La définition classique d’un polytraumatisé est celle d’un patient atteint de deux lésions traumatiques ou plus, dont une au moins menace le pronostic vital[1]. Cette définition n’a pas d’intérêt pratique en urgence car elle suppose que le bilan lésionnel ait déjà été effectué. À la phase initiale, un traumatisé grave est un patient dont une des lésions menace le pronostic vital ou fonctionnel, ou bien dont le mécanisme ou la violence du traumatisme laisse penser que de telles lésions puissent exister. Il est donc très important d’inclure la notion de mécanisme et de violence du traumatisme dans la définition du polytraumatisé, au moins lors de la phase initiale [1]. Les caractéristiques principales du traumatisé grave peuvent être résumées ainsi:
● la gravité des lésions ne s’additionne pas mais se multiplie, par potentialisation de leurs conséquences respectives ;
● la sous-estimation de la gravité des lésions est un piège mortel ;
● l’absence de diagnostic de certaines lésions traumatiques peut avoir des conséquences vitales ou fonctionnelles dramatiques ;
● le temps perdu ne se rattrape pas ;
● les solutions thérapeutiques rendues nécessaires par certaines lésions peuvent être contradictoires impliquant parfois des choix stratégiques difficiles .
La stratégie de prise en charge pose encore un problème dans plus de la moitié des décès post-traumatiques [3]. Ainsi elle nécessite une chaine de soins multidisciplinaires qui va du ramassage précoce médicalisé à la réinsertion socioprofessionnelle du polytraumatisé en passant par des soins de qualité à l’hôpital.
ANATOMIE PATHOLOGIQUE
Circonstances des traumatismes selon la classification OMS
➤ Les traumatismes intentionnels causés par [6, 7,8] :
• des actes de violence envers autrui (agressions, homicides, faits de guerre);
• et par des actes de violence tournés contre soi-même (mutilation, tentative suicide, suicide).
➤ Les traumatismes non intentionnels sont provoqués par des évènements non-induits par les personnes :
• Les accidents de la circulation routière qui se définissent comme des collisions ou incidents impliquant au moins un véhicule routier en mouvement, sur une route publique ou sur une route privée à laquelle le public a droit d’accès. Cette classe comprend les collisions entre véhicules routiers, entre véhicules routiers et piétons, entre véhicules routiers et animaux ou obstacles fixes et dans lesquelles seul un véhicule est impliqué. Sont également visées les collisions entre véhicules routiers et véhicules ferroviaires.
• L’accident de travail se définit comme un accident, quelqu’un soit la cause, survenu par le fait ou à l’occasion du travail, sur toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.
Les circonstances sont incluses dans les critères de gravité :
➤ Éjection d’un véhicule
➤ Autre passager décédé dans le même véhicule
➤ Chute d’une hauteur de plus de
➤ Victime projetée ou écrasée
➤ Appréciation globale (déformation du véhicu de casque, absence de ceinture de sécurité)
➤ Blast.
Mécanismes
Il existe deux types de mécanisme en cas de polytraumatismes [4]:
➤ le mécanisme direct, au cours l’agent traumatisant, doué d’une certaine énergie cinétique, provoque la lésion traumatique au point d’impact ;
➤ et le mécanisme indirect, au cours duquel une contrainte mécanique imposée à l’organe détermine sa lésion à distance du point d’application des forces.
Les types de lésions observées
Les traumatismes directs (agents tranchants, contondants, pénétrants) sont responsables de lésions pariétales (plaies, ecchymoses, hématomes…) signant l’atteinte probable des organes sous-jacents. Le syndrome d’écrasement expose au risque d’une levée de garrot (prévenu par le remplissage), puis à l’insuffisance rénale secondaire (alcalinisation préventive). Les traumatismes indirects génèrent des lésions internes ou à distance, sans atteinte pariétale obligatoire. La décélération donne des contusions, dilacérations, rupture des organes pleins, arrachements des pédicules vasculaires (foie, rate, cerveau, isthme aortique, vaisseaux mésentériques). L’onde de choc de l’effet de souffle (blast) donne des lésions des organes creux et des alvéoles pulmonaires. L’hyperflexion-extension brutale du rachis cervical est responsable de lésions vertébro-médullaires.
Les interférences lésionnelles caractérisent le polytraumatisé et sont de trois ordres :
➤ l’effet de sommation dont le pronostic vital peut être mis en jeu à cause de l’association lésionnelle alors que chaque atteinte prise séparément n’aurait pas les mêmes conséquences ;
➤ l’effet de masquage ou d’occultation « une lésion peut en cacher une autre». Par exemple, chez un patient présentant des troubles de conscience, le diagnostic clinique de rupture de viscère creux est plus difficile ;
➤ L’effet d’amplification :un traumatisme thoracique peut entraîner une hypoxie qui a des effets délétères chez un traumatisé crânien. La gravité des lésions cérébrales engendre un coma avec troubles de la déglutition et risque d’inhalation de liquide gastrique qui aggrave l’hypoxémie préexistante : c’est la constitution d’un cercle vicieux qu’il convient de rompre.
