Définition de l’hépatite B
L’hépatite B est une maladie virale due à une infection par le virus de l’hépatite B (VHB) et entrainant une inflammation du foie. Elle est très répandue dans le monde et particulièrement au Sénégal. La gravité potentielle de l’hépatite B est constituée par le risque d’évolution vers une hépatite chronique B qui peut se compliquer d’une cirrhose du foie et d’un cancer primitif du foie. C’est une maladie mortelle avec un taux de réponse très faible à la chimiothérapie actuelle [31].
Absence de thérapeutique curative
A l’heure actuelle il n’y a aucun traitement spécifique de l’hépatite virale aiguë B (25). Les antiviraux utilisés tels que la vidarabine et son dérivé monophosphaté ainsi que l’interféron recombinant alpha [32], constituent le traitement de référence de l’hépatite chronique active (réplication virale) [91]. Cependant, cette thérapeutique donne des résultats mitigés puisqu’elle ne permet d’obtenir une rémission que chez environ 50% des patients; pour les 50% de nonrépondeurs, aucune alternative thérapeutique ne peut être actuellement proposée [69]. De plus, 50% des patients répondeurs rechutent à l’arrêt du traitement [100], les antiviraux n’éliminant que rarement le virus [8]. Il s’ajoute que, le coût très élevé de l’interféron dans le traitement de l’hépatite chronique active B (environ 1,5 millions CFA /malade) et la nécessité d’un suivi relativement lourd des patients traités, rendent illusoire son emploi dans les pays du Tiers Monde [100]. Il reste également à prouver que l’amélioration des critères histologiques et biologiques objectivée avec un traitement par l’interféron est bien prédictive d’une diminution de l’incidence des hépatocarcinomes [8]. En outre, malgré les espoirs basés sur l’interféron, le seul traitement de l’hépatite fulminante à virus B qui mérite d’être pris en considération reste la transplantation hépatique [69].
Vaccins plasmatiques dits de première génération
Il s’agit des premiers vaccins contre l’hépatite B, obtenus à partir du plasma humain de sujets porteurs chroniques du VHB [63,72]. L’antigène vaccinant utilisé n’est pas le virus entier, mais une fraction du virus correspondant à l’enveloppe virale (AgHBs). Une telle approche développée en 1975 par Maupas et al [72] a été possible car lors de la réplication du VHB chez l’homme, il y a une production disproportionnée de la protéine d’enveloppe par rapport au virus complet et que cet antigène viral est produit en très grandes quantités dans le sérum. L’enveloppe virale est donc purifiée à partir du plasma de sujets porteurs chroniques du virus et tous les virus éventuellement présents sont éliminés lors des étapes de purification et lors de l’inactivation par le formol. On ajoute au vaccin, l’hydroxyde d’aluminium comme adjuvant. Il existe plusieurs vaccins plasmatiques contre l’hépatite B, dont deux distribués mondialement (Pasteur Vaccins: Hevac B et Merck Sharp &Dhome: Heptavax B). En dehors de ces vaccins, il y a des producteurs locaux ou régionaux: au Japon, à Taïwan, en Chine, en Corée…. Plusieurs millions de sujets ont reçu ce type de vaccins. Il s’agit d’un des vaccins les mieux tolérés et l’un des plus efficaces [42]. Cependant, du fait de son origine plasmatique (issu du sang de porteur chronique collecté dans les centres de transfusion sanguine), de sa préparation longue et délicate, des contrôles (sur le chimpanzé) qu’il doit subir, le vaccin plasmatique est un produit relativement cher, inaccessible à certaines populations à haut risque et produit en quantité forcément limitée, d’où l’intérêt de mettre au point de nouveaux vaccins [14].
Moyens de contamination en Odontologie
Dans la pratique dentaire quotidienne, les instruments utilisés sont tranchants ou piquants et causent facilement des plaies et blessures exposant au sang et aux liquides biologiques, véhiculant ainsi des agents infectieux susceptibles d’être transmis. Parmi ces agents, les plus préoccupants sont les virus de l’hépatite B, de l’hépatite C et le VIH, en raison de leur virulence et de leur caractère infectieux. La contamination virale au cabinet dentaire implique trois éléments principaux:
Le patient :
Le chirurgien dentiste et son équipe :
L’environnement (le local de soin) et le matériel contaminé [7,26,99]
Il faut un hôte susceptible d’être contaminé, un moyen de transmission des virus (ex : inhalation ou inoculation) et une porte d’entrée par laquelle l’hôte peut être contaminé [26].
