Lโaviculture est une activitรฉ importante dans les pays en voie de dรฉveloppement. Elle reprรฉsente un moyen dโรฉpargne, dโinvestissement et dโassurance pour les fermiers et procure une source de revenu aux populations (Sonaiya et Swan, 2004). ร Madagascar, il existe deux types dโaviculture : villageoise et commerciale. Lโaviculture commerciale, localisรฉe autour des zones urbaines et pรฉriurbainesยธ est basรฉe sur lโรฉlevage de races importรฉes suivant un systรจme extensif (Maminiaina et al., 2007). Lโaviculture familiale se dรฉfinit comme la production de volaille ร petite รฉchelle pratiquรฉe par des mรฉnages utilisant la main-dโลuvre familiale. Du fait de ses nombreuses potentialitรฉs (espรจce ร cycle court, nรฉcessitรฉ de peu dโinvestissement et accessibilitรฉ ร tous), elle englobe 95% de lโaviculture malgache (Sonaiya et Swan, 2004).
Toutefois, lโexistence des maladies virales limite le dรฉveloppement de cette activitรฉ. Selon lโOIE, Madagascar hรฉberge des maladies virales comme la maladie de Gumboro, la maladie de Marek, la bronchite infectieuse, la leucose aviaire et la maladie de Newcastle (Czeglรฉdi et al., 2006). Par leurs infectiositรฉs รฉlevรฉes, ces maladies virales sont responsables des pertes innombrables de volailles chaque annรฉe. Pourtant, une certaine rรฉsistance est observรฉe dans le secteur villageois.
La maladie de Marek a ravagรฉ en 2004 les poules pondeuses dans les fermes avicoles aux alentours de Mahitsy et Ivato avec 5 000 dรฉcรจs. Elle a refait surface en 2007 suite ร des problรจmes sanitaires des souches parentales auprรจs de sociรฉtรฉs fournisseurs de poussins dโun jour (Navalona, 2014).En revanche, pendant les mรชmes pรฉriodes, aucune รฉpizootie meurtriรจre nโest observรฉe dans lโaviculture de type villageois. Lโenquรชte รฉpidรฉmiologique rรฉalisรฉe en aviculture villageoise aux environs dโAmbohimangakely et de Moramanga en 1999 et 2000 donne les mรชmes observations pour la bursite infectieuse et la bronchite infectieuse. Dans lโaviculture commerciale, ces deux maladies entrainent des pertes considรฉrables en lโabsence de vaccination. Les sรฉroprรฉvalences de ces deux maladies sont respectivement de 64% et de 96%, montrant une importante circulation des virus dans les troupeaux non vaccinรฉs de lโaviculture de type villageois. En outre, la maladie de Newcastle est affirmรฉe responsable de 44,3 % de toute la mortalitรฉ enregistrรฉe durant cette enquรชte. Cependant, lโobservation dโune poulette survivante appelรฉe Volontsipoy chez un รฉleveur villageois conduit ร penser ร un phรฉnomรจne de rรฉsistance (Maminiaina et al., 2007).
La rรฉsistance dโun individu face aux diverses maladies (virales, bactรฉriennes et parasitaires) pourrait sโexpliquer par diffรฉrents mรฉcanismes et par des facteurs gรฉnรฉtiques spรฉcifiques de chaque espรจce. Parmi les facteurs gรฉnรฉtiques interviennent les gรจnes de complexe majeur d’histocompatibilitรฉ ou CMH ( Chazara, 2010). Chez les volailles, les gรจnes du CMH appelรฉ complexe B sont situรฉs sur le microchromosome 16 du gรฉnome (Briles et McGibbon, 1948). Lโanalyse sรฉrologique effectuรฉe sur le CMH a permis de dรฉcrire 27 haplotypes dรฉsignรฉs de B1 ร B27 (Briles et al., 1982). La notion dโhaplotypes correspond ร lโassociation des allรจles des gรจnes prรฉsents dans le complexe B (Chazara, 2010). Le CMH constitue un facteur de dรฉterminisme de la rรฉsistance dโun organisme face ร un agent infectieux. Lโimplication de cet haplotype dans la rรฉsistance ร la maladie de Marek est bien รฉtudiรฉe actuellement (Bacon et al., 2000). Par contre, peu dโรฉtudes ont รฉtรฉ faites pour les autres maladies aviaires comme la maladie de Newcastle.
