Comment définir le bilinguisme ?

La pratique orthophonique se situe au carrefour de plusieurs disciplines : linguistique, psychologie, pédagogie, médecine… C’est à la lueur de ces différents domaines que se constitueront en conséquence les prises en charge. De plus, C. CALBOUR (2006) rappelle que face à la multiculturalité de ses patients « l’orthophoniste doit agir en […] ethnolinguiste respectueux de la langue et de la culture du patient, en éthologue se référant aux comportements spécifiques et au milieu de vie du patient. » En effet, tout thérapeute doit s’adapter à chacun de ses patients, et ces rencontres multiculturelles devraient l’amener à une réflexion sur la diversité et ses effets sur sa pratique clinique. Une attention particulière portée à la singularité de la patientèle immigrée conduira le thérapeute à prendre conscience de toute la richesse que peut représenter la prise en charge d’un trouble porté au cœur d’un multiculturalisme, et bien souvent également d’un bilinguisme.

En parallèle avec l’augmentation de ces situations, la littérature et les recherches autour de la pluriculturalité et de la prise en charge transculturelle se sont de ce fait énormément développées ces dernières années, dans l’optique de parvenir à comprendre et prendre en compte la diversité linguistique et culturelle de la manière la plus adaptée possible. Lors de ces prises en charge est avancée la nécessité toute particulière de se placer dans une coconstruction : ainsi, le thérapeute doit s’attacher à offrir un cadre thérapeutique adapté aux représentations culturelles de sa patientèle. L’intérêt d’une telle démarche s’inscrit dans l’idée que « La réflexion commune sur le sens et les représentations de chacun peut être un véritable moteur pour la rencontre nécessaire au projet de soins. » (P. ANTHEUNIS, F. ERCOLANIBERTRAND, S. ROY, 2012). Si les données culturelles aident à construire la relation entre le thérapeute et son patient, elles peuvent également aider à interpréter certaines difficultés, certains doutes, rencontrés au cours de la prise en charge.

La bibliographie consacrée à la consultation transculturelle a été déterminante dans le choix de la méthodologie. Afin d’établir quels éléments particuliers vont devoir être pris en compte dans la co-construction du cadre thérapeutique, avec une famille issue de l’immigration, il est apparu nécessaire de se fonder sur l’exploitation de sources directes, par l’intermédiaire de questionnaires et d’entretiens semi-dirigés. Leur interprétation visait à répondre à plusieurs interrogations inhérentes au sujet : comment les patients envisagent la prise en charge orthophonique? De quelle manière les troubles sont-ils compris ? Comment, de leur côté, les orthophonistes appréhendent-ils la prise en charge de patients issus de l’immigration?

L’UNESCO définit la culture comme étant « l’ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. » (2001). Ces traits distinctifs englobent un certain nombre de notions : les traditions artistiques, scientifiques, religieuses, politiques, mais aussi les techniques, coutumes et usages. La culture n’est donc ni une nationalité, ni une ethnie. Pour R. CHIANCA, elle « désigne ainsi les modes de vie d’un groupe social, c’est-à-dire ses façons de sentir, d’agir ou de penser, son rapport à la nature, à l’homme, à la technique et à la création artistique » (2010, p.169).

La culture s’établit « dans de multiples situations qui se structurent autour de la rencontre de différences » (O. SCHMITZ, 2013, p.45). S. MOKRANE et C. TILMANSCABIAUX (2013) précisent dans cette même idée que la culture n’est pas quelque chose d’homogène et de figé. Elle est le fruit de rencontres, de négociations entre différents groupes sociaux et donc d’évolutions. Ces rencontres permettent pour les membres d’une communauté « d’établir des rapports entre eux et avec le monde, de communiquer et de développer les capacités créatrices qui existent chez eux. » (O. MAIER, 2012) Cependant, ces différences peuvent également être sources de conflits. Pour F. ROSENBAUM, chaque culture aurait tendance à «imposer une vision normative du monde qui classe souvent les comportements de façon manichéenne et exclusive, ce qui la pousse à imposer ses valeurs à autrui. » (1997, p. 17).

Le regard que l’on porte sur le monde est propre à chaque culture. Elle est un moyen d’appréhender le monde, de donner du sens, et d’interpréter nos expériences. « La culture est ce système d’interprétations, complexe et sublime, qui oublie qu’il en est un » (M-R. MORO, 2010, p.12).

Notre identité culturelle se construit par expériences tout au long de notre développement. Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue que notre construction culturelle débute avant même notre naissance. M-R. MORO parle de « berceau culturel » pour illustrer cette idée. En effet la culture n’a-t-elle pas déjà un impact sur la manière dont la grossesse se déroule, sur la manière dont l’accouchement est abordé ? Cela nous laisse imaginer l’importance que la culture prend au cours de la vie d’un individu². L’arrivée d’une fille ou d’un garçon, par exemple, ne sera pas prise en compte de la même manière selon les cultures, et c’est ensuite toute l’éducation qui en découlera. L’anthropologue M. MEAD avait proposé le terme d’ « enculturation» pour caractériser ce phénomène.

Il existe donc une transmission assurée par les groupes d’appartenance auxquels un individu est rattaché (M-R. MORO, 2002). Tout système culturel engage ainsi des représentations culturelles collectives. L’individu se crée un comportement adéquat afin de s’adapter à son environnement. Cette affiliation au groupe social se fait par la manière de vivre, par les croyances du peuple, mais aussi notamment à travers la langue de l’espace communautaire.

L’appartenance à la culture d’origine est par ailleurs le fruit d’une filiation, interne à la famille. Les parents racontent leur histoire à leurs enfants, de manière plus ou moins explicite et plus ou moins exacte, ou la laissent en proie à l’imagination des enfants. Ces derniers placeront alors cette histoire au cœur de fantasmes et d’hypothèses. (M-R. MORO, 2002) Les représentations culturelles ont donc également un aspect individuel. Elles sont comme l’évoque M-R. MORO, « le résultat de l’appropriation par les individus de systèmes de pensée d’origine culturelle ». Chaque expérience vécue (activités perceptives, cognitives…) est influencée puis interprétée : chacun s’approprie son monde afin de constituer son identité culturelle.

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Table des matières

Introduction
Chapitre I : Le sujet issu de l’immigration
1. La culture
1.1. Définition
1.2. Identité et représentations culturelles
2. Le phénomène de l’immigration
2.1. L’acculturation
2.2. Vulnérabilité de l’enfant issu de l’immigration
Chapitre II : La situation de bilinguisme
1. Comment définir le bilinguisme ?
1.1. Définition générale du bilinguisme
1.2. A quel âge devient-on bilingue ?
1.3. Liens entre les langues constituant le bilinguisme
2. Le développement du langage bilingue
2.1. L’enfant entre langues et langage
2.2. Le développement des différentes composantes linguistiques
3. Conditions au bon développement du bilinguisme
3.1. La langue maternelle au cœur du bilinguisme
3.2. La confrontation à deuxième langue
3.3. La situation de bilinguisme
4. Difficultés de langage chez l’enfant en situation de migration
4.1. Le langage de l’enfant vulnérable
4.2. Langage et psychopathologie
4.3. Prévention des difficultés de langage
Conclusion

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