Chronologie de la découverte de la betterave à sucre

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Les plantes productrices de sucre dans l’histoire

Comme nous l’avons souligné plus haut, le miel, qui fut la source originelle de sucre naturel, a, pour diverses raisons, été supplanté par le sucre issu plusieurs végétaux.
C’est ce que nous allons aborder ci-dessous.

Quelques sources historiques

Précisions, avant de commencer que cette liste n’est pas exhaustive : l’objectif était de se limiter aux trois principales sources végétales en sucre mais nous aurions pu également parler, bien qu’elles soient minoritaires, du dattier et du sorgho principalement en Afrique, des agaves au Mexique, du mélèze, du frêne et du bouleau dans les régions européennes.

Le palmier à sucre

La première plante dont l’homme ait extrait du sucre fut une espèce de palmier dioïque poussant exclusivement en Asie du Sud-Est. Le palmier à sucre (Borassus flabellifer, Arécacées) est originaire du sud de l’Inde. Rustique, il se plaît dans un sol meuble, sableux ou argileux et régulièrement arrosé. Cet arbre résistant aux sécheresses (grâce à de profondes racines) et aux inondations, peut atteindre 30 mètres et vivre jusqu’à 150 ans.
Aux alentours du III millénaire avant notre ère, cet arbre nourricier était sacré : les paysans qui en extrayaient la sève le vénéraient comme une divinité chtonienne, c’est-à-dire faisant partie d’une mythologie souterraine, tellurique et obscure. Il n’est pas rare, même de nos jours, de retrouver le palmier à sucre aux alentours de certains temples.
Le sucre de ce palmier est contenu dans la sève des inflorescences (les grimpeurs qui les exploitent préfèrent les inflorescences femelles car les mâles contiennent moins de sucre et le jus est moins parfumé) : la personne chargée de la récolte du jus doit donc monter tout en haut du tronc via des échelles de bambou.
Une fois à la hauteur des inflorescences, il faut les inciser pour en faire écouler la sève, sève qui est récoltée dans des pots en terre cuite. C’est un travail périlleux et ancestral que seuls des professionnels allant de villages en villages effectuent.
L’exploitation commence en novembre-décembre avec la croissance de l’inflorescence, connaissant son apogée en février-mars, et se termine vers le mois de mai10.
La teneur en saccharose de la sève de ce palmier est importante et se situe en moyenne autour de 11%. Il peut être exploité jusqu’à l’âge de 100 ans, les inflorescences étant absentes durant les vingt premières années de vie de l’arbre.
On estime que pour une période de récolte de 2 mois, un Borassus fournit 60kg de sucre par an (cette période pouvant être plus longue dans certaines régions).
En plus de l’extraction du sucre provenant de sa sève, ses feuilles sont toujours utilisées dans la confection du toit des maisons et pour couvrir les murs. On utilise aussi ses fruits de la taille d’un pamplemousse et qui renferment des noyaux contenant une pulpe sucrée et filamenteuse. Le tronc des arbres trop âgés ou trop grands pour être exploités est utilisé comme matériaux de construction et dans la fabrication de pilotis. Enfin, du vin de palme est fabriqué par fermentation de la sève11.
Cependant il existe plusieurs inconvénients à l’extraction de sucre de palme : le rendement fluctue notamment avec les aléas climatiques, une forte saison sèche réduisant les récoltes. La cristallisation du sucre nécessite des besoins en bois de chauffe considérables : on estime qu’il faut 160kg de combustible pour produire 35kg de matière sèche, ce qui provoque une déforestation importante dans les zones de culture du palmier à sucre. Un autre facteur limitatif est, nous l’avons vu, la croissance assez lente de cet arbre qui n’est exploité qu’à l’apparition des inflorescences, 20 à 25 ans après sa plantation. Enfin, la récolte est dangereuse et ceux qui s’y affairent ne continuent que très rarement au-delà de 40 ans. Ils risquent sans cesse les chutes et sont particulièrement affectés par les maladies tropicales12.
Bien qu’étant un sucre apprécié, il est difficile à obtenir. Ainsi la culture du palmier à sucre est devenue marginale au fil des siècles et elle s’est effacée de façon indéniable et logique, devant une autre plante tropicale, la canne à sucre, plus facile à cultiver, plus rentable et à croissance plus rapide.

La canne à sucre

La canne à sucre est la plante saccharifère la plus répandue actuellement dans le monde. Appartenant à la famille des Poacées, ce “roseau sucré” pourrait avoir comme origine Saccharum robustum L., une plante de Papouasie Nouvelle- Guinée. Les premières traces de sa culture remontent à 2000 av J-C dans le golfe du Bengale, le mot “sucre” a d’ailleurs une étymologie indienne dérivant du sanskrit शक? रा (Shakar) signifiant grain de sable. Il est intéressant de noter que cette étymologie est commune à bon nombre de langue indo-européennes actuelles13 : Sugar en anglais, Zucker en allemand, Azucar en espagnol, Zucchero en italien, Sakar en arabe, Seker en turc, Tsukor en hongrois, Sukker en norvégien etc. On retrouve des remarques sur le “goût du suc tiré de la canne” dans le Ramayana14, un poème sanscrit fondateur de l’hindouisme.
C’est aux alentours de 300 av J-C que les peuples d’Occident découvrirent son existence, dans un rapport écrit par Mégasthène15, ambassadeur d’Alexandre le Grand en Inde. Celui-ci, reprenant une expression des Perses, décrit la canne à sucre comme “un roseau donnant du miel sans le concours des abeilles”16. Pline l’Ancien en fera une description dans son Historia Naturalis : “le miel des Indes est recueilli sur des roseaux : c’est blanc comme la gomme, on l’emploie seulement en médecine”.
Son usage resta discret jusqu’à ce que les Arabes, après avoir envahi la Perse, rapportent la canne à sucre et l’implantent en Palestine et en Egypte au VIIe siècle. Le succès est tel qu’elle fut cultivée partout où les conditions de cultures étaient possibles avec la main d’oeuvre locale : à partir de là, l’esclavagisme devint indissociable de la culture de la canne et ne cessera pas avant le XIXe siècle.
Puis ce sont les croisés qui la feront connaître et la transplantèrent en Europe occidentale au XIIe siècle. Elle fut par la suite cultivée en Sicile, en Calabre, aux Canaries, à Madère. Il y eut également une vaine tentative de culture dans le midi de la France en Provence17 (culture qui fut abandonnée à cause du manque d’humidité auquel était soumise la canne) quelques temps avant que Venise ne devienne la grande capitale du sucre en Europe dans les années 1450. A l’âge d’or de la Sérénissime, le sucre arrivait d’Orient et d’Egypte par bateau et était expédié dans toute l’Europe jusqu’en Angleterre18.
Véronèse et Titien, deux peintres vénitiens du XVIe siècle, agrémentaient leurs peintures par des représentations du sucre de l’époque, sucre qui fût aussi utilisé pour fabriquer des lustres éphémères par les artisans de l’île de Murano.
Selon Eric Birlouez dans sa conférence Histoire et géographie de la saveur sucrée, les maîtres confiseurs italiens furent les premiers à copier et compiler de nombreuses recettes orientales dans un recueil intitulé “L’Art du Sucre” : parmi ces recettes on peut citer une affriolante coutume qui recommandait de croquer des “épices de chambres” au lit, des sucreries constituées de gingembre enrobé dans du sucre qui avaient les propriétés de “réveiller la semence, exciter les ébats et favoriser le sommeil”.
La rivale génoise ne fut pas en reste dans l’import de sucre arabe tout comme les villes de Marseille et de Cadix un peu plus tard qui disposaient de vastes entrepôts afin de stocker les grandes quantités de sucre attendant d’être expédiées.
Ni la concurrence du miel ou son prix exorbitant ne réduisait l’engouement général pour ce “sucre indien”.
Cependant on avait remarqué certains inconvénients au sucre de Méditerranée : la quantité produite répondait de moins en moins à l’ampleur du marché et la route du sucre échappait parfois aux Européens qui désiraient s’affranchir de leur dépendance aux états de l’Empire turco-arabe.
Le temps des grandes découvertes pointait à l’horizon et déjà l’on avait remarqué que la canne s’acclimatait fort bien dans les îles de l’Atlantique nord. Ainsi commença la culture de la canne dans les Caraïbes : dès son deuxième voyage en 1493, Christophe Colomb l’implanta sur l’actuelle île de Saint-Domingue19. Du côté de la France, l’économie sucrière aux Antilles débute dès les années 1650-60, sous Louis XIV et surtout sous l’influence de son ministre des finances, Jean-Baptiste Colbert 20 qui se félicitait d’ailleurs que “les quantités de sucre envoyées à la Métropole s’accroissent, les raffineries se multiplient et le Royaume, naguère tributaire de l’étranger pour le sucre, commence à lui en vendre”.
A la veille de la révolution de 1789, la production sucrière de la France répondait au cinquième de la demande européenne.
Cependant, cette culture nécessite des bras que des conditions de travail déplorables usent rapidement et lorsque les indiens locaux furent décimés il fallut trouver une autre solution et dès le milieu du XVIe siècle un trafic d’esclave s’était mis en place entre l’Europe, l’Afrique et les Amériques.
Environ un siècle et demi après le début de cette culture, le déclin commence à se faire sentir : Saint Domingue, colonie française qui constituait à l’époque le plus grand producteur de canne à sucre au monde, est perdue lors de la révolution haïtienne de 1791. Petit à petit, se sont chacune des colonies sucrières de l’Atlantique nord qui sont écartées (envahies par les Britanniques et les Portugais lors des guerres du début du XIXe siècle ou encore acquérant leur indépendance).
En Europe, la campagne d’Egypte de 1798 a d’ailleurs un rôle économique autant que militaire : désireux de bloquer la route des Indes à l’Angleterre, Napoléon voit en l’Egypte une solution de remplacement des colonies antillaises pour la culture de la canne à sucre. Cependant, après la défaite d’Aboukir qui élimine la flotte française et les nombreuses déroutes des français notamment au siège de Saint- Jean d’Acre, Napoléon se résout à rentrer en France. Il laisse le commandement à Kleber mais suite à l’assassinat de ce dernier en 1800, l’armée française capitule et elle est rapatriée un an plus tard : il n’y aura pas de canne à sucre française en Egypte.

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Table des matières

I. Introduction
II. Généralités et histoire
A. Le sucré, une histoire de goût
B. Les plantes productrices de sucre dans l’histoire
1. Quelques sources historiques
a) Le palmier à sucre
b) La canne à sucre
c) L’érable à sucre du Canada
2. Autres sources européennes
a) La carotte
b) La pomme
c) La châtaigne
d) Le maïs
e) Le raisin
C. Chronologie de la découverte de la betterave à sucre
1. La betterave avant le sucre
a) Origine de la betterave (… – 3000 av J-C)
b) Le début de la domestication (Vers 3000 av J-C – an 0)
c) Vers une démocratisation de la betterave (Vers An 0 – …)
2. Les grandes figures
a) Olivier De Serres, le précurseur (1539-1619)
b) Marggraf, l’incompris (1709-1782)
c) Achard, l’expérimentateur (1753-1821)
D. La betterave à sucre en France
1. Les prémices
2. Une situation politique des plus instables : le blocus
3. Le blocus, une opportunité plutôt qu’un fléau pour le sucre indigène
4. Les débuts difficiles de l’industrie du sucre indigène
a) L’omniprésence du sucre de canne sur le déclin
b) L’embellie de la fin des années 1820 puis la “guerre des sucres” des années 1830
5. La seconde moitié du XIXe siècle, une croissance quasi-exponentielle
III. La betterave à sucre
A. Description botanique de la plante
1. Systématique et classification
2. Appareil végétatif
3. Appareil reproducteur
4. Cycle végétatif
B. Composition chimique
C. Le défi de l’augmentation de la quantité de sucre dans la betterave.
1. Une sélection physico-chimique …
2. … ainsi que génétique
IV. Le sucre de betterave
A. Evolution des méthodes d’extraction du sucre de betterave
1. Du commencement à l’aube du XXe siècle : un siècle de progrès techniques
a) Nettoyage des betteraves
b) Râpage des betteraves
c) Extraction
d) Défécation
e) Clarification
f) Filtration
g) Evaporation et Cuite
h) Cristallisation
2. L’extraction du sucre de betterave à notre époque
B. Le sucre de betterave et l’Homme : Utilisation du XIXe au début du XXe siècle
1. Dans la vie quotidienne.
2. Dans l’univers de la pharmacie
a) Contexte de la pharmacie et du pharmacien à cette époque
b) Médicaments et sucre, une quasi-symbiose
(1) Les préparations pharmaceutiques et le sucre de betterave
(2) Les spécialités et le sucre de betterave
V. Conclusion
VI. Annexes
Annexe 1 : Distribution des espèces et sous-espèces du genre Beta
Annexe 2 : Décret de Berlin, 1806
VII. Bibliographie

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