Lโhypothรจse de recherche que nous avons posรฉe est la suivante : il existe une relation entre la rรฉsistance contre les maladies virales (en particulier la maladie de Newcastle) des poulets et la nature des haplotypes de CMH. Dans le cadre de cette รฉtude, nous avons essayรฉ de modรฉliser in silico les protรฉines CMH de poulets avec leurs antigรจnes spรฉcifiques de la maladie de Newcastle. Nous allons ensuite รฉtudier la phylogรฉnie des haplotypes B de CMH I et simuler les รฉpitopes T localisรฉs sur les protรฉines de fusion du virus de la maladie de Newcastle. Nous essayerons enfin de faire des amarrages CMHรฉpitopes T ร lโaide dโoutil bioinformatique. Pour รฉtudier lโimportance de la maladie de Newcastle, nous entreprendrons aussi une analyse sรฉrologique par le test dโInhibition de lโHรฉmagglutination (ou IHA) des sรฉrums des volailles recueillis dans une rรฉgion du Sud de Madagascar (rรฉgion Androy).
SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
Gรฉnรฉralitรฉs sur lโaviculture
Lโaviculture occupe une place importante dans lโalimentation humaine (Chazara, 2010). A cรดtรฉ de son importance nutritionnelle, elle prรฉsente รฉgalement des intรฉrรชts sur le plan socio-รฉconomique : cรฉrรฉmonies rituelle et religieuses, dons, source de revenu (Fotsa, 2008). ร Madagascar, le cheptel aviaire est estimรฉ actuellement ร 30 millions de tรชtes (FAO, 2008). Les volailles se rรฉpartissent dans deux soussecteurs : le secteur traditionnel ou villageois et le secteur commercial ou moderne. Lโaviculture villageoise est nettement plus dรฉveloppรฉe que lโaviculture commerciale. Elle occupe plus de 83% de lโaviculture malgache (Maminiaina et al., 2007). En plus des problรจmes zootechniques (mauvaise alimentation, insรฉcuritรฉ de lโรฉlevage face aux au diffรฉrents dangers de la nature, nonobservation de la rรจgle dโhygiรจne, non-respect du protocole vaccinal), le problรจme de couverture sanitaire est lโun des grands facteurs qui limite la productivitรฉ de lโaviculture malgache (Rakotonanahary, 2007). Ce problรจme est trรจs important dans lโaviculture traditionnelle mais la situation est globalement contrรดlรฉe dans le secteur moderne grรขce ร la vaccination (MAEP, 2004). Les maladies sont principalement dโorigine parasitaire, bactรฉrienne, fongique et virale. Cependant, les viroses sont les plus importantes et les plus meurtriรจres pour toutes les classes dโรขges de poulet (Maminiaina et al., 2007).
Exemples des Maladies virales aviaires existantes ร Madagascarย
Les maladies virales aviaires existantes ร Madagascar
ร Madagascar, la maladie de Gumboro a รฉtรฉ identifiรฉe par Rajaonarison et son รฉquipe en 1993 (Rajaonarison et al., 1994). Les enquรชtes sรฉro-รฉpidรฉmiologiques faites par Porphyre en 1999 ont confirmรฉ la prรฉsence dโautres maladies telles que la bronchite infectieuse, la maladie de Marek, la variole aviaire, les infections ร Adรฉnovirus, lโinfluenza aviaire de type faiblement pathogรจne et lโencรฉphalomyรฉlite aviaire (Porphyre, 1999). En 2004, la Gumboro a ravagรฉ les secteurs avicoles de Fenoarivo et de Tanjombato. En outre, la maladie de Marek a tuรฉ 5 000 tรชtes de poules pondeuses dans la ferme de Mahitsy (MAEP, 2004). Au cours de ces deux รฉpidรฉmies, aucune mortalitรฉ chez les oiseaux villageois nโa รฉtรฉ rapportรฉe. Dโaprรจs lโenquรชte รฉpidรฉmiologique entreprise par lโรฉquipe de Koko et de Maminiaina dans les diffรฉrentes Rรฉgions de Madagascar (Analamanga, Alaotra Mangoro, Androy et Sofia), la maladie de Newcastle est la maladie la plus dรฉvastatrice au sein de lโaviculture villageoise malgache. Elle a engendrรฉ 49,57% de mortalitรฉ des volailles. Toutefois, des volailles ont pu rรฉsister ร cette maladie (Maminiaina et Rakotondravao, 2012).