Stérilisation
C’est l’opération permettant d’éliminer ou de tuer les micro-organismes portés par des milieux inertes contaminés, le résultat de cette opération étant l’état de stérilité [52]. Bien que l’état stérile, c’est-à-dire 0 germes, soit l’objectif à atteindre, la stérilisation n’est qu’une probabilité d’où la complexité et la responsabilité du praticien [49,52]. Il existe différents procédés de stérilisation définis par des normes française, européenne et internationale. La vapeur d’eau saturée reste le seul procédé de référence [49, 52, 79]. Le stérilisateur actuel de référence est un autoclave de classe B qui présente la garantie d’une stérilisation sûre pour tous les types de charge [79].
Transmission du VHB de la femme enceinte à son fœtus ou par les baisers
Si pour la transmission verticale pendant la grossesse, 41,2% des chirurgiens dentistes ne semblaient pas connaitre la bonne réponse, il n’en est pas de même pour les baisers où plus de ¾ de l’échantillon (76,5%) évoquaient la possibilité de transmission du VHB lorsque l’une des personnes en était porteuse (figure 21). La présence de marqueurs VHB dans le sang du cordon ne constitue pas une preuve de transmission in utero, en raison de la contamination du cordon par le sang de la mère au cours de l’accouchement. En effet, l’ADN viral a été détecté dans des hépatocytes de fœtus examinés après avortement sans pour autant conclure à une contamination lors de la grossesse [15,45]. La transmission du virus est essentiellement périnatale [80].Au moment de l’accouchement, l’enfant est contaminé à l’occasion de micro-transfusions materno-fœtales qui se produisent pendant le travail par contact avec le sang maternel ; le virus peut pénétrer dans l’organisme par voie transcutanée à la faveur d’érosions cutanées ou par déglutition des sécrétions lors du passage dans les voies génitales [15,41]. Pourtant 41,2% des chirurgiens dentistes enquêtés trouvaient qu’il y a bel et bien transmission du VHB d’une femme à son fœtus lors de la grossesse (figure 20).
Conduite à tenir en cas d’AES
En dépit du contexte à risque, caractérisé le plus souvent, par l’ignorance des patients de leur état général, l’insuffisance des dispositifs de protection et la fréquence des accidents d’exposition au sang lors des soins bucco-dentaires, la majorité des chirurgiens dentistes (52,1%) déclarait tenir une conduite qui consiste à désinfecter le site en cas de piqûres ou de blessures. En revanche, en cas d’éclaboussures, 2/3 de l’échantillon choisissaient le rinçage seulement. En Iran, les travaux de Shaghaghian [101] rapportaient que 43 % des dentistes croyaient qu’un rinçage immédiat de la surface exposée suite à une piqûre, blessure ou éclaboussure était sans effet sur la prévention de l’hépatite B. Ce résultat ne suit pas la tendance que nous avons trouvée, et peut être sujet à beaucoup d’interprétations.
Les chirurgiens dentistes
Du fait de leur environnement de travail, il leur sera nécessaire d’observer :
Un apprentissage et un respect des précautions standard : pas de recapuchonnnage d’aiguille ; utilisation de conteneurs pour aiguilles usées ;
Une Information-formation concernant le risque lié au sang et liquides biologiques ;
Le port de gants qui diminue le volume de sang transféré, lié à l’effet barrière de ceux-ci, à l’occasion d’une piqûre. Cette diminution peut atteindre 60 à 80 % selon qu’il s’agit d’une aiguille creuse ou d’une aiguille pleine. Le port d’une double paire de gants augmente cet effet. Dans certaines disciplines comme la chirurgie, le port d’une double paire de gants est fortement recommandé ;
Le port de lunettes de protection pour les spécialités ou les actes à risque de projections ou d’éclaboussures ;
L’utilisation de matériel sécurisé à usage unique (sonde, miroir, précelles…);
Le dépistage et la vaccination précoces pour une protection adéquate contre l’hépatite B ;
La formation continue aux praticiens sur les attitudes et les pratiques à adopter face aux accidents d’exposition au sang.
