Collaboration humain-machine à l’aide de motifs dialogiques pour la réalisation d’une tâche complexe

À l’origine réservés à un public restreint et à la résolution d’un petit nombre de problèmes, l’accès et l’utilisation de l’intelligence artificielle se banalisent chaque jour un peu plus. De nombreux domaines sont investis par des machines intelligentes qui transforment nos modes de vie et de pensée, que ce soit au travail, à la maison ou dans nos loisirs. La résolution d’un problème complexe peut être partagée entre les humains et les machines, chacun réalisant les actions pour lesquelles il est le plus performant, capacités de résolution de l’humain ou de la machine pris indépendamment.

Dans le même temps, la montée en puissance des technologies de l’information et de la communication et la complexification des systèmes que nous utilisons a fait croître la quantité d’information que nous avons à traiter. Ces avancées poursuivent le bouleversement du lien existant entre un être humain et les machines avec lesquelles il interagit, amorcé dans les années 60 avec l’émergence de l’interaction humain-machine comme domaine de recherche [Eng62, EE68]. Ce changement donne l’opportunité de continuer de faire évoluer la relation que les humains entretiennent avec les machines en offrant à celles-ci des capacités d’interaction et de prise d’initiative plus naturelles.

Réalisation collaborative de tâche 

« La pierre n’a point d’espoir d’être autre chose que pierre. Mais, de collaborer, elle s’assemble et devient temple. » Antoine de Saint-Exupéry, Citadelle – LXXXVII .

L’orientation suivie par les approches collaboratives humain-machine partent du principe que les humains et les machines ont des compétences complémentaires. Plutôt que de les mettre en concurrence, cette complémentarité permet de développer des situations où les humains et les machines vont s’apporter un soutien mutuel. En d’autres termes, les machines collaboratives n’ont pas vocation à remplacer des êtres humains mais à réaliser une tâche avec eux. Dès le début des années 70, Negroponte [Neg70] a donné une vision de la manière dont des humains et des machines « intelligentes » peuvent s’associer pour concevoir des projets architecturaux. Il imagine des machines capables d’apprendre et de s’adapter en dépassant le paradigme de l’exécution répétitive de tâches automatiques. La relation entre un humain et une machine ne serait donc plus de maître à esclave, mais entre deux associés permettant un développement et un apprentissage mutuel. Pour lui, l’intérêt de coopérer avec une machine est la complémentarité des points de vue et des traitements que chacun peut apporter au problème à résoudre, l’humain et la machine ayant des représentations et des modes opératoires radicalement différents. Kay [Kay89] est l’un des premiers a avoir eu l’intuition d’une communication avec des machines qui agiraient comme des guides, des entraîneurs ou des assistants dans ce qu’il a appelé une grande collaboration. La vision de Kay est de tenir compte des processus cognitifs de l’utilisateur lors de la conception de l’interface d’un programme pour améliorer la communication entre le programme et l’utilisateur.

Définition de la collaboration

La caractérisation de la collaboration et l’identification des ses différentes formes et propriétés a fait l’objet de nombreuses études dans des domaines variés comme les sciences sociales, la psychologie et l’intelligence artificielle. Préalablement à la présentation de notre vision de la collaboration, nous définissons le concept d’interaction :

Définition 1.1 – Interaction : « Les interactions sont des événements réciproques nécessitant au moins deux objets et deux actions. Elles ont lieu quand ces objets et événements s’influencent mutuellement. » ([Wag94], p.8) .

Tout échange qui n’est pas à sens unique entre au moins deux entités et ayant une influence sur ces entités est donc perçu comme une interaction. Nous cherchons maintenant à décrire ce qui fait la particularité de la collaboration en tant qu’interaction. Ses définitions et les concepts qui s’y rattachent ne font pas forcément consensus au sein des différentes communautés de la recherche [WG91] et sont parfois contradictoires. Nous essayons dans un premier temps, en section 1.1.1, de donner une définition générale de la collaboration et des concepts qui y sont liés, en la différenciant des notions de communication, contribution, coopération et de coordination, dans un contexte humain-humain.

