Cohabitation et relations interethniques

Les Diola

     Les Diola sont le produit d’une longue migration. Avant leur installation en Casamance, ils ont eu pour théâtre d’opération la Guinée portugaise d’où ils furent chassés par les Mandingue. Dépossédés de ce qu’ils ont de plus précieux à savoir leur terre, les Diola migrèrent ensuite en Casamance. Là, ils longèrent, de l’avis de P. Pelissier 1966, « I’aval de la rivière , c’est- à- dire la plaine qui longe la rive droite du soungrougrou en direction du sud, vers les villages Baïnounk situés dans le fogny, canton dont ils firent leur fief »48 . En effet dans ces lieux, la terre était propice à la riziculture, activité que les Diola pratiquaient déjà en Guinée. Plus tard, eu égard à l’insuffisance des surfaces cultivables par rapport aux nombres de populations, certains groupes étaient contraints d’émigrer. Cette émigration fut décisive en ce sens qu’elle conduisit à la partition des Diola en plusieurs factions plus ou moins hostiles les unes des autres. La société diola est une société égalitaire visible à travers ses structures horizontales (classes d’âge, groupe de travail, …). En effet, toutes les sources s’accordent à affirmer que «les Diola constituent une société égalitaire et individualiste où l’absence de structure politique organisée va de pair avec celle de hiérarchie sociale, les familles ne dépendant jamais les unes des autres » . La société diola ne comporte ni chef héréditaire, ni esclaves. «Individualisme et égalitarisme marquent aussi les techniques de production : aucune spécialisation fonctionnelle n’intervient dans l’activité économique. » L’individu était fondamentalement lié à une structure (exemple classe d’âge) avec laquelle sa vie durant, il reste lier passant rituellement les grandes étapes de son existence. Pour preuve, «les garçons de la même classe d’âge apprenaient ensemble à cultiver un petit champ qui leur était confié et avec la récolte duquel ils faisaient bombance. Ils s’affrontaient ensuite pendant les années de jeunesse lors des luttes et des danses guerrières. Ils passaient ensemble les épreuves de l’initiation qui leur donnaient accès au monde des adultes» . Aussi, le Diola est un peuple très attaché à son terroir. Cependant, certaines croyances populaires font des Diola un peuple fermé à organisation autarcique. Mais, le constat à Sédhiou est tout autre car ils cohabitent tant bien que mal avec les autres et vivent en bonne intelligence avec tous les autres sédhiois entraînant ainsi des intermariages entre les populations.

Les Mandjack

    A l’époque de l’installation portugaise en Casamance, un certain nombre d’originaires de la Guinée portugaise fréquentaient déjà l’escale et avaient pris position dans les environs de Sédhiou. En effet, dès le début du XIXe siècle, les Mandjack sont signalés comme immigrants temporaires venant « pour servir de traitants en qualité d’homme de peine ou « laptots » gagnant un petit pécule qu’ils emportaient par la suite dans leur pays d’origine », disait Berenger Feraud 1874.61 Fuyant ainsi la colonisation portugaise, plusieurs d’entre eux se sont retrouvés en Casamance où ils s’occupent désormais de la culture de l’arachide. Ils s’installèrent définitivement et fondèrent des villages à l’image de bammacounda, à quelques 11 kilomètres de Sédhiou en allant vers Bambaly. Cependant, la fidélité des Mandjack à leur religion du terroir et le maintien des liens étroits avec leurs familles d’origine, contribuent à maintenir leur personnalité ethnique. Ils sont disséminés un peu partout dans les villes de la Casamance notamment à Sédhiou où ils vivent en harmonie avec les autres populations. Ce qui a d’ailleurs permis à certains d’entre eux d’embrasser la religion musulmane. Les Mandjack, tout comme les Diola, ne connaissent pas de hiérarchisation. C’est une société égalitaire ignorant tout système de castes.

Les tontines

     Les tontines sont des associations à but lucratif mais, de développement. Elles regroupent généralement les femmes de mêmes conditions sociales (à l’image des femmes commerçantes, des femmes marchandes, les femmes des gendarmes…). Elles se fixent une cotisation financière quotidienne, hebdomadaire ou mensuelle de 500, 1000, 5000, 10.000f…selon, qu’elles donnent ensuite à une des leurres. Cette dernière peut en faire tout ce qu’elle en voudra. Mais, consciente du taux élevé de chômage et de paupérisation, elle préfère se lancer dans une activité économique telle que le commerce. Ces femmes bénéficieront chacune à son tour, de la cagnotte de la tontine, jusqu’à ce que tous les membres du groupe en bénéficient. Ainsi, elle peut être hebdomadaire ou mensuelle. A la fin de chaque cycle, les femmes se regroupent chez la personne qui doit « prendre la main »73 et organisent à cet effet un petit festin entre elles. A ce titre, les tontines aussi sont un cadre propice de manifestation de la solidarité entre les femmes.

La longue cohabitation

    La longue cohabitation aussi constitue pour sa part une manifestation des rapports de bon voisinage et de coexistence pacifique entre les populations. Généralement, quand différentes familles s’entendent difficilement dans leurs rapports de voisinage, la séparation intervient toujours. En effet, la plupart de nos enquêtés, ont affirmé cohabiter dans l’ensemble en paix avec leurs voisins. Pour eux, le voisin est le parent le plus proche car en cas de besoin, il est le premier à apporter son soutien et puis c’est lui qui ensuite, informe les autres parents. C’est pourquoi à Sédhiou le voisinage fait naître la parenté entre différentes familles cohabitantes. Mieux, dans certaines familles dont le chef n’est plus en vie et que les parents biologiques habitant loin, c’est un voisin qui assure le rôle de père social et il a tous les droits sur les enfants et joue à peu près le même rôle que leur père biologique en prêtant un œil attentif à tout ce qui tourne autour de celle-ci. Aussi en islam, parmi les péchés les plus graves, figure celui relatif au voisinage. En effet, le Mandingue étant un peuple ancré dans les valeurs religieuses musulmanes est très respectueux de celui-ci (voisinage) afin de ne pas compromettre la vie en communauté mais aussi et surtout sa vie dans l’audelà. C’est pourquoi ils observent une conduite irréprochable envers son prochain notamment de proche voisin.

