’accompagnement et des manuels pour concevoir son enseignement. Examinons donc ce qu’ils préconisent.

Les préconisations institutionnelles

Ce que disent les programmes

Comme l’a analysé Chaachoua (2016), les programmes de 2002 et 2007 insistaient sur les deux aspects de la numération, en particulier l’aspect décimal grâce aux activités de groupements et d’échanges mentionnées : « Ils doivent comprendre les principes de la numération décimale, en particulier que la valeur des chiffres dépend de leur position dans l’écriture des nombres, en relation avec les activités de groupements et d’échanges qui la sous-tendent. (Programmes, 2002 et 2007 »).
Elle relève ainsi que les programmes de 2002 accordaient une grande importance à l’aspect décimal de la numération, et cela à travers trois compétences : « – Déterminer la valeur de chacun des chiffres composant l’écriture d’un nombre entier en fonction de sa position.
– Donner diverses décompositions d’un nombre en utilisant 10, 100, 1000.
– Retrouver l’écriture chiffrée à partir d’une décomposition. »
Selon elle, si on s’appuie sur les documents d’application des programmes, ces compétences peuvent être rattachées à « Trouver le nombre de … », « Recomposer un nombre… », « Décomposer un nombre… ». Elle note cependant que dans les progressions de 2008, « Décomposer un nombre et « Recomposer un nombre » ainsi que les écritures en puissances de 10 disparaissent, ce qui met à mal la prise en charge de l’enseignement de l’aspect décimal.
De plus, si l’on regarde les évaluations de 2005 pour l’entrée en CE2, seul l’aspect positionnel est évalué au travers des compétences « Lire/écrire et comparer des nombres entiers ».
Qu’en est-il des derniers programmes entrés en vigueur à la rentrée 2016 ?
Les programmes de 2015 pour le cycle 2 (BO du 26 novembre 2015) préconisent (p.75) « L’étude de la relation interne aux nombres : […] décomposer/recomposer les nombres additivement, multiplicativement, en utilisant les unités de numération (dizaines, centaines, milliers), changer d’unités de numération de référence, […]. ». Même si cela n’est pas exposé de façon explicite, il s’agit bien ici de prendre en charge à la fois l’aspect positionnel de la numération par la décomposition/recomposition des nombres en unités de numération, et l’aspect décimal de la numération par les échanges et conversions entre les différentes unités de numération.
Plus loin, des éléments d’aide sont proposés aux enseignants dans deux compétences. Dans la compétence « Comprendre et utiliser des nombres entiers pour dénombrer, ordonner, repérer, comparer », les programmes insistent sur l’importance particulière qui doit être accordée aux regroupements par dizaines, centaines, milliers. Mais c’est dans la compétence « Nommer, lire, écrire, représenter des nombres entiers » que l’on trouve le plus d’éléments d’aide pour l’enseignant. En effet, l’élève doit être conduit à « Interpréter les noms des nombres à l’aide des unités de numération et des écritures arithmétiques ». L’enseignant doit insister sur les « Unités de numération (unités simples, centaines, dizaines, milliers) et leurs relations (principe décimal de la numération en chiffres) » et la « Valeur des chiffres en fonction de leur rang dans l’écriture d’un nombre (principe de position) ». Les exemples proposés sont explicites : « Utiliser des écritures en unités de numération (5d 6u, mais aussi 4d 16u ou 6u 5d pour 56) ». L’enseignant a donc tous les éléments pour permettre aux élèves de faire le lien entre les chiffres qui composent le nombre et donc de mieux en comprendre le sens véritable.
Cependant, sur les 35 fiches proposées pour les évaluations en mathématiques des élèves de CE2 dans la rubrique Banqu’outils pour l’évaluation du site Eduscol, seule une fiche propose une situation qui met en jeu l’aspect décimal par la conversion entre unités de numération. On constate donc une réelle contradiction entre les préconisations des programmes et les outils d’évaluation mis à disposition des enseignants par le ministère.

Tournons-nous maintenant vers les manuels conçus pour aider les enseignants dans leur pratique

Ce que disent les manuels

Dans son analyse des manuels, Tempier (2010) constate que la prise en charge de l’aspect positionnel de la numération prédomine sur celle de l’aspect décimal. Certains types de tâches sont en effet valorisés comme « Comparer des nombres » et « Lire/écrire des nombres », mettant plutôt en jeu l’aspect positionnel de la numération. Cependant, au travers de l’analyse de Cap Maths CE2 et J’apprends les maths CE2, il repère « des espaces de liberté pour les enseignants. L’aspect décimal est un savoir qui y est identifié clairement et certaines activités proposées peuvent amener les élèves à une compréhension de l’écriture des nombres en termes de groupements ». Ces espaces de liberté sont cependant propres à chaque enseignant et ne garantissent pas une prise en charge totale de l’aspect décimal dans les activités qu’il propose.

Problématique

La prise en charge de l’aspect décimal permet une bonne compréhension du nombre et des unités qui le composent, et facilite notamment l’apprentissage du calcul et des techniques opératoires. Il est donc un enjeu essentiel de l’enseignement de la numération.
Alors que depuis 2002, l’institution a opéré de nombreux allers-retours dans sa mise en avant auprès des enseignants, les programmes de 2016 lui accordent à nouveau une place à part entière. De plus, dans la formation dispensée dans les ESPE, les formateurs nous mettent en garde sur l’importance de prendre en charge cet aspect dans notre pratique. Pourtant des documents ressources très récents destinés à évaluer les élèves de CE2 en mathématiques, n’y font qu’une seule référence, pouvant facilement passer inaperçue.
Je me suis donc demandée si les outils que j’avais actuellement à disposition dans ma classe avaient été suffisamment pensés en prenant en compte l’aspect décimal de la numération, ou si l’incohérence constatée précédemment avait encore des répercussions au sein notamment des classes de CE1 de mon école. Un fichier de numération autocorrectif a été créé par les enseignants du cycle 2 de mon école durant les vacances d’été 2016. Prend-il suffisamment en charge l’aspect décimal de la numération pour permettre à mes élèves une bonne compréhension du nombre ? Si non, travailler de manière spécifique sur cet aspect durant une période leur permettra-t-il de mieux progresser que des élèves ne travaillant que sur ce fichier ?
Voilà donc les questions auxquelles je vais tenter de répondre dans la suite de ce mémoire.

Méthodologie

Analyse des ressources de la classe

Présentation du fichier autocorrectif pour le Cycle 2

Durant les vacances d’été 2016, les enseignantes de cycle 2 ont travaillé en concertation sur l’élaboration d’un fichier d’entraînement autocorrectif de type Freinet afin de permettre à chaque élève de progresser à son rythme, en fonction de son niveau de départ. Ce fichier permet de travailler la compétence « Comprendre et utiliser des nombres entiers pour dénombrer, ordonner, repérer, comparer » et présente 13 niveaux (N1 à N13) correspondant chacun à des nombres travaillés de plus en plus grands. Un exemple de fiche est proposé en Annexe 1. Ce fichier se présente sous forme de feuilles mises dans des pochettes plastiques sur lesquelles seuls les élèves de CP ou les plus fragiles des CE1 peuvent écrire directement avec des feutres adaptés. A partir du CE1, les élèves déjà à l’aise, répondent directement sur leur cahier. Derrière chaque fiche, la correction est proposée. Pour certains exercices, les élèves doivent « s’inscrire en correction » (mettre leur étiquette prénom au tableau) afin que l’enseignant viennent corriger et si besoin leur fournir des explications. A chaque fois qu’une fiche est terminée, l’élève doit reprendre les exercices qui lui ont posé problème, ce qui lui permet de s’auto-évaluer et de progresser en termes d’autonomie dans son travail. Il ne passe aux autres fiches que lorsqu’il a tout réussi. Quand toutes les fiches d’un niveau ont été réalisées, l’élève demande à l’enseignant de passer l’évaluation de départ du niveau supérieur. S’il la réussit, il peut passer à l’entraînement sur les fiches du niveau supérieur. S’il s’est trompé, il doit se ré-entraîner sur les exercices correspondant à la/aux compétence(s) concernée(s) que l’enseignant lui a indiquées.
Lors de mon arrivée dans l’école, j’ai demandé aux enseignantes du cycle 2 et notamment celles ayant des CE1 dans leur classe, comment elles procédaient pour l’enseignement de numération. Elles m’ont toutes conseillé de ne pas mener de séquence type, mais d’utiliser exclusivement le fichier. J’ai donc fait passer aux élèves l’évaluation de départ correspondant à leur niveau théorique et en fonction des résultats, les ai orientés vers le niveau adéquat. Après quelques semaines d’appropriation de l’outil, ils sont finalement devenus assez autonomes dans leur travail. Mais j’avais le sentiment que malgré l’avancée fulgurante de certains, je passais à côté de choses essentielles en termes de compréhension du nombre. J’ai donc commencé par en faire l’analyse.

Analyse du fichier

L’étape préliminaire à mon étude a d’abord consisté à analyser le fichier afin de regarder s’il répondait aux attentes institutionnelles en termes de prise en charge de l’aspect décimal de la numération. En effet, j’avais le sentiment que même les élèves les plus habiles avec les nombres n’avaient pas une réelle compréhension du nombre aves les exercices proposés par le fichier. Mais si je me suis d’abord interrogée sur cela c’est aussi et surtout grâce aux enseignements en mathématiques dont j’ai bénéficié à l’ESPE et au cours desquels j’ai pris conscience de ce qu’enseigner la numération voulait dire pour nous enseignants. Mon objectif n’avait pas pour but de critiquer le travail de mes collègues mais plutôt de m’aider, si nécessaire, à le compléter pour amener mes élèves à progresser sur la compréhension de l’aspect décimal.
Voici les types de tâches proposées par les exercices du fichier pour les nombres de 59 à 999, nombres qui doivent être étudiés au CE1 :
– Compter en groupant par 10 puis par 100 : les élèves sont orientés sur la tâche à accomplir. Ils trouvent ainsi le nombre de centaines, le nombre de dizaines, le nombre d’unités simples restantes et les associent aux chiffres qui composent le nombre à trouver. Parfois, ils comptent de 100 en 100 puis de 10 en 10 et effectuent une addition. Seul l’aspect position est travaillé dans ce type exercice.
– Comparer deux nombres : C’est ici la valeur des chiffres en fonction de leur position dans le nombre qui est en jeu. Donc seul l’aspect position est travaillé.
– Compléter des files numériques : cette tâche mobilise la capacité à compter de 1 en 1, de 5 en 5…donc ni l’aspect décimal ni l’aspect position ne sont en jeu.
– Placer des nombres sur une droite graduée : même remarque que ci-dessus.
– Décomposer des nombres en une somme de nombres correspondants aux unités de numération (ex. : 186 = 100 + 80 + 6) : ici l’élève doit être capable d’associer à un chiffre le nombre correspondant dans une écriture additive. L’exemple induit chez l’élève une procédure qui ne témoigne en rien de sa compréhension de l’écriture additive associée à un nombre. Seul l’aspect position est encore ici travaillé.

Test initial

L’expérimentation s’est déroulée sur la période 4 de l’année scolaire. Les élèves avaient donc travaillé exclusivement sur le fichier autocorrectif durant les trois premières périodes de l’année. En semaine 11, les élèves du groupe Témoin ainsi que les élèves du groupe Test ont passé le Test initial. Les consignes ont été explicitées et les élèves avaient la possibilité d’utiliser du matériel de numération ou de dessiner pour répondre aux questions. Chaque élève a eu le temps nécessaire pour réaliser l’ensemble des exercices proposés. A la suite du test, une analyse des réponses a permis de constituer trois groupes de besoins auxquels des ateliers différenciés ont ensuite été proposés pour remédier aux difficultés rencontrées. Ma connaissance du niveau des élèves avant cette étude a aussi joué. Précisons que les groupes n’ont pas été identifiés ni par un numéro ni par une lettre, il s’agissait de trois listes de noms.
Ainsi, les élèves n’ont pas pu associer leur groupe à un niveau dans la classe.
L’exercice 1 (figure 2) travaillait la compétence « Dénombrer une collection ». Il s’agissait de voir si l’élève était capable de faire des groupements pas 10 et si, à partir du nombre de dizaines trouvé, il était capable de déduire sans compter le nombre correspondant. Une observation de l’élève était donc nécessaire durant cet exercice. Lorsque cela n’a pas été possible d’observer directement, l’élève a ensuite été questionné sur sa procédure.

