Classification des myopathies inflammatoires
De nombreux facteurs cliniques, biologiques et para-cliniques ont été corrélés au pronostic péjoratif des myosites, et tout particulièrement le retard au diagnostic . Ces données soulignent que l’identification de critères diagnostiques des MII, fiables sur les plans de la sensibilité et de la spécificité, est essentielle, afin de permettre un diagnostic de certitude précoce et une prise en charge thérapeutique adéquate chez ces patients.
Dans cette optique, Peter et Bohan en 1975 , furent les pionniers de la classification des myopathies inflammatoires, en proposant des critères diagnostiques regroupant une combinaison spécifique de symptômes, de critères paracliniques : biologiques et histologiques. Malgré ce socle commun, il existe une hétérogénéité importante tant sur le plan clinique, qu’anatomopathologique. En effet, ces critères ne permettent pas, en règle générale, de différencier de nombreuses autres affections musculaires, très proches des MII, telles que : les dystrophinopathies ou dystrophies musculaires des ceintures par déficit protéique, dont elles peuvent tout à fait mimer les caractéristiques, cliniques et/ou histologiques définies par Bohan et Peter, et dont la prise en charge thérapeutique est pourtant radicalement différente.
Cette classification mère, est, donc, désormais remise en cause . La nomenclature a évoluée au fil des années grâce aux progrès immunopathogéniques, donnant naissance à l’ENMC.
Le premier objectif de ce groupe international a été l’élaboration de nouveaux critères diagnostiques des PM et DM intégrant l’ensemble des nouvelles connaissances . De fait, dans un premier temps, une meilleure définition des manifestations cliniques et électriques des myosites a été réalisée, et, dans un second temps la détermination de critères d’exclusion cliniques (déficit moteur asymétrique et sélectif aux quatre membres, déficit des muscles oculomoteurs, dysarthrie) ainsi qu’électromyographiques (existence de salves myotoniques, réduction du recrutement des potentiels d’unités motrices) a été effectuée . De surcroît, les autres critères diagnostiques retenus ont été des paramètres radiologiques (IRM musculaire), auto-immuns (ASM), ainsi qu’immunohistologiques.
Par ailleurs, ces critères diagnostiques ont permis la rédaction d’une nouvelle classification en fonction du nombre et du type d’items diagnostiques présents. Les PM ont été différenciées en PM certaine et probable; les DM ont été séparées en DM certaine et probable, en individualisant également deux nouvelles entités : les DM amyopathiques et les DM sine dermatitis .
Rappel anatomique de la fibre musculaire striée
Les muscles striés squelettiques sont constitués de cellules allongées : les fibres musculaires. Associées en faisceaux, ces fibres sont rendues solidaires par des enveloppes élastiques composées de tissu conjonctif : L’endomysium qui entoure chaque fibre musculaire. Le périmysium qui assemble les différentes fibres musculaires en faisceaux de fibres musculaires. L’épimysium qui recouvre l’ensemble du muscle.
Chaque fibre musculaire présente de nombreux noyaux répartis à la périphérie de la cellule. Elle est délimitée par une membrane : le sarcolemme qui présente de fines invaginations tubulaires «tubules T» réparties régulièrement le long de la fibre musculaire et qui y pénètrent profondément.
Elle contient dans son cytoplasme (sarcoplasme) des myofibrilles qui constituent le support de la contraction musculaire. Chaque myofibrille est composée d’une chaîne d’unités contractiles répétitives, les sarcomères : Sur la longueur de chaque myofibrille, il existe une alternance de bandes foncées (bandes A) et de bandes claires (bandes I). Chaque bande A est coupée en son milieu par une rayure claire (zone H). Au milieu de la bande I, se trouve une zone plus foncée (strie Z). La région d’une myofibrille située entre deux stries Z successives représente un sarcomère. Ces myofibrilles présentent une structure filamentaire régulière (myofilaments) qui donne au muscle son aspect strié au microscope.
Enfin, la fibre musculaire résulte de la fusion de plusieurs cellules non différenciées à noyau unique appelées myoblastes.
Le myotube formé par la fusion des myoblastes est caractérisé par des noyaux en position centrale. Puis lors de la différenciation du myotube en fibre musculaire, les noyaux vont se placer en périphérie de la cellule musculaire.
Dermatomyosite
La cible primitive du processus conduisant à la DM se situe au niveau de l’endothélium vasculaire . La maladie se déclenche quand des anticorps putatifs dirigés contre des cellules endothéliales activent le complément C3. Ce dernier, une fois activé, mène à la formation de C3b, C3bNEO et les fragments de C4b et C5b-9 qui est le complexe d’attaque membranaire . Le MAC, C3b et C4b sont détectés tôt dans le sérum des patients et sont déposés sur les capillaires avant que l’on ne voit les changements inflammatoires ou structurels dans le muscle.
Ainsi, le dépôt du complément induit un gonflement, la vacuolisation, la nécrose capillaire, l’inflammation périvasculaire, des phénomènes ischémiques, responsables d’une atrophie péri-fasciculaire des fibres .
Finalement, il y a une réduction en nombre de capillaires par fibre musculaire avec une dilatation compensatoire de la lumière des capillaires restants . Les cytokines et chémokines liés au complément d’activation sont libérés, ils activent les molécules d’adhésion aux cellules vasculaires (VCAM-1) et les molécules d’adhérence intercellulaire (ICAM-1) sur les cellules endothéliales facilitant ainsi la sortie des cellules T activées dans les espaces endomysial et périmysial .
La composition particulière de l’infiltrat inflammatoire est la suivante : Nette prédominance de lymphocytes B et de cellules dendritiques plasmacytoides CD4+/CD56+ par rapport aux lymphocytes T CD8+ ou Natural Killer (NK), tandis que les macrophages sont représentés à hauteur de 25-30%.
La myosite à inclusion sporadique
L’analyse de la BM met en évidence, en microscopie optique, des vacuoles bordées de 3 à 30μm de diamètre au sein du cytoplasme des fibres musculaires normales ou atrophiques. Ces vacuoles bordées contiennent des granulations éosinophiles. Leur composition est remarquablement analogue à celle des dépôts retrouvés dans le système nerveux central au cours de la maladie d’Alzheimer. Elles sont, en effet, constituées de protéines caractéristiques de cette maladie : béta-amyloïde, précurseur béta-amyloïde, tau phosphorylée, préséniline-1 . Elles ne sont pas donc spécifiques de la MI.
On observe par ailleurs, des anomalies mitochondriales focales sous forme de fibres rouges déchiquetées «ragged red fibres» et/ou des anomalies d’absence d’activité cytochrome oxydase «fibres COX négatives». Il s’y associe généralement des délétions de l’ADN mitochondrial .
La microscopie électronique, met en évidence des structures tubulofilamenteuses, rectilignes ou curvilignes, de 15 à 18mm de diamètre à l’intérieur de ces vacuoles, qui correspondent aux granulations éosinophiles. Ces inclusions filamenteuses intracytoplasmiques et/ou intranucléaires permettent d’affirmer le diagnostic .
A ces lésions élémentaires s’associent des infiltrats inflammatoires qui sont principalement constitués de macrophages et de LT CD8+. Leurs caractéristiques sont en tous points comparables à ceux de la PM, témoignant également d’un mécanisme d’immunité à médiation cellulaire .
Les myosites associées aux cancers
Une réponse immunitaire anti-tumorale peut être dirigée contre des néoantigènes tumoraux qui peuvent ressembler à des antigènes musculaires. Il a été démontré des similarités entre des AA de fibres msculaires en régénération et des antigènes d’adénocarcinomes. Le tissu d’adénocarcinome pulmonaire ou mammaire surexprime des auto-antigènes musculaires .
Chez des sujets prédisposés, cette réponse immunitaire peut donc agresser les fibres musculaires qui, lors de leur processus de régénération, vont exprimer de grande quantité d’autoantigènes musculaires co-exprimés avec des molécules HLA-I. Ce phénomène amplifie la réponse lymphocytaire cytotoxique qui aggrave la destruction musculaire. Dans ces formes de myopathies inflammatoires paranéoplasiques, la surexpression de marqueurs tumoraux (CA125, CA19-9) pourrait permettre d’identifier les formes associées à un cancer .
Ainsi, la recherche immunologique exige son intérêt car certains AA orientent vers un risque élevé ou moindre d’association paranéoplasique comme par exemple l’Ac anti-Mi2 qui est associé à une diminution du risque de cancer, globalement élevé au cours des DM.
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Table des matières
INTRODUCTION
PATIENTS ET MÉTHODES
I. PATIENTS
II. METHODES
RESULTATS
I. Epidémiologie
1. Répartition en fonction du type de myosite
2. Age
3. Sexe
4. Antécédents pathologiques
5. Circonstances de découverte
II. Données de l’examen clinique
1. Examen neurologique
2. Examen ostéo-articulaire
3. Examen dermatologique
4. Examen cardio-vasculaire
5. Examen pleuro-pulmonaire
6. Le reste de l’examen clinique
III. Données des examens para-cliniques
1. Bilan de l’atteinte musculaire
2. Bilan d’extension
IV. Associations pathologiques
V. Traitement
1. Corticothérapie
2. Les immunosuppresseurs
3. Autres
VI. Evolution
1. Réponse au traitement initial
2. Le suivi
3. Les complications liées au traitement
DISCUSSION
I. Classification des myopathies inflammatoires
II. Physiopathologie
1. Rappel anatomique de la fibre musculaire striée
2. Etiopathogénie
3. Physiopathologie et spécificités histologiques
III. Données épidémiologiques
1. Age
2. Sexe
3. Antécédents pathologiques
IV. Diagnostic positif
1. Les caractéristiques cliniques
2. Les caractéristiques para-cliniques
V. Extension systémique
1. Atteinte pulmonaire
2. Atteinte oeso-gastrique
VI.Associations pathologiques
1. Association aux cancers
2. Association aux connectivites ou syndrome de chevauchement
3. Association aux infections
VII. Traitement
1. Les objectifs
2. Moyens thérapeutiques
3. Les indications thérapeutiques
VIII. Evolution
1. La réponse aux moyens thérapeutiques
2. Pronostic
CONCLUSION
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