CONCLUSION

     Dans une Nation en construction, les questions telles que la cohabitation interethnique constituent un levier fédérateur pour les citoyens surtout quand celles-ci s’appuient sur le facteur religieux. C’est grâce à des villes comme Sédhiou que l’on parle d’harmonie interethnique au Sénégal. En effet dans cette ville, la cohabitation est harmonieuse. Elle a été rendue possible grâce à la religion. Ainsi l’islam qui est une religion de paix et de tolérance a joué un rôle de premier plan dans la mise en commun et/ou en connexion des populations. Ensuite, cette mise en commun a été beaucoup facilitée par les rencontres multiples dans les différents lieux de culte de la ville mais aussi et surtout par la prépondérance des inter-mariages dans la société mandingue. Il y a enfin, la position géo-stratégique de ville carrefour entre plusieurs villes du pays mais aussi entre déférents pays de la sous- région occidentale. Tous ces facteurs ont de façon dialectique été à l’origine de la cohabitation interethnique à Sédhiou. Ils ont d’une manière ou d’une autre participé au maintien et à la préservation des rapports interethniques de cohabitation. Ceuxci sont dans l’ensemble normaux même si par moments la politique a constitué pour eux la source de discorde occasionnant ainsi des affrontements entre les populations. Toutefois, malgré les contradictions politiques, les Sédhiois continuent toujours de vivre dans une parfaite harmonie. Ainsi, cette présente étude confirme l’hypothèse selon laquelle l’islam est le ciment de la cohésion sociale et de la cohabitation interethnique à sédhiou. Cependant, le facteur religieux à lui seul ne servirait pas à grande chose s’il n’était pas renforcé par le phénomène des mariages interethniques et de la position stratégique de ville carrefour. De nos jours, cette cohabitation harmonieuse constitue un atout de taille pour les sédhiois de tous les groupes ethniques qui sont tournés vers le développement de leur localité. Ainsi, pour relever les défis du développement et faire face aux nombreux problèmes que connaît la région à cause de son enclavement qui constitue un handicap certain pour son décollage économique, les fils du terroir ont accepté de se remobiliser autour d’un bloc consistant derrière le premier magistrat de la ville afin qu’ensemble, les défis du développement soient relevés. Ainsi, nous sommes donc convaincu que c’est grâce au développement des villes comme Sédhiou que la paix sera définitivement acquise dans cette partie du pays qui est une région à part entière du Sénégal, mais aussi et surtout dans les jeunes Nations en construction.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LE CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE 
CHAPITRE I – LE CADRE THEORIQUE 
I. PROBLEMATIQUE
II. LES OBJECTIFS
II.1. OBJECTIFS GENERAUX
II.2. OBJECTIFS SPECIFIQUES
III LES HYPOTHESES
III .1. Hypothèses principales
III.2. Hypothèses secondaires
IV. LE CADRE CONCEPTUEL ET LA REVUE CRITIQUE DE LA LITTERATURE
V. MODELE THEORIQUE
CHAPITRE II : LE CADRE METHODOLOGIQUE 
I. L’ECHANTILLONNAGE
I.1. La constitution de l’échantillon
I.2. La technique de l’échantillon
II. LES INSTRUMENTS DE COLLECTE DES DONNEES
III. LA COLLECTE DES DONNEES
III.1. La recherche documentaire
III.2. L’enquête proprement dite
IV. TRAITEMENT DES DONNEES
V. LES OBSTACLES RENCONTRES
V. 1. Les obstacles d’ordre matériel
V.2. Les obstacles d’ordre financier
V.3. Les obstacles d’ordre humain
DEUXIEME PARTIE : GENERALITES SUR SEDHIOU ET SUR LES DIFFERENTS GROUPES ETHNIQUES 
CHAPITRE III : LE CADRE DE L’ENQUETE
I. HISTORIQUE ET EVOLUTION DE LA VILLE DE SEDHIOU
I.1. Historique
I.2. Le peuplement
I.3. L’évolution
II. SITUATION GEOGRAPHIQUE ET DEMOGRAPHIQUE DE LA VILLE DE SEDHIOU
II.1. Les éléments déterminants du milieu physique
II.1.1. Le relief
II.1.2. Le climat
II.1.3. La végétation
II.1.4. L’hydrographie
II.2. La population
CHAPITRE IV : PRESENTATION GENERALE DE L’ETHNIE MANDINGUE ET LES AUTRES GROUPES ETHNIQUES DE SEDHIOU 
I. L’ETHNIE MANDINGUE
I.1. Les structures de la société Mandingue
I.2. L’organisation de la société Mandingue
II. LES AUTRES GROUPES ETHNIQUES DE SEDHIOU
II.1. Le Groupe Sub-guinéen
II.1.1. Les groupes majoritaires
II.1.1.1 Les Diola
II-1-1-2 Les Balante
II.1.2. Les groupes minoritaires
II.1.2.1. Les Baïnounk
II.1.2.2. Les Mandjack
II.1.2.3. Les Mancagne
III. LES AUTRES GROUPES NORDIQUES
III.1. Les Peul
III.2. Les Wolof
III.3. Les Sérère
III.4. Les Toucouleur
TROISIEME PARTIE : PRESENTATION ET ANALYSE DES RESULTATS DE L’ENQUETE 
CHAPITRE V : LA DYNAMIQUE DE COHABITATION ET DES RELATIONS INTERETHNIQUES DANS LA VIE ECONOMIQUE, POLITIQUE, SOCIALE ET CULTURELLE A SEDHIOU 
I. LES FONDEMENTS CULTURELS DE LA COHABITATION ET DES RELATIONS INTERETHNIQUES
I.1. Une tradition de brassage héritée de l’empire du Gabou
I.2. Un ancrage bien solide dans les valeurs religieuses islamiques
I.3. Des déterminants socio-anthropologiques qui fondent la Société mandingue
II. LES MANIFESTATIONS DE LA COEXISTENCE PACIFIQUE
II.1. Une solidarité de type communautaire
II.1.a. la solidarité dans le mouvement associatif
II.1.b.les Groupements d’Intérêts Economiques
II.1.c.les tontines
II.1.d. les dahiras
II.2. Les mariages interethniques : un phénomène dynamique de rapprochement
II.2.1. Le mariage endogamique
II.2.2. Le mariage exogamique
II.3. La longue cohabitation
III. LA DYNAMIQUE DE COHABITATION ET DES RELATIONS INTERETHNIQUES DANS LA VIE ECONOMIQUE
III.1. Les différentes activités économiques
III.1.a. L’Agriculture
III.1.b. L’Elevage
III.1.c. La Pêche
III.1.d. La Chasse
III.1.e. L’Artisanat
III.1.f. Le Commerce
III.2. L’impact des relations interethniques dans la vie économique
IV. LA DYNAMIQUE DE COHABITATION ET DES RELATIONS INTERETHNIQUES DANS LA VIE POLITIQUE
IV.1. L’Arbre à palabres : sa fonction sociologique dans la société mandingue
IV.2. Le choix des dirigeants politiques
IV.3. Les principaux dirigeants politiques
V. LA DYNAMIQUE DE COHABITATION ET DES RELATIONS INTERETHNIQUES DANS LA VIE SOCIALE
V.1. L’impact de la cohabitation dans les rapports de parenté
V.2. L’impact de la cohabitation dans les rapports de voisinage
VI. LA DYNAMIQUE DE COHABITATION ET DES RELATIONS INTERETHNIQUES DANS LA VIE CULTURELLE
IV.1. Le diamba dong : un phénomène de convergence culturelle
IV.2. Les journées culturelles : une unité culturelle dans la diversité
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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