CLASSIFICATION DES CONDUITES D’ALCOOLISATION

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ADOLESCENT ET ALCOOL
État des lieux de la consommation d’alcool des adolescents : synthèse des enquêtes épidémiologiques
Plusieurs enquêtes nationales et internationales permettent de décrire de façon quantitative la consommation d’alcool et l’évolution des usages des jeunes, en s’appuyant sur des échantillons représentatifs de collégiens et de lycéens :
∀ L’enquête HBSC (Health Behaviour in School-aged Children) est une enquête internationale réunissant plus de 40 pays essentiellement européens, qui interroge les collégiens de 11, 13 et 15 ans. Elle est menée par l’OMS tous les 4 ans depuis 1982, et est réalisée en France en collaboration avec l’INSERM. Les derniers résultats disponibles sont ceux de l’enquête HBSC 2010. Les résultats de l’enquête HBSC 2014 devraient paraître au printemps 2016.
∀ L’enquête ESPAD (European School Survey Project on Alcohol and Other Drugs) est une enquête européenne, interrogeant les lycéens. La dernière s’est déroulée en 2011 (la prochaine enquête « ESPAD 2015 » est en cours).
∀ L’enquête ESCAPAD (Enquête sur la santé et les consommations lors de la Journée d’appel de préparation à la défense) est une enquête nationale qui interroge les adolescents âgés de 17 ans. Elle est réalisée par l’OFDT (Observatoire Français de Drogues et des Toxicomanies) en partenariat avec la DSN (direction du service national). Les derniers résultats disponibles sont ceux de l’enquête ESCAPAD 2014.
∀ Les enquêtes réalisées par l’IREB (Institut de recherche scientifique sur les boissons), permettent de mieux cerner les attitudes et comportements spécifiques des jeunes français à l’égard des boissons alcoolisées.
∀ Le Baromètre santé, est une enquête réalisée par l’INPES (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé), auprès de la population générale.
Les principaux indicateurs utilisés dans ces enquêtes sont définis dans l’ANNEXE 3.

En Europe

D’après les chiffres des enquêtes HBSC en 2010 (11) et ESPAD en 2011 (12), la France se situe parmi les pays européens les moins concerné par les consommations d’alcool hebdomadaire et les usages réguliers chez les jeunes de 15 à 16 ans.
Cependant, la France se démarque des autres pays européens avec des niveaux supérieurs à la moyenne en ce qui concerne les API (12). (Figure 2)

En France

En France, l’alcool est la première substance psychoactive en termes de niveau d’expérimentation, d’usage occasionnel et de précocité d’expérimentation (13).
Les premières ivresses et les premières consommations régulières se développent fortement pendant les « années collège » et s’intensifient ensuite tout au long du lycée. L’âge moyen de la première consommation est d’environ 13 ans (11), et celui de la première ivresse d’environ 15 ans (14).

Chez les jeunes collégiens

L’alcool est le produit le plus précocement expérimenté à l’adolescence et ceci avant même l’entrée au collège : d’après l’enquête HBSC en 2010, plus de la moitié (59,3 %) des élèves en classe de 6ème ont déjà goûté à une boisson alcoolisée (15).
Si le collège ne paraît pas être une période spécifique pour découvrir l’alcool, c’est une période où son abus augmente fortement (13).
Son expérimentation progresse ainsi continuellement tout au long du collège, et fini par concerner 8 élèves sur 10 (83,2 %) en classe de 3ème (11).
En ce qui concerne les ivresses alcoolique, environ 1 collégien sur 6 dit avoir déjà été ivre, avec des niveaux qui sont multipliés par 5, entre la 6ème (6,8%) et la 3ème (34,0 %) (11).
Pour la consommation régulière de boissons alcoolisées, une différence nette marque les élèves de 4ème (2,5 %) et ceux de 3ème (7 %) (11).
Les garçons se révèlent plus précoces que les filles, et sont plus nombreux qu’elles à consommer au début du collège, mais ces dernières « rattrapent » leur retard dès la 4ème. A la fin du collège, filles et garçons présentent des niveaux de consommation comparables (11). Cependant l’écart entre garçon/fille s’accentue dès lors que le niveau de consommation s’élève (11).
A la fin de l’adolescence : les données de l’enquête ESCAPAD 2014
• Les consommations d’alcool à 17 ans en 2014 (16) :
– près de 9 adolescents sur 10 (89,3%) ont déjà bu de l’alcool ;
– environ 6 jeunes sur 10 (58,9 %) déclarent avoir déjà été ivre au cours de leur vie ;
– près de la moitié des jeunes (48,8 %) déclare au moins 1 API dans le mois et 3 % en déclarent au moins 10.
– les consommations régulières sont plus rares (environ 10%).
La consommation d’alcool reste un comportement majoritairement masculin, et l’écart entre garçon/fille s’accentue dès lors que le niveau de consommation s’élève. Ainsi, près de trois fois plus de garçons que de filles déclarent un usage régulier.
• Évolutions des consommations d’alcool à 17 ans, entre 2000 et 2014 (16):
– baisse des expérimentations (de 95% en 2000 à 89,3% en 2014) ;
– augmentation des usages réguliers (10,9 % en 2000 à 12,3% en 2014) ;
– stabilisation des ivresses depuis 2005, après une période de forte hausse.
• Évolutions des API à 17 ans, entre 2005 et 2014 (16):
– baisse des API dans le mois et des API répétées, après une période de forte hausse entre 2005 et 2011 ;
– augmentation continue des API régulières (2,2% en 2005, à 3,0% en 2014).
En Haute Normandie
Les chiffres de la consommation d’alcool chez les jeunes français âgés de 17 ans sont très contrastés selon les régions (17). Au sommet des consommations on retrouve à l’Ouest, la Bretagne et les Pays de la Loire très largement en tête des régions les plus consommatrices (18). A contrario, la région PACA et un ensemble de régions au Nord, incluant le Nord Pas-de-Calais, la Picardie, la Haute-Normandie et l’Île-de-France, présentent un caractère sous-consommateur (17).
En 2005, l’INPES et l’OFDT publient le premier Atlas régional des consommations d’alcool (19). Les données recueillies montrent notamment que les adolescents haut normands déclarent plus souvent que les autres avoir bu la dernière fois en compagnie de leurs parents (35% contre 30,8% en métropole), et que les consommations d’alcool ont plus souvent lieu au domicile ou chez des amis (56% contre 49,5% en métropole), plutôt que dans les bars ou les lieux publics (19).
D’après l’enquête ESCAPAD 2014, la consommation moyenne des jeunes haut normands de 17 ans est inférieure à la consommation moyenne nationale, et ce quel que soit le type d’usage (17). Ces derniers se distinguent notamment par les taux les plus bas d’usages réguliers d’alcool (carte n°1) et d’API (carte n°2), par rapport au reste du territoire (17).
• Une enquête régionale :
L’enquête INDIcateurs de Suivi en Santé (Indiss) a été menée auprès d’un échantillon d’élèves de 5ème (20) et de 2nde (21) scolarisés dans les établissements publics de Haute Normandie durant l’année scolaire 2012-2013. Un questionnaire anonyme comprenant le test CRAFFT (ce test sera défini page 50) a été renseigné par chaque élève.
Cette enquête nous donne un aperçu des comportements d’alcoolisation des adolescents hauts normands. Les principaux résultats sont les suivants :
– En classe de 5ème, 2 élèves sur 5 ont déjà expérimenté l’alcool, et 1 élève sur 10 a déjà été ivre (20) ;
– En classe de 2nde, 4 élèves sur 5 ont déjà bu de l’alcool. Parmi ces élèves, près de la moitié (46,2%) a déjà connu un état d’ivresse (21).
D’après le test de CRAFFT, parmi les élèves déclarant avoir bu au cours des douze derniers mois (9 élèves sur 10), plus d’un quart d’entre eux (26,3 %) présenterait un mésusage de l’alcool (21).
Cependant, ces résultats ne reflètent pas vraiment le ressenti qu’ont les élèves de la dangerosité de leur consommation. En effet, 75,3 % des élèves présentant un test de CRAFFT positif ont déclaré que leur consommation d’alcool n’était pas dangereuse pour leur santé, et seulement 14,5 % d’entre eux ont estimé qu’elle était dangereuse (21).
Spécificité des adolescents vis-à-vis de l’alcool
Afin d’effectuer un travail de prévention efficace, il est important de comprendre l’adolescent dans sa globalité : sa vision du produit, ses vulnérabilités ou encore ses modes de consommations.
Les différents modes de consommation des adolescents
Les modes de consommation des jeunes ont considérablement évolué ces dernières décennies.
La précocité est un élément qui est souvent mis en avant et ce n’est pourtant pas cela qui a changé, mais bien la façon dont les jeunes consomment. Les générations précédentes consommaient l’alcool plutôt comme un aliment au moment des repas, alors que les jeunes de nos jours font de l’API (ils consomment énormément et rapidement de l’alcool dans le seul but d’être ivre) (22). Ces comportements sont souvent planifiés, prémédités au sein des groupes de pairs et ont souvent lieu le samedi soir. La plupart d’entre eux recherche dans ce comportement les effets psychotropes de l’alcool, et le consomment comme une drogue : ils recherchent la « défonce » (23).
Ce mode de consommation peut être festif, entre amis, mais aussi auto-thérapeutique ou toxicomaniaque.
L’un des principaux enjeux pour le médecin généraliste dans la prévention et le dépistage d’un mésusage d’alcool chez l’adolescent, est de définir son mode de consommation afin d’adapter au mieux sa prise en charge.
• D’une consommation familiale, à une consommation autonome :
En France, les jeunes ont un double usage de l’alcool : le plus souvent modéré en famille et important, même si occasionnel, en groupe (24).
L’initiation à l’alcool se fait le plus souvent dans un cadre familial, et une part non négligeable (31%) des alcoolisations à 17 ans a lieu avec les parents (1). Ces derniers ne sont donc pas étrangers à la consommation d’alcool de leurs enfants, d’autant plus que les sorties arrosées du samedi soir reçoivent le plus souvent leur aval (25).
• La consommation festive :
C’est le type de consommation le plus fréquent à l’adolescence : elle concerne 85% des jeunes de 17 ans (1) et a lieu le plus souvent entre amis, le week-end ou pendant les vacances. C’est l’effet euphorisant qui est principalement recherché.
Dans ce type de consommation, on ne retrouve pas nécessairement de facteurs de risque familiaux ou individuels, et il n’y a pas de retentissement social, ni scolaire.
Toutefois, l’habitude de boire peut s’installer, souvent sous la pression d’un groupe de pair, et conduire à une escalade dans la consommation (26). La prévention sur les risques de l’alcool chez les adolescents est ici primordiale.
• La consommation auto-thérapeutique :
C’est l’effet anxiolytique ou antidépresseur voire excitant de l’alcool qui est recherché. Cette consommation est souvent solitaire, cachée et régulière. L’adolescent a tendance à s’isoler et a une vie sociale plutôt pauvre.
Ce mode de consommation de l’alcool peut traduire un mal être, voir un comportement suicidaire. L’alcool est alors considéré comme un remède à des difficultés personnelles.
Le développement d’une dépendance est à craindre dans ce type de consommation (26), et une prise en charge spécialisée est souvent nécessaire.
• La consommation toxicomaniaque :
Ici, l’effet « anesthésie / défonce » est recherché. La consommation peut être à la fois solitaire ou en groupe, régulière voire quasi quotidienne.
L’exclusion de la scolarité et des circuits sociaux est fréquente, et on retrouve très souvent des facteurs de risque socioéconomiques et familiaux chez ces adolescents.
Ce type de consommation s’accompagne souvent de la prise concomitante d’autres substances psychoactives licites (tabac) ou illicites (cannabis, cocaïne, amphétamines…), dont l’alcool amplifie les effets.
Bénéfices et risques de l’alcool selon les adolescents
Les adolescents sont plus réceptifs aux effets de l’alcool ressentis comme « positifs ». Les raisons de leur consommation reposent surtout sur le plaisir de la fête et la quête de l’ivresse, dans laquelle ils perçoivent un certain nombre de bénéfices, tout au moins à court terme (27).
D’après différentes études (28) (29), les bénéfices les plus souvent recherchés sont : l’amusement, la détente, échapper à la routine quotidienne, oublier les problèmes personnels, se sentir heureux, rencontrer l’autre sexe, acquérir du prestige auprès des pairs (« faire comme les copains », trouver de l’assurance en groupe), favoriser les interactions sociales, tester ses limites (recherche de la performance), défier l’autorité (recherche de la transgression, s’opposer aux adultes), la désinhibition, ou encore se sentir adulte.
Une étude récente suggère qu’une consommation d’alcool affichée sur les réseaux sociaux augmente la popularité des adolescents (30).
S’agissant des effets négatifs attendus, les jeunes anticipent surtout les conséquences physiques désagréables et transitoires consécutives à l’absorption d’alcool, telles que « la gueule de bois » ou « se sentir malade », et moins souvent les écarts de comportements (comme l’agressivité), les problèmes de santé, les problèmes judiciaires ou les accidents (24).
Conséquences d’une consommation excessive d’alcool à l’adolescence
Les adolescents sont en général réceptifs aux effets indésirables d’une consommation excessive d’alcool à court terme. Cependant, ils sont peu sensibles aux risques sanitaires et sociaux à moyen et long terme, car il s’agit pour eux d’un risque très lointain ne les concernant pas vraiment (1).
– Les dommages sanitaires peuvent être définis comme l’ensemble des maladies et traumatismes provoqués par la consommation d’alcool.
L’alcool ayant une excellente capacité de diffusion dans l’organisme, aucun organe, ni aucun tissu humain n’échappe à sa diffusion et à son imprégnation. La consommation d’alcool expose donc à des risques multiples pour la santé, à court, moyen et long terme, en fonction des quantités absorbées et des modes de consommations. Plus l’initiation à l’alcool a lieu tôt dans la vie de l’adolescent, plus les dommages sont importants.
L’alcool est également responsable de nombreux accidents et de comportements violents (31).
– Les dommages sociaux sont les répercussions négatives de la consommation d’alcool sur la vie sociale de l’individu.
La consommation excessive d’alcool peut entrainer des problèmes familiaux, judiciaires, scolaires/professionnels, pouvant mener à une délinquance, un échec scolaire/professionnel, un isolement, ou à une situation précaire voire marginale (31).
Conséquences à court terme
Les principaux effets immédiats de l’alcool chez les adolescents, sont : une désinhibition, une diminution du contrôle de soi, une altération des réflexes et de la vigilance, une mauvaise coordination des mouvements, une perturbation de la vision et de la parole, ou encore une somnolence (14).
Ces effets peuvent être à l’origine d’accidents de la route, d’accidents domestiques, de comportements violents, ou de rapports sexuels non voulus ou non protégés, pouvant entrainer des infections sexuellement transmissibles ou des grossesses non désirées (14). La consommation excessive d’alcool est l’une des causes principales de traumatisme et de décès prématurés à l’adolescence (14).
Conséquences à moyen terme
Les complications les plus fréquentes à moyen terme sont dues aux effets neurotoxiques de l’alcool (27). En effet, le cerveau des adolescents poursuit d’importantes étapes de maturation jusqu’à l’âge de 25 ans (27), ce qui le rend plus vulnérable à l’alcool que celui des adultes. Les déficits observés sont proportionnels à la quantité d’alcool consommée et au mode de consommation (27). Ainsi, les consommations excessives, comme les API, portent progressivement atteinte au cerveau et à son fonctionnement, en altérant principalement la neurogenèse (la formation de nouveaux neurones) et les capacités d’apprentissage et de mémorisation (altération de la concentration et de l’attention) (27).
Une équipe de l’INSERM (Unité 982/Université de Rouen, Mont-Saint-Aignan) a mené en 2014 une étude chez la souris (32), en exposant des animaux adolescents et adultes à une prise excessive d’alcool, unique ou répétée. Les chercheurs ont ensuite analysé l’expression de nombreux gènes dans le cerveau des animaux et les ont soumis à des tests comportementaux. Les résultats montrent que certains gènes associés à la réparation des dommages à l’ADN sont sous-exprimés chez les souris adolescentes pendant les heures qui suivent la prise d’alcool, empêchant alors la correction des dégâts causés par les composés oxydatifs libérés par l’éthanol. Chez les souris adultes, cette anomalie ne survient pas et les éventuelles réparations nécessaires sont effectuées. Les chercheurs ont également observé une réduction de la neurogenèse chez les souris adolescentes exposées à une prise répétée d’alcool. Ces dernières ont aussi présenté de plus grandes difficultés que les adultes à circuler dans des labyrinthes ou à reconnaître des objets, ce qui traduit un déclin transitoire de la mémoire à court terme.
Les auteurs n’ont pas retrouvé ces effets avec des consommations modérées d’alcool. Cependant d’autres travaux ont montré que la prise d’alcool en quantité « raisonnable » semble avoir d’autres conséquences néfastes chez l’adolescent, dont celui d’augmenter le risque ultérieur de dépendance (32).
Conséquences à long terme
L’alcool à forte dose entraîne un remodelage des connexions entre les neurones qui permet au cerveau de s’adapter à cette consommation, d’en amoindrir les effets et de créer ainsi un appel à la consommation (7). Le cerveau des adolescents étant particulièrement vulnérable, la pratique de l’API à cette période constitue donc un facteur de risque considérable d’usages problématiques ultérieurs voir de la survenue d’une dépendance. Ainsi, l’immense majorité des alcoolo-dépendants avérés ont commencé leur consommation à l’adolescence (33).
De même, une consommation quotidienne et abusive d’alcool peut également être responsable de nombreuses complications organiques et psychiatriques (34).
Une consommation excessive et chronique d’alcool à l’adolescence peut également être à l’origine d’un désinvestissement professionnel ou scolaire, d’un état dépressif ou encore d’une rupture avec son entourage, et ainsi avoir une incidence négative sur le niveau d’étude et le niveau socioéconomique futur de l’adolescent (1).
Les facteurs de vulnérabilités
L’adolescence constitue à elle seule un facteur de vulnérabilité. En effet, c’est une période de bouleversements neuropsychologiques et sociaux, propice à la découverte et à la quête de nouveaux défis (1).
De plus, les adolescents sont particulièrement sensibles à l’alcool pour deux raisons : premièrement leur corps, en plein développement, ne produit pas en quantité suffisante l’enzyme responsable de l’élimination de l’alcool, et deuxièmement leur corpulence étant moindre, le taux d’alcool dans le sang augmente bien plus vite que dans celui d’un adulte (1).
Cependant, il existe également des facteurs individuels ou environnementaux qui favorisent, voire prédisposent les adolescents à un usage problématique de l’alcool :
• Facteurs psychologiques :
Il existe plusieurs facteurs psychologiques susceptibles d’entrainer un mésusage, voir une addiction, comme :
– Certains traits de personnalité tels que la faible estime de soi, la timidité ou encore la recherche de sensations fortes ;
– De nombreux troubles psychiatriques comme les troubles anxieux, le TDAH (trouble déficit de l’attention/hyperactivité), les troubles bipolaires, les troubles du sommeil, les troubles des conduites alimentaires (anorexie et boulimie), les troubles psychosomatiques (tels que les migraines, les céphalées ou la spasmophilie), ou encore les personnalités antisociale et borderline (1) ;
– Des évènements de vie négatifs, tel qu’un deuil, une maltraitance, un abus sexuel ou une absence de domicile fixe.
• Facteurs génétiques :
Une part non négligeable du risque de développer une dépendance serait attribuable à des facteurs génétiques parmi lesquels de nombreux gènes candidats ont été identifiés (27). Des études familiales et d’adoption (35), ont ainsi montré que les facteurs génétiques augmenteraient de 40 à 60 % le risque de développer une dépendance.
D’autres travaux ont montré qu’une exposition à l’alcool in utero ou une expérimentation précoce, augmenterait considérablement le risque de devenir dépendant (7). Ainsi, une initiation à l’alcool vers 11-12 ans, multiplierait ce risque par 4 ou 5, par rapport à une initiation vers 18 ans (7). Un développement pubertaire précoce pourrait également être un facteur de risque d’alcoolo-dépendance (7).
• Facteurs familiaux :
L’influence parentale sur la consommation des jeunes semble agir de deux manières (36) :
– une influence directe : le comportement des parents en tant que consommateurs et les normes véhiculées au sein de la famille en matière d’alcool, ont un impact direct sur l’attitude des adolescents face à cette substance (10). Ainsi, le risque pour un enfant de développer à l’adolescence un abus ou une dépendance est proportionnel à l’importance des conduites d’alcoolisation de ses parents et à la précocité de son exposition à ces conduites (37) : les enfants de consommateurs excessifs d’alcool ont deux fois plus de risque d’être eux-mêmes des consommateurs réguliers (38).
– une influence indirecte : si l’adolescent perçoit un manque de proximité avec ses parents, il peut être tenté d’aller chercher des compensations dans un groupe de pairs déviant. Ainsi, plus le climat familial est défavorable (mauvaises entente, manque d’implication des parents dans la vie de leur enfant ou au contraire parents réprimandant chaque comportement d’autonomie de leurs enfants) plus l’influence des pairs sur le comportement des adolescents est déterminant (1).
La situation familiale apparaît également fortement associée à la consommation d’alcool : les jeunes dont les parents ne vivent pas ensemble (famille monoparentale ou recomposée) ou qui séjournent hors de leur foyer (internat…), déclarent davantage d’ivresses répétées et s’avèrent plus souvent consommateurs réguliers que les autres (14). Il est probable que l’absence de l’un ou des deux parents entraîne une augmentation des opportunités de consommer (14).
• Le sexe :
Dans notre pays, la consommation d’alcool reste un comportement très masculin, et ce quel que soit l’âge (39). D’une part les garçons y voient une marque de virilité, et d’autre part l’abus d’alcool chez les femmes reste socialement très mal accepté (39).
De plus, les parents d’adolescents sont souvent plus regardant et plus sévères sur les sorties de leurs filles, qui restent ainsi davantage confinées au domicile familial que les garçons (39). Elles anticipent également plus souvent que les garçons les conséquences désagréables liées à la consommation d’alcool (39).
• Cercle amical :
Les pairs ont une influence considérable sur la consommation des adolescents (40) (41). Leur présence sécurise et encourage le jeune à adopter les mêmes modes de consommations qu’eux. Ainsi, les adolescents dont les amis consomment de l’alcool présentent des niveaux de consommation plus élevés que les autres (24). Plus les adolescents sont jeunes (10-12 ans), et plus ils sont influençables par la consommation de leurs pairs (42).
L’enquête HBSC a montré une corrélation entre la fréquence des soirées entre amis et l’usage régulier chez les adolescents de 15 ans (14).
• Parcours scolaires :
Quel que soit leur âge, les adolescents qui ont un parcours scolaire perturbé (redoublement, filière professionnelle, décrochage scolaire, déscolarisation) ont des niveaux plus élevés d’usage problématique d’alcool (16). Les jeunes en apprentissage et ceux sortis du système scolaire sont ainsi plus nombreux que les jeunes scolarisés à déclarer boire régulièrement de l’alcool ou connaître des API répétées (16).
• Conditions socioéconomiques :
Les adolescents issus de milieux favorisés ont des niveaux d’expérimentation et de consommation d’alcool plus élevés. Ceci peut s’expliquer notamment par la plus grande probabilité de trouver de l’alcool dans ces foyers (43), ou par l’argent de poche perçu directement par l’adolescent (14), lui permettant de se procurer des boissons alcoolisées.
Cependant, les jeunes des milieux favorisés présenteraient moins de difficultés psychologiques concomitantes, ce qui leur permettrait de mieux maitriser leurs consommations. Au contraire, les jeunes de milieux défavorisés (faibles revenus ou profession peu qualifiée des parents) présenteraient plus de risque de développer des troubles émotionnels et comportementaux et seraient donc plus vulnérables (36). Ces jeunes présenteraient donc un risque plus élevé de consommation régulière d’alcool et d’API (44).
• Facteur géographique :
Les adolescents vivant dans une commune rurale (moins de 2 000 habitants) ont des niveaux d’usage régulier d’alcool plus élevés que les jeunes vivant dans des agglomérations de grande taille (>200 000 habitants) (16).
• Facteurs culturels :
De toutes les substances psychoactives, l’alcool est celle qui tient une place privilégiée dans notre société : elle est partie intégrante de notre culture, de nos traditions, et de notre patrimoine (35). L’alcool est fortement intégré aux relations sociales (repas en famille ou entre amis, célébrations en tous genres, etc.).
La religion joue également un rôle dans les comportements de consommation : on retrouve des symboles religieux dans le vin chez les catholiques et chez les orthodoxes, alors que chez les musulmans l’alcool est interdit (45).
• Publicité et marketing : la jeunesse, un marché pour les alcooliers
Les industriels de l’alcool développent des stratégies marketing et des actions publicitaires à destination des jeunes pour les inciter à consommer leur produit (46).
Plusieurs études ont montré un lien significatif entre l’exposition des jeunes à cette publicité et les comportements d’API, l’initiation à l’alcool et l’augmentation de la consommation (46).
Un exemple poignant est l’apparition ces dernières années de nouveaux produits visant spécifiquement les adolescents : les « premix » ou « alcopops ». Ce sont des alcools souvent fort, mélangés à des sodas sucrés ou à des sirops colorés, qui semblent conçus spécifiquement pour les adolescents de 12 à 17 ans (47). Il est vrai que tout est pensé pour plaire à cette population, de leur composition au packaging.

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Table des matières

NTRODUCTION
I. GENERALITES
A. DEFINITIONS
1. Adolescence et adolescent
2. L’alcool, une substance psychoactive
B. CLASSIFICATION DES CONDUITES D’ALCOOLISATION
1. Les différentes catégories d’usage d’alcool
a. Le non-usage
b. L’usage simple
c. Le mésusage
2. L’intoxication alcoolique aigue, un comportement d’alcoolisation
3. Les recommandations de l’OMS
II. ADOLESCENT ET ALCOOL
A. ÉTAT DES LIEUX DE LA CONSOMMATION D’ALCOOL DES ADOLESCENTS : SYNTHESE DES ENQUETES EPIDEMIOLOGIQUES
1. En Europe
2. En France
a. Chez les jeunes collégiens
b. A la fin de l’adolescence : les données de l’enquête ESCAPAD 2014
3. En Haute Normandie
B. SPECIFICITE DES ADOLESCENTS VIS-A-VIS DE L’ALCOOL
1. Les différents modes de consommation des adolescents
2. Bénéfices et risques de l’alcool selon les adolescents
3. Conséquences d’une consommation excessive d’alcool à l’adolescence
a. Conséquences à court terme
b. Conséquences à moyen terme
c. Conséquences à long terme
4. Les facteurs de vulnérabilités
III. LA PREVENTION
A. GENERALITES
1. Le développement des compétences psychosociales
2. Les stratégies de prévention validées
3. Intérêt de la recherche en matière de prévention
B. LES PRINCIPAUX ACTEURS DE LA PREVENTION ET LEURS MISSIONS
1. Les parents
2. Le milieu scolaire
3. L’État : une politique de l’alcool
a. Réglementation des commerces et de la consommation d’alcool des mineurs en France
b. Réglementation de la publicité et du marketing
c. La sécurité routière
d. Service de prévention et d’aide à distance
4. Le médecin généraliste
a. Le repérage précoce et l’intervention brève (RPIB)
b. Les spécificités de la consultation de l’adolescent
5. Réseau de soin et aides aux acteurs
IV. OBJECTIF
V. MATERIEL ET METHODE
A. LA POPULATION CIBLE
B. LE QUESTIONNAIRE
VI. RESULTATS
A. CARACTERISTIQUES DE LA POPULATION ETUDIEE
B. LA CONSULTATION DE L’ADOLESCENT EN MEDECINE GENERALE
C. LE MEDECIN GENERALISTE EN PRATIQUE
D. LE POINT DE VUE DU MEDECIN GENERALISTE
VII. DISCUSSION
A. LIMITES DE L’ETUDE
B. PRINCIPAUX RESULTATS
1. Consultation de l’adolescent
2. Prévention du risque alcool chez les adolescents
3. Le repérage précoce et l’intervention brève chez les adolescents
4. Consommation « normale » et problème de santé publique
C. PERSPECTIVES
VIII. CONCLUSION
IX. ANNEXES
X. BIBLIOGRAPHIE

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