L’histoire des benzodiazépines a déjà été rédigée par divers auteurs de façon très pertinente au cours des dernières années (28). Lors de leur introduction sur le marché, ces médicaments ont été accueillis comme une avancée majeure dans le domaine de l’anxiolyse puisqu’ils étaient considérés comme à la fois très efficaces et sans danger (43). Leurs mérites, vantés par les firmes pharmaceutiques, les rendirent populaires auprès des médecins et des consommateurs (28). Cependant, durant les années 1980, les benzodiazépines sont soudainement tombées en disgrâce et ont été considérées comme l’une de pires menaces pour la société «en temps de paix», un type de médicament plus difficile à arrêter que l’héroïne (12). Une campagne de dénigrement fit fureur dans les médias à la fin des années 1980 et au début des années 1990, générant une compassion pour les «victimes» de la dépendance aux benzodiazépines, ce qui n’avait jamais été pour les autres produits induisant une accoutumance. Les «malheureux usagers dupés» étaient décrits comme subissant des forces irrépressibles leur faisant perdre tout contrôle sur leur destinée (12). Les forces irrépressibles ne peuvent être que les effets indésirables qu’engendrent les benzodiazépines (1). Ces dernières peuvent en particulier entrainer des troubles de la mémoire et du comportement, une altération de l’état de conscience et des fonctions psychomotrices. Sans oublier que l’usage des benzodiazépines expose également à un risque de dépendance psychique et physique qui s’accompagne d’un syndrome de sevrage à l’arrêt du traitement (1).
Ces dangers liés à la consommation abusive des benzodiazépines et l’inexistence de données sur l’usage des benzodiazépines dans la République de Djibouti, nous ont amené à faire une étude sur la prescription des benzodiazépines au niveau des officines de pharmacie de la ville de Djibouti. C’est ainsi que nous avons confectionné un questionnaire en six points destinés aux patients ayant une prescription contenant au moins une BZD et dont la délivrance du produit en officine a été effective.
La classification des benzodiazépines en fonction de leur durée d’action
Il existe plusieurs façons de classer les BZD (14), dont les différentes caractéristiques peuvent chacune mener à des abus (32). On distingue habituellement BZD hypnotiques et BZD anxiolytiques, mais il ne faut pas perdre de vue que toute BZD réputée anxiolytique peut acquérir des propriétés hypnotiques. La puissance d’une BZD se caractérise par son affinité pour les récepteurs GABA. Une forte affinité témoignerait d’un plus grand risque de dépendance(38), qui est encore majorée en cas de demi-vie d’élimination brève. Le début de l’action après la prise orale est mesuré par la latence du pic plasmatique : une absorption rapide est fréquemment à l’origine d’un effet «flash», inducteur d’abus. La durée d’action est fonction de la demi-vie alpha et béta qui mesurent la distribution plasmatique et le temps d’élimination. La classification des BZD en fonction de leur durée d’action (courte, intermédiaire et longue) (41). Les BZD à absorption et élimination lentes sont plus adéquates dans le traitement de l’anxiété, alors qu’une absorption rapide semble préférable dans le cas de l’insomnie, surtout d’endormissement (42). Il faut savoir qu’une molécule à demi-vie courte produit plus d’effet de rebond et de sevrage, surtout si elle est de forte puissance. Certaines BZD sont des bioprécurseurs (pro-drogues) à l’origine d’un ou de plusieurs métabolites actifs, dont la demi vie peut être très longue et qui présentent un risque d’accumulation. Le praticien choisit la BDZ en fonction de ses caractéristiques, tout en préférant toujours celle qui présente le plus faible risque de dépendance. Une bonne connaissance des doses thérapeutiques habituelles et du dosage recommandé maximal permet de reconnaitre et de dépister les abus et d’éviter d’atteindre la concentration plasmatique maximale.
Propriétés pharmacologiques
Les BZD créent une confortable sensation de bien-être, comme l’alcool. Elles produisent une sensation de relâchement musculaire et de calme que la plupart des patients apprécient. Dans un certain sens, c’est l’une des plus grandes inventions du 20ème siècle, un progrès pour soulager l’anxiété après 2000 ans d’utilisation de l’alcool à cette fin (1).
Action anxiolytique
Décrire l’effet anxiolytique des benzodiazépines pourrait sembler superflu(4).Chez l’homme, les Benzodiazépines sont des médicaments psychotropes utilisés dans le traitement de l’anxiété et des troubles psychosomatiques qui l’accompagnent. Elles n’ont pas l’activité à elles seules dans les états dépressifs et se différencient des neuroleptiques par leur inefficacité dans le traitement des psychoses et l’absence de manifestations extrapyramidales. L’évaluation clinique et pharmacologique de leur action est difficile. Il faut en effet souligner les difficultés de mise en évidence des anxiolytiques chez l’animal lors d’un « screening» systématique par des méthodes classiques, les problèmes méthodologiques et théoriques de la création et de l’appréciation de l’anxiété chez l’animal, et les difficultés d’interprétation. Par ailleurs, il est qualitativement difficile de différencier d’un point de vue pharmacologique un tranquillisant d’un hypnotique : les anxiolytiques à doses fortes sont sédatifs et souvent hypnotiques à doses faibles (34).
Action anticonvulsivante
Les BZD sont généralement anticonvulsivantes. Elles sont peu prescrites dans l’épilepsie parce que la phénytoïne, la carbamazépine, le valproate et les autres antiépileptiques sont plus efficaces dans cette indication (1). Elles empêchent l’apparition, ou augmentent les seuils d’apparition des convulsions cloniques et toniques qui sont déclenchées par de très nombreux convulsivants chimiques : le pentéprazole, la picrotoxine, les inhibiteurs de l’acétylcholinestérase, les antagonistes de l’acide – aminobutyrique(GABA) (33).
En relation avec cette action anticonvulsivante, on trouve que les BZD sont capables d’inhiber les post-décharges des populations neuronales évoquées par stimulation électrique des certaines régions du cerveau et surtout à partir du système limbique. Les décharges paroxystiques à haute fréquence (décharges épileptiques) des neurones dans des tranches d’hippocampe, déclenchées par changement de la composition ionique du milieu physiologique ou par incubation en présence d’agents convulsivants, sont également inhibées par les benzodiazépines (33).
Action hypno-sédative
Effet sédatif
L’action sédative est souvent un effet secondaire des benzodiazépines utilisées comme anxiolytiques. En effet, la plupart des insomnies d’endormissement sont sous-tendues par l’anxiété, elles sont à distinguer des insomnies de milieu de nuit qui seraient plutôt le reflet d’un syndrome dépressif (34). Cette action sédative des BZD, c’est-à-dire une réduction du niveau de vigilance et de la réactivité psychomotrice, peut être détectée grâce à différents tests de comportement ou à des mesures électrophysiologiques. Sous l’influence de doses en général plus élevées que celles utilisées pour l’action anticonflit et anticonvulsivante, les animaux deviennent plus calmes, diminuent leur activité motrice spontanée et réagissent moins aux bruits ou aux contacts brusques («réaction de sursaut»). Ils font davantage de fautes dans les tests de comportement, par exemple lorsqu’ils doivent abaisser un levier à intervalles réguliers pour éviter une punition («réaction d’évitement») (1).
Effet hypnotique
Lors de l’augmentation des doses de BZD anxiolytiques, les actions sédative et hypnotique directes des produits puissants (d’autant plus qu’ils sont rapidement résorbés et éliminés) allongent la durée totale du sommeil. Celui-ci s’accompagne d’un raccourcissement du délai d’endormissement, avec des diminutions faibles du temps de sommeil paradoxal et une baisse plus marquée du temps de sommeil lent profond (11).
Effet myorelaxant
Leur effet relaxant sur le muscle justifie leur prescription chez les patients qui ont des problèmes de spasticité, de dystonie ou sclérose en plaque (1). Les BZD diminuent le tonus pathologiquement élevé de la musculature squelettique. Cette relaxation musculaire est d’origine centrale et la transmission neuromusculaire au niveau de la plaque motrice n’est pas affectée. Les réflexes monosynaptiques et polysynaptiques mettent en jeu des motoneurones affaiblis et un trouble de la coordination motrice (ataxie) est éventuellement associé à cette relaxation musculaire (33).
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Table des matières
Introduction
Première Partie : Étude bibliographique
I. Définition
II. Historique
III.Classification des benzodiazépines en fonction de leur durée d’action
IV. Propriétés pharmacologiques
IV.1.- Action anxiolytique
IV.2.-Action anticonvulsivante
IV.3.- Action hypno-sédative
IV.3.1.- Effet sédatif
IV.3.2.-Effet hypnotique
IV.4.-Effet myorelaxant
IV.5.- Action amnésiante
IV.6. L’abréaction
V. Mécanisme d’action
V.1.- GABA (acide-aminobutyrique)
V.2.Potentialisation de l’action du GABA par les BZD
V.3.- Récepteurs des BZD : couplage avec les récepteurs GABAA et les récepteurs périphériques
V.4.- Les ligands des récepteurs des benzodiazépines
VI. Propriétés pharmacocinétiques
VI.1.- Résorption
VI.2.- Distribution
VI.3.- Métabolisme
VI.4.- Élimination
VII. Indications thérapeutiques des BZD
VIII. Contre-indications
IX. Effets secondaires
X. Précautions d’emploi
XI. Interactions médicamenteuses
XII. La Prescription des BZD
XII.1.-Règles de la prescription médicale
XII.1.1. Règles communes
XII.1.2 Règles spécifiques
XII.2 Délivrance du médicament
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
I. Matériel et méthode
I.1 Matériel
I.1.- Cadre d’études
I.1.2 Questionnaire
I.2. Méthode d’étude
II. Résultats
II.1. La répartition des ordonnances en fonction de l’indication des BZD
II.2. La répartition des ordonnances en fonction des problèmes rencontrés avec l’utilisation des benzodiazépines
II.3. La répartition des ordonnances selon la disponibilité des BZD
II.4. La répartition des ordonnances en fonction de l’accessibilité financière des BZD
II.5. La répartition des ordonnances en fonction du moment de la prise des BZD
II.6. La répartition des ordonnances en fonction des différentes BZD prescrites
III. Discussion
Conclusion générale
Références Bibliographiques
Annexes