Classifications en milieu scolaire romand

Classifications en milieu scolaire romand

Une comparaison CDD – CDU

Considérant que la CDU est la descendante directe de la Dewey, il nous semble important de comparer les deux classifications pour pouvoir comprendre les points communs et les différences de chacune d’elles. Tout d’abord, les deux systèmes suivent le même schéma fondamental de séparation des connaissances en 10 classes numérotées :

• de 0 à 9 pour la CDU,

• de 000 à 900 pour la CDD.

En ce qui concerne la popularité des deux classifications, la Dewey est la plus utilisée au monde, soit dans plus de 135 pays. Elle est également traduite dans plus de 30 langues différentes (Kumbhar 2012, p. 39) et a été sélectionnée par de nombreuses bibliothèques nationales pour classer leurs collections en libre accès, dont celle de France, du Canada, du Québec et de la Suisse. À titre de comparaison, la CDU est utilisée presque uniquement en Europe et dans des pays non anglophones. De plus, elle n’avait été adoptée par aucune bibliothèque nationale jusqu’à récemment (Hudon 2006, p. 93). Ces dernières années, elle a été adoptée par les bibliothèques nationales croate et slovène, par exemple. Au niveau de leur structure, ces classifications se distinguent par leur niveau de complexité. La Dewey a une structure claire avec une notation relativement simple. Cela explique son adoption dans de nombreuses bibliothèques professionnelles ou non. Elle possède une facilité d’utilisation que d’autres classifications ne possèdent pas. La publication de nombreuses éditions abrégées contribue également à son adoption par des institutions de toutes tailles. Nous pouvons faire le constat inverse pour la CDU. En effet, elle vise tout d’abord la précision grâce à son système de facettes. Celui-ci permet de créer des combinaisons inédites et donc d’adapter la classification aux besoins de collections complexes (Hudon 2006, p. 93).

Cependant, cette complexité grandissante se paie au prix d’une difficulté accrue d’utilisation de la classification pour l’utilisateur lambda ainsi que le bibliothécaire de petite institution. Une critique assez répandue à l’égard de la Dewey est son aspect très anglo-saxon à la fin du 19e siècle. On peut le voir dans son traitement pour les religions. En effet, une place prépondérante est occupée par la chrétienté dans la classe 200 qui traite des religions dans leur ensemble (Béthery 2003). C’est sans prendre en compte les efforts qui ont été fournis dans ce domaine de la part des éditeurs actuels pour nuancer cet aspect christiano-centriste. Ainsi, une table optionnelle des religions, qui propose un ordre alternatif, a été mise à disposition depuis 2012 (Green 2019). La CDU est issue quant à elle d’une tradition bibliothéconomique européenne et a possédé un caractère multilingue et universel dès sa création. Il faut cependant relever qu’elle n’a pas été exempte de critiques au sujet de son traitement de la religion, mais qu’elle a été la première à introduire des correctifs à ce sujet en 2000 (Green 2019). Si nous comparons les mises à jour, on peut constater que la Dewey est plus actualisée et réactive que sa descendante.

En effet, à l’heure où nous écrivons ces lignes, elle est à sa 23e édition, sortie en 2013 dans sa version française abrégée. Les éditeurs de la CDD essayent de répondre aux problématiques récentes et aux besoins des usagers. Par exemple, une place est faite dans la numérotation pour de nouveaux médias, comme la bande dessinée. Ils communiquent également ouvertement à propos de ces discussions sur leur site web7 ou sur des blogs. « De toutes les grandes classifications documentaires, la CDD est celle qui prend le mieux le virage du XXIe siècle et qui a la meilleure chance de survie à long terme. » (Hudon 2006, p. 92). En comparaison, la dernière édition en français de la CDU date de 2004. Sa dernière version abrégée, quant à elle, remonte à 2001. Le retard de ses mises à jour dans plusieurs langues est la conséquence directe de ressources financières insuffisantes (Hudon 2006, p. 94). C’est une des raisons principales de la relative baisse de son adoption d’un point de vue mondial.

Méthodologie

La forme de l’entretien libre a été retenue pour les entrevues avec les bibliothécaires. La forme de l’entretien libre, soit non directif, a été choisie pour deux raisons. La première est de permettre aux bibliothécaires de s’exprimer plus facilement à propos des difficultés rencontrées au cours de leur pratique professionnelle. La seconde est de cerner plus précisément quels sont leurs besoins, afin de savoir quelles solutions pourraient être apportées. Les entretiens ont été préparés en établissant une série de thèmes généraux qui devaient être abordés durant nos échanges. Quelques questions de relances ont été également préparées pour fluidifier le dialogue. Nous avons estimé la durée de ces entrevues entre 40 et 60 minutes. Afin de ne pas être pressé par le temps, nous avons réservé une journée complète pour cette tâche, comprenant la phase de préparation, les entretiens ainsi que le débriefing. Nous avons décidé d’enregistrer les entretiens, avec l’autorisation des personnes concernées.

Pour respecter la protection des données et le droit en vigueur, ces mémos vocaux seront supprimés après la réalisation de ce mémoire. Au total, nous avons planifié deux entretiens. Il est important de préciser qu’ils ont été réalisés plus tard que la période prévue initialement à la suite de la crise du COVID-19. Le premier s’est déroulé sur place au CEDOC avec Steve Hunziker, le bibliothécaire responsable et mandant. Le deuxième s’est fait par téléphone avec Patrice Borgeat, bibliothécaire-documentaliste et employé dans l’institution depuis de nombreuses années. Ainsi, son expertise et ses opinions sur l’évolution de la classification apporteront des éléments essentiels à la rédaction de notre travail. Les entretiens avec les usagers n’ont finalement pas été réalisés. Comme nous l’expliquons plus loin (Chapitre 4.2.2.3). Nous ne développons donc pas la méthodologie de cet objectif dans le mémoire. Les autres informations relatives se trouvent au chapitre susnommé.

Entretien du responsable

Nous débutons cet entretien en abordant les généralités liées à l’ensemble du fonds de la bibliothèque. Le responsable, M. Hunziker, précise que pour des raisons historiques, le classement au sein des étagères est inversé avec le sens logique de classement : les indices descendent, de 1000 à 0 au lieu de monter. Il relève également une critique au sujet des cotes physiques. Les choix successifs de couleur et de contraste avec les polices de caractère rendent aujourd’hui un grand nombre de cotes illisibles. En effet, certaines ne sont pas visibles à cause de leur positionnement sur les ouvrages. De plus, les livres trop grands pour être placé debout dans les rayons sont alors couchés sur leur tranche, ce qui cache leur indice.

En ce qui concerne la signalétique de la bibliothèque, il juge son état actuel insatisfaisant. Il souligne le manque de clarté et de précision pour permettre aux usagers – particulièrement les élèves – de s’y retrouver. Nous passons ensuite en revue la section littérature, soit les langues et les ouvrages généraux. Tout d’abord, il considère que la place actuelle des méthodes de langue en tête de chaque section de littérature n’est pas cohérente, car il y a une opposition entre le classement par « origine » et par « langues ». Pour les oeuvres littéraires, le constat à propos de la classification actuelle est sans appel : les élèves ont rarement connaissance de l’origine des auteurs qu’ils recherchent. Par conséquent, ils ne savent pas dans quel rayon se rendre. À travers cet exemple, on comprend bien que notre mandant n’est pas satisfait de la classification par origine de l’auteur pour la littérature. L’idée de séparer les belles lettres et la littérature contemporaine est à première vue une mauvaise idée, car cela pourrait créer un jugement de valeur dans l’esprit des usagers entre la bonne et la mauvaise littérature. Malgré cela, M. Hunziker s’est montré ouvert à l’idée de tenter une séparation dans le cas où des institutions similaires auraient procédé ainsi.

Après cela, nous nous concentrons sur les séries de fiction en plusieurs volumes. Notre mandant est opposé à l’idée d’ajouter un numéro de série ou une partie du titre à la cote, car cela apporterait des complications. Le responsable souhaiterait simplifier et unifier au maximum la classification et le classement de la collection. Ainsi, rajouter des exceptions pour des séries est une option allant à l’encontre de cet objectif. Pour lui, les méthodes sont moins importantes que les résultats. Sa priorité dans la révision de la section littérature est d’apporter une clarté afin de donner envie aux élèves d’explorer les rayons et de lire. Quant à la section des périodiques, elle a été remaniée récemment par le responsable pour permettre d’avoir un ordre alphabétique dans leurs tiroirs de rangement. M. Hunziker a relevé que les périodiques ont la particularité de ne pas avoir de cote. Cependant, de son point de vue, il faudrait en ajouter, car « chaque document qui entre dans le fonds devrait avoir une cote »8. Les archives des périodiques se trouvent actuellement au fond de la bibliothèque, soit à la fin de la classification. C’est d’après lui, un non-sens, car l’ensemble des anciens numéros devraient être classés dans la même section et pas séparés physiquement.

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Table des matières

Table des matières
Déclaration
Remerciements
Résumé
Liste des figures
1. Le mandat  
1.1 Introduction
1.2 Objectifs et buts
2. Présentation du centre de documentation de Madame de Staël
2.1 Le CECG Madame de Staël
2.2 Le centre de documentation
3. Les classifications : état de l’art
3.1 Méthodologie
3.1.1 La littérature professionnelle
3.1.2 Les normes
3.2 Définition
3.3 Les classifications en bibliothèque
3.3.1 Les deux grandes classifications traditionnelles
3.3.1.1 La classification décimale de Dewey (CDD)
3.3.1.2 La classification décimale universelle (CDU)
3.3.1.3 Une comparaison CDD – CDU
3.4 Le classement du « loisir » en bibliothèque
3.4.1 La littérature et le divertissement dans la CDU – CDD
3.4.1.1 La place de la littérature
3.4.1.2 La place de la bande dessinée
3.4.1.3 La place du cinéma et de la télévision
3.4.2 D’autres manières de classer
3.4.2.1 Les adaptations des classifications
3.5 Les classifications en milieu scolaire romand
3.5.1 Les normes en vigueur
4. Analyse de l’existant et des besoins
4.1 Présentation des espaces et de la classification actuelle
4.1.1 Méthodologie
4.1.2 Les livres documentaires
4.1.3 La littérature et les langues
4.1.4 Les périodiques
4.1.5 Les DVD
4.1.6 Les bandes dessinées, mangas et romans graphiques
4.2 Analyse des besoins
4.2.1 Méthodologie
4.2.2 Synthèse des entretiens du personnel
4.2.2.1 Entretien du responsable
4.2.2.2 Entretien du bibliothécaire
4.2.2.3 Entretiens des usagers
5. Classifications en milieu scolaire romand : enquête
5.1 Méthodologie
5.1.1 Choix de la méthode
5.1.1.1 L’enquête à distance
5.1.1.2 Constitution d’un panel
5.1.2 Le questionnaire
5.1.2.1 Création du questionnaire
5.1.2.2 Déroulement et analyse de l’enquête
5.1.2.3 Retours d’expérience
5.2 Résultats d’enquête : synthèse
5.2.1 La classification utilisée
5.2.2 Choix de la classification
5.2.3 Personnalisation de la classification : diversité des pratiques
5.2.4 L’évolution de la classification
5.2.5 Les usagers : analyse des besoins
5.2.6 L’équipe de la bibliothèque
5.2.7 Les loisirs
5.2.8 Conclusion
6. Propositions d’amélioration de la classification existante
6.1 Le choix d’un système de classement hybride
6.1.1 Les étiquettes de mots-matières
6.1.1.1 Des étiquettes de genre en littérature
6.1.1.2 Des étiquettes pour l’ensemble de la collection
6.2 Une classification revisitée
6.2.1 Le choix de la classification
6.2.1.1 Les critères
6.2.1.2 Le choix final
6.2.2 Conception de la nouvelle classification
6.2.2.1 Les sources
6.2.2.2 Conception des indices et règles générales
6.2.2.3 Les classes et règles spécifiques à celles-ci
6.2.2.3.1 Classe 0 – Généralités
6.2.2.3.2 Classe 1 – Philosophie / Psychologie
6.2.2.3.3 Classe 2 – Religion / Théologie
6.2.2.3.4 Classe 3 – Sciences sociales
6.2.2.3.5 Classe 4
6.2.2.3.6 Classe 5 – Sciences pures
6.2.2.3.7 Classe 6 – Sciences appliquées
6.2.2.3.8 Classe 7 – Arts
6.2.2.3.9 Classe 8 – Langue / Littérature
6.2.2.3.10 Classe 9 – Géographie / Histoire
6.2.2.4 La littérature et les divertissements
6.3 Conclusion et retour sur la conception
7. Recommandations de mise en application
7.1 Recommandations générales
7.1.1 Le désherbage
7.1.2 La signalétique
7.1.3 Les documents électroniques
7.2 Recommandations d’application
7.2.1 Introduction et sources
7.2.2 La mise en application par étapes
7.2.2.1 Étape 1 : Les étiquettes-matières en Littérature.
7.2.2.2 Étape 2 : La recotation des supports divers
7.2.2.3 Étape 3 : La recotation de la littérature et les langues
7.2.2.4 Étape 4 : Les classes simples à recoter
7.2.2.5 Étape 5 : Classes documentaires restantes
7.2.3 Évaluation des coûts d’application
7.2.3.1 Plan de travail
7.2.3.1.1 Étape 1 : Adhésion du public et communication
7.2.3.1.2 Étape 2 : Déplacement des ouvrages à traiter
7.2.3.1.3 Étape 3 : Choix de l’indice, cote et étiquette-matière
7.2.3.1.4 Étape 4 : Étiqueter et équiper le document
7.2.3.1.5 Étape 5 : Mise à jour de la notice dans le catalogue
7.2.3.1.6 Étape 6 : Rangement et diverses opérations administratives
7.2.3.2 Calcul de temps
8. Conclusion
Liste des acronymes
Bibliographie
Annexe 1: Liste des institutions contactées
Annexe 2: Questionnaire d’enquête sur les classifications
Annexe 3: Modèle de lettre de contact pour les institutions
Annexe 4: Proposition de classification et guide
Annexe 5: Extrait de la classification du Lycée-Collège des Creuset

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