Le jeu de l’oie des échanges

Pour cet atelier, les élèves ont tous pu jouer par 3 ou 4, en ma présence afin qu’ils comprennent bien les règles du jeu et la méthode à adopter. Dans ce jeu, l’objectif est que l’élève puisse s’approprier les échanges. Il est amené sans cesse à faire des échanges avec le banquier pour pouvoir réaliser l’action indiquée sur sa case et donner ou recevoir la somme exacte. Les joueurs s’entraident afin que les bons échanges soient réalisés. Ce jeu était proposé en version allégée au groupe de besoin le plus fragile. Lors du premier tour d’ateliers, les élèves ont rencontré de grosses difficultés à échanger par exemple 100 contre 9 billets de 10 et 10 billets de 1. Une nouvelle session de familiarisation a donc été proposée. Cela a permis de remédier à ce problème.

Les exercices corrigés

Les ateliers d’exercices ont été explicités en semaine 11 et les élèves ont pu poser toutes les questions nécessaires à leur compréhension. Un atelier type a ensuite été proposé afin que les élèves s’approprient l’activité et soient autonomes durant les ateliers.
Durant les trois semaines d’ateliers, les exercices étaient globalement du même type que ceux du test de départ (Cf Annexe 2). Une fois tous les exercices réalisés ou tentés, les élèves devaient aller se corriger avec une fiche corrective, repérer les erreurs et comprendre les explications données sur la fiche. Puis ils revenaient à leur place et devaient essayer de corriger leurs erreurs en se rappelant les explications. Les deux groupes les plus à l’aise ont eu les mêmes exercices,le groupe des plus fragiles a eu des exercices plus courts avec des nombres plus petits.

L’atelier manipulation

L’atelier de manipulation était le seul mené par l’enseignant. Les élèves choisissaient un nombre supérieur à 100 qui avait du sens pour eux (nombres d’os dans le corps humain, vu en sciences, nombre de jours dans une année…). A partir de ce nombre, ils devaient le représenter avec du matériel de numération. Une fois la représentation classique faite, ils devaient en trouver d’autres. L’enseignant pouvait orienter en demandant qu’ils n’utilisent que des centaines et des unités, seulement des unités… et faisait constater les équivalences.
L’objectif était aussi de faire prendre conscience que, certes un carré c’est une centaine, mais que dans cette centaine il y a des dizaines, des unités « cachées ».

Analyse qualitative

Les types d’erreurs

Pour les exercices 1, 2 et 3 du test, les différents types d’erreurs ont été relevés puis codés. Elles sont répertoriées dans le tableau 2.
Nous n’avons pas analysé les erreurs au problème car le but était simplement que les élèves sachent sortir du nombre, le nombre de paquets de 10. Donc soit l’élève savait faire, en s’aidant ou non d’un dessin, soit il ne savait pas faire. On ne pouvait pas vraiment trouver des types d’erreurs différents.

Analyse des résultats

Pour chaque sous-groupe constituant le groupe Test (groupe A, groupe B, groupe C) nous avons relevé la fréquence d’apparition de chaque type d’erreur, exercice par exercice, au Test initial et au Test final. Nous avons ainsi pu regarder les éventuels progrès des élèves, non plus en termes de note ou de réussite, mais en termes d’amélioration de leur compréhension et donc d’apprentissage. L’objectif premier de l’expérience consistant à faire progresser les élèves sur la compréhension du nombre, il fallait que certains types d’erreurs disparaissent ou s’atténuent fortement entre les deux évaluations, comme notamment DG1, DG2, DN1, DN2, DN3, ND1, ND2. Qu’en a t-il été réellement ?

Discussion

Cette expérimentation avait pour objectif de montrer que le fichier autocorrectif mis en place cette année par les enseignants de Cycle 2 ne prenait pas suffisamment en charge l’aspect décimal pour permettre aux élèves de réussir des exercices traduisant leur bonne compréhension du nombre. Ainsi, il s’agissait de proposer aux élèves du groupe Test des exercices spécifiques prenant en charge cet aspect et de les évaluer avant et après pour constater d’éventuels progrès.
Les élèves du groupe Témoin, eux, continuaient leur travail sur le fichier et passaient également l’évaluation avant et après.
Suite à cette expérimentation, j’ai d’abord rapidement regardé les divers résultats du groupe Test et du groupe Témoin et me suis rendu-compte sans en faire l’analyse poussée, que le groupe Témoin avait obtenu dès le test initial de très bons résultats. Pourtant, l’analyse du fichier autocorrectif avait révélé que l’aspect décimal n’était pas pris en compte dans les exercices. Comment les élèves avaient-ils donc pu réussir aussi bien ? C’était rassurant, mais déconcertant car mon hypothèse de départ ne tenait plus vraiment. Je me rappelais pourtant bien le discours de mes collègues me disant qu’elles n’utilisaient que cet outil. Je décidais néanmoins de leur en reparler en leur disant qu’il me paraissait difficile avec seulement le travail sur fichier que les élèves aient pu répondre correctement à autant de questions de l’évaluation. Elles m’ont donc dit qu’effectivement, elles travaillaient sur le rituel du 100ème jour, chaque jour depuis le début de l’année, et n’avaient tout simplement pas pensé à m’en parler. Et lorsqu’elles m’ont expliqué concrètement comment elles s’y prenaient, tout est devenu plus limpide. L’une d’entre elles faisait également d’autres ateliers en maths dont elle ne m’avait pas parlé.
Donc, pour pouvoir attribuer à mes ateliers expérimentaux un réel effet par rapport au fichier autocorrectif, il aurait fallu que je fasse en plus le rituel du 100ème jour. Ainsi, dans cette discussion, je vais surtout expliquer en quoi je pense que mes ateliers ont eu un effet sur la progression des élèves du groupe Test sans plus vraiment tenir compte du groupe Témoin qui n’en était finalement pas vraiment un puisqu’avantagé par le rituel quotidien.
Sur la progression de la réussite des élèves aux divers exercices, les résultats sont globalement en faveur d’un effet des ateliers par rapport au groupe Témoin n’ayant travaillé que sur fichier. Les élèves progressent plus et atteignent souvent un meilleur niveau que le groupe Témoin. Cependant, il faut nuancer ces résultats car le groupe Témoin est composé d’une classe de très bon niveau et d’une classe de niveau moyen. Et comme nous avons comparé des réussites moyennes, l’écart aurait peut-être été moindre si les niveaux avaient été plus homogènes. Et puis, ces résultats sont aussi à nuancer car durant 3 semaines, les élèves du groupe Test n’ont travaillé que l’aspect décimal, par des exercices choisis, adaptés semaine après semaine en fonction des observations réalisées en classe. Il aurait donc été étonnant de ne pas voir d’effet.
Si l’on s’intéresse aux types d’erreurs, nous avons vu que les résultats étaient moins tranchés en faveur du groupe Test mais le groupe Témoin n’en étant plus vraiment un, essayons de les nuancer.
Concernant la capacité des élèves à être plus efficaces dans le dénombrement en faisant des groupements par 10 (exercice 1), les ateliers ont eu un effet incontestable. Les élèves ont moins recours au comptage de 1 en 1, et même si certains se trompent encore, le recours au groupement devient plus fréquent. Certains deviennent de plus en plus à l’aise, ce qui pourrait d’ailleurs expliquer l’augmentation de l’erreur DG3 : plus confiants, les élèves vont plus vite et sont peut-être moins attentifs. Mais cela est intéressant car ce n’est plus un problème de procédure. Néanmoins, je reste prudente quand à cet exercice où j’ai parfois vu les élèves les plus rapides faire leurs groupements, puis compter de 10 en 10. Je n’ai donc pas la certitude, saufs pour ceux qui ont bien réussi le problème sans avoir recours au schéma, que la réussite à l’exercice est due à bonne compréhension de la construction du nombre. Compter de 10 en 10 pour trouver 120 ce n’est pas la même chose que de compter 12 paquets de 10 et de dire que c’est 12 dizaines donc 1 centaine et 2 dizaines donc 120.

CONCLUSION

L’enseignement de la numération ne peut pas se faire sans prendre en charge son aspect décimal. C’est un enjeu majeur pour aider les élèves à bien comprendre le nombre et toutes les connaissances mathématiques qui en découlent. L’expérimentation menée a permis de montrer que sans un travail spécifique avec des exercices choisis, les élèves ne peuvent accéder à cette compréhension. Mais elle a également montré, grâce aux résultats du groupe Témoin, comment un travail quotidien moins spécifique, mais intégrant cet aspect, sous forme de rituel par exemple, peut aider à une meilleure compréhension du nombre. Il faut habituer les élèves à manipuler les nombres, sous différentes formes et faire en sorte qu’ils y prennent plaisir, comme cela a pu être le cas lors des ateliers proposés, c’est fondamental. Un travail spécifique sur l’aspect décimal réalisé régulièrement sur l’année et un travail ritualisé plus global mais prenant en charge l’aspect décimal semble donc être un bon compromis. Cette expérimentation m’a donc permis de comprendre à quel point l’enseignant à un rôle essentiel pour permettre aux élèves une meilleure compréhension du nombre simplement en prenant du recul sur les outils en place et sur sa propre pratique. Lorsqu’on débute, on accueille à bras ouverts tout ce qui nous semble bien construit et qui va nous faciliter la tâche.
Ce fichier autocorrectif est un outil intéressant pour l’entraînement des élèves, mais il ne suffit pas. Je suis donc ravie de m’être penchée sur cette question de la prise en compte de l’aspect décimal de la numération dans mon enseignement des mathématiques. Cette expérience va me permettre de toujours être à l’affût de la moindre dérive dans ma pratique et e prendre le même recul vis-à-vis des autres disciplines que j’ai à enseigner. « Que doivent réellement comprendre les élèves ? Quel est l’enjeu de cet apprentissage ? Comment dois-je m’y prendre réellement ?
Cet outil qui me paraît parfait et clé en main, est-il réellement adapté ?… ». Autant de questions que je me poserai dorénavant plus spontanément et qui devraient me permettre d’améliorer ma pratique.

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Table des matières

INTRODUCTION 
1 Etat de l’art 
1.1 Les deux aspects de la numération décimale
1.1.1 L’aspect de position
1.1.2 L’aspect décimal
1.2 L’apprentissage de la numération à l’école
1.2.1 Les enjeux
1.2.1.1 L’addition et la soustraction
1.2.1.2 La multiplication et la division
1.2.2 Les difficultés liées à cet apprentissage
1.3 Comment la numération est-elle enseignée ?
1.4 Les préconisations institutionnelles
1.4.1 Ce que disent les programmes
1.4.2 Ce que disent les manuels
2 Problématique 
3 Méthodologie 
3.1 Analyse des ressources de la classe
3.1.1 Présentation du fichier autocorrectif pour le Cycle 2
3.1.2 Analyse du fichier
3.2 Les participants à l’étude
3.3 Matériel utilisé
3.4 Objectif de l’étude
3.5 Les observables
4 Conception de l’expérimentation
4.1 Test initial
4.2 Les ateliers de numération
4.2.1 Le jeu de l’oie des échanges
4.2.2 Les exercices corrigés
4.2.3 L’atelier manipulation
4.3 Test final
5 Analyse et Résultats
5.1 Analyse de la réussite aux exercices
5.2 Analyse qualitative
5.2.1 Les types d’erreurs
5.2.2 Analyse des résultats
6 Discussion
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE 
ANNEXES 

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