CONCLUSION
L’hépatite B est une maladie infectieuse causée par le virus de l’hépatite B et qui provoque une inflammation du foie. Elle se transmet par les sécrétions et liquides corporels, notamment les secrétions génitales, la salive et le sang. C’est une affection qui constitue un problème majeur de santé publique. Elle est la forme la plus grave des hépatites virales. Au Sénégal, on estime que 85 % de la population ont au moins un marqueur du virus de l’hépatite B (VHB).En dépit de l’ampleur du problème et malgré les politiques et programmes de lutte contre l’hépatite B, le personnel médical et surtout les chirurgiens dentistes sont considérés comme un groupe à haut risque pour l’infection à VHB. L’objectif de ce travail était d’étudier les connaissances, attitudes et pratiques des chirurgiens dentistes face à l’infection virale B. Il s’agissait d’une étude descriptive et transversale portant sur un échantillon de 171 chirurgiens dentistes. Un échantillonnage probabiliste à plusieurs degrés, stratifié et systématique était utilisé. Les informations collectées à l’aide d’un questionnaire concernaient:
les caractéristiques socio-démographiques: âge, sexe, secteur d’activité, statut, durée d’exercice ;
les variables en rapport avec la connaissance sur l’hépatite B ;
les variables liées aux attitudes et pratiques des chirurgiens dentistes en rapport avec l’hépatite B.
Au total, il y avait plus de chirurgiens dentistes masculins (67,3%) et la moyenne de la durée d’exercice professionnel était de 10 ans ±8. Près de 2% des chirurgiens dentistes estimaient qu’il n’y avait pas de risque lié à la piqûre d’aiguille déjà utilisée chez un patient porteur du virus de l’hépatite B ; il en était de même pour plus de 8% et 15% en ce qui concerne la morsure et les baisers avec un patient atteint de VHB. Pour ce qui est des mesures et dispositifs de protection, il a été remarqué une insuffisance des moyens de protection contre le VHB dans les structures de santé bucco-dentaires. Ainsi près de 22% des chirurgiens dentistes n’étaient pas vaccinés contre le VHB ; le respect du port de gants, de lunettes, de la tenue professionnelle et de l’hygiène dans les cabinets dentaires n’était pas systématique. Les surfaces de travail n’étaient désinfectées que de manière irrégulière pour plus de 23%. Il en était de même pour le rinçage et la désinfection des empreintes pour plus de 29%. Les accidents d’exposition au sang étaient aussi fréquents car pour une fois près de 13% avaient subi des piqûres d’aiguilles, 10% des éclaboussures aux yeux et environ 6% de blessures causées par des instruments tranchants. La conduite à tenir en cas d’AES était pour la majorité, la désinfection en cas de piqûres ou blessures (52,1%) et le rinçage en cas d’éclaboussures aux yeux (66,7%). Compte tenu de ces résultats, nous estimons qu’il demeure important de développer des programmes de sensibilisation et d’information à l’intention des chirurgiens dentistes sur les différents risques de transmission du VHB, sur la nécessité de faire le vaccin et de respecter les mesures d’hygiène, de stérilisation ainsi que la bonne conduite à tenir en cas d’accidents d’exposition au sang. Une étude sur la même cible recensant les dispositifs de prévention disponibles aux cabinets dentaires et intégrant les paramètres biologiques des chirurgiens dentistes permettrait de mieux appréhender l’ampleur de la maladie de l’hépatite B en milieu odontologique.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GENERALITES SUR L’HEPATITE B
I. DONNEES EPIDEMIOLOGIQUES
I.1. Définition de l’hépatite B
I.2. Histoire naturelle de l’infection par le VHB
I.3. Gravité de l’infection à virus B
I.4. Absence de thérapeutique curative
I.5. Prévalence de l’hépatite B
I.5.1. Prévalence dans le monde
I.5.2. Prévalence au Sénégal
I.6. Modes de transmission
I.6.1. Transmission sexuelle
I.6.2. Transmission verticale ou périnatale (de la mère à l’enfant)