La maladie de Newcastle
Gรฉnรฉralitรฉs sur la maladie de Newcastle (MN)
La MN, appelรฉe aussi ยซ pseudopeste aviaire ยป,est une virose trรจs contagieuse (OIE, 2009). Elle affecte les oiseaux domestiques ou sauvages dans les Familles des Numididae (Pintades), des Phasianidae (Poule, perdrix, faisans, cailles, paons, dindons) et des Colombidae (Pigeon). Selon les rรฉgions de Madagascar, les aviculteurs attribuent plusieurs appellations ร cette maladie. Dans la partie centrale, les deux noms ยซbarikaยป et ยซramoletakโakohoยป sont utilisรฉs. Dans la partie orientale, dโautre appellations comme ยซmoafonโakohoยป et ยซpestโakohoยป sont enregistrรฉes. ยซMaikitsokaยป et ยซkoropokeยป sont utilisรฉs dans la partie Sud et ยซramibomognoยป dans le Nord (Maminiaina et al., 2007).
La MN est transmise par voie respiratoire (inhalation par aรฉrosol de gouttelettes ou de poussiรจres contaminรฉes) ou digestive (ingestion dโeau, et dโ aliments contaminรฉs) (Acha et Szyfres, 1982). Les signes cliniques de la MN sont diverses mais la paralysie des membres et le torticolis sont les plus souvent observรฉs (Razafindrafara, 2015).
Plusieurs mรฉthodes sont disponibles pour diagnostiquer la MN (PCR, ELISA, IHA, isolement viral). Le traitement spรฉcifique de la maladie nโexiste pas encore, la prophylaxie รฉtant la seule voie de protection. Ainsi, des mesures de biosรฉcuritรฉ comme le nettoyage et la dรฉsinfection rรฉguliรจre des locaux, lโutilisation de bottes et de vรชtements ร usage unique peuvent รชtre adoptรฉes avant lโinfection. En cas dโinfection, il faut abattre les animaux infectรฉs ou suspectรฉs et dรฉtruire les cadavres. Une dรฉsinfection totale et un vide sanitaire sont obligatoires avant le repeuplement du milieu quand lโinfection est passรฉe. La prophylaxie mรฉdicale repose sur la vaccination (Robyn et Spradbrow, 2000).
Classification de lโagent causal de la maladie
Le virus de la MN est classรฉ dans lโordre des Mononรฉgavirales, famille des Paramyxoviridae, sous-famille des Paramyxovirinae et genre Avulavirus. Ce genre regroupe 9 sรฉrotypes de paramyxovirus dโorigine aviaire (APMV pour avian paramyxovirus), dรฉsignรฉs dโAPMV-1 ร APMV-9. Toutes les souches du virus de la MN appartiennent au sรฉrotype 1, dโoรน leur nom APMV-1 (Alexander, 2003).
Gรฉnome et capside virales
Le gรฉnome de lโAMPV-1 est fait dโun ARN monocatรฉnaire, de polaritรฉ nรฉgative, et de taille variable (15186 ou 15192 ou 15198 Kilo paire de bases). Il renferme six gรจnes de structure : NP, P, M, F, HN et L codant les six protรฉines structurales du virus (Czeglรฉdi et al., 2006). La capside virale a une structure hรฉlicoรฏdale et elle est entourรฉe par une enveloppe dรฉrivรฉe de la membrane plasmique de la cellule infectรฉe. Elle est fragile et peut รชtre dรฉtruite par le formol, lโalcool, et mรชme lโeau bouillante (Ribot, 1985).
Lโenveloppe virale
Lโenveloppe virale est hรฉrissรฉe de spicules. Ces derniรจres sont formรฉes par deux types de glycoprotรฉines : HN (Hรฉmagglutinine Neuraminidase) et F (Fusion) (Ichakou, 2004). La glycoprotรฉine F est constituรฉe de 553 acides aminรฉs pour un poids molรฉculaire de 55 kDa (Lamb et Parks, 2007). Les antigรจnes viraux se trouvent ร la surface ou ร l’intรฉrieur de la particule virale. La molรฉcule F est activรฉe par lโattachement de HN sur des rรฉcepteurs cellulaires. La forme active est composรฉe de deux sous unitรฉs : F1 (48 ร 54 kDa) et F2 (10 ร 16 kDa) (Yusoff et Tan, 2001). Cette forme active assure la fusion de lโenveloppe virale avec la membrane cellulaire lors de la pรฉnรฉtration du virus dans la cellule cible (Mahon et al., 2008). LโHN est formรฉe par un nombre variable dโacides aminรฉs (de 571 ร 616) et elle a un poids molรฉculaires de 63 kDa (Yusoff et Tan, 2001). Elle est activรฉe par lโinteraction avec des molรฉcules prรฉsentes ร la surface des cellules. Elle sโattache au rรฉcepteurs des cellules cibles, permettant ainsi la libรฉration de virus nรฉosynthรฉtisรฉs (Huang et al., 2004).
|
Table des matiรจres
INTRODUCTION
CHAPITRE I: INTRODUCTION ET SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
I. INTRODUCTION
II. SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
II.1. Gรฉnรฉralitรฉs sur lโaviculture
II.2. Exemples des Maladies virales aviaires existantes ร Madagascar
II.3. Lโimmunologie aviaire
II.4. CMH et rรฉsistances aux maladies virales
II.5. Modรฉlisation de la structure 3D dโune protรฉine
II.6. Docking ou amarrage dโune protรฉine in silico
CHAPITRE II : MATERIELS ET METHODES
I. FOFIFA/ DRZVP
II.ANALYSE SEROLOGIQUE DE LA MN : TEST IHA
III.MODELISATION DE LA STRUCTURE 3D DE LA GLYCOPROTEINE DE FUSION DE NDV
IV. ANALYSE PHYLOGENETIQUE DE LA CMH CLASSE I DE POULET
IV.1. Alignement des sรฉquences
IV.2. Calcul de distance avec modรจle de Kimura ร 2 paramรจtres
IV.3. Gรฉnรฉration de lโarbre phylogรฉnรฉtique par la mรฉthode de NJ
IV.4. รvaluation de lโarbre phylogรฉnรฉtique
V. MODELISATION DE LA STRUCTURE 3D DE LA PROTEINE DE CMH DE POULET
VI. PREDICTION DES EPITOPES T DE LA GLYCOPROTEINE F DE LA NDV
VII. DOCKING PROTรINE-PROTรINE
VII.1.Tรฉlรฉchargement des fichiers PDB
VII.2.Sรฉlection de paramรจtre dโaccueil
VII.3.Filtrage et regroupement des structures
VII.4.Tรฉlรฉchargement et analyses des rรฉsultats de lโamarrage
CHAPITRE III: RESULTATS ET INTERPRETATIONS
I. RESULTATS DU TEST IHA
II. STRUCTURE 3D DE LA PROTEINE F GENEREE IN SILICO
II.1. Comparaison de six modรจles PDB
II.2. Qualitรฉ du modรจle 3D de la glycoprotรฉine F obtenue
II.3. Test de fiabilitรฉ de la structure par analyse du diagramme de Ramachandran
III. ANALYSE PHYLOGENETIQUE DU CMH I DE POULET
III.1. Alignement de sรฉquences de CMH classe I
III.2. Arbre phylogรฉnรฉtique des CMH classe I de poulet
IV. STRUCTURE 3D DE LA PROTEINE DE CMH CLASSE I DE POULET
IV.1. Les modรจles 3D gรฉnรฉrรฉs par modรฉlisation
IV.2. La qualitรฉ des modรจles obtenus
V. LES EPITOPES T SUR LA PROTEINE F
VI. DOCKING EPITOPE T – AGRETOPE DE CHAQUE HAPLOTYPE DE CMH
VI.1. Lโinteraction รฉpitope- agrรฉtope
VI.2. Les diffรฉrents scores du docking
CHAPITRE IV : DISCUSSIONS, CONCLUSION ET PERSPECTIVES
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES