Chocs laser sur le diamant, l hélium et l hydrogène

Les approches expérimentales de la mesure EOS

   Deux principales approches existent pour comprimer la matière : l’approche statique où l’échantillon est maintenu sous pression et l’approche dynamique pour laquelle le matériau est mis sous pression par le passage d’une onde de choc. Le principe des méthodes statiques est de maintenir l’échantillon entre deux enclumes et de les rapprocher doucement pour ainsi diminuer le volume et augmenter la pression. Cette méthode a évolué progressivement au cours du temps grâce à l’utilisation de matériaux de plus en plus durs. P. W. Brigman fut le pionnier dans ce domaine et obtint le prix Nobel en 1946. Il avait pu atteindre alors 10 GPa avec des enclumes en carbure de tungstène. Lawson et Tang [2] furent les premiers à utiliser des enclumes en diamant. Cette évolution permit non seulement de repousser les limites des pressions atteintes, mais aussi les techniques d’analyse, car le diamant étant transparent sur un grand domaine de longueurs d’onde toutes les techniques de spectroscopie et de diffraction X pouvaient maintenant être utilisées. Les cellules à enclumes diamant sont maintenant l’outil de référence pour les études des hautes pressions. Couplées avec un système de chauffage résistif ou un chauffage laser, cette méthode permet de décrire un grand domaine du diagramme de phase. Le principe de l’approche dynamique est de générer une onde de choc dans un échantillon le portant ainsi, pendant un court instant (quelques nanosecondes), à des pressions très élevées. Au contraire de l’approche statique, l’onde de choc n’augmente pas seulement la pression, mais elle augmente aussi la température. On passe donc très rapidement d’un milieu solide ou gazeux froid à un milieu sous très hautes pressions et hautes températures.

Relation de Rankine-Hugoniot

   Nous allons maintenant nous intéresser aux conséquences de l’apparition d’une telle onde dans le milieu. On imagine un piston qui se déplace vers la droite à une vitesse u et comprime la matière. Nous supposerons donc que l’onde de choc est déjà formée et qu’elle se propage à une vitesse D. A droite de l’onde de choc le matériau est encore dans son état initial P0, ρ0 et E0

Correction de résistance

   Dans le cas du solide, une autre correction doit être prise en compte [7]. La résistance d’un matériau sous choc, au dessus de la limite élastique, a tendance à augmenter. Le matériau se « durcit ». Cela est du à la rapidité de la compression qui entraîne ainsi une grande densité de défauts durcissant le matériau par rapport aux conditions ambiantes. Ce phénomène est ralenti par l’augmentation de température dû au choc qui, au contraire, a tendance à éliminer les défauts. On va donc observer une augmentation de la rigidité du matériau, puis une diminution jusqu’à devenir nulle lors du passage à l’état liquide. Cette correction est égale à 2/3Y où Y est la limite élastique (contraintes de fluage). La figure présente la correction à appliquer en fonction de la pression de long de l’Hugoniot pour différents systèmes [7]. Cette correction est ainsi la correction à donner à la pression donnée par les relations de Rankine-Hugoniot pour avoir la pression hydrostatique du choc

Interaction entre atomes

   Comme nous l’avons vu, une équation d’état est une relation qui relie plusieurs grandeurs thermodynamiques, f(P,V,T,N)=0 par exemple. Cela revient à déterminer la fonction de partition Z ou encore de façon équivalente l’énergie libre F du système. Deux grandes familles de modèles existent : l’approche physique et l’approche chimique. Dans l’approche physique, seules les particules élémentaires, électrons et noyaux, sont considérées et interagissent entre eux par effet Coulombien. Il suffit alors de résoudre l’équation de Schrödinger pour le système obtenant alors un spectre d’états liés qui va former les atomes et les molécules. C’est cette idée qui est à la base de la dynamique moléculaire et des méthodes ab-initio : résoudre l’Hamiltonien pour un système de particules élémentaires. Cette méthode bien que très intuitive est loin d’être simple à mettre en oeuvre. Dans l’approche chimique, les particules fondamentales ne sont plus les noyaux et les électrons, mais les espèces chimiques du milieu, atomes,ions et électrons. Ces espèces interagissent alors entre elles et, en exprimant l’énergie libre totale des espèces avec leurs interactions, on peut remonter à la configuration du système. Cette approche reste plus simple que l’approche physique dans la mesure où les potentiels d’interaction restent eux aussi simples. Elle a cependant certaines limites dues au fait que à fortes densités, les électrons se délocalisent et les potentiels d’interaction doivent être modifiés. Les espèces chimiques perdent alors leur identité

Ionisation en pression

   Prendre en compte l’environnement extérieur et les interactions entre les particules constituant le plasma entraîne 4 modifications importantes [24].
1 : Le puits de potentiel dans lequel se trouvent les ions et les électrons est maintenant déterminé par le plasma environnant. Cela donne lieu à des effets appelés « self-energy effects ».
2 : Les forces coulombiennes sont écrantées par la présence du plasma (longueur de Debye classique/ Thomas-Fermi quantique) et on observe ainsi un déplacement dans les niveaux d’énergie interne.
3 : La présence d’électrons environnant limite, par le principe d’exclusion de Pauli, les niveaux d’énergie accessibles. Un électron ne pourra pas prendre un niveau d’énergie déjà occupé par un électron du plasma.
4 : A cause des collisions entre les électrons de liaison et les électrons du plasma, la durée de vie des états de liaison est limitée.
En majorité, les déplacements des niveaux d’énergie sont dus aux deux premiers points. Il faut donc, pour tenir compte de ces effets, remplacer les valeurs réelles des énergies des niveaux par des valeurs effectives

Approche dynamique

   Le principe de l’approche dynamique est de générer une onde de choc dans un échantillon le portant ainsi, pendant un court instant (quelques nanosecondes), à des pressions très élevées. Au contraire de l’approche statique, l’onde de choc n’augmente pas seulement la pression, mais elle augmente aussi la température. On passe donc très rapidement d’un milieu solide ou gazeux froid à un milieu très dense et très chaud. Les pressions atteintes peuvent alors être très grandes, mais l’augmentation importante de la température limite le facteur de compression à 4 quel que soit le matériau étudié. L’ensemble des points atteints par cette méthode sont situés sur la courbe de Rankine Hugoniot, courbe unique déterminée pour une densité initiale de l’échantillon. Les principaux dispositifs utilisés à l’heure actuelle pour générer des ondes de choc sont entre autres les canons à gaz, les machines Z pinch et les lasers. Quelques explosions nucléaires ont été instrumentées pour ces mesures. Le domaine extrême alors obtenu peut maintenant être couvert par l’utilisation des lasers kJ. La figure 3.2 présente une illustration de ces 4 systèmes. Le principe du canon à gaz est de mettre en mouvement par l’explosion d’un gaz un projectile qui va percuter l’échantillon provocant ainsi l’apparition d’une onde de choc. Les pressions atteintes avec ce système pour l’hydrogène par exemple sont de l’ordre de 300-400 kbar pour des températures de quelques milliers de degrés . Les machines Z pinch fonctionnent de manière différente. On dispose autour de l’axe z un réseau de fils dans lequel on fait passer un courant très intense pendant une courte durée. Au passage du courant, les fils sont vaporisés et grâce au champ magnétique B produit par le passage de ce même courant, le plasma crée est comprimé le long de l’axe z . Ce plasma très chaud émet des rayons X qui vont comprimer à leur tour l’échantillon placé au centre. On peut alors atteindre des pressions de l’ordre du Mbar et des températures de plusieurs eV. L’explosion nucléaire est la méthode qui permet d’atteindre les pressions et les températures les plus élevées. L’explosif est en contact avec un métal dans lequel l’onde de choc est générée puis transmise à l’échantillon à étudier. Les pressions sont alors de l’ordre de la dizaine de Mbar. Cette méthode est très similaire aux explosions chimiques. Seule l’intensité de l’explosion change.

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Table des matières

I Introduction 
II Approche théorique 
1 Comportement dynamique : les relations utiles 
1.1 Les équations fluides
1.1.1 Conservation de la masse
1.1.2 Conservation de l’impulsion
1.1.3 Conservation de l’énergie
1.2 Propagation des ondes sonores
1.3 Invariants de Riemann : comportement dynamique le long de l’isentrope
1.4 Formation de l’onde de choc
1.5 Relation de Rankine-Hugoniot
1.5.1 Conservation de la masse
1.5.2 Conservation de l’impulsion
1.5.3 Conservation de l’énergie
1.6 Calcul de la variation d’entropie lors du passage d’une onde de choc
1.6.1 L’entropie croît le long de l’Hugoniot
1.6.2 Remarque sur l’augmentation d’entropie
1.6.3 L’Hugoniot est différente de l’isentrope seulement au 3ème ordre au niveau du pôle
1.7 Calcul pour un gaz parfait
1.8 Evolution de la température le long de l’Hugoniot
1.8.1 Cas du gaz parfait
1.8.2 Modèle de Grüneisen
1.9 Onde de relaxation
1.10 Cas d’une onde de choc dans un solide
1.10.1 L’onde élastique
1.10.2 Correction de résistance
2 Quelques modèles pour décrire la matière dense 
2.1 Gaz parfait moléculaire
2.1.1 Forme d’énergie libre en fonction de γ =cpcv
2.1.2 Comportement de l’Hugoniot d’un gaz parfait
2.2 Interaction entre atomes
2.2.1 Approche chimique avec potentiels
2.2.2 Modèle de Grüneisen
2.3 Contribution électronique
2.3.1 Gaz d’électrons sans interaction
2.3.1.1 Modèle de Fermi-Dirac
2.3.1.2 Comportement de l’Hugoniot
2.3.1.3 Equations de Hartree-Fock
2.3.2 Modèle de Thomas-Fermi
2.3.3 Théorie de la fonctionnelle de la densité
2.4 Ionisation et conductivité
2.4.1 Equation de Saha
2.4.2 Ionisation en pression
2.4.3 Modèle de bandes : fermeture du gap
2.4.4 Modèle de Drude
2.4.5 Relation entre réflectivité et conductivité
2.4.5.1 Propagation du champ dans le milieu
2.4.5.2 Relation avec la conductivité
III Mise en place expérimentale 
3 Chocs laser dans des cibles pré-comprimées 
3.1 Principe du couplage statique-dynamique
3.1.1 Approche statique
3.1.2 Approche dynamique
3.1.3 Couplage statique dynamique
3.2 Mesures absolues et mesures relatives
3.2.1 Mesures absolues
3.2.1.1 Radiographie transverse
3.2.1.2 Mesures avec marches
3.2.2 Mesures relatives : méthode de désadaptation d’impédance
3.2.2.1 Propagation d’un choc entre deux milieux
3.2.2.2 Méthode de désadaptation d’impédance
3.2.3 Principe d’une cible pour choc laser
3.3 La cible pré-comprimée
3.3.1 Schéma d’une cible
3.3.2 Caractérisation de la cible
3.3.2.1 Mesure de la pression initiale
3.3.2.2 Mesure de l’épaisseur de l’échantillon
4 Mesures des vitesses de choc : technique VISAR 
4.1 VISAR
4.1.1 Interféromètre de Mach Zender
4.1.2 Retard introduit par l’étalon
4.1.3 Calcul lorsque la cible est immobile
4.1.4 Calcul lorsque la cible est animée d’une vitesse v(t)
4.1.5 Sensibilité des visars
4.1.6 Influence de la réflectivité de la surface en mouvement
4.1.7 Nature de l’interface réfléchissante
4.2 Traitement des données
4.2.1 Données VISAR
4.2.2 Traitement de l’image
4.2.2.1 Distorsion de l’image
4.2.2.2 Franges parasites
4.2.3 Extraction de l’information
4.2.4 Précision atteinte
5 Une nouvelle métrologie : utilisation du quartz 
5.1 Avantages du quartz
5.2 Equation d’état du quartz
5.2.1 Diagramme de phase du quartz et propriétés
5.2.2 Données expérimentales sur l’Hugoniot
5.3 Modèle de détente
5.3.1 Modèle de Grüneisen
5.3.2 Détermination expérimentale du coefficient de Grüneisen
5.3.3 Approximation de la détente isentropique
5.3.4 Approximation de l’Hugoniot secondaire
5.3.5 Comparaison du modèle avec les modèles existants
5.3.6 Comment prendre en compte la précompression ?
5.4 Mesure de réflectivité
5.5 Mesure de température
5.5.1 Technique de mesure
5.5.2 Utilisation du quartz comme référence in situ
5.6 Estimation des barres d’erreur
5.6.1 Erreur sur la vitesse de choc
5.6.2 Erreur sur la pression P et la vitesse particule Up
5.6.3 Erreur sur la réflectivité
5.6.4 Erreur sur la température
6 Les lasers de puissance 
6.1 Génération d’une onde de choc par laser : interaction laser matière
6.1.1 Propagation d’une onde électromagnétique dans un plasma
6.1.2 Zone d’interaction
6.1.3 Zone de conduction
6.2 Simulations hydrodynamiques
6.2.1 Code Lagrangien
6.2.2 Equations d’état utilisés
6.2.3 Dimensionnement de l’expérience
6.2.3.1 Influence de l’intensité laser sur le temps de transit dans le diamant
6.2.3.2 Influence de la forme de l’impulsion
6.2.4 Analyse des résultats post-expérience
6.2.4.1 Transmission du choc
6.2.4.2 Evolution de la vitesse du choc
6.2.4.3 Estimation du préchauffage
6.3 Lasers utilisés
6.3.1 OMEGA
6.3.2 LULI 2000
IV Résultats 
7 Diamant 
7.1 Motivations
7.2 Connaissances actuelles sur le diagramme de phase
7.2.1 Mesures sur l’Hugoniot
7.2.2 Evolution de la réflectivité
7.2.3 Modèles théoriques
7.2.3.1 Modèle de Fried et Howard
7.2.3.2 Autres modèles
7.3 Résultats
7.3.1 Configuration expérimentale
7.3.2 Mesures réalisées
7.3.3 Evolution de P, ρ, T le long de l’Hugoniot
7.3.4 Evolution de la réflectivité
7.4 Conséquences astrophysiques
7.5 Conclusion
8 Hélium 
8.1 Motivations
8.1.1 Intérêt fondamental
8.1.2 Intérêt astrophysique
8.2 Connaissances actuelles sur le diagramme de phase
8.2.1 Equation d’état
8.2.1.1 EOS fluide
8.2.1.2 Indice
8.2.1.3 Courbe de fusion
8.2.1.4 EOS Hugoniot
8.2.1.5 Prédictions Hugoniot
8.2.2 Ionisation par pression
8.2.2.1 Ionisation par pression en phase fluide
8.2.2.2 Mesures de conductivité des russes
8.3 Résultats
8.3.1 Comparaison avec les données existantes : évolution de P, ρ, T à 1.2 kbar
8.3.2 Effet de la précompression
8.3.3 Ionisation et métallisation
8.4 Conclusion
9 Hydrogène 
9.1 Un intérêt fondamental et astrophysique
9.2 Connaissances actuelles sur le diagramme de phase
9.2.1 Equation d’état
9.2.1.1 EOS fluide
9.2.1.2 Indice
9.2.1.3 Courbe de fusion et hautes températures
9.2.1.4 Controverse sur l’hugoniot du D2
9.2.2 Ionisation
9.2.2.1 Mesure du gap dans la phase solide
9.2.2.2 Metallisation dans la phase fluide
9.2.3 Calculs théoriques
9.2.3.1 Modèle chimique
9.2.3.2 Possible existence d’une transition de phase plasma
9.2.3.3 Comportement de l’Hugoniot
9.3 Résultats
9.3.1 Objectifs des mesures
9.3.2 EOS H2 et D2
9.3.3 Effet de la précompression
9.3.4 Métallisation
9.4 Conséquences astrophysiques
9.5 Conclusion
10 Hydrogène/Hélium 
10.1 Problématique astrophysique
10.2 Etude des mélanges H2/He : problème de miscibilité
10.3 Conséquences sur Jupiter et Saturne
10.4 Premiers résultats
10.4.1 Comment détecter la miscibilité ?
10.4.2 Mesures
10.5 Conclusion
V Conclusion

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