Concepts liés à la collaboration

Le bénéfice apporté par la collaboration peut se rattacher au concept d’intelligence collective, qui suppose que la capacité à prendre de bonnes décisions émerge d’un groupe plutôt que de quelques personnes éclairées [Sur05]. Autrement dit, la mise en commun de différents points de vue et expertises individuelles apporte un profit mutuel [FBP+00]. Les problèmes difficiles, interconnectés et évolutifs nécessitent la création d’une relation élaborée et dynamique entre ceux qui essaient de les résoudre, amenant à la formation d’un groupe dont le résultat dépasse le cumul des contributions individuelles [TPRG98]. C’est ce qui est décrit par Gray [Gra89] comme établissant « un compromis qui permet aux parties prenantes de concevoir des solutions qui n’auraient pas été accessibles si elles avaient travaillé indépendamment » (cité dans [Sha12]) et est résumé par Shah et González-Ibáñez sous le nom de synergie [SGI11].

Roberts [Rob00] classifie les problèmes en trois degrés de difficulté :

Un problème simple – sa définition et sa solution font l’objet d’un consensus entre toutes les personnes concernées ;
Un problème complexe – sa définition fait l’objet d’un consensus mais les solutions et leurs mises en œuvre sont sources de conflits ;
Un problème « confus » ou « épineux » – sa définition n’est ni définitive ni unanime et est sujette à controverse. La recherche de solution est ouverte et change selon la définition du problème et celui qui cherche une solution. Le processus de résolution ainsi que les ressources disponibles sont contraints et changent constamment. En cours de résolution, les parties prenantes peuvent s’associer et se dissocier du problème et de sa résolution, changer d’avis et échouer à communiquer.

London [Lon95] ajoute des caractéristiques aux problèmes de cette dernière catégorie : les parties prenantes sont interdépendantes et ne sont pas clairement identifiées ou organisées à priori. La répartition du pouvoir ou des ressources entre leurs mains est hétérogène. Leur degré d’expertise et niveau d’accès à l’information du problème est variable. Les différentes perspectives sur le problème mènent à des relations conflictuelles. Le problème est souvent caractérisé par une complexité technique et une incertitude scientifique. Les efforts unilatéraux ainsi que les méthodes existantes pour résoudre le problème produisent des résultats qui ne sont pas satisfaisants. Face à un problème de cette catégorie, le travail collaboratif n’est pas forcément la première option envisagée et est précédé par des méthodes compétitives ou autoritaires [DY08, Rob00]. C’est seulement une fois que ces deux méthodes ont échoué que « les gens tombent dans la collaboration »  [Rob00]. Même si certains auteurs utilisent indifféremment «collaboration », « coopération » et « coordination » pour se référer à un même concept [Sha14], d’autres cherchent à nuancer leur définition.

Taylor-Powell et al. [TPRG98] donnent le modèle des « 5-C » : communication, contribution, coordination, coopération et collaboration. Ce modèle reprend la définition de Gray en y ajoutant la mise en œuvre des solutions trouvées.

Les auteurs donnent les définitions suivantes pour les concepts du modèle :
Communication – processus basé sur l’échange d’informations et de sens. C’est par la communication que s’établit l’interaction entre les interlocuteurs.
Contribution – relation informelle entre les parties au cours de laquelle celles-ci s’apportent des ressources et du soutien nécessaires pour atteindre leurs objectifs, indépendants de ceux des autres.
Coordination – un processus de communication, de planification, de partage de ressources, de risques et de récompenses dans un but d’efficience et d’efficacité pour atteindre les buts complémentaires des parties concernées.
Coopération – un processus où les parties ayant des intérêts similaires planifient ensemble, négocient des rôles mutuels et partagent des ressources pour atteindre des buts communs tout en conservant des identités distinctes.

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Table des matières

Introduction
I État de l’art
1 Réalisation collaborative de tâche
1.1 Définition de la collaboration
1.1.1 Concepts liés à la collaboration
1.1.2 Mise en œuvre et limitations de la collaboration
1.2 Collaboration humain-machine
1.2.1 Les agents autonomes
1.2.2 Les agents d’interface
1.2.3 Les agents autonomes d’interface
1.2.4 Les agents collaboratifs
1.2.5 Problèmes soulevés par la collaboration humain-machine
1.3 Stratégies pour un agent collaboratif
1.3.1 Approches par plan
1.3.2 Approches cognitives
1.4 La recherche d’information collaborative
1.4.1 Le processus de recherche d’information
1.4.2 Caractérisation d’une recherche d’information collaborative
1.4.3 Mise en œuvre de la RIC
1.4.4 Avantages et limites de la RIC
1.4.5 Vers un modèle d’agent collaboratif pour la recherche d’information
1.5 Synthèse
2 Modèles formels des interactions dialogiques
2.1 Fondements sur le dialogue
2.1.1 Caractérisation du dialogue
2.1.2 Le dialogue comme projet conjoint opportuniste
2.1.3 Les actes de langage
2.1.4 Les actes de dialogue
2.2 Approches intentionnelles
2.2.1 Langages de communication agent
2.2.2 Approches par planification du dialogue
2.2.3 Théorie de la conversation collaborative
2.3 Approches conventionnelles et sociales
2.3.1 Protocoles et politiques
2.3.2 Le tableau de conversation
2.3.3 Les engagements sociaux
2.3.4 Les jeux de dialogue
2.4 Les jeux de dialogue comme approche mixte
2.4.1 Modèle de dialogue de Dogma
2.4.2 Représentation des jeux dans Dogma
2.4.3 Réconcilier intentionnel et conventionnel
2.5 Conclusion
II Contribution
3 Modèle formel pour la collaboration humain-machine
3.1 Représentation de l’interaction humain-machine
3.1.1 Structure d’une tâche collaborative
3.1.2 Formalisation d’un état de l’interaction
3.1.3 Organisation d’une table d’état
3.2 Processus décisionnels d’un agent collaborant avec un humain
3.2.1 Définitions
3.2.2 Contextualisation d’un acte de dialogue de l’utilisateur
3.2.3 Sélection d’un comportement réalisable
3.2.4 Gestion des échecs dialogiques et extra-dialogiques
3.3 Gestion de l’interaction
3.3.1 Comportements proactifs
3.3.2 Relaxation des contraintes d’un motif dialogique
3.4 Discussion
4 Implémentation dans l’architecture CoCoA
4.1 Caractérisation des besoins pour un agent collaboratif
4.1.1 Besoins fonctionnels
4.1.2 Systèmes de dialogue existants
4.2 Le système CoCoA
4.2.1 Architecture de CoCoA
4.2.2 Gestionnaire de prédicats et gestionnaire d’état
4.2.3 Module intentionnel
4.3 Conclusion
III Mise en application
5 Application à une recherche d’information assistée
5.1 Exemple humain-humain de recherche d’information collaborative médicale
5.1.1 Le corpus Cogni-CISMeF
5.1.2 Scénario de RICM
5.1.3 Comparaison entre la RICM humain-humain et humain-machine
5.2 Ouverture, verbalisation et construction
5.2.1 Ouverture
5.2.2 Formulation d’une verbalisation
5.2.3 Reformulation de la verbalisation
5.2.4 Demande de précisions de la verbalisation
5.2.5 Précision de la verbalisation
5.2.6 Alignement verbalisation/terminologie
5.3 Lancement de la requête
5.4 Évaluation des résultats
5.4.1 Évaluation des résultats par l’expert
5.4.2 Évaluation des résultats par l’utilisateur
5.4.3 Sortie
5.4.4 Résultats partiellement satisfaisants et non satisfaisants
5.5 Réparation de la requête
5.6 Modularité du modèle
5.6.1 Les comportements comme opérations atomiques
5.6.2 Les règles comme spécifications contextuelles
5.6.3 Séparation des interactions et des décisions
5.7 Synthèse
5.7.1 Propriétés conservées
5.7.2 Limites
6 Mise en œuvre expérimentale
6.1 Comportement conventionnel des participants à l’interaction
6.1.1 Enchaînement conventionnel de l’interaction de RICM
6.1.2 Variation des initiatives prises par les participants
6.1.3 Altération du comportement conventionnel de l’utilisateur
6.2 Protocole expérimental
6.2.1 Calcul des prédicats
6.2.2 Simulations des dialogues
6.2.3 Métriques d’évaluation
6.3 Analyse des résultats des expérimentations
6.3.1 Initiative utilisateur/système/mixte et violation d’un engagement en action
6.3.2 Mise à jour du besoin d’information, rejet implicite et saut en avant
Conclusion

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