PRESENTATION DE L’HOPITAL GENERAL DE GRAND YOFF (HOGGY)
Historique
La Caisse de Sécurité Sociale a ouvert en 1989 un Centre de Traumatologie et d’Orthopédie (CTO) dont la vocation première était de recevoir et de soigner les victimes d’accidents de travail. Le but visé était de réduire les rentes versées, d’assurer un meilleur traitement aux victimes et de réaliser ainsi des économies évaluées à l’époque à huit cent millions (800 000 000 F CFA) par an. Ce Centre de Traumatologie comportait :
❖un service d’urgence autonome dirigé par un chef de service des urgences avec un système de garde quotidien assuré par les internes et étudiants en Certificat d’Etude Spécialisée(CES) et hebdomadaire assuré par un réanimateur et un chirurgien orthopédiste sénior. Le service d’urgence comptait une salle d’accueil de consultation, un bloc opératoire, une échographie, une radiographie mobile et une réserve de sang. Tous les examens biologiques venant des urgences étaient traités en priorité par le laboratoire.
❖Un service de réanimation avec trois réanimateurs : un aux urgences, un au bloc opératoire et un à la réanimation.
❖Un service de traumatologie adulte.
❖Un service de traumatologie infantile.
❖Un service destiné aux autres spécialités chirurgicales : viscérale, urologie, ORL, maxillo-faciale, neurochirurgie et ophtalmologie
❖Un service des brulés non fonctionnel à l’époque. Ce centre qui avait une présence importante des réanimateurs et des chirurgiens orthopédistes aux urgences avait comme doctrine : un traitement urgent complet et définitif de tous les blessés évacués aux urgences. Tous les blessés étaient opérés dans les 24 heures si leur état le permettait.
Ainsi avec ce centre, une nouvelle vision de prise en charge rapide et complète avait fini de s’imposer, s’exprimant lors du conflit entre le Sénégal la Mauritanie en 1989 et de l’accident de la Société Nationale de Commercialisation des Semences (SONACOS) en mars 1992 qui a fait environ 200 blessés et plusieurs décès. D’où la notion d’hôpital d’urgence dédié à cette structure à cette époque. Après cinq années de fonctionnement, le CTO a connu un déficit cumulé de six milliards (6 000 000 000 FCFA) et de lourds contentieux sociaux. Malgré les nombreuses expertises et efforts de redressement, les difficultés ont persisté. La Caisse de Sécurité Sociale a rétrocédé, en 1996, le Centre de Traumatologie et d’Orthopédie à l’État du Sénégal qui décida d’en faire un hôpital général à vocation sous régionale. Ainsi, le CTO devint l’Hôpital Général de Grand-Yoff (HOGGY) [9]. Cet Etablissement Publique de Santé(EPS) de niveau III poursuit une mission de service public en termes de soins, de formation, d’enseignement et de recherches. Il occupe une superficie de 3,5 hectares dans la Commune de Grand-Yoff avec un bâtiment principal entouré de structures pavillonnaires et d’espaces verts. La capacité d’accueil théorique de l’Hôpital est de 245 lits installés extensibles à 300 lits. Il comptait un effectif de 670 agents permanents à la date du 31 octobre 2015. Ses ressources financières proviennent essentiellement des produits issus de ses prestations et de la subvention de l’État du Sénégal.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GENERALITES
I.ANATOMIE PATHOLOGIQUE
1.Circonstances des traumatismes selon la classification OMS
2.Mécanismes
3.Les types de lésions observées
II.PRESENTATION DE L’HOPITAL GENERAL DE GRAND YOFF
1.Historique
2.Description du service d’urgence de l’HOGGY
III.PROCEDURE DE PRISE EN CHARGE DES POLYTRAUMATISES AU SAU DE HOGGY
1-L’objectif de la prise en charge pré-hospitalière
2-La prise en charge aux urgences
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
MATERIEL ET METHODE D’ETUDE
I-CADRE D’ETUDE
II-MATERIEL
III-METHODE
RESULTATS
I.LES ASPECTS EPIDEMIOLOGIQUES
II.DONNEES DIAGNOSTIQUES
III.PRISE EN CHARGE HOSPITALIERE
IV.DONNEES EVOLUTIVES
DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES