Comment faciliter l’identification de l’entomofaune ? Construction, évaluation et amélioration de clés d’identification numériques

Décrire, identifier et étudier la biodiversité 

État et enjeux de la biodiversité 

La biodiversité (ou diversité biologique) est la diversité de la vie sur Terre. Le terme ‘’biodiversité’’ est utilisé depuis les années 1980 et l’intérêt pour sa conservation ne cesse de croître, notamment depuis la Convention sur la diversité biologique qui fut adoptée lors du sommet de la Terre à Rio de Janeiro en juin 19921 . La biodiversité s’appréhende à plusieurs échelles : les gènes, les espèces, les écosystèmes. Son importance numérique est très conséquente – entre 1,2 et 1,9 millions d’espèces décrites à ce jour (Chapman 2009, Mora et al. 2011, Fontaine et al. 2012a, Larsen et al. 2017) – et elle est essentielle pour l’homme. D’une part, il s’agit d’un patrimoine naturel que nous devons maintenir et protéger pour des raisons éthiques (Yamin 1995, Tilman 2000). D’autre part, la biodiversité apporte des services aux sociétés humaines sans lesquels ces dernières ne pourraient se maintenir ; c’est ce qu’on appelle les services écosystémiques (nourriture, matériaux, régulation du climat, pollinisation, santé notamment grâce aux plantes médicinales, cycles globaux de l’eau et du carbone – pour ne citer qu’eux) (Costanza et al. 1997, Daily 1997, Worm et al. 2006).

Son importance fondamentale mérite et nécessite que la biodiversité soit étudiée et bien connue. Du fait du nombre colossal d’êtres vivants sur Terre, l’appréhension de leur fonctionnement à de multiples échelles (génétique, physiologie, anatomie et morphologie d’un organisme, population, espèce, écosystème, biome…) et de leurs particularités représente un travail soutenu et continu. Encore aujourd’hui, l’étendue des connaissances restant à acquérir est incommensurable (Jetz et al. 2012, Tyler et al. 2012, Chambers et al. 2017). En ce qui concerne la diversité spécifique, les recherches sont toujours en cours pour mieux évaluer l’importance numérique et la connaissance des millions d’espèces, et de nouveaux taxons sont découverts chaque jour dans le monde – environ 15 000 nouvelles espèces par an (Chapman 2009, Mora et al. 2011, Fontaine et al. 2012a, Larsen et al. 2017).

L’étude des organismes vivants débute par une étape essentielle : savoir sans ambiguïté à quelle espèce (ou groupe d’êtres vivants) appartient le spécimen que l’on souhaite étudier, ou du moins être en mesure de séparer ce spécimen des autres taxons connus (Ruse 1969). C’est ce qu’on appelle l’identification ou la détermination. Une identification incorrecte peut fortement réduire la qualité des résultats d’une étude, ce qui entraîne de sérieuses conséquences lorsque cette dernière nécessite une précision et une fiabilité sans faille, par exemple pour des suivis de biodiversité et études d’impact, des contrôles de populations invasives ou ravageuses de cultures, des diagnostics de santé et soins médicaux (Marshall 2000). Il est donc fondamental d’avoir à notre disposition des outils de qualité pour la détermination des êtres vivants.

Comment décrire et identifier la biodiversité ? 

La taxonomie – la science qui définit, décrit et classe les organismes vivants (Simpson 1961, Mayr 1969) – a grandement bénéficié des avancées technologiques récentes dans le domaine de la biologie moléculaire, et de nouvelles techniques qui ont ouvert d’immenses perspectives pour la description et la classification des organismes. De nombreux taxons peuvent maintenant être identifiés à partir de leur ADN (séquençage, barcoding, ADN environnemental…) (Hebert et al. 2003, Blaxter 2004, Shendure & Ji 2008, Bohmann et al. 2014). Malgré ces nouveaux outils, la méthode d’identification ‘’traditionnelle’’ basée sur des caractères morpho anatomiques reste incontournable (Hillis 1987, Will & Rubinoff 2004, Dayrat 2005, Page et al. 2005). En effet, les bases de données génétiques sont actuellement inexistantes ou très incomplètes pour de nombreux groupes (Padial et al. 2010, Ko et al. 2011, Osmundson et al. 2013, Grattepanche et al. 2018) ; la majeure partie des espèces reste décrite uniquement à partir de caractères morpho-anatomiques. D’autre part, les techniques de séquençage et de barcoding sont encore coûteuses (même si les coûts se réduisent rapidement), et difficiles à utiliser sur le terrain. Les connaissances en morpho-anatomie possédées par les scientifiques et experts amateurs restent irremplaçables pour la description et la détermination de la plupart des taxons (Will & Rubinoff 2004, Cowart et al. 2015). Les deux grandes approches – morpho-anatomique et moléculaire – doivent se compléter pour permettre un travail d’identification le plus fiable et rapide possible.

Parmi les outils facilitant la détermination des spécimens à partir de critères morphoanatomiques, les collections scientifiques de référence sont un ensemble de spécimens conservés, entre autres, au sein des musées d’histoire naturelle partout dans le monde (Shaffer et al. 1998, Suarez & Tsutsui 2004, Lister et al. 2011). Il s’agit historiquement de spécimens matériels – organismes ou parties d’organismes – récoltés et mis en collection depuis des centaines d’années au cours des missions de terrain et expéditions scientifiques, qui peuvent être vivants (graines, microorganismes…) ; mais il existe aussi des collections moléculaires (fragments d’ADN) et immatérielles, comme la Sonothèque du MNHN . Un nom (normalement, avec une nomenclature binomiale d’après le modèle de Linné) est associé à chaque spécimen mis en collection qui a pu être formellement identifié. Un souci actuel est que de nombreux spécimens restent encore à déterminer et identifier dans les collections (Fontaine et al. 2012b). D’autre part, l’utilisation de méthodes moléculaires telles que le barcoding est souvent difficile voire impossible sur des spécimens anciens ou des fossiles.

D’autre part des publications scientifiques de référence en taxonomie (description de nouvelles espèces ou monographies taxonomiques portant sur un taxon de rang supérieur à l’espèce), mais également des ouvrages, souvent richement illustrés, décrivent précisément la morphologie et l’anatomie des spécimens.

Parmi ces ouvrages, les guides naturalistes et de terrain sont conçus pour permettre l’identification d’un spécimen (à des niveaux de précision variables qui peuvent aller jusqu’aux sous-espèces et aux variations phénotypiques observées au sein d’une population), le plus rapidement et/ou aisément possible et en utilisant des caractères observables sur le terrain ou en laboratoire (Law & Lynch 1988). La difficulté d’utilisation, le rang taxonomique, l’étendue de l’aire géographique concernée ainsi que d’autres paramètres, peuvent varier pour chaque guide en fonction du public auquel il s’adresse (professionnels, naturalistes, grand public, scolaires…).

Enfin, il existe les clés d’identification (ou clés de détermination), qui proposent de suivre un chemin d’identification, c’est-à-dire une suite d’étapes au cours de laquelle l’utilisateur de l’outil renseigne les attributs du spécimen observé, caractère par caractère. Les clés d’identification sont souvent intégrées aux publications scientifiques ou aux guides de détermination. Leur objectif est d’aboutir à une détermination la plus précise et correcte possible d’un spécimen en s’attachant à la description de caractères morpho anatomiques particuliers, qui permettent de distinguer efficacement plusieurs spécimens entre eux.

Le contexte actuel de changements climatiques et de crise de la biodiversité au niveau mondial renforce la nécessité de mettre des moyens financiers et humains suffisants pour l’étude approfondie des êtres vivants présents sur Terre (Fontaine et al. 2012a). Scientifiques et experts naturalistes combinent leurs efforts dans cette optique et depuis une trentaine d’années, le grand public est lui-même sollicité pour apporter sa contribution à l’effort général, notamment dans le cadre des sciences participatives.

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Table des matières

Chapitre 1 – Introduction
1.1. Décrire, identifier et étudier la biodiversité
1.1.1. État et enjeux de la biodiversité
1.1.2. Comment décrire et identifier la biodiversité ?
1.1.3. Les sciences participatives : l’implication des citoyens pour l’étude de la biodiversité
1.2. Le cas particulier de l’entomofaune
1.2.1. Les insectes : des organismes clés très diversifiés mais en fort déclin
1.2.2. Les difficultés rencontrées dans l’identification des insectes
1.3. L’entomofaune étudiée dans ce travail de thèse : des organismes d’intérêts variés
1.3.1. Les insectes aquatiques de la région Ile-de-France
1.3.2. Les coccinelles de France métropolitaine
1.3.3. Les insectes pollinisateurs de France métropolitaine
1.4. Objectifs et problématiques de la thèse
Chapitre 2 – Caractéristiques et historique des clés d’identification
2.1 Les clés d’identification à accès simple
2.1.1 Fonctionnement et particularités des clés d’identification à accès simple
2.1.2 A l’origine des clés d’identification à accès simple
2.1.3 Types de caractères utilisés dans les clés
2.1.4 Clés numériques à accès simple
2.2 Les clés d’identification numériques à accès libre
2.2.1 Principes et caractéristiques
2.2.2 Pourquoi ce type de clés ? Avantages et inconvénients des clés d’identification numériques à accès libre
2.2.3 L’apport des clés numériques à accès multiples pour les sciences participatives: l’exemple du Spipoll
Chapitre 3 – Comment construire des clés d’identification numériques ?
3.1 Taxons étudiés et logiciels utilisés
3.1.1 Échantillonnage taxonomique pour l’entomofaune
3.1.2 Xper, une suite d’outils pour la construction et l’analyse de bases de données et de clés d’identification
3.2 Méthodologie pour la construction de clés d’identification numériques sous Xper3
3.2.1 Modèle descriptif
3.2.2 Caractères morpho-anatomiques
3.3 Construction de clés Xper3 pour les insectes dans le cadre de la thèse
Chapitre 4 – Comment évaluer des clés d’identification numériques ?
4.1 Évaluation du contenu des clés d’identification
4.1.1 Contenu général des clés d’identification
4.1.2 Pouvoir discriminant des descripteurs
4.2 Évaluation de l’utilisation des clés d’identification
4.2.1 Le système Xperience
4.2.2 Analyse des démarches d’identification pour la clé Spipoll
4.2.3 Test de l’utilisation de la clé des larves d’odonates d’Ile-de-France
Chapitre 5 – Comment améliorer des clés d’identification numériques ?
5.1 Intégration de critères écologiques dans les clés d’identification
5.1.1 Le cas des larves d’insectes aquatiques : odonates et éphémères
5.1.2 L’apport des critères écologiques
5.1.3 Une étude moléculaire pour affiner les critères écologiques
5.2 Prise en compte de l’expérience des utilisateurs des clés d’identification
5.2.1 Pour la clé ‘’Insectes’’ du Spipoll
5.2.2 Pour la clé des larves d’odonates d’Ile-de-France
5.3 Questionnaire et expérience des volontaires au Spipoll
5.3.1 Contexte
5.3.2 Matériel et méthodes
5.3.3 Résultats et discussion
5.3.4 Pistes d’amélioration de la clé d’identification du Spipoll
Chapitre 6 – Discussion générale et conclusion
6.1 Bilan du travail de thèse
6.2 De nouvelles méthodes d’identification
6.2.1 Les logiciels d’identification automatique
6.2.2 L’identification par séquençage rapide d’ADN
6.3 L’utilisation de critères non morphologiques dans les clés d’identification
6.4 Conclusion

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