I.6.3. Transmission horizontale (de personne à personne)
I.6.4. Transmission parentérale
I.7. Groupes à risque
I.8. Prévention par la vaccination
I.8.1. Différents types de vaccins
I.8.1.1. Vaccins plasmatiques dits de première génération
I.8.1.2. Vaccins issus du génie génétique (recombinants) dits de seconde génération
I.8.1.3. Type de vaccin utilisé au Sénégal en campagne de masse en 1999
I.8.2. Protocole de vaccination
I.8.3. Voie d’administration du vaccin
I.8.4. Innocuité du vaccin
I.8.5. Réponse Immune
I.8.6. Stratégies vaccinales contre l’hépatite B
II. HEPATITE B ET SOINS AU CABINET DENTAIRE
II.1. Moyens de contamination en Odontologie
II.1.1. Porteurs de germes animés
II.1.2. Instruments
II.1.2.1. Instruments critiques
II.1.2.2. Instruments semi critiques statiques et dynamiques
II.1.2.3. Instruments non critiques
II.2. Type de contamination
II.2.1. Contamination manuportée
II.2.2. Contamination aeroportée
II.2.3. Contamination des fluides
II.2.4. Contamination croisée
II.3. Mesures de prévention et de contrôle de l’infection par VHB dans un environnement de soins dentaires
II.3.1. Responsabilité des acteurs en Odontologie
II.3.2. Equipements de protection individuelle
II.3.2.1. Masques
II.3.2.2. Lunettes
II.3.2.3. Gants
II.3.2.4. Vêtements de protection
II.3.3. Mesures concernant l’environnement de travail
II.3.3.1. Salles de soins
II.3.3.2. Radiologie dentaire
II.3.3.3. Laboratoire de prothèse
II.3.4. Mesures concernant les dispositifs médicaux
II.3.4.1. Dispositifs courants
II.3.4.2. Traitements des dispositifs courants
II.3.4.2.1.Désinfection/ Décontamination
II.3.4.2.2.Stérilisation
II.3.4.2.2.1.Chaleur sèche
II.3.4.2.2.2.Chaleur humide
II.3.5. Gestion des déchets
II.3.5.1. Typologie des déchets
II.3.5.1.1.Déchets Assimilables aux Ordures Ménagères (DAOM)
II.3.5.1.2.Déchets d’Activité de Soins à Risque (DASR)
II.3.5.1.3.Déchets d’Activité de Soins à Risque Infectieux (DASRI)
II.3.5.2. Tri et conditionnement dès la production au cabinet
II.3.5.3. Elimination des déchets d’amalgame
II.3.5.4. Stockage
II.3.5.5. Transport et élimination
DEUXIEME PARTIE : RECHERCHE SUR LES CONNAISSANCES, ATTITUDES ET PRATIQUES DES CHIRURGIENS DENTISTES FACE A L’HEPATITE B
I. CONTEXTE DE L’ETUDE
I.1. Problématique
I.2. Justification
I.3. Objectifs
I.3.1. Objectif Général
I.3.2. Objectifs Spécifiques
II. Méthodologie
II.1. Type d’étude
II.2. Cadre et population d’étude
II.3. Critères de sélection
II.4. Taille de l’échantillon
II.5. Echantillonnage
II.6. Collecte de données et variables étudiées
II.7. Considérations éthiques
II.8. Analyse des données
III. RESULTATS
III.1. Caractéristiques socio démographiques et professionnelles
III.1.1. Age
III.1.2. Sexe
III.1.3. Secteur d’activité
III.1.4. Statut
III.1.5. Durée d’exercice
III.2. Connaissances des chirurgiens dentistes par rapport à l’hépatite B
III.2.1. Niveau de risque lié au port de gants ou masque
III.2.2. Niveau de risque lié au toucher d’instruments non stérilisés
III.2.3. Niveau de risque lié à une piqûre d’aiguille souillée
III.2.4. Niveau de risque lié à une morsure par un patient porteur du VHB
III.2.5. Contamination liée aux instruments souillés
III.2.6. Transmission de la femme enceinte à son fœtus
III.2.7. Transmission du VHB par les baisers
III.2.8. Liquides de transmission et moyens d’élimination et de contrôle du VHB
III.3. Attitudes et Pratiques des chirurgiens dentistes face à l’hépatite B
III.3.1. Fréquence des AES
III.3.2. Statut vaccinal
III.3.3. Comportement des chirurgiens dentistes au cabinet dentaire
III.3.4. Méthode de stérilisation de la turbine et des fraises
III.3.5. Conduite à tenir en cas de d’AES
IV. DISCUSSION
1. Caractéristiques socio-démographiques
2. Connaissances des chirurgiens dentistes liées au niveau de risque de contamination à l’hépatite B
3. Attitudes et pratiques des chirurgiens dentistes face à l’hépatite B
V. RECOMMANDATIONS
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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