Comment aborder la prospective énergétique pour l’industrie diffuse

Introduction : intérêt de la modélisation prospective

« Savoir c’est prévoir et prévoir c’est pouvoir». Auguste Comte

Pour reprendre Claude Mandil, le paysage énergétique mondial fait face à trois crises : une crise de l’approvisionnement tout d’abord, une crise climatique ensuite et enfin une crise économique. Cette crise économique a jeté dans la tourmente les marchés énergétiques avec la forte augmentation et la volatilité des prix des énergies contribuant fortement au ralentissement des activités dans le monde. Ainsi l’évolution des perspectives énergétiques dans le futur, dépendra fortement du rythme de la reprise économique. Et comme le rappelle aussi le World Energy Outlook 2010, ce sont les gouvernements et leurs réponses au double défi du changement climatique et la sécurité énergétique qui façonneront l’avenir de l’énergie à plus long terme. Nous constatons donc que les incertitudes auxquelles le monde de l’énergie est confronté, sont sans précédent. C’est pourquoi, avec la croissance des incertitudes, les experts s’accordent à dire que les prévisions énergétiques s’avèrent très difficiles, pénalisant ainsi l’investissement.

Dans ce monde d’incertitude on perçoit bien toute l’importance de la modélisation prospective. Il s’agit via les outils et méthodologies prospectives d’appréhender cette incertitude qui est la marque de l’avenir. La modélisation prospective est ainsi, selon Gaston Berger , une réflexion pour éclairer l’action présente à la lumière des futurs possibles et souhaités [Godet et Durance, 2011].

Il existe de nombreux et différents types de modèles sur lesquels s’appuient les exercices de prospective. Leurs fonction et niveau d’agrégation peuvent être très différents selon leur usage d’une part, et d’autre part on peut constater une disparité au niveau des résultats. Ainsi, nous devons faire face à la question cruciale et délicate qui est de choisir le modèle qui serait le plus adéquat pour répondre à des questions précises.

Le paysage énergétique et environnemental global

Le bilan énergétique…

…Au niveau mondial, une consommation en forte croissance

On constate, d’après le World Energy Outlook 2010, qu’on est face à un monde énergétique en forte croissance depuis 2000. En effet, la demande mondiale en énergie primaire a atteint 12,3 GTep en 2008 avec un taux de croissance annuel moyen de +2,6% depuis 2000 . Les scénarii de projection de l’AIE montrent qu’il devrait avoir néanmoins un ralentissement de cette croissance énergétique à 1,4% par an entre 2008-2020 (avec la reprise économique suite à la crise) et de 0,9% par an sur la période 2020-2035 suite aux effets de la lutte contre le changement climatique et des politiques de sécurisation de l’approvisionnement.

Les combustibles fossiles restent les sources dominantes de l’énergie primaire mondiale, comptant pour environ 86% de l’augmentation totale de la demande énergétique entre 2000 et 2008. Leurs parts dans la demande mondiale est de 81% en 2008, connaissant une augmentation de l’ordre de 1% par rapport à 2000 alors qu’une baisse de 4% était observée entre 1980 et 2000 (Cf. Fig. 1). Les énergies renouvelables hors hydraulique et biomasse ( « autres renouvelables » englobant la géothermie, le solaire, l’éolien, énergie marine) connaissent la plus forte croissance (+6,2% par an) entre 2000 et 2008. Le taux de croissance annuel du charbon est aussi important de l’ordre de 4,7%, suivi du gaz naturel et l’hydraulique respectivement 2,8% par an et 2,6% par an) alors que celui du pétrole est de 1,3% par an.

En raison des caractéristiques écologiques et pratiques, et la mise en place de politiques de déploiement de technologies de moins en moins polluantes, la croissance du gaz naturel devrait connaitre une plus forte progression face aux autres combustibles. L’augmentation de la demande en énergie primaire constatée sur la période 2000-2008, provient essentiellement des pays non membres de l’OCDE (la Chine et l’Inde représentant à eux seuls environ 65% de cette augmentation) qui deviennent collectivement d’ailleurs les plus gros consommateurs d’énergie avec un poids d’environ 55%. Et cela s’explique par l’explosion de la demande de la Chine (qui a quasiment doublé entre 2000- 2008) et de l’Inde. Dans la Fig. 2 où nous représentons la répartition géographique de la demande en énergie  primaire, nous constatons que l’Europe pointe à la troisième place avec 15% derrière l’Amérique du Nord (23%) et la région Asie et Océanie (37% soit respectivement 29,7% et 7,3%).

L’intensité énergétique : l’industrie, leader de la performance énergétique

Identiquement à l’indicateur intensité énergétique primaire, nous avons également défini le rapport entre la consommation d’énergie finale et le produit intérieur brut (PIB) que nous appelons l’intensité énergétique finale (IEF) du PIB. On évalue ainsi le degré de découplage de la croissance économique de la consommation énergétique finale de l’économie d’un pays. Son évolution relève du degré de modifications de la structure des activités économiques ou de pénétration de nouvelles technologies « plus performantes et sobres » (progrès technique), donc d’efficacité énergétique.

Le poids des industries grosses consommatrices d’énergie (IGCE) constitue également un déterminant important d’un fort contenu énergétique du PIB du fait de la proportion très élevée de leurs coûts énergétiques dans les coûts de production (sidérurgie, papier et carton, minéraux non métalliques (verre, ciment…)…etc.). Ainsi, nous distinguons deux types d’industries de caractéristiques bien différentes sous le terme Industrie : IGCE (Industrie Grande Consommatrice d’Energie) et l’Industrie Diffuse (ID) qui se caractérise habituellement par opposition à l’industrie énergivore. Cette segmentation repose pour la plupart sur des considérations historiques d’appartenance (comme le cas de la sidérurgie, papier, chimie). C’est pourquoi nous verrons d’ailleurs dans le chapitre suivant une méthodologie de segmentation de l’Industrie en veillant à regrouper sous un choix de critères pertinents l’ensemble de l’industrie diffuse, sans interférer avec les IGCE mais sans laisser de coté une classe de consommateurs. Cette distinction découle surtout du fait que chaque famille possède sa propre structure et ses caractéristiques particulières imposant ainsi une modélisation différente adaptée à chacune d’elle. Dans cette partie, la sidérurgie, la chimie, le papier et carton, et les minéraux non métalliques (verre, ciment, chaux, plâtre etc…) sont regroupés dans les IGCE alors que le reste de l’industrie sera considéré par défaut dans l’ID (regroupement basé sur des considérations historiques d’appartenance) .

Impact sur l’environnement

Le Sommet de Copenhague (15ème Conférence des Parties ou COP 15) sur la lutte contre le changement climatique a permis aux décideurs de s’accorder sur la nécessité de limiter la hausse des températures à +2°C suite aux recommandations du GIEC. Cela implique finalement que le protocole de Kyoto demeure le seul instrument légalement contraignant sur les émissions de gaz à effet de serre (GES) des pays industrialisés [SOeS, 2010]. Dans le cadre du protocole de Kyoto, l’Union Européenne a pour objectif de réduire de 8% ses émissions de CO2 d’ici à 2012 par rapport à 1990 avec un objectif pour la France de stabiliser ses émissions sur cette même période.  En 2008, le paquet Energie-Climat a été adopté par l’UE définissant une politique européenne commune avec pour objectif ambitieux d’atteindre d’ici 2020, la réduction de 20% des émissions de GES d’ici 2020 par rapport au niveau de 1990, l’augmentation de 20 % de la part des ressources renouvelables en 2020 et l’amélioration de 20 % de l’efficacité énergétique par rapport aux projections établies à l’horizon 2020 : c’est l’objectif « 20/20/20 ». Ainsi, l’industrie constitue un acteur clé pour aider à atteindre ces objectifs en France. Elle représente environ 24% des émissions totales de GES en 2008, soit une baisse de 16,4% par rapport au niveau de 1990 [CITEPA, 2011]. L’industrie diffuse constitue environ 35% de ces émissions.

Le panorama qui vient d’être dressé ci-dessus permet de bien mettre en exergue toute l’importance de l’industrie diffuse sur le plan économique, énergétique et environnemental. Néanmoins, il est d’autant plus important de constater que ces secteurs ont peu été traités dans les analyses énergétiques malgré le nombre considérable d’articles et de livres sur l’énergie et l’intérêt des politiques en matière d’efficacité énergétique. Elle renferme une part importante de gisements d’autant plus que le très faible poids des coûts énergétiques dans la production ainsi que le fait qu’il ne soit pas couvert par l’EU-ETS n’incite guère les acteurs du secteur à mettre en place des politiques énergétiques et environnementales.

Le recours à la modélisation prospective s’avère ainsi pertinent afin de mesurer l’apport de l’industrie diffuse dans les engagements pris par la France et l’Union Européenne en matière de consommations énergétiques et d’émissions de CO2. Néanmoins une des questions cruciales est de déterminer le modèle le plus adéquat à la description de cette industrie caractérisée par l’hétérogénéité de ses opérations et ses produits.

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Table des matières

Introduction Générale
1. Contexte
2. Intérêt de la modélisation prospective
3. Organisation du document
CHAPITRE 1 : Comment aborder la prospective énergétique pour l’industrie diffuse
1. Introduction : intérêt de la modélisation prospective
2. Le paysage énergétique et environnemental global
2.1. Le bilan énergétique…
2.1.1. …Au niveau mondial, une consommation en forte croissance.
2.1.2. …En Europe, une économie énergivore avec une dépendance énergétique de plus en plus croissante.
2.2. La problématique mondiale du réchauffement climatique
2.3. Importance énergétique des secteurs économiques : le cas particulier de l’industrie diffuse dans l’industrie.
2.3.1. De l’énergie primaire à l’énergie finale.
2.3.2. L’intensité énergétique : l’industrie, leader de la performance énergétique.
2.3.3. Impact sur l’environnement
2.3.4. Conclusion
3. Les modèles pour les exercices de prospective.
3.1. Modèles “Top-Down” (TD) et “Bottom-Up” (BU)
3.1.1. Modèles Top-Down « TD »
3.1.2. Modèles Bottom-Up « BU »
3.1.3. Quel serait l’approche la plus adéquate aux enjeux énergétiques de l’industrie diffuse?
4. Le modèle TIMES industrie
4.1. La structure du modèles TIMES
4.1.1. Les entrées du modèle
4.1.1.1. La demande
4.1.1.2. L’offre
4.1.1.3. Définition des politiques énergétiques
4.1.2. Le système énergétique de référence (RES)
4.1.3. Les attributs de TIMES (paramètres)
4.1.3.1. Les paramètres associés aux technologies
4.1.3.2. Les paramètres associés aux commodités
4.2. Formulation mathématique du modèle TIMES industrie.
4.2.1. Les variables de décision
4.2.2. La fonction-objectif de TIMES : coût total du système actualisé.
4.2.3. La définition des contraintes
5. Conclusion
6. Bibliographie
CHAPITRE 2 : Méthodologie de modélisation pour l’industrie diffuse
1. Introduction : l’industrie diffuse, un périmètre si diffus
2. Segmentation de l’Industrie : des frontières floues…
2.1. Le périmètre Industrie considéré…
2.1.1. …Quelle nomenclature d’activités pour la segmentation.
2.1.2. …Cadrage au niveau sectoriel.
2.2. Comment définir l’industrie diffuse dans ce périmètre Industrie?
2.2.1. Définition des groupes homogènes de secteurs industriels
2.2.1.1 La Classification Ascendante Hiérarchique (CAH)
2.2.1.2 Validation des résultats – Confrontation avec la méthode K-means.
2.2.2. Définition des frontières de l’industrie diffuse dans l’Industrie.
3. Structuration de l’industrie diffuse
3.1. Hétérogénéité de l’industrie diffuse : une myriade d’opérations et de produits
3.1.1. La disparité de la consommation énergétique
3.1.2. Une myriade d’opérations et de produits
3.2. Etablissement d’un modèle sectoriel de l’ID : une modélisation par usages
3.3. Choix de l’indicateur de la demande : une caractérisation primordiale
3.3.1. L’Indice de la Production Industrielle (IPI)
3.3.2. Indicateur économique
3.3.3. Conclusion
3.4. L’effet de structure
3.4.1. Méthodologie d’évaluation de l’effet de structure dans l’industrie
3.4.2. Analyse de son impact dans l’évolution de la performance énergétique
3.4.3. Conclusion
3.5. Le choix du niveau de désagrégation : un compromis…
4. Structure de l’industrie diffuse dans TIMES
4.1. La modélisation des technologies de chaudières, turbines et cogénérations.
4.1.1. Méthode de prise en compte du paramètre pertes chaufferie dans chaque type de chaudière.
4.1.2. Méthode attribution des paramètres (durée de vie, disponibilité) à chaque type de chaudière, turbine ou cogénération
4.2. Les données : un point crucial dans la modélisation prospective.
5. Conclusion
6. Bibliographie
CHAPITRE 3 : Etude d’un cas: Les Pompes à Chaleur dans l’Agroalimentaire.
1. Introduction
2. Description des scénarii pour la démarche prospective
3. Hypothèses de modélisation communes retenues
3.1. Evolution de la demande dans l’agroalimentaire
3.2. Scénarii de prix des énergies
3.3. Optimisation des choix d’investissements énergétiques : quel taux d’actualisation choisir ?
3.4. Les autres hypothèses
4. La pompe à chaleur industrielle (PAC)
4.1. Schéma de principe d’une pompe à chaleur
4.2. Caractéristiques des pompes à chaleur industrielles
4.2.1. Intérêt économique
4.2.2. Intérêt environnemental
4.3. Hypothèses d’intégration des PACs dans le modèle TIMES
4.3.1. Les tranches de températures et COP retenus
4.3.2. Les coûts d’investissement retenus
5. Résultats d’ensemble
5.1. Impact de l’implantation des Pompes à Chaleur (PACs) dans l’agroalimentaire
5.1.1. Profil d’évolution des consommations énergétiques
5.1.2. Profil du potentiel de récupération de chaleur
5.1.2.1. …dans l’industrie agroalimentaire au niveau global.
5.1.2.2. …au niveau désagrégé sectoriel
5.1.2.3. La rentabilité des PACs
5.1.3. Profil d’évolution des gisements d’économies en énergie
5.1.4. Impact des PACs sur les émissions de CO2
5.1.5. Conclusion
5.2. Gisement supplémentaire atteignable avec les PACs grâce à certaines mesures de soutien
5.2.1. Effet d’une valorisation des émissions de CO2
5.2.2. Politique d’incitation dans le cadre de Certificats d’Economies d’Energie (CEE).
5.3. Analyse de sensibilité de notre modèle TIMES-industrie diffuse sur l’implantation des PACs dans l’agroalimentaire.
5.3.1. Influence du choix du taux d’actualisation
5.3.2. Influence de l’évolution du prix du gaz naturel
5.3.3. Influence du contenu carbone de l’électricité
6. Conclusion
7. Bibliographie
CONCLUSION GENERALE

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