Collagène hydrolysé et santé osseuse

Les cellules osseuses

Le remodelage osseux dépend de trois grands types cellulaires: les ostéoblastes, les ostéoclastes et les ostéocytes, dont les activités sont interreliées En effet, les ostéoblastes modulent l’activité ostéoclastique par le complexe de l’activateur du récepteur du ligand NFκB et de son ligand (RANK/RANKL) (Katagiri et Takahashi, 2002), tandis que les ostéocytes modulent à la fois l’activité ostéoblastique et ostéoclastique.

– Les ostéoblastes synthétisent la matrice osseuse nouvelle.

Les ostéoblastes (figure 4) sont des cellules mononuclées responsables de la formation de la matrice osseuse. Le noyau, volumineux, ne contient habituellement qu’un seul nucléole bien visible. Elles dérivent des cellules souches mésenchymateuses pluripotentes d’origine fibroblastique (CFU-F ou colony-forming unit-fibroblast) localisées au niveau de la moelle osseuse. Ces cellules souches peuvent aussi se différencier en adipocytes, chondrocytes, myoblastes et fibroblastes selon les facteurs de transcription exprimés. Le premier précurseur des ostéoblastes subit plusieurs transformations avant de devenir un ostéoblaste mature. Les préostéoblastes ont toujours la capacité de se diviser, contrairement aux ostéoblastes matures dont la fonction première est de synthétiser la matrice osseuse. Les ostéoblastes matures deviennent ensuite des ostéocytes, des cellules bordantes ou subissent une apoptose (50 à 70 % des cellules).

L’ostéoblastogenèse est régulée par la voie Wnt qui module la différenciation pré-ostéoblastique et leur prolifération. La fixation de Wnt aux récepteurs intramembranaires ostéoblastiques Frizzled (Fz) et LRP5/6 induit une réaction en cascade qui entraîne une accumulation de β-caténine dans le cytosol. La β-caténine va alors induire la transcription des gènes cibles au niveau du noyau (Caetano-Lopes et al, 2007). Cette voie module la transcription de deux facteurs, Cbfa-1 et Osterix (Osx), essentiels à la différenciation ostéoblastique. En outre, Cbfa-1 module l’expression de l’ostéocalcine. De plus, il semblerait que la voie Wnt / β-caténine inhibe l’ostéoclastogenèse par la régulation transcriptionnelle de l’OPG (Krishnan et al., 2006), et inhibe la transcription des facteurs intervenant dans l’adipogenèse. L’activation inappropriée de la voie Wnt semble intervenir dans l’apparition de l’ostéoporose (Cadigan et Liu., 2006).

Des travaux (Stein et Lian, 1993; Owen et al., 1991; Quarles et al., 1992) ont montré que l’activité des ostéoblastes compte trois phases: une phase de prolifération, suivie d’une phase de formation de la matrice protéique, synthèse du collagène de type I et des protéoglycanes, et enfin une phase de minéralisation de la matrice osseuse, synthèse de l’hydroxyapatite. Plusieurs hormones et cytokines interviennent dans la différenciation cellulaire, tel que le transforming growth factor TGF-β qui est stocké sous forme latente dans la matrice osseuse et relargué pendant la phase de résorption de celleci. L’interaction entre le TGF- β et son récepteur ostéoblastique stimule la production du collagène de type I et des protéoglycanes mais inhibe la formation d’hydroxyapatites.

– Les ostéoclastes résorbent et détruisent le tissu osseux.

Les ostéoclastes (figure 5), assurant la résorption du tissu osseux, sont des cellules géantes possédant plusieurs noyaux qui proviennent des cellules souches de la moelle osseuse hématopoïétique. Elles forment en 2 à 4 semaines une cavité dans les os minéralisés, la lacune de Howship ou lacune de résorption. La différenciation des ostéoclastes nécessite des interactions entre les cellules stromales (BMSCs ou Bone Marrow Stromal Cells) et les ostéoblastes. En effet, les cytokines RANKL (Receptor Activator of Nuclear Factor κB) exprimées par les ostéoblastes et le M CSF (Macrophage Stimulating Factor) exprimé par les cellules stromales sont indispensables à la différenciation des CFU-GM (Granulocytes and Macrophage Colony-Forming Unit) , premier précurseur des ostéoclastes, en ostéoclastes matures. Le récepteur à la calcitonine (CTR), la TRAP (Acide Phosphatase Tartrate Resistant) et le VNr (Vitronectin Receptor) sont des marqueurs des ostéoclastes. Les ostéoclastes résorbent le tissu osseux par deux actions distinctes (figure 6) : solubilisation des sels de calcium par la sécrétion d’acides organiques et résorption de la matrice organique par la sécrétion de collagénases et enzymes protéolytiques. L’ostéoclasie a lieu à l’interface de la surface osseuse et de la cellule (Teitelbaum, 1996; Baron, 1996). Les ostéoclastes assurent une baisse du pH au niveau de la zone de résorption en relargant des ions hydrogènes par des pompes ATPases permettant la dissolution des minéraux de la matrice osseuse, et exposant ainsi la matrice organique aux enzymes protéolytiques, telles que les collagénases et les cathepsines. Les ostéoclastes sécrètent alors des métalloprotéases, principalement des collagénases (Teitelbaum et al., 2000), et des enzymes lysosomiales, principalement des phosphates acides, sulfates, glucuronidases, glycérophosphates, cystéines et différentes protéinases (Zhao et al., 2009), dans le compartiment de résorption ostéoclastique. Les ostéoclastes migrent sur la matrice osseuse, multipliant les zones de résorption, jusqu’à leur entrée en apoptose (Nakamura et al.,1999). L’ostéoclasie libère le TGF-β prisonnier de la matrice osseuse, qui va alors activer la phase de sécrétion minérale des ostéoblastes en se liant à son récepteur ostéoblastique.

Les ostéocytes, régulateurs de l’activité ostéoblastique et de l’ostéoclasie

Les ostéocytes, type cellulaire majoritaire de l’os (90 % des cellules), sont des ostéoblastes devenus prisonniers de la matrice osseuse. Les ostéocytes réguleraient l’activité ostéoblastique et ostéoclastique (Hartmann, 2006). De fins prolongements cytoplasmiques des ostéocytes s’étendent dans les canalisations qui rayonnent autour des ostéoplastes. Dans l’os en cours de développement, les prolongements des ostéocytes s’étendent de façon à ce qu’il y ait contiguïté et donc communication entre les ostéocytes voisins et les ostéoblastes. Dans l’os adulte, les prolongements se rétractent presque complètement, mais les canicules persistent afin de fournir un passage pour les échanges de métabolites entre la circulation sanguine et les ostéocytes (Nijweide et al, 1996). Ils participeraient aussi à la mécanotransduction dans l’os (Adachi et al., 2009 ; Jiang et al., 2007).

Lors de la phase de sécrétion de la matrice protéique par les ostéoblastes, certaines de ces cellules se retrouvent emprisonnées par la matrice osseuse, et se différencient en préostéocytes. Ces cellules sont non prolifératives, et sécrètent la phosphatase alcaline, l’ostéocalcine, et des protéines de la matrice osseuse, telle que le collagène de type I. En parallèle de la phase de minéralisation de l’ostéoide, les préostéocytes se différencient en ostéocytes matures, qui n’expriment plus la phosphatase alcaline et secrètent de faibles taux d’ostéocalcine et de protéines de la matrice osseuse (Gehron et al., 1992). Cependant, ces cellules restent sensibles à la PTH, et expriment les récepteurs aux œstrogènes (Komm and Bodine, 2001).

Epidémiologie

« L’ostéoporose constitue, à l’heure actuelle, un problème de santé publique considérable tant par la proportion croissante de femmes qui en est atteinte que par ses répercussions sur la qualité de vie des patients » (INSERM, 1996). Il existe deux types d’ostéoporose :
– L’ostéoporose de type I, conséquente à la baisse du taux d’œstrogène due à l’apparition de la ménopause.
– L’ostéoporose de type 2, ou ostéoporose sénile, qui concerne les deux sexes après 70 ans. Sa fréquence augmente avec l’âge. Elle est aggravée par plusieurs facteurs : sédentarité, absence d’exposition à la lumière naturelle du soleil (qui permet la synthèse de la vitamine D par la peau), manque de calcium, régime pauvre en protéines. L’ostéoporose peut aussi être causée par un excès d’hormones thyroïdiennes, et peut être aggravée par la consommation d’alcool et de tabac.

En France, on estime qu’il y a environ chaque année 150 000 nouveaux cas de fractures des vertèbres, dont un tiers seulement est diagnostiqué, et 50 000 fractures de l’extrémité supérieure du fémur. Après 50 ans, 40 % des femmes feront une ou plusieurs fractures liées à une fragilité osseuse; et après 80 ans, 70 % des femmes souffrent d’ostéoporose. Selon la Fondation Internationale contre l’Ostéoporose, (International Osteoporosis Foundation), l’ostéoporose concerne 75 millions de personnes en Europe, Etats Unis et au Japon (Fontanas and Delmas, 2001). Il existe moins de données concernant l’ostéoporose chez les hommes, et il semble que ce phénomène soit négligé devant l’importance de ce problème chez la femme (Wang et al., 1997). Cependant, plusieurs études épidémiologiques ont montré qu’il y a une augmentation de cas chez les hommes, et il semble que certaines fractures arrivent plus fréquemment chez l’homme que chez la femme avant 45 ans (Kudlacek et al., 2000).

Variables géographique et environnementale 

Le risque de développer une ostéoporose varie en fonction de la localisation géographique des individus (Bacon et al., 1996). Le risque de fracture de la hanche est plus élevé chez les patients caucasiens scandinaves que chez les patients d’amérique du nord ou d’océanie (Johnell et al., 1992, Maggi et al., 1991 ). Au sein même de l’Europe, le risque de fracture peut varier d’un facteur sept d’un pays à l’autre (Ellfors et al., 1994). Ce facteur géographique dépend non seulement du facteur génétique mais également des facteurs environnementaux. Ainsi, 17 % des femmes caucasiennes post ménopause aux USA, 12 % des femmes d’origine hispanique et 8% des femmes d’origine africaine présentent une fracture de la hanche. Les principaux facteurs environnementaux pouvant moduler l’incidence de l’ostéoporose sont : les habitudes de vie en général, la qualité de l’eau à disposition (et sa composition minérale), l’exposition au soleil, le taux de pauvreté, les habitudes alimentaires et la proportion de l’espace agricole du pays (et donc la disponibilité des aliments). Notons aussi que le risque diffère selon l’origine rurale ou urbaine des individus (Gardsell et al., 1991).

Les facteurs peuvent aussi varier en fonction de la zone du squelette étudiée. Il existe des facteurs aggravants communs. De nombreuses études ont montré que la sédentarité joue sur l’apparition de l’ostéoporose en diminuant la densité osseuse (pas de pression mécanique exercée régulièrement au niveau de l’os), mais aussi en augmentant le risque de chute (perte d’agilité) (Joakimsen et al., 1997 ; Berard et al., 1997 ; Marcus , 1996). D’autres travaux ont montré que l’immobilisation de volontaires sains provoque une diminution de leur masse osseuse (Marcus R, 1996), tandis que les gymnastes adultes ont une densité de masse osseuse en moyenne plus élevée comparée au reste de la population. Les exercices à fort impact sur le squelette sont en général recommandés (Bass et al., 1998 ; Bradney et al., 1998). La consommation d’alcool ou de cigarettes constitue un facteur aggravant. Des études ont montré qu’en l’absence de différence notable sur la densité osseuse de patients fumeurs ou non fumeurs avant 50 ans, la densité osseuse chez les fumeurs décroît, tous les 10 ans, de 2 % de plus par rapport aux sujets non fumeurs. L’effet de la cigarette sur la DMO s’expliquerait par son rôle sur la perte de poids, et sur le métabolisme des oestrogènes. L’alcool entraînerait une diminution de la DMO en modulant le métabolisme des protéines et du calcium, en augmentant l’immobilité du patient, en modulant ses fonctions gonadales et en ayant un effet toxique direct sur les ostéoblastes, mais son effet reste controversé (Seeman, 1996; Naves-Diaz et al., 1997). Un index de masse corporel (IMC), comme une perte de poids importante, entraîne une diminution de l’acquisition de la masse osseuse et une perte osseuse accélérée. (Burger et al., 1998, Dennison et al., 1999, Ensrud et al., 1997). Cet effet serait dû à la réduction de la production d’oestrogènes par les tissus adipocytaires chez la femme. Notons que l’anorexie nerveuse, qui provoque une aménorrhée chez la femme, augmente le risque de développer une ostéoporose chez les patients. Tous les facteurs influençant le cycle des hormones sexuelles sont en général à risques : hypogonadisme, apparition prématurée de la ménopause chez la femme (chirurgie), prise de contraceptifs, autres facteurs alimentaires.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
1. L’OSTEOPOROSE
1.1 : Définition
1.2: Les cellules osseuses
1.3: Epidémiologie
1.4 : Facteurs de risque
1.4.1 : Déterminisme génétique
1.4.2 : Variables géographique et environnementale
1.4.3 : Facteurs nutritionnels
1.4.3.a Calcium
1.4.3.b Vitamine D
1.4.3.c Protéines
1.4.3.d Phosphate, vitamine K, magnésium
2. LES PROTEINES ET LA SANTE OSSEUSE
2.1.1 : Impact controversé de la prise protéique sur la santé osseuse
2.1.2 : Un régime hyperprotéique entraine une augmentation de la charge acide dans l’organisme
2.1.3 : La prise protéique augmente le taux circulant de IGF-1
2.1.4 : Modulation de la balance calcique par les protéines alimentaires
2.1.5 : Intéraction des protéines et de la matrice alimentaire
2.1.6 : La nature des protéines différencie leurs rôles sur le métabolisme osseux
2.2 : Le collagène
2.2.1 : Définition du collagène
2.2.2 : Collagènes hydrolysés et gélatines industrielles
2.2.3 : Quelques utilisations intéressantes des collagènes et gélatines hydrolysés
2.2.4 : Etude de non toxicité
2.2.5 : Collagène hydrolysé et ostéoporose
2.2.5.a Descriptions de quelques études in vivo
2.2.5.b Analyse critique de ces études
2.2.5.c Mécanisme d’action
MATERIEL ET METHODE
I PRESENTATION DES MODELES
1.1 Modèle in vivo
1.1.1 Choix de l’animal
1.1.2 Simulation de l’ostéoporose
1.1.3 Paramètres étudiés
1.1.3.a : Mesure de la densité minérale osseuse
1.1.3.b : Marqueurs du remodelage osseux
1.1.3.c : microarchitecture
– Propriétés extrinsèques et intrinsèques de l’os
1.1.3.d : Evaluation des paramètres biomécaniques de l’os
– Test flexion trois points : connaissances actuelles
– Présentation du test
– Paramètres géométriques
– Force et déplacement ou paramètres extrinsèques
– Contrainte et déformation ou paramètres intrinsèques
– Viscoélasticité du tissu osseux
1.2 : Protocole expérimental
1.2.1 : Animaux et régimes
1.2.2 : Paramètres mesurés
2.1 : Modèle in vitro
2.1.1 Généralités
2.1.2 : Etude de la biologie des ostéoclastes et ostéoblastes
2.2. Protocole expérimental
RÉSULTATS DE NOS ÉTUDES
1. EFFECT OF INGESTED HYDROLYZED COLLAGEN ON BONE METABOLISM AND BIOMECHANICAL PARAMETERS
2. HYDROLYZED COLLAGEN IMPROVES BONE STATUS AND PREVENTS BONE LOSS IN OVARIECTOMIZED C3H/HEN MICE73
DISCUSSION
CONCLUSION